Citations sur Une carte postale du bonheur (18)
Aucun son ne sort de ma bouche, je sens mon coeur dans ma tête mais plus ma tête dans mon coeur.
« … Nous avons donc décidé de venir car le manque de confiance et la jalousie de Juliette menacent notre relation. Ses crises de larmes sont incessantes, ses excès de furie de plus en plus fréquents. Elle est jalouse des présentatrices télé, des filles dans la rue et maintenant, plus grave, de son propre fils. »
Mon sommeil n’a pas été entrecoupé de nausées, ni de pauses pipi à répétition. En revanche, je dois y aller immédiatement. Je me lève, totalement nue, et me précipite aux toilettes. En passant ensuite dans la salle de bains pour me rafraîchir et enfiler une nuisette, je constate que mes cernes sont un peu moins marqués que la veille.
Je passe du dentifrice sur ma langue et mes dents, et l’étale avec mes doigts avant d’aller jeter un coup d’œil dans la chambre de Tom. Il dort encore, malgré le jour qui pénètre à travers les stores que j’ai dû oublier de baisser.
Tout vouloir faire trop vite sans être forcément prêt nous condamne à payer cher nos erreurs par la suite.
On écoute durant toute notre existence les autres nous raconter leurs mésaventures, on compatit, on se dit « Oh le pauvre » ou « Moi, cela ne m’arrivera jamais ». Bien sûr…
Mais pourquoi ne tirons-nous aucune leçon des mauvaises expériences de nos semblables ? Je ne suis visiblement pas encore assez mûre, du haut de mes presque trente ans, pour savoir que l’on doit fabriquer ses propres moments de vie, bons ou mauvais. Essayer, chuter et recommencer. Il ne sert à rien de vouloir échapper à son destin, paraît-il. Si ce n’est que j’ignore encore que c’est moi qui m’apprête à chuter. Encore plus bas.
« Il disait : “Le problème du mariage, c’est qu’il meurt toutes les nuits après l’amour et qu’il
faut le reconstruire tous les matins avant le petit-déjeuner”. »
L’Amour aux temps du choléra, Gabriel Garcia Marquez
Dieu merci, la plupart du temps nous nous contentons de croiser brièvement ces personnes toxiques, sans que le destin nous lie à eux d’une quelconque manière. Mais quand par malheur nous tombons amoureuse de ce type d’homme hautement manipulateur, il est déjà trop tard. Nous ne sommes plus qu’une proie sur laquelle le piège se referme, et nous demeurons seule à la merci d’un prédateur qui entame bientôt notre transformation, lente et destructrice.
J’éprouve désormais du mépris à l’égard de ces lèvres, de ce corps et de cet air de chien battu qui me rendent sa présence insupportable depuis des mois. Il m’est de plus en plus difficile d’utiliser les pronoms possessifs. Je n’aime plus dire « mon » mari, « ses » lèvres, « notre » vie. Il tente de m’arracher un baiser mais je tourne la tête. Je me remémore le roman d’Alberto Moravia, Le Mépris, lu sur la plage, l’été dernier. Il me semble que j’incarne à mon tour le rôle d’Émilie, cette femme qui a subitement cessé d’aimer son mari pour ne plus éprouver que de l’indifférence, voire du dégoût. À elle aussi, tout contact physique est devenu insupportable. Je l’avais alors trouvée si cruelle, si condescendante…
Mille roses ne peuvent rien changer quand plus rien ne peut fleurir sur un coeur asséché.
« Se préparer » pour Thomas signifie bien s’habiller et bien se maquiller. Où que j’aille, que ce soit chez Franprix, chez le boulanger ou à la poste, il faut que je sois toujours sur mon trente et un. C’est donc perchée sur mes hauts talons que je vais acheter ma baguette le soir.
Du haut de mes seize ans, ce qui me choqua le plus, ce fut l’abnégation de ma sœur. Renoncer à la vie avant même de l’avoir commencée, je trouvais cela pitoyable. Lise allait devenir mère alors qu’elle était encore une gosse, une sale gosse de surcroît ; elle allait partir dans un alpage perdu dans la montagne avec un illuminé qui avait le double de son âge.