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Citations sur Des âmes et des saisons (122)

Aujourd'hui, dans de nombreux foyers, les deux parents disparaissent le matin, délèguent leur pouvoir protecteur et éducatif à une employée de la petite enfance, puis reviennent le soir pour le rebond affectif et le partage approximatif de l'entretien du fover. Selon les récits d'alentour, un père peut être admiré quand il chasse, héroisé quand il part à la guerre ou descend à la mine, détesté quand il terrorise son foyer et affadi quand personne n'en parle, quand il part travailler on ne sait où, faire on ne sait quoi et revenir de nulle part. Depuis les années 1970, la culture met en scène un père donneur de soins. Les films, les romans et les journaux, surtout féminins, mettent la lumière sur ce père aidant de la mère.
L'approche scientifique de cette nouvelle paternité est difficile tant les variables sont nombreuses, mais cliniquement on peut soutenir que le père tout-puissant n'existe pratiquement plus, que le père violent est criminalisé et que le père aidant de la mère prend la place qu'il peut sans qu'on sache encore en évaluer les effets.
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Pour bien éduquer un jeune garçon, il fallait le battre, on lui apprenait qu’il connaîtrait la guerre plusieurs fois dans sa vie. On glorifiait la violence, hommes tués, grands animaux tués. Ce n’est que depuis quelques décennies que la violence a été disqualifiée et qu’on cherche à protéger les femmes et les enfants. La violence s’est civilisée en se cantonnant aux spectacles sportifs.
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On a filmé le même déchaînement de fureur lors de la Libération en France quand un collaborateur fut pendu par les pieds. Quand il est mort d'asphyxie et que son corps est tombé à terre, une dame âgée au chignon bien élevé a frappé le cadavre à coups de canne. Ce n'est pas après avoir réfléchi que cette dame a décidé de frapper un mort. L'homme était collaborateur pour des raisons morales, il voulait épurer la société de ses parasites, les étrangers, les Juifs et les handicapés. Et la dame, tout aussi morale, s'acharnait sur la dépouille d'un homme qui avait trahi la France en collaborant avec l'occupant. La pensée binaire est une pensée paresseuse qui s'impose à nous tant elle est logique : le jour s'oppose à la nuit, la droite à la gauche, le corps à l'esprit et le masculin au féminin. Pour penser le monde il faut le catégoriser, classer les objets selon leur forme, leur couleur ou leur poids : on ne fait pas boxer un poids lourd contre un poids léger, on ne vend pas un beau morceau de viande au même prix qu'un bas quartier. Depuis Homo sapiens, et peut-être même avant, le découpage du monde par la pensée permet de mieux le voir et d'agir sur lui. Dès que l'esprit catégorise ce qu'il voit, le monde devient clair et dicte les conduites. Cette pensée binaire se connote très vite d'une signification morale : le haut est supérieur au bas, le devant est plus noble que le derrière, le dedans plus intelligent que le dehors. Le dualisme aide les enfant, à penser, mais quand cette représentation fragmentante fige les certitudes (si ce n'est pas inné, c'est acquis), elle renforce les convictions qui mènent au fanatisme...
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Ce n’est qu’à partir de la Révolution française qu’on a cessé d’expliquer la force physique et mentale par le fait d’être bien né, et qu’on a osé penser qu’une bonne organisation sociale pouvait produire le même effet. …Avant on vivait entre deux paradis : le paradis perdu à cause de la faute originelle et le paradis à retrouver éventuellement après la mort. Entre les deux la vie était une vallée de larmes. Pour mériter le bonheur il suffisait d’obéir aux prêtres et aux aristocrates qui étaient grands, forts, riches et cultivés. L’idée neuve de 1794, aujourd’hui s’appelle « école »..On ne construit plus une société grâce à l’art de la guerre, grâce aux bras des prolétaires et au ventre des femmes. C’est le diplôme depuis 1970 qui hiérarchise les communautés.
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Le bonheur des vallées n'a pas la même connotation affective que le bonheur des sommets. En haut du haut, l'estime de soi est renforcée par la fierté d'avoir surmonté les épreuves du froid et de la surveillance des troupeaux.
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Quand le développement a été sécurisant et fortifiant, dans une famille stable et une culture en paix, un message sensoriel sera plus facilement orienté vers le noyau accumbens dont la stimulation déclenche des sensations agréables. Quand une excitation trop intense provoque une douleur, un cerveau auparavant fortifié orientera moins l'information vers l'amydgale rhinencéphalique, qui provoque des sensations désagreables. Le fait d'avoir acquis un facteur de protection avant de recevoir l'impact douloureux atténue la souffrance.
A l'inverse, quand l'organisme du mammifère humain ou non humain s'est développé dans des conditions adverses, les messages de douleur ont pris l'habitude d'être orientés vers l'amygdale, qui amplifie l'information douloureuse. Quand l'organisme a acquis des facteurs de vulnérabilité, la même stimulation douloureuse aggrave la douleur.
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Mais comment expliquer qu'un mot, une représentation sans substance, puisse agir sur la matière ? Une insulte nous fait rougir en dilatant nos vaisseaux, une mauvaise nouvelle nous fait pâlir et tomber en syncope, une posture symbolique comme se mettre à genoux pour prier peut nous faire ressentir une dimension métaphysique, et la perception d'une croix gammée peut déclencher une angoisse en réveillant le souvenir d'une période tragique.
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Entre 4 000 et 7 000 mètres, l’altitude devient très contraignante. Quand l’air et l’oxygène se raréfient, la vitalité diminue : moins de plantes, moins d’animaux, le pas se fait plus lent, la respiration accélère et les petits en haute altitude ralentissent leur croissance.

La haute montagne fragmente les populations. Les villages étendus des vallées tropicales deviennent des hameaux tibétains. Avec l’altitude apparaissent des maisonnettes et, sur le haut du haut, la technologie des tentes modernes permet de ne pas mourir de froid.

La culture, elle aussi, varie selon les niveaux. Les vêtements, bien sûr, mais aussi les rituels de rencontre et les mots de politesse s’adaptent aux températures. Quand on se croise en montagne, on dit : « Que Dieu vous bénisse », mais quand on passe près de la même personne dans une grande ville, on fait comme si elle était transparente. Les cérémonies religieuses, tolérantes et dissipées dans les plaines, deviennent rigoureuses avec l’altitude. Le calendrier communautaire, la répartition du travail, la construction des abris, la conduite des troupeaux, la fumure des champs évoluent différemment d’un groupe à l’autre.

Quand le contexte écologique suscite des événements différents, on n’a pas les mêmes choses à raconter. L’éthos, la hiérarchie des valeurs morales qui caractérise une culture, dépend, plus qu’on le croit, de la structure du milieu.

Dans les plaines tropicales où la vie est facile, l’éthos privilégie la libido, le plaisir des petites jouissances. Dans les grandes étendues urbaines, il faut organiser des lieux de rencontre si l’on veut parler, jouer, assister à un combat de coqs ou tenter une aventure sexuelle. Alors que l’éthos des hauts sommets met en valeur le courage physique, la rigueur des rituels de rencontre, l’ingéniosité des constructions, la générosité de ceux qui partagent leurs biens et respectent les codes sexuels.
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Le XIVème siècle a été marqué par la peste noire transportée par les puces et les poux. Entre 1348 et 1352, cette peste bubonique a tué 6 millions de Français. Avant la peste, quand le seigneur vendait une terre, il vendait en même temps les serfs qui habitaient dessus. Deux ans plus tard, quand l'épidémie a tué un Européen sur trois, les paysans avaient pris une telle importance que le servage a disparu pratiquement sans débat.
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La violence s'est civilisée en se cantonnant aux spectacles sportifs. Le sport de bas niveau apporte la santé et le bien-être pour compenser une culture de la sédentarité, mais le sport de haut niveau prend une autre signification : il s'agit d'utiliser ses qualités physiques et mentales et faire un spectacle commerciale.
Les garçons plus que les filles sont attirés par cette violence valorisée par la culture,
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