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EAN : 9782072688201
304 pages
Gallimard (18/08/2016)
3.64/5   690 notes
Résumé :
"Quand tu penses à ce qui t’arrive, tu as l’impression de te retrouver en plein David Lynch. Blue Velvet, Twin Peaks. Une ville universitaire, le cadavre d’un garçon de vingt ans, la drogue, la police, une ravissante étudiante, une histoire d’amour entre elle et son professeur deux fois plus âgé : il y a toute la matière pour un scénario formidable.
Ce n’est pas un film.
L’autre qu’on adorait fait revivre Thomas, un homme d’une vitalité exubérante qui ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (184) Voir plus Ajouter une critique
3,64

sur 690 notes
Bel hommage à un ami perdu, à travers de portrait sans complaisance mais beaucoup de tendresse.
C'est à la fin du lycée, dans les années 80 que la bande se constitue, des étudiants prometteurs, y compris Thomas, même si, déjà, les résultats dont il ne doutait pas ne sont pas à la hauteur de ses espérances. Sciences-Po, c'est un piètre succédané quand on vise Normale Sup. Ça ne marche pas en France, qu'à cela ne tienne, Les Etats-Unis sauront reconnaître sa valeur. et Thomas s'embarque dans des années de déménagements, de postulation, d'amours aussi définitives que transitoires, d'alcool, un peu, d'insomnie, beaucoup, d'exubérance et de déconvenues qui peu à peu sapent les bases fragiles d'une personnalité pas ordinaire.

On est immergé avec Thomas dans le milieu universitaire américain, avec sa hiérarchie des établissements, ses codes internes, sa liberté pédagogique et ses limites infranchissables (le principal piège que Thomas n'évite pas, c'est l'interdiction absolue d'avoir une relation avec une étudiante). Les repères historiques sont également adroitement insérés. c'est une belle évocation, à la fois littéraire et pédagogique, des Etats-Unis de la fin du vingtième siècle, sans oublier les références nombreuses à la musique, et à la littérature, puisque Thomas est un
"vingtièmiste" spécialiste de Proust.

Parlons des amours de Thomas, et de son talent de séduction. Elles sont toutes vite attirées par le charme et le bagout du frenchy, prêtes à passer sur ses excès. Ana, Elisa, Olga (une folle grave celle-là), Nora, elles ont toutes été sincèrement aimées. Aucune n'est restée.

Peu à peu, le portrait révèle les failles qui expliquent le prologue dramatique, avec la découverte du corps de Thomas. Les indices sont subtilement amenés, l'insomnie, les excès, les échecs aussi, dont on ne connaît pas clairement la cause, mais qui pourraient bien être liés à des agissements inopportuns du jeune homme. Pour aboutir à une claire explication qui donne la cohérence et la raison d'être du récit.

Tout cela est très bien fait mais…

Le choix de l'auteur de s'adresser au personnage principal par un tutoiement est une épreuve pour le lecteur. On comprend l'intention, qui correspond à une sorte d'éloge funèbre où l'on s'adresse au défunt, en retardant le moment où l'on ne pourra plus s'adresser à lui. Mais il faut, en tant que lecteur, presque visualiser ce dialogue mortuaire pour suivre l'intrigue. D'autant que c'est Catherine, l'auteur, qui parle. Certes, au fil de la lecture, la gymnastique s'acquiert, mais il faut tout de même un certain temps pour naviguer aisément dans le texte.


Belle écriture (malgré le procédé) pour une belle lecture.

Merci à Babelio et à Gallimard pour leur confiance

Lien : http://kittylamouette.blogsp..
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Comment parler de ce récit biographique minutieux et bouleversant qui embrasse à peu près sur vingt ans la vie de Thomas Bulot, le héros, ami, confident et premier lecteur de l'auteur, sans une émotion intense ?

Il s'est donné la mort le 22 avril 2008, à 39 ans, dans l'université où il enseignait, à Richmond, en Virginie .

Du livre, Thomas est tout à la fois le sujet, - le destinataire- .
Il est écrit à la deuxième personne du singulier , au "tu" et la tragique énigme......le mystère......
Tout au long de cette oraison poignante et nostalgique, l'auteur interroge et cerne au plus près les pensées, la subjectivité, la sensibilité instable, aiguë de son cher ami disparu.


Ils se sont connus en 1986, au moment des manifestations contre la loi Devaquet.
Inséparable de Nicolas, le frére de Catherine, Thomas sort beaucoup, il a 18 ans, elle en a 26, et dispose déjà de solides acquis universitaires..
Ils deviennent amants, l'entente est forte et immédiate .
Elle le quittera bientôt mais l'affection demeure intacte, ils resteront amis.
Quand il rate le concours de l'ENS, il part pour les Etats- Unis et l'université de Colombia......
Catherine remonte le fil de son parcours sinueux..Elle décrit ses espoirs, ses histoires d"amour passionnées .
Thomas est entouré d'amis, ils se multiplient autour de lui, à Paris et aux Etats- Unis.

Avec une acuité inouïe elle montre qu'au milieu d'eux, qui le chérissent et lui pardonnent tout, il s'enfonce dans une solitude qu'il tisse à coups de sautes d'humeur, de comportements addictifs, de hauts, de bas, d'inadvertance , d'imprudence, d'accés d'impatience, de caprices qui ruinent ses amours et son parcours professionnel.
Universitaire, il est passionné de Proust et de Nina Simone, spécialiste de cinéma ......Il enchaîne les emballements et les déchaînements , se cogne souvent contre un mur......
Quelle gaucherie innée, quelle malédiction ont- elles conduit ce jeune homme ambitieux, brillant, charmeur et attachant à multiplier au cours de sa brève vie les mauvais choix et les maladresses , les hésitations et les occasions manquées ?
On apprend , à la fin le motif de ses souffrances......
Avec une empathie profonde , elle rend ses fêlures incroyablement palpables au lecteur ........
Elle restitue, interroge ou imagine en remontant la courbe d'une vie ..
Celle d'un être avec ses forces et ses failles jusqu'au dernier moment .......un être partagé entre le soleil et la nuit qu'il finit par choisir !
Un récit musical et bouleversant qui déroule la mécanique implacable d'une descente aux enfers !
L'intimité dévoilée d'un homme souffrant et la restitution de la dignité à un ami disparu .
Dense, cruel, addictif , douloureux et lumineux à la fois !
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Ce récit est un hommage à un ami récemment décédé - il s'est suicidé.
La narratrice, une certaine Catherine universitaire et auteur, raconte la courte vie de Thomas en s'adressant à lui à la deuxième personne du singulier.
Le portrait du défunt est accablant : Thomas apparaît comme égocentrique, de mauvaise foi, immature, manipulateur, s'étonnant des trahisons d'amis et de femmes qu'il ne respecte guère.

Comme dans la plupart de ses ouvrages, Catherine Cusset donne dans l'autofiction, et joue avec les mises en abyme.
Lorsque la narratrice fait lire à Thomas un passage de son manuscrit retraçant sa vie, il est furieux, vexé : « Un texte qui n'est pas seulement blessant, mais mauvais. »
Réaction de Catherine : « Tu es partial, soit, puisqu'il s'agit de toi, mais tu n'as aucun doute. Tu te rappelles la phrase de Proust dans une lettre à son ami Halévy : 'C'est à la cime du particulier qu'éclot l'universel.' Mon livre n'atteint aucune cime ; il ne t'atteint même pas en profondeur. Il reste au ras des pâquerettes. J'ai transformé ta vie en un fil chronologique dont j'ai ôté toute substance pour la juger à l'aune du succès en suivant des critères purement sociaux. » (p. 175)

Verdict lucide !
« blessant, mauvais... ras des pâquerettes, fil chronologique [sans substance] ». Je n'aurais pas osé, mais puisque l'auteur le dit... Ce passage m'a fait un bien fou, résumant parfaitement ce que je pensais du portrait de Thomas dressé par Catherine, « une de ses meilleures amies » (sic).

Le récit tourne en rond, à l'instar de la vie de cet homme qui cumule les échecs professionnels et sentimentaux. On étouffe avec Thomas dans un milieu universitaire étriqué, où les diplômes et la Culture gonflent l'ego mais ne donnent pas les clefs pour s'ouvrir aux autres - monde de requins où l'on se persuade, pour se consoler de stagner, que ce sont les plus médiocres qui réussissent.
Pas d'éclaircie dans cette histoire sombre, mais un éclairage, lorsque Thomas apprend de quoi il souffre. On s'en doutait, mais j'ai trouvé ces pages particulièrement poignantes ; elles m'ont convaincue que j'avais bien fait de poursuivre cet ouvrage que je trouvais jusqu'alors sans intérêt, ennuyeux, mal fichu (je me suis parfois perdue entre le 'je' et le 'tu', alors que je ne suis pas particulièrement rétive à ce procédé narratif).

J'ai lu à peu près tous les romans de cette auteur, mon préféré reste 'Un brillant avenir'. Je n'ai aimé ni 'Confessions d'une radine' ni 'Jouir'.

# playlist : 'Avec le temps' (Leo Ferré), 'Suzanne' (Leonard Cohen), Nina Simone...
~ bibliographie : Marcel Proust, Serge Doubrovsky...

• Merci à Babelio et aux éditions Gallimard.
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Comme Annie Ernaux, comme Anne Wiazemsky, comme Christine Angot, mais avec sa voix bien à elle, Catherine Cusset construit une oeuvre largement autobiographique, dévoilant lentement les pans de sa vie. "L'autre qu'on adorait" pourrait laisser penser qu'elle décentre son regard en écrivant l'autobiographie de Thomas, son ami, suicidé dès le prologue du livre.

Elle le fait sous un forme qui nous tient en haleine : l'oraison funèbre écrite au disparu. C'est Catherine (je) qui parle à Thomas (tu) par-delà la mort, nous faisant ainsi entrer dans l'intimité de leur relation tour à tour amoureuse (il fut son amant) puis amical.

Elle raconte (ou imagine à partir des bribes qu'elle en connaît ?) l'histoire de ce garçon brillant et séduisant dont la - courte - vie fut une accumulation d'échecs. Mais qu'on ne s'y méprenne pas. L'échec d'une vie, chez Catherine Cusset, intellectuelle assumée, normalienne, agrégée, c'est rater le concours de l'ENS ou se voir refuser un poste de professeur à Princeton. La sociologie des livres de Catherine Cusset est bien particulière : des intellos désargentés à cheval sur les deux rives de l'Atlantique.

Pour autant, l'histoire de Thomas n'a rien de nombriliste. Si le monde dans lequel il vit est - comme chez David Lodge - "un tout petit monde", ses tentatives toujours vaines d'y trouver sa place sont poignantes. Sisyphe de l'amour, Thomas tombe amoureux. Elisa. Ana. Olga. Mais, par sa faute ou par celle de ses compagnes, ces relations font long feu. Insuccès identiques sur le front professionnel : après l'échec à Normale Sup, c'est la thèse trop ambitieuse sur "Proust et le classicisme" que Thomas mettra plus de huit ans à boucler, c'est le recrutement dans une université de l'Ivy league qu'il rate par excès de confiance, c'est les séjours décevants dans des petits universités de l'Oregon et de l'Utah... jusqu'au suicide.
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Catherine parle à Thomas.
Thomas, pour faire bref, c'est un ex.
Un ex de Catherine.
De Catherine Cusset.
Enfin… de la narratrice.
Enfin on ne sait plus ma pauvre Liliane, avec cette récurrente pratique de l'autofiction chez l'écrivain hexagonal du XXIème siècle, on ne sait plus…

Quoi qu'il en soit voilà la vie de Thomas détricotée par Catherine qui remonte le temps à partir de son suicide (celui de Thomas, pas de Catherine). Je ne spoile rien du tout, le roman commence là, au décès de Thomas, point de fuite des lignes de Catherine qui s'enchaînent, aussi denses et intenses que cette quête de reconnaissance où se consumera l'existence de l'imprévisible et flamboyant Thomas.

On sait que Catherine a voulu rendre hommage à Thomas. Seulement voilà, si j'ai pu suivre le garçon avec intérêt, voire compassion, je n'ai ressenti aucune empathie chez la narratrice, et ça, ça me chiffonne sévère.

Ma lecture achevée je ne parviens toujours pas à dissiper le malaise induit par ce récit paradoxal, analyse pertinente d'un point de vue intellectuel mais curieusement indigente sur le plan émotionnel.

La faute peut-être à cet usage méthodique de la deuxième personne. Le Tu qui tue. Qui tue l'intimité en prétendant la créer. Ce Tu déjà déploré chez Sophie Divry* ou Emmanuel Dongala*, artificiel parti-pris à mon sens, qui complique la narration et suscite la distance, plaçant le lecteur en marge d'un dialogue intime dont il se sent exclu. Pire, ce Tu qui s'adresse à Thomas m'est apparu un peu "jugeant", presque accusateur, au mieux maladroit.
Je pourrais en pondre des kilos comme ça sur cet emploi du Tu qui me turlupine mais bon, on ne va pas passer la nuit là-dessus non plus.

Pour en revenir au roman proprement dit, je constate en conclusion que si brillants que puissent être l'intellect et les beaux diplômes de l'auteure, il manque ici pour moi le souffle universel d'une intelligence émotionnelle, autrement dit l'essentiel de ce qui me touche dans la vie en général et dans un livre en particulier.

Je me doute que mon ressenti sera loin de faire l'unanimité, « mais comment qu'elle se la pète la Lolo avec ses grands mots » pourras-tu donc objecter (oui oui, je dis « tu » parce que moi c'est bien à toi que je m'adresse là). Tant pis, j'assume et résume cette antinomie toute personnelle : J'ai dévoré l'histoire de Thomas, j'ai détesté le regard de Catherine.
Voilà.


* La condition pavillonnaire
* Photo de groupe au bord du fleuve


Lien : http://minimalyks.tumblr.com/
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critiques presse (10)
LeDevoir
28 novembre 2016
Son écriture claire et rythmée vous emporte au gré de la carrière et des amours d'un Parisien doué, Thomas, parti vivre et enseigner aux États-Unis.
Lire la critique sur le site : LeDevoir
Bibliobs
24 novembre 2016
Le plus beau livre de Catherine Cusset.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
Lexpress
18 octobre 2016
Petit à petit, le bouquin se résume à son style. L'écriture finit par tout bouffer et minimiser ce qui aurait dû être un grand cri rageur.
Lire la critique sur le site : Lexpress
LaPresse
04 octobre 2016
On s'abîme au coeur du drame dès les premières pages et on en ressort chaviré par l'émotion qui transpire de cette brillante autofiction écrite à la deuxième personne.
Lire la critique sur le site : LaPresse
LesEchos
16 septembre 2016
Le dernier roman de Catherine Cusset se boit d'un trait. Tel un amer mais irrésistible calice.
Lire la critique sur le site : LesEchos
LeFigaro
16 septembre 2016
Un portrait peut être un Rembrandt, un tableau en clair-obscur plus réel qu'aucune photographie pour scruter le mystère du sujet. On dit alors chef-d'œuvre. C'est à cela que tend la romancière dans le portrait qu'elle fait de son ami Thomas.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Lexpress
06 septembre 2016
A la deuxième personne du singulier, l'auteure dévoile l'intimité d'un homme souffrant. L'Autre qu'on adorait, par Catherine Cusset, un de nos coups de coeur de la rentrée littéraire.
Lire la critique sur le site : Lexpress
LaLibreBelgique
24 août 2016
Catherine Cusset évoque avec nostalgie la vie d’un ami qui a manqué à ses rêves. Avec acuité et le souci de dire le vrai.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
Culturebox
24 août 2016
Si ce roman vibre si fort, c'est qu'il a pris l'exact tempo pour conter l'ascension d'un Thomas rayonnant qui s'était élancé, confiant, vers les Etats-Unis. Puis pour décrire sa descente aux enfers, quand la fêlure insoupçonnée s'est faite lézarde, jusqu'à l'effondrement. Dense et poignant.
Lire la critique sur le site : Culturebox
Telerama
24 août 2016
Comment ce jeune homme si brillant a-t-il pu accumuler tant d'échecs ? Une oraison bouleversante qui restitue sa dignité à l'ami disparu.
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (99) Voir plus Ajouter une citation
Tu n'écris pas un mot. Tu en es incapable. Tu ne fais rien, strictement rien. Le manuscrit de ta thèse a migré sur ton lit. Parfois tu en lis une phrase. Du jargon universitaire. Où est passé ce Proust que tu aimais tant? Même lui te paraît abscons. Tu ouvres Le Temps retrouvé, ton volume préféré : "Peut-être pourtant ce côté mensonger, ce faux-jour n'existe-t-il dans les mémoires que quand ils sont trop récents, quand les réputations s'anéantissent si vite, aussi bien intellectuelles que mondaines (car si l'érudition essaye ensuite de réagir contre cet ensevelissement, parvient-elle à détruire un sur mille de ces oublis qui vont s'entassant?)" Qui a encore la patience aujourd'hui pour ces phrases à parenthèses précieuses comme des boudoirs remplis de petites boites laquées, de cadres en argent ciselés et de bibelots de porcelaine? Et pourquoi s'intéresser à Proust? Ta thèse a beau le distinguer de ses amis antisémites et nationalistes Maurras et Barrès, tu n'en es plus si sûr. N'y-a-t-il pas quelque chose de dégoûtant dans sa fascination pour la grâce si française de Saint-Loup, qu'il oppose à la grossièreté et au nez juif de Bloch? Comment se fait-il qu'aucune vois ne se soit élevée pour faire tomber l'idole de son piédestal?
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Tu t'envoles le lendemain sans que personne t'arrête à l'aéroport. Nicolas peut maintenant laisser libre cours à son rire. Dans l'avion qui file loin de la vieille Europe, tu ne comprends plus ta terreur. Ce qui compte, ce sont les dix mille francs dans ta banane. Neuf heures plus tard vous atterrissez à Kennedy Airport. Quand vous sortez du terminal, tu respires un air moite, poisseux, salé. Il fait si chaud que tu transpires tout de suite. Tu éprouves une excitation intense. Te voilà arrivé dans la ville des villes. Pour aller de l'aéroport à Manhattan vous prenez le bus puis le métro, le moins cher des moyens de transport. Vous vous asseyez sur des sièges jaune vif, vos sacs à dos entre les genoux, très éveillés malgré l'heure tardive, vingt et une heure à New-York, trois heures du matin à Paris. Quand vous sortez du métro sur West Fourth Street, il fait nuit et toujours très chaud, trente-cinq degrés peut-être. Le bruit de fond des sirènes et des klaxons est assourdissant. Néons multicolores, taxis jaunes, filles en débardeur, en claquettes et en short au ras des fesses, comme à la plage. Derrière un grillage une douzaine de Blacks jouent au basket-ball à la lumière d'un puissant réverbère. Tout de suite tu te sens chez toi. C'est une ville de la nuit, une ville pour insomniaques.
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Tu es heureux à Reed, et Portland est sans doute la seule ville des Etats-Unis où il fait bon vivre quand on est français en ce printemps 2003 où Bush vient de déclarer la guerre à l'Irak sans l'accord des Nations unies, où les Américains taxent d'arrogance et d'ingratitude le président français qui refuse de soutenir leur croisade (tu n'aurais jamais imaginé à dix-sept ans que tu te revendiquerais un jour de Chirac!), où les French fries sont rebaptisés freedom fries dans tout le pays, et où Condoleezza Rice parle de "punir la France" comme s'il s'agissait d'un enfant de quatre ans. A Reed, intelligence rime encore avec tolérance.
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Phil Miller tapotait le micro, tout le monde s'est tu. Les discours ont commencé. Quand il a prononcé son nom, Nora s'est avancée, les pommettes roses sous les applaudissements. Elle a reçu son prix, accompagné d'un chèque de sept cents dollars qui seraient bien utiles si elle t'accompagnait en France cet été. Le professeur Miller a esquissé le geste de lui serrer la main puis s'est ravisé, s'approchant d'elle pour l'embrasser sur les joues - à la française. Il était plus petit qu'elle et Nora a dû retenir un rie au souvenir du surnom que tu lui donnais : le gnome.
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Allongés par terre dans ta chambre, vous écoutez The Cure ou, en chantant à tue-tête, Ferré, Reggiani, Brel, Dutronc et Serge Gainsbourg. Vous chantez aussi faux et fort l’un que l’autre, vous hurlez en imitant les mimiques faciales du vieux Léo aux tempes grisonnantes que vous avez vu à la télévision, et son poing qui s’abat quand il bute sur le mot « peinard » : Avec le temps… Avec le temps va, tout s’en va / Et l’on se sent blanchi comme un cheval fourbu / …
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