Depuis bien des années je vois avec amertume une foule d'abus envahir une cause au service de laquelle j'ai voué ma vie.
Lorsque j'ai été poussé à écrire ce livre, j'ai voulu faire voir la stricte vérité, et exposer les abus qui ternissent le spiritualisme. Il y a entre cette belle doctrine et les noirceurs dont on l'accable le même rapport qu'entre une perle fine et la boue qui la souille.
Une expérience de trente-quatre ans peut, j'ose l'espérer, me donner un titre suffisant pour être écouté.
Je n'ai aucun intérêt pécuniaire à la publication de cet ouvrage. Le désir de faire parler de moi m'est également étranger. J'accepte la tâche comme un devoir qui m'est imposé par une volonté en dehors de la mienne. Tous ceux qui aiment la vérité seront avec moi, les autres me sont indifférents.
Si, par un séjour aux temples des brahmanes, l'étranger pouvait acquérir en majeure partie de pareils dons, quelles ne devaient pas être les richesses spirituelles que possédaient les brahmanes eux-mêmes ! Leur culte avait pour objet d'affranchir l'âme de l'empire des sens, à tel point qu'elle pût s'élever jusqu'à s'identifier avec l'unité de la substance en Dieu. De même que les platoniciens, ils croyaient que l'esprit est enveloppé d'une forme éthérée, lumineuse, d'une sukshonasarira ou corps plus idéal, suivant les livres des Védas. Une foule de sensations que nous éprouvons rendent notre esprit perplexe, c'est pourquoi bouddha, la raison, nous a été donné pour les régir.
Envoyée pour s'identifier à la vie terrestre, l'âme émigre de corps en corps d'une manière merveilleuse et tout à fait pythagoricienne. Ces incarnations finies, l'esprit parait devant Yamas, le Minos de la cosmogonie brahmanique. Suivant que ses actes auront été justes ou répréhensibles, l'esprit sera admis au paradis d'Indra ou condamné à l'un ou à l'autre des purgatoires variés de cette religion, pour y expier ses fautes.
Il est difficile de porter un jugement sur ceux qui, étant eux-mêmes illusionnés, cherchent à illusionner les autres hommes. Ces sortes de gens peuvent ne pas être entièrement malhonnêtes. Il se mêle souvent, et sans qu'ils s'en doutent, de la folie à leurs actes. C'est un orgueil immodéré, parfois l'ambition, le désir de commander, qui, au fond, sert de mobile à leur conduite.