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sur 470 notes
Avec seulement deux romans, Alain Damasio s'est imposé en l'espace de quelques années comme un auteur majeur sur la scène française, et pas seulement parmi les lecteurs de littérature de l'imaginaire. Mais outre « La Horde contrevent » et « La Zone du Dehors », Damasio est également l'auteur d'un certain nombre de nouvelles regroupées dans un recueil intitulé « Aucun souvenir assez solide », republié cet été en poche chez Folio SF. Science-fiction, fantasy, essai philosophique..., on serait bien en peine d'accoler une quelconque étiquette à la plupart des textes présents au sommaire de cet ouvrage qui fait figure de véritable ovni littéraire. Autant l'avouer d'emblée, si les précédents écrits de l'auteur possédaient déjà un certain degré de complexité, le niveau ne fait ici qu'augmenter à tel point que, sans un bon bagage philosophique, il devient parfois difficile de bien saisir où veut en venir l'auteur, sans parler d'appréhender toutes les subtilités des notions abordées ou des univers et personnages créés. A ma grande honte et  frustration j'ai ainsi eu le sentiment de passer à côté de certaines nouvelles, notamment « El Levir et le Livre », consacrée à la vie d'un scribe en quête du livre ultime, ou encore « Sam va mieux », texte se déroulant dans un décor post-apocalyptique et mettant en scène un personnage ravagé par la solitude. Deux textes qui dégagent une grande force mais dont je ne suis pas parvenue à véritablement m'imprégner.

La plupart des nouvelles se lisent malgré tout avec beaucoup d'intérêt et traitent de sujets d'actualité chers à Damasio : l'uniformisation de nos sociétés occidentales, la course à la sécurité, l'hypocrisie et le cynisme des politiques... le texte qui m'a le plus touché est celui chargé d'ouvrir le bal, « Les Hauts Parleurs », et le fait qu'il soit clairement affilié à « La Zone du Dehors » n'y est évidemment pas étranger. On y découvre un monde où la totalité du lexique a été privatisé par l'état ou de grandes entreprises et où les seuls résistants se trouvent être des marginaux vivant au ban de la société et se jouant des mots avec une virtuosité et un enthousiasme incroyables. « Annah à travers la Harpe » est également une nouvelle chargée d'émotion puisqu'elle met en scène un père qui entreprend un voyage spirituel afin de ramener sa petite fille dont on comprend au fur et à mesure la raison du décès. Les deux autres textes qui m'ont le plus marquée se déroulent tous deux dans un cadre urbain très particulier : dans « C@PTCH@ » le décor est une ville qui dématérialise les enfants qui la traversent, un phénomène tragique mais hypnotique et qui fait par conséquent le bonheur des caméras, tandis que dans « So phare away » Damasio nous dépeint une cité de phares où la lumière est devenue un véritable langage bien que dangereusement menacé.

Si les deux précédents romans de l'auteur ne vous en avaient pas convaincu, « Aucun souvenir assez solide » est bien la preuve que Damasio est un auteur exigent qui entend avant tout faire travailler les méninges de ses lecteurs. le recueil n'est toutefois pas, selon moi, le meilleur moyen de découvrir son oeuvre et reste donc réservé aux fans ayant déjà lu ses précédents romans. (A noter que la version Folio SF comprend une postface revenant sur chacune des nouvelles et renseignant sur les nombreuses influences de l'auteur).
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Ce livre m'ayant été offert et recommandé par quelqu'un qui compte vraiment pour moi, je l'ai abordé avec envie et beaucoup de plaisir anticipé.
De plus l'auteur est quelqu'un que Systar, en quatrième de couverture, qualifie d'auteur exigeant, écrivant dans une langue poétique et neuve.
Il est, paraît-il, encensé par la critique, par le public et couronné d'un succès mérité.
Pourtant longuement, obstinément, j'ai tenté de pénétrer au coeur de cette dizaine de nouvelles.
Je n'ai été happé par aucun des textes.
De guerre lasse, un à un, par manque d'intérêt, je les ai abandonnés.
Rebuté par un style pauvre qui se cache maladroitement derrière un vocabulaire hermétique et inventé, je me suis enlisé au seuil d'intrigues qui ne me paraissaient pas valoir la peine de l'effort demandé.
Je me suis alors reporté au postface de Systar intitulé "Portraits de Damasio en aéroplane" pour tenter d'y trouver une nouvelle motivation, un nouveau souffle pour une lecture recommencée.
Qu'en dire si ce n'est que grandiloquence n'est pas science et que bavardage n'est pas fiction.
Et que ce postface m'a fait sourire à plus d'un de ses détours ...
Dieu me savonne ! Que j'aime la bonne science-fiction, je n'en ai pas trouvée là !
Au final, "Aucun souvenir assez solide" ne m'en laissera aucun ...
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J'ai une relation amour/haine avec Alain Damasio. D'un côté, il écrit de la SF plutôt chouette, c'est un anar et puis... Quelle plume!

D'un autre, tous ses écrits tournent autour de la technophobie et on a l'impression d'avoir rapidement fait le tour. Plutôt que de dénoncer l'utilisation d'une technologie sous le capitalisme, il préfère souvent dénoncer la technologie elle-même. Et rendu à un certain stade, on a l'impression que ce voudrait a Damasio, en fait, c'est un retour à la terre, aux familles nucléaires et aux rôles de genre traditionnels. Sa façon d'écrire les personnages féminins n'aide pas à se débarrasser de cette impression. Elles alternent entre le rôle de la succube et celle de la Barbie.

Et ses héros? Des hommes géniaux coincés dans une foule trop idiote pour eux.

Certaines nouvelles de ce recueil sont simplement géniales de par leur usage de la langue et de la typographie. Il est là, pour moi, le grand Damasio. Quand il le langage est partie prenante de l'histoire.

Les Hauts&#xNaN Parleurs&#xNaN en particulier, une histoire où le simple fait de parler implique de payer des droits d'auteurs à ceux à qui les mots"appartiennent". Les gens tentent donc d'utiliser des néologismes constants pour se sauver de l'argent.

J'ai aussi adoré So Phare Away, un truc de vieux tenanciers de phare dans un enfer climatique, où les marrées d'asphalte submergent très littéralement le texte au fil de la lecture.
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Ceci est un recueil de nouvelles de notre grand maître de la SF qui fait réfléchir, voici ma critique par nouvelles au gré des journées de confinement :
- Les Hauts Parleurs (copyrights sur hauts et sur parleurs, je ne sais pas les mettre) : quand même les mots ont été achetés par des consortiums, un orateur génial sait jouer avec eux, esquiver les amendes (jusqu'à un certain point) et me faire rêver lorsque je les prononce...
Depuis qu'il a vu disparaître le dernier vrai chat (les autres sont des clones obèses), Spassky utilise indéfiniment les trois lettres de la prononciation de ce terme pour les clamer dans des phrases poétiques.
- Annah à travers la harpe : un beau et poétique récit sur le deuil d'une enfant par le père qui va la chercher jusqu'au bout de sa propre vie. C'est aussi une critique acerbe de tous les moyens technologiques (et plus sortis de l'imagination foisonnante de l'auteur mais, pourquoi pas ?) prévus pour rassurer les parents, sans résultats probants, d'ailleurs. J'ai cependant préféré La porte des enfers, sur le même sujet par mon auteur de prédilection, Laurent Gaudé.
- Le bruit des bagues : là encore, l'auteur fustige la technicité d'un monde hyperconnecté. Le vocabulaire est le même, j'ai remarqué une allusion au terme furtif et une célébration des ZAD est de rigueur dans cette nouvelle qui se conclue avec brio.
- C@ptch@ : Dans une cité déserte et remplie de capteurs un groupe d'enfants tente d'échapper à la dématérialisation. C'est une étrange nouvelle mais qui contient, là encore, certaines obsessions de l'auteur (monde hyperconnecté, enfance ou jeunesse des protagonistes, modernité).
- So phare away : quand la terre est noyée, il ne reste plus qu'une cité d'asphaltes autour de laquelle des phares et leur gardien-ne solitaire ont proliféré. Lorsqu'ils étaient peu nombreux, leurs messages picturaux ou poétiques se distinguaient et se répondaient encore mais à présent ils se diluent et seuls la publicité demeure. Un amant tente de rejoindre sa belle avant la grande marée ou avant que l'asphalte ne l'engloutisse...
- Les hybres : cette courte nouvelle évoque la transformation d'un artiste de seconde zone, habitué à aller chercher ses œuvres dans une usine désaffectée rempli d'êtres hybrides, en machine vivante pour le bonheur des galeristes, plus complètement qu'Orlane (que j'ai connue il y a longtemps).
Le tout est écrit dans la langue imagée et percutante de l'auteur.
- El Levir et le livre : c'est ma nouvelle préférée jusqu'ici. Un scribe écrit un livre en caractères de plus en plus importants selon des règles bien définies et jusqu'à la mort. Je suis partie au sommet du mont Uluru avec l'auteur tant sa description est réaliste, une fois encore il m'a fait rêver par la magie du langage.
- Sam va mieux : je n'aurait peut-être pas dû lire cette nouvelle en ce moment, mais tant pis. Un homme parcourt Paris dont tous les habitants ont disparu, sans doute noyés, à la recherche de survivants, accompagné d'un enfant à ce qu'il semble. Nous retrouvons les thèmes chers à l'auteur, jeune enfant sautillant et babillant, musique, jeux de mots.
- Une stupéfiante salve d'escarbilles de houille écarlate : l'auteur nous raconte une course fantastique qui se déroule dans les airs. Un cycliste volant amoureux d'une ange, un animal attachant jouant avec ses pouvoirs, la pluie, la foudre, un papillon en sont les participants. Cette nouvelle m'a paru loufoque et capillotractée, avec des jeux de mots par trop artificiels.
- La dernière nouvelle est très courte mais aussi émouvante. C'est elle qui a donné son titre au recueil : Aucun souvenir assez solide. Un homme ayant tout perdu n'arrive pas à retenir sa mémoire.
- Dans la postface de Systar les nouvelles d'A. Damasio sont analysées en profondeur (mille fois mieux que je ne l'ai fait) et Deleuze est maintes fois invoqué, ainsi que quelques autres grands penseurs. J'en ai tiré une citation d'actualité (alors que ce recueil date de 2017) que vous pouvez lire sur la page dédiée.
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Ce recueil de nouvelles est ma première rencontre avec un auteur qui voit sa légende formée au bout de trois livres seulement, et il est suffisant pour me convaincre qu'il ajoute au choeur général des auteurs SFF français, voire de littérature tout azimut, une voix inouïe jusqu'alors.

Alain Damasio possède un style d'écriture riche, imaginatif, qui m'a plusieurs fois évoqué Raymond Queneau que je lis en parallèle. Mais ce style est exigeant ; il nécessite une volonté de lecture qui va au-delà du besoin de simple détente. Combien de fois me suis-je dit avant d'aborder une nouvelle « Houlaa ! Ça va encore me prendre la tête ! » ? Parfois je renonçais, parfois j'y allais. le style est un personnage qui participe aux histoires de Damasio. Il les enveloppe souvent au point qu'il faut attendre plusieurs pages avant de deviner où l'auteur veut en venir. Lorsqu'on a deviné, deux choses peuvent advenir : soit on est conquis par ce que l'on découvre – cela a été mon cas avec « Annah à travers la harpe » ou « Sam va mieux » - soit on cela nous indiffère et on le rejette – « C@ptch@ » et « El levir et le livre » m'ont fait cet effet.

Alain Damasio tourne dans ce recueil autour des mêmes thèmes qui dévoilent beaucoup sur la vision amère qu'il porte sur notre époque. Inquiet du potentiel de la technologie et de l'utilisation néfaste qu'une vision purement consumériste pourrait en faire, il la transcende, la transforme en un animal dangereux, en une force de la nature (comme les marées de bitume dans « So phare away ») ou en une puissance mystique qui va balayer les hommes, jouer avec eux comme on joue au yoyo. Mais les récits ne sont pas entièrement dystopiques. Toujours un homme relève le défi, affronte cette puissance comme un véritable héros grec, quitte à ce que ce soit son chant du cygne, créé sa propre légende et redonne l'espoir. Il y a du romantisme chez Damasio, pas que du désespoir.

Mes nouvelles préférées sont « Les Hauts® Parleurs® » et la chattifique déclamation de Spassky, « Une stupéfiante salve d'escarbilles de houille écarlate » dont j'imagine qu'elle se passe dans le même monde que la Horde de Contrevent (un peu plus en hauteur) et, quelques années-lumière devant les autres, la lumineuse romance « So Phare Away ».

Je retournerai prendre l'air avec Alain, un jour où ma volonté sera assez forte.
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Complètement sous le charme de l'auteur grâce à La Horde du Contrevent, et n'ayant pas encore sorti Les Furtifs de ma PAL, j'ai finalement emprunté vite fait ce recueil de nouvelles pour renouer avec Damasio.
Bon, je préfère prévenir, les nouvelles, c'est pas du tout mon truc. Des chances que ça biaise légèrement ma critique...

Nous voilà donc parti pour dix nouvelles, touchant forcément à des thèmes variés, mais présentant surtout des ambiances assez différentes l'une de l'autre. Tour à tour psychédélique, onirique ou hypnotisante, s'attaquant au capitalisme, à l'egocentrisme ou aux dérives technologiques, on est sur du Damasio pur et dur. Un peu trop à mon goût (dans le style, pas dans les idées).

L'auteur s'amuse allègrement avec nous, encore plus avec les mots, et il m'a malheureusement perdu quelques fois en route.
Comme le précise la plupart des autres critiques, ce livre amène le lecteur sur plusieurs axes de réflexions, certes passionnantes, mais qui ne correspondent vraiment pas à ce que j'espérais trouver avec Damasio.

On n'est pas passé loin, c'est dommage. Hâte d'attaquer Les Furtifs pour départager tout ça.
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Un recueil de nouvelles qui ne peut laisser indifférent, que l'on s'y retrouve ou non. Ce sont peut-être des nouvelles, il n'empêche qu'elles offrent tout autant de matière à réflexion qu'un roman,j'oserai même dire, parfois plus. La plupart d'entre elles donnent une image assez réaliste de ce que pourrait être notre futur technologique et sémantique, parfois par le biais de la poésie et de la métaphore (C@ptach@ ou So Phare Away, entre autres exemples). La nouvelle qui donne son titre au recueil est la plus courte, pas forcément la moins dérangeante, puisqu'elle parle de la faculté perdue de l'homme de faire son deuil ; elle offre un écho assez troublant avec la première du recueil, qui elle parle également des extensions technologiques pour s'occuper des enfants. (Pour ceux qui connaissent (les autres, je les encourage à aller voir), ces deux nouvelles trouvent un écho dans l'épisode 1 de la saison 2 de Black Mirror.)
Je ne prétendrais pas avoir compris toutes les nouvelles, ni tout ce qu'elles peuvent impliquer. Je ne pourrais pas dire laquelle j'ai le plus aimé ; en revanche, toutes m'ont parlé à un niveau ou un autre. Outre les projections de ce que pourraient devenir nos sociétés, il y a un très grand fond philosophique (notamment Deleuze, très présent) et beaucoup d'inventions verbales (mots, tournures de phrases) Ce qui rend la réflexion sur la disparition ou la privatisation du langage plus profonde encore. L'impression d'ensemble, c'est un foisonnement, une richesse dans les histoires, toutes très différentes les unes des autres ; elles sont parfois difficiles, à lire, à comprendre, à accepter.
un recueil exigeant, qui demande une vraie disponibilité d'esprit et vers lequel je reviendrai un jour.
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Lire Damasio peut s'avérer déroutant, et l'auteur a quelque chose de clivant dans le style mais dont le talent ne peut que faire l'unanimité.
à ceux qui n'ont pas apprécié certains romans de Damasio (je pense aux Furtifs), lire ses nouvelles donne à voir une autre facette de son talent. C'est là le principal atout de ce recueil, dont les univers sont réhaussés par un artifice de mots.
à lire, par petits bouts si vous préférez, ou d'un coup d'un seul comme moi.
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L'Univers de Damasio, on y adhère ou pas. Ses envolées lyriques et métaphysiques peuvent laisser certains sur le bord de la piste.
Mais quand elles font écho au désir d'envol c'est beau.
Parmi ces nouvelles certaines sont plus ardues à suivre, mais d'autres de vrai bijoux.. Pour fans et pour inconditionnels cependant. Un peu haut perché pour le découvrir....
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Attention, c'est du Damasio concentré. Ce petit livre ne se dévore pas en quelques heures : il faut, après chaque nouvelle, prendre le temps de respirer un coup avant de replonger dans la suivante. Il faut dire que l'auteur crée un nouveau monde pour chaque récit, axé sur différentes déformations de ce que le nôtre pourrait devenir. Alors on croise des addicts au monde virtuel, des gardiens de phare amoureux, des jeunes enfants trop protégés par leurs parents... Et toujours ce questionnement qui est la marque d'Alain Damasio : comment être humain dans ses relations avec les autres ? Quels risques font peser sur cette humanité les deux grandes puissances d'aujourd'hui, le capital et la technologie ?
On peut comprendre l'appréhension face à la marchandisation de tout, face à l'emprise du virtuel, face au fliquage de nos comportements... Et cependant, croire encore que l'humanité saura dépasser tout ceci, comme la plupart de ses héros le prouvent.
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