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EAN : 9782369140207
490 pages
Libretto (12/09/2013)
3.81/5   13 notes
Résumé :
D'après l'ancienne cosmologie hindoue, qui divise l'histoire en quatre grandes ères, l'Inde serait aujourd'hui dans les affres de l'âge de Kali, la pire période qui soit, une époque de conflits, de corruption et de ténèbres, durant laquelle toutes les règles s'effondrent et où tout devient possible... Pendant dix ans, William Dalrymple a sillonné le sous-continent indien, de l'État du Bihar en pleine déliquescence politique au Rajasthan, en proie à une guerre des ca... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
«Kali Yuga», autrement dit «L'âge de Kali», est synonyme dans la mythologie hindoue d'une ère de décadence sinistre. Mais cet ouvrage traduit de l'anglais ne traite pas directement de cosmologie. le journaliste écossais William Dalrymple n'est pas tombé amoureux de l'Inde au point d'en épouser les mythes ancestraux. Il confronte ses impressions sur le sous-continent indien, où il a séjourné environ dix ans, et dont il a visité les différentes parties, à la croyance répandue en Inde dans la traduction de l'âge de Kali par le chaos politique et moral actuel.

Pour W. Darlymple, la situation du sous-continent indien (Inde & Pakistan) est très contrastée. Au Nord et à l'Est, l'extrême violence et la corruption politiques ont tendance à accréditer le mythe, quand la prospérité croissante du Sud et de l'Ouest le démentirait plutôt. Reste à savoir quelle tendance l'emportera ?

Le bouquin est méthodiquement divisé en six chapitres, consacrés aux observations de W. Dalrymple sur le Nord, le Rajasthan, la Nouvelle Inde, le Sud, la côte bordée par l'Océan indien, et enfin le Pakistan. Un index des noms propres et des noms communs (indiens) complète ce long reportage.

Les observations du journaliste, qui remontent à une quinzaine d'années, sont étayées sur la fréquentation et les interviews de personnalités locales de premier plan du monde politique, du business ou du monde culturel.

Comme on pouvait s'y attendre, W. Dalrymple témoigne d'une nation indienne peu conforme aux fantasmes que l'Occident nourrit à son sujet. S'il ne prend pas toujours la forme inquiétante qu'il a dans le Bihar, région voisine du Bangladesh, au bord du chaos, on peut parler de véritable choc des cultures interne vécu par l'Inde. Les valeurs démocratiques et libérales dont l'Occident moderne s'enorgueillit ont dynamité l'organisation politique et la culture ancestrale, ultra-conservatrices, de l'Inde. Hormis les barons de la drogue, les politiciens corrompus et quelques stars du show-biz, la société indienne est dans un état plus piteux qu'elle fut sous l'occupation coloniale britannique. Les promesses de lendemains qui chantent ont fait long feu.

Du fait des pratiques invasives du commerce international, nombre d'Indiens ont le sentiment de subir une présence étrangère plus envahissante que jamais. Les symboles de la culture occidentale dernier cri (fast-food) et les moeurs libérales cristallisent un sentiment de haine grandissant vis-à-vis de l'Occident, dont les politiciens locaux ne peuvent pas ne pas tenir compte, y compris lorsqu'ils ont étudié à Oxford et pris le pli occidental.

W. Dalrymple note que la charia peut être vantée par un candidat populiste pakistanais, sur la foi de statistiques établissant une fréquence des viols bien plus importante aux Etats-Unis que dans des régions du Nord de l'Inde encore administrées d'une manière médiévale.

Au Nord, appauvri au point que la famine persiste, l'ancienne caste des brahmanes a perdu son statut privilégié au profit d'une catégorie d'intouchables, qui ont désormais le pouvoir institutionnel en main, mais se comportent en parvenus inaptes dans les domaines économiques et administratifs, ce qui a pour effet de restaurer la violence primaire des armes et le gangstérisme dans ses droits.

Dans les régions ou les villes plus prospères du centre et du Sud de l'Inde, le phénomène de captation de la majorité des richesses par une oligarchie restreinte a le don d'excéder toutes les couches de la population dont le bonheur se trouve altéré par les métamorphoses rapides de leur cadre de vie (Bangalore est passée rapidement d'1,6 million d'habitants à 6), et la culture traditionnelle est effacée peu à peu au profit d'enseignes et de slogans modernes.

Même si on le devine plutôt libéral, les opinions politiques de W. Dalrymple ne déteignent guère sur ses observations. Force lui est de constater que les espoirs placés par les milieux d'affaires occidentaux au début des années 90 dans une croissance rapide de l'Inde, à l'instar de la dictature chinoise, sont devenus plus qu'hypothétiques quelques années plus tard.

D'ailleurs, s'il n'envisage pas d'autre issue que l'application du modèle libéral, suivant un mécanisme qui semble s'imposer au monde entier, Dalrymple manifeste de la sympathie vis-à-vis de la volonté des Indiens, aussi réactionnaire soit-elle, de ne pas se soumettre à l'égalisation de toutes les cultures du monde sur le modèle occidental.

Rédigé dans un style simple et vivant, faisant bonne mesure entre la part des descriptions, celle des dialogues et des anecdotes significatives, le gros bouquin de Dalrymple est d'une lecture agréable et instructive.

Le mérite de l'auteur est de faire apparaître le droit international des nations et les motifs idéalistes servis avec comme une rhétorique en décalage avec la réalité politique intérieure d'un des principaux pays émergents, où les valeurs occidentales sont très loin d'être perçues comme exemplaires, et ne font tout au plus que servir de paravent à des méthodes cyniques très éloignées de l'accomplissement démocratique – si éloignées, même, qu'elles suscitent dans une partie de la population la nostalgie de l'ordre le plus archaïque, auprès duquel le fachisme peut presque passer comme une aimable concession à l'air du temps.

Son défaut est la rançon de sa qualité, à savoir une présentation des faits la plus objective possible, d'où découle l'absence de conclusion synthétique à ces larges états généraux du sous-continent indien. L'auteur paraît lui-même écartelé entre sa culture occidentale moderne d'origine, d'une part, et l'expression quasiment artistique ou nietzschéenne du refus de se soumettre à ce mercantilisme, qui émane d'autre part de la société indienne.

Le constat plutôt inquiétant de W. Dalrymple, d'une situation pré-révolutionnaire engageant la responsabilité de l'Occident, fait planer le doute sur la science politique, économique, technique, voire philosophique de ceux qui détiennent les rênes du pouvoir à l'échelle mondiale, et paraissent dépassés par les événements. Sans doute c'est ce qui explique la référence à une logique plus ancienne, mythologique : l'âge de Kali.
Lien : http://fanzine.hautetfort.co..
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L'âge de Kali, quel voyage !

L'Inde est en proie à une profonde mutation, et voit ses valeurs traditionnelles remises en cause aujourd'hui. Ce livre nous pose les bases d'une transformation en cours d'après son auteur. Selon les Purana (recueil mythologique et religieux composé entre 400 et 1000 de notre ère) « le Kali Yuga est le dernier âge avant que le monde soit détruit par « le feu d'un millier de soleils », après quoi le cycle arrive à sa fin, le temps s'arrête momentanément puis la roue se remet à tourner et un nouveau cycle commence. » La prospérité du sud et de l'ouest de l'Inde l'emportera-t-elle sur la corruption et le désordre des régions du nord ?

Personnellement, j'ai pu découvrir que le système de castes reste encore très présent malgré la mise en place de loi par l'Etat pour lutter face à ces discriminations. L'hindouisme, la mythologie hindoue sont très pratiqués. La corruption gangrène l'Inde dans certaines régions, la femme veuve n'est plus reconnue par ses pairs, le cricket est le sport national, le Pakistan, le Sri Lanka portent aujourd'hui encore les séquelles des conflits passés avec l'Inde …

Le livre se présente sous la forme de 6 parties avec une description par zone géographique. Ces parties sont elles-mêmes découpées en chapitre qui reprennent un évènement marquant pour le retracer chronologiquement et se faire un avis sur ses causes, ses origines.

Je suis très heureux d'avoir pu voyager dans cette Inde, deuxième pays au monde en terme démographique, mais dont nous savons si peu... William Dalrymple est un grand passionné, un amoureux de ce pays. Rarement j'ai pu lire des sources aussi précises. Merci !!
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Faut-il lire un livre écrit dans les années 1990-1995 si l'on veut se faire une idée juste de l'Inde d'aujourd'hui , une vingtaine d'années plus tard ? la réponse est oui. J'ai résolu le problème en allant musarder sur les sites d'infos consacrés au Sous-continent. J'en suis ressorti abasourdi : c'est toujours et plus que jamais "l'Age de Kali" , le Kali Yuga. Une époque de conflits et de ténèbres durant laquelle toutes les règles s'effondrent comme le dit la 4e de couverture du livre de Richard Dalrymple. L'inde post-moderne de la Bangalore valley, des Mittal, des Tata, existe et fait exulter les éditorialistes des journaux économiques mais autant sinon plus que la Chine, l'Inde est confrontée à de multiples quadratures du cercle : problèmes sociaux, ethniques, religieux , le tout décuplé par des équations insolubles : désertification,pollution des mégapoles,natalité, disparité hommes-femmes engendrant un taux de viols hallucinant, et couronnant le tout, corruption généralisée des élites. C'est le mérite du journaliste écossais de ne pas nous avoir dorer la pilule . Chaque chapitre de son livre aborde un sujet précis, une facette de l'Inde d'aujourd'hui. de la guerre des castes au Bihar et au Rajahstan on passe a une interview de Benazir Buttho (petite escapade au Pakistan), du monde de Bollywood (incroyable reportage à Bombay ! ) nous voilà transporté chez les Tigres de l'Elam Tamoul le mouvement séparatiste tamoul qui mit à feux et à sang le nord du Sri Lanka dans les années 90.
L'Inde est un pays qui me fascine, et qui me fait peur. Je n'y suis jamais allé . J'ai eu plusieurs fois la velléité de sauter le pas, rien de plus facile aujourd'hui, mais la fameuse histoire de l'anglais qui, a l'aéroport de Bombay remonta illico dans l'avion horrifié par ce qu'il venait de découvrir m'a toujours fait réfléchir...
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William Dalrymple, l'auteur de "l'âge de Kali", est un historien doublé d'un journaliste. Pendant dix ans, il a parcouru le continent indien et "l'âge de Kali" en est issu. C'est un recueil d'essai journalistico-historique de ces voyages au cours desquels Dalrymple a rencontré toutes sortes de personnages, visité des régions ou des villes , nous donnant à réfléchir à la multiplicité de l'Inde et de ses populations.
William Dalrymple écrit très bien et ses tranches de vie, d'histoire, sont très vivantes et passionnantes. Ceux qui ne connaissent pas l'Inde y apprendrons beaucoup, et ceux qui la connaissent la retrouverons telle qu'elle est.
Ajoutons le plaisir toujours intense pour moi à la lecture d'un Libretto dont j'apprécie le papier et la forme.
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Car l’Inde, qui autrefois créa le Kama sutra, est aujourd’hui l’un des pays les plus coincés, les plus prudes du monde. Bien que toutes les possibilités d’acte sexuel n’aient jamais été cataloguées d’une manière aussi exhaustive que dans les shastra indien, l’Inde résiste depuis trente ans aux assauts de ka révolution sexuelle qui a secoué le reste du monde pendant les années soixante.
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- Mais vous ne pouvez pas vous attendre à ce que cent millions de musulmans abandonnent leur foi pour se convertir à l’hindouisme ?

- C’est cela l’ennui, répliqua-t-elle. Les musulmans devraient comprendre qu’ils sont indiens. Babur (le premier empereur monghol) n’est pas leur ancêtre, Rama l’est. Ils devraient accepter notre culture commune et s’unir à nous au nom de Dieu. C’est forcément la solution. Ils sont trop nombreux pour qu’on les chasse, ajouta-t-elle en fronçant les sourcils.
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En Occident, comme partout dans le monde, il existe aussi une sorte de système de castes, dont l’habillement est un élément important : un costume rayé et une cravate vous rangent dans une classe, une salopette sale d’ouvrier dans une autre. Ce qui fait la différence, c’est que le modèle indien est rigide et occupe une place centrale dans la philosophie hindoue.
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Power has passed from the educated to the illeterate.
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Videos de William Dalrymple (8) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de William Dalrymple
Les relations entre philosophie et histoire peuvent prendre deux formes distinctes. Dans le premier cas, la philosophie interroge le sens des événements historiques (on parle alors de philosophie de l'histoire). Dans le second, la philosophie interroge la discipline historique et non plus son objet, s'intéressant au type de connaissance que produisent les historiens, et à l'extension de la classe des activités de recherche qui relèvent de la catégorie «histoire». C'est sur ce second type de réflexion que porte cette conférence. Celle-ci reviendra sur une question aussi ancienne que la philosophie des sciences : lorsqu'on explique en histoire, quelle forme prend cette explication, quelle relation entre l'explication historique et les explications qu'on trouve dans d'autres disciplines?
Dans un premier temps, Denis Forest reviendra sur la figure de William Whewell qui définit au XIXe siècle la classe des sciences «palétiologiques» (ou historiques) et propose un examen critique des explications que l'on peut rencontrer dans une science de ce type, emblématique à ses yeux : la géologie. Dans un second temps, il présentera la conception moniste de Carl Hempel qui, au milieu du XXe siècle, nie toute spécificité à l'explication en histoire (au sens ordinaire de ce mot) au nom de l'unité de la science. Enfin, il s'intéressera à un échantillon contemporain de connaissance historique (le livre récent de William Dalrymple, Anarchie) pour caractériser les explications que produisent les historiens, en soutenant qu'elles ne consistent pas à invoquer des lois causales, contrairement à ce que proposaient Whewell et Hempel. Il tentera également de montrer comment s'articulent une valeur comme celle d'objectivité et la dimension perspectiviste de toute connaissance historique.
Par Denis Forest, professeur de philosophie et d'histoire des sciences à l'université Paris 1 et membre statutaire de l'Institut d'histoire et de philosophie des sciences et des techniques
En savoir plus sur le cycle Comment écrire l'histoire aujourd'hui ? : https://www.bnf.fr/fr/agenda/comment-ecrire-lhistoire-aujourdhui
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