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EAN : 9782847951448
80 pages
L' Esprit du temps (11/03/2009)
3.74/5   131 notes
Résumé :
"ça fait soixante-quatre ans que je n'ai rien pu dire, c'est la première fois que je le fais.
Je me rappelle, j'habitais ici. Et puis un jour, ou plutôt une nuit -c'était tôt le matin quand j'ai été arrêté-, la rue a été barrée de chaque côté par des soldats en armes. C'étaient des Allemands, mais j'ai été arrêté par la police française.
Il y avait des camions en travers de la rue et puis, devant la porte, une traction avant avec des inspecteurs en civ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (25) Voir plus Ajouter une critique
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Dans ses souvenirs d'enfance que Boris Cyrulnik nous raconte dans ce livre, il nous laisse le message que la vie est encore possible après l'horreur. Il appelle cette force "la résilience". En le lisant, on se demande comment on aurait réagi si cela nous était arrivé.
J'ai aimé le lire.
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Soixante quatre ans après l'avoir vécu, Boris Cyrulnik revient sur l'épisode de son enfance qui a façonné toute sa vie sans qu'il en soit réellement conscient. Peu à peu en revenant sur les lieux de ses souvenirs, il réalise à quel point que, ce qui lui a été en quelque sorte interdit de raconter durant des dizaines d'années, a constitué une empreinte indélébile dans sa construction intellectuelle et affective.
Plus qu'un livre sur ce qu'il a vécu, c'est surtout un essai sur la résilience, cette capacité d'adaptation face à l'horreur, et la mémoire, celle qui transforme, minimise ou amplifie un évènement ; les deux étant étroitement imbriquées l'une dans l'autre : le remaniement du passé étant justement un facteur de résilience.

Il est frappant de constater que ce que Boris a essentiellement retenu de ces années de fuite, de placement de familles en familles, consiste en des petits détails incongrus : les lunettes noires que portaient les policiers venus le chercher, au milieu de la nuit, la glotte montant et descendante de l'homme qui pleurait dans le camion qui les amenait vers la mort : des protections contre l'angoisse, la terreur d'un enfant de six ans et demi qu'on vient arrêter avec tant d'armes, tant de camions et tant d'hommes.

« Je me souviens » est un petit livre, à peine 85 pages qui se lit vite et qui est très intéressant d'un point de vue psychologique sur tous les mécanismes de défense que développent les hommes face à l'impensable.
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N'est-ce pas ironique qu'un psychiatre éprouve une certaine difficulté à se délivrer des blessures de son enfance, quand il passe certainement une partie de son temps à décortiquer celles des autres pour les assainir et les guérir? Quel meilleur sujet de réflexion que soi-même?



Enfant d'origine juive, rescapé de l'horreur nazie, il a occulté ce pan de sa vie pendant des décennies. En bon professionnel, il s'analyse avec une certaine objectivité, dénuée d'émotion. A travers ce récit, il se démarque totalement de son passé, le narrant avec une certaine froideur, parlant de lui-même comme d'un tiers.



Il rentre très peu dans les détails, se souvenant assez peu de l'époque, à la fois par déni (source d'apaisement et de son travail de résilience), et parce que sa mémoire elle -même souffre de nombreuses distorsions de la réalité.

" La mémoire, ce n'est pas le simple retour du souvenir, c'est une représentation du passé. La mémoire, c'est l'image que l'on se fait du passé. ça ne veut pas dire que l'on se mente - on se rappelle seulement de morceaux de vérité qu'on arrange, comme dans une chimère. C'est la définition même de la chimère, toutes les parties sont vraies, mais la chimère n'existe pas."



C'est l' histoire d'un enfant qui a eu certainement une chance inouie dans son malheur, et qui a eu très tôt la lucidité nécessaire pour ne pas sombrer. C'est aussi l'histoire d'un homme rempli de contradictions : affirmant ne pas avoir eu de syndrome post-traumatique, alors même qu'il reconnaît avoir vécu dans le déni, ingorant son passé et tout ce qui l'y renvoyait... Affirmant être très bavard et nous faisant pourtant l'économie de grands développements sur sa propre histoire.



Dans le fond je me demande si ce court récit avait vocation à être publié? le narrateur paraît hésiter, noyant quelques souvenirs précis et secondaires au milieu de son analyse de professionnel.

Forme de théraphie ou simple récit pour la postérité? Peut-être un peu des deux, dans tous les cas, il est dommage de ne pas en savoir davantage.
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Ce grand spécialiste de la neuropsychiatrie
, qui a vulgarisé le concept de résilience, n'a pas pu parler de sa propre histoire pendant près de 64 ans. C'est dans ce court essai qu'il nous raconte enfin son enfance, son placement à l'assistance publique et dans les familles d'accueil et la manière dont il a déjoué la Gestapo en se cachant dans les toilettes de la synagogue. C'est au cours d'un séjour dans le Bordelais qu'il va, avec un ami, retourner sur les lieux de son enfance et retrouver la ferme où il a passé près de deux ans. Cet ouvrage nous permet de comprendre la mémoire traumatique, la résilience dans l'après coup, la mise à distance de l'émotion pour que le traumatisme ne vienne plus nous hanter. Il nous montre aussi la façon dont on reconstitue notre histoire en nous éloignant quelquefois de la réalité, ce qui m'a rappelé un événement traumatique qui m'a longtemps poursuivi et qui date de mon adolescence jusqu'à ce que le principal intéressé vienne remettre les pendules à l'heure. J'avais 16 ans, dans notre quartier, on faisait traditionnellement un feu de la Saint Jean et les mecs, pour faire les malins, on sautait au dessus du feu jusqu'à ce qu'une collision envoie mon ami Pierre à l'hôpital avec des brûlures sur tout le corps. J'ai pensé pendant près de 40 ans que j'étais responsable de cet accident, que j'avais percuté Pierre au-dessus du feu. Il y a quelques années, il a sonné à ma porte 40 ans après et depuis, nous nous revoyons régulièrement. Nous avons évidemment abordé le sujet et c'est alors qu'il m'apprit que celui qu'il avait percuté en était un autre qui avait partagé sa chambre à l'hôpital. CQFD.

Challenge Riquiqui 2022.

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Après s'être contraint au silence pendant des décennies, de peur que son témoignage ne soit mal perçu, ou pas cru, ou nié de tant de violence vue et entendue, parce que la souffrance infligée à l'homme est encore plus odieuse quand c'est un enfant qui en est la victime... Dans ce témoignage de moins d'une centaine de pages, Boris Cyrulnik revient sur des morceaux de son passé qu'il avait préféré enfouir, oublier : les années où, après avoir de peu échappé aux aux rafles qui devaient le conduire en camp de concentration, il a été caché dans de nombreuses familles. Il revient à l'endroit où il a vécu près de deux ans, une ferme où il "comptait les moutons" et "courrait après l'âne" qui ne cessait de s'enfuir. Ce n'est pas un récit de ses souvenirs, mais une réflexion au sujet du souvenir lui-même : ce qui marque, ce que l'on retient, ce que l'on transforme-la "chimère" que cela devient.
Un petit livre très intéressant.
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Citations et extraits (50) Voir plus Ajouter une citation
« Rebelle » signifie « se déterminer par rapport à soi ». C'est-à-dire que, même si cet adulte que je connais bien, dit : « Ça, c'est important ! », moi âgé seulement de trois, six ou onze ans, j'ai ma petite idée sur la question, et je pense autrement ! « Rebelle », ce n'est donc pas « opposé », ce peut même être « D'accord, mais pas jusqu'à la dépersonnalisation ! » Aujourd'hui encore, je suis toujours gêné par ceux qui récitent trop bien la doxa, le discours convenu, les stéréotypes. Les croyants m'inquiètent, les douteurs me rassurent. J'éprouve le même sentiment pour nos collègues qui se soumettent à toute récitation, qu'elle soit biologique, psychologique ou sociologique. Les bons élèves me dérangent. C'est peut-être cette réaction qui explique mon cheminement atypique.
p. 83
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Le tempérament, c'est l'apprentissage d'un style relation. C'est une sorte de "goût", c'est ce "goût du monde" que l'on acquiert très tôt dans la vie. Il y a des gens qui goûtent le monde de manière amère, d'autres qui le goûtent de manière sucrée, il y a des goûteurs gais et des goûteurs tristes, des goûteurs accueillants et des goûteurs hostiles. Et ce "goût du monde" explique nos réactions souriantes ou méfiantes, intellectuelles ou désespérées. Ce goût du monde est une empreinte très précoce.
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De l'émotion qu'on éloigne, on fait une représentation, c'est-à-dire qu'on « re-présente » dans sa mémoire un événement passé. La résilience ne peut donc s'effectuer que dans l'après coup. Sur le coup, on souffre, on panique, on a peur, on n'a pas peur, on se défend, on se débat comme on peut. Mais dans l'après coup, quand la représentation est possible, quand le milieu familial ou culturel permet de faire ce travail de représentation on cherche alors des mots, on tente de convaincre, on élabore des stratégies psychologiques pour que le trauma ne revienne plus. C'est cette mobilisation qui met l'émotion à distance et permet d'être maître de la situation. On fait ainsi un travail de résilience. Car l'émotion se transforme, se métamorphose. Beaucoup d'anciens blessés, d'enfants traumatisés, m'ont expliqué qu'ils avaient tenté de retrouver les archives sur les circonstances de leur souffrance. Ils ont alors pris du plaisir à comprendre ce qu'ils avaient vécu et ont métamorphosé leur souffrance en œuvre philosophique, en création théâtrale… Beaucoup de « traumatisé » de la vie mettent en scène au théâtre ce qu'ils ne peuvent pas exprimer directement. C'est dur de dire à quelqu'un : « Voilà ce qui s'est passé, voilà ce qu'était ma vie ».
P. 100
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Un autre mécanisme de défense, le déni, consiste à éviter d'évoquer ce qui fait souffrir. Enfant, je me rappelle d'une très belle gravure de Gustave Doré dans la Bible, une gravure de Loth et de ses filles. Chacun s'en souvient, Dieu dit à Loth : « Ne te retourne pas, ne regarde pas en arrière les incendies de Sodome, sinon tu seras transformé en statue de sel. » Pour moi, à l'époque, ce sel ne pouvait être que le sel des larmes. J'ai donc fait de cette histoire une règle de vie : « il me faudra toujours aller de l'avant, ne jamais pleurer, jamais me plaindre, ne pas me retourner. » Ça a été jusqu'à présent ma stratégie de survie. Comme tout ce qui enclenche un processus de résilience. Ça a été ma stratégie d'existence…
Page 63
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Un enfant n'a jamais les parents dont il rêve.
Seuls les enfants sans parents ont des parents de rêve.
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Boris Cyrulnik vous présente son ouvrage "Quarante voleurs en carence affective : bagarres animales et guerres humaines" aux éditions Odile Jacob. Entretien avec Sylvie Hazebroucq.
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