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Maxime Boidy (Traducteur)Stéphane Roth (Traducteur)
EAN : 9782350960135
137 pages
Les Prairies Ordinaires (16/10/2009)
4.44/5   17 notes
Résumé :
Une Terre où la nature recouvre peu à peu ses droits sur la ville après la disparition de l'espèce humaine. Une architecture bunkérisée dédiée à la sécurité et au contrôle comme réponse à l'effondrement des Twin Towers. Des répliques d'immeubles allemands et japonais érigées dans le désert de l'Utah pour servir de laboratoire au dernier grand projet du New Deal : la destruction par le feu des villes ennemies. Dévastée par les bombes ou les stylos rouges des spéculat... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
L'obsolescence des villes

Ce petit livre de Mike Davis rassemble trois textes passionnants - nourris des travaux des historiens, de la littérature, de la photographie, ou encore d'études scientifiques ou biologiques - sur la destruction des villes et le rapport de la ville à la nature.

«Le cadavre berlinois dans le placard de l'Utah» évoque le «Village allemand», cette ville construite en 1943 dans le désert de Saltbrush dans l'Utah pour y être détruite – c'est-à-dire pour y tester les bombes incendiaires et «réussir» à mener à bien «le dernier grand projet de travaux publics du New Deal : la destruction par le feu des villes japonaises et allemandes». En quelques pages très denses et souvent terrifiantes, l'auteur raconte la genèse de ce «projet», et notamment les débats internes qui agitèrent les dirigeants politiques et militaires anglais et américains avant de décider de ces massacres, la méticulosité de la reconstitution de ce Village allemand sous l'impulsion des industries pétrolières, de l'armement et d'Hollywood alliés pour le projet, afin de véritablement tester l'efficacité de la propagation des incendies, les objectifs de rendement des bombardements et l'espoir délirant de susciter une révolte populaire antifasciste dans la population allemande qui conduisirent à cibler les quartiers ouvriers les plus densément peuplés, avec le «résultat» que l'on connaît.

«La cible de l'«opération Meetinghouse» - le raid aérien le plus dévastateur de l'histoire mondiale – était l'équivalent tokyoïte de Wedding ou du Lower East Side : le quartier ouvrier congestionné d'Asakusa. le commandant de la cinquième division aérienne, Curtis le May, considérait les Japonais de la même manière qu'un Heydrich ou un Eichmann les juifs et les communistes : «Nous savions que nous allions tuer de nombreux enfants et de nombreuses femmes quand nous avons brûlé cette ville. Cela devait être fait. […] Pour nous il n'y a pas de civils au Japon». […] L'enfer qui en résulta – Akakaze, le « vent rouge » en japonais – fut plus meurtrier qu'Hiroshima, tuant environ cent mille personnes.»

Partant des attentats du 11 Septembre et des prédictions de destruction apocalyptique de la ville présentes dans la littérature depuis un siècle, le deuxième texte aux résonances ballardiennes, «Les flammes de New York», met en lumière la fragilité de villes américaines coupées de leur environnement naturel en prétendant dominer la nature, devenues trop complexes et vulnérables, alors que leurs habitants, maintenus dans l'angoisse bien avant Septembre 2001 par ceux qui entretiennent et s'engraissent sur l'idéologie de la peur, rêvent d'une vie totalement sécurisée.

«Barry Glassner, un des maîtres du genre, a systématiquement démythifié quelques-uns de nos démons les plus communs – les jeunes hommes noirs, les dealers, la terreur du « politiquement correct », etc. – qui obstruent délibérément la possibilité d'une compréhension publique de problèmes sociaux tels que le chômage, l'échec scolaire, le racisme ou la faim dans le monde. Il a méticuleusement analysé la manière dont les peurs conjurées par les médias étaient des «expressions obliques» responsables du refus post-libéral de réformer les véritables conditions de l'inégalité. La peur était devenue la pierre angulaire du glissement droitier depuis 1980. Selon lui, les peurs des Américains «se choisissaient les mauvaises cibles» et les récents équivalents de la fameuse émission radiophonique d'Orson Welles sur la «Guerre des Mondes» ne faisaient que les détourner de problèmes bien réels. «Les martiens, insistait-il, ne vont pas débarquer.» »

Dans «Villes mortes : une histoire naturelle», Mike Davis montre enfin comment la nature bafouée reprend ses droits dans les villes bombardées ou dans les quartiers-ghettos nés de l'hyperségrégation à l'oeuvre dans les villes américaines, quartiers cycliquement condamnés au déclin et à la destruction par les spéculateurs et des politiques publiques malavisées ou sous contrôle.
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Ressorts sociaux et politiques de la destruction des villes : trois essais toniques et décapants.

Publié en 2003, traduit en 2009 par Maxime Boidy et Stéphane Roth aux Prairies Ordinaires, "Dead Cities" regroupe trois essais de Mike Davis, le difficilement classable et passionnant historien américain qui s'est créé, au fil des années, une spécialité des approches ethno-sociologiques nourries d'architecture et d'urbanisme.

"Le cadavre berlinois dans le placard de l'Utah" prend appui sur une visite du site militaire, partiellement déclassifié désormais, de Dugway, dans l'Utah, où fut minutieusement reconstitué jadis une banlieue ouvrière de Berlin (ainsi que des "villes de papier" japonaises, d'ailleurs), en 1942, pour y tester sans relâche les engins incendiaires destinés à être largués sur les villes allemandes durant la seconde guerre mondiale - et sur l'archipel nippon. C'est l'occasion pour Mike Davis de fouiller par le menu, en inlassable décrypteur d'archives et de témoignages qu'il est, à la fois le débat entre Anglais et Américains, partisans des bombardements de masse dits "de terreur" et partisans des bombardements de précision, débat qui déchira aviateurs, scientifiques et politiques anglo-saxons en 1942, avant de voir le triomphe de "l'école britannique", bien soutenue par certains Américains toutefois, et de lancer la destruction systématique des villes allemandes, en visant un effet maximal sur les populations, et tout spécialement sur les populations ouvrières. En étudiant les raisons et les justifications invoquées pour cet acharnement et de son aspect "de classe", des aspects particulièrement glaçants d'une certaine conception de la lutte du Bien contre le Mal apparaissent, en même temps que l'extraordinaire "mise à disposition" de savoirs d'ingénieurs, d'architectes, d'urbanistes et de spécialistes des matériaux, au service d'une destruction des populations.

"Les flammes de New York" rapproche dans une lecture des années 1920-1980 les fictions anti-utopiques et apocalyptiques ayant mis en scène la destruction de New York - jusqu'au moment où une part de cette fiction devient réalité en septembre 2001- des politiques de la peur développées désormais au nom de la lutte anti-terroriste, pour élucider la part fantasmatique qui permet de "faire avaler" si aisément un ensemble de mesures au fond profondément mercantiles.

"Villes mortes : une histoire naturelle" passe en revue avec un certain systématisme l'ensemble des expériences, simulations et travaux ayant été conduit depuis plus de 50 ans, dans un cadre scientifique et écologique, sur la manière et les formes parfois inattendues dont la nature "reprend ses droits" lorsque des pans des métropoles contemporaines, au coût de maintenance absolument prohibitif, sont abandonnés - souvent pour des raisons de marché immobilier et de politique de la ville - ou détruites, et l'on revient ici au premier essai du recueil, en étudiant le devenir urbain et écologique des villes bombardées, effondrées ou rasées.

Souvent connu des lecteurs français, notamment ceux ayant un intérêt pour la science-fiction, par son "Au-delà de Blade Runner - Los Angeles et l'imagination du désastre" (1992 et 2000, traduit en 2006 chez Allia), Mike Davis démontre à nouveau dans ces trois essais la puissance de sa recherche boulimique au service d'un décryptage social et politique de réalités urbaines que les amis de la main invisible aiment à croire purement techniques et scientifiques.
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L'inclassable total. Essai ? Prophétie ? Philo ? Histoire ? SF pré-apocalyptique ? Branché sur les grandes grosses infernales villes, leurs massacres programmés et leur étrange destinée végétale visualisée sur les ruines de Tchernobyl, ce véritable OVNI s'accroche aux pattes et dessille les yeux.
Un gros morceau analyse-de-guerre, assez horrible dans les faits et réellement glaçant dans l'esprit qui découvre, dans l'effrayante première partie, la stratégie volontaire et assumée des bombardements de masse, des populations civiles, au Japon et en Europe de l'Est. (Et qui plus est en visant, sciemment, les quartiers miséreux pour favoriser des rebellions envers les pouvoirs en place des quartiers encore cossus o_O)
Impossible de résumer davantage, c'est à lire.

Source : http://laclefdefa.wordpress.com/2010/02/10/amatsubu/
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Vidéo de Mike Davis
Les cartes ont des partis pris, des biais. Tentatives de retranscription du monde, elles sont aussi des moyens d'imposer une vision du monde, des objets de combats politiques, de propagande. Mahmoud Abbas et Benjamin Netanyahu ne cessent d'en agiter en conférences de presse et jusqu'à l'Assemblée générale des Nations Unies.
Depuis quelques années, dans le sillon de la géographie radicale et de ses grands noms, David Harvey et Mike Davis notamment, une cartographie radicale se développe. Cette dernière assume : l'exercice de représentation du monde est forcément subjectif et fondamentalement politique.
Dessiner le monde, c'est se le figurer, le nommer, l'organiser. Les cartes deviennent dès lors des champs de bataille et des outils de propositions politiques. Des peuples indigènes contestent les cartes hégémoniques pour imposer leur récit sur les terres dont ils sont issus. Des groupes de citoyens, d'académiciens ou de militants se retrouvent autour de projets de carte pour donner de la force aux habitants en matière d'aménagement du territoire. D'autres encore cartographient l'absence des femmes dans l'espace public, la gentrification…
Nous en parlons avec Philippe Rekacewicz, géographe et cartographe, chercheur associé à l'université de Helsinki et Nephtys Zwer, historienne.
L'invité des Matins de France Culture. Comprendre le monde c'est déjà le transformer(07h40 - 08h00 - 23 Décembre 2021) Retrouvez tous les invités de Guillaume Erner sur www.franceculture.fr
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