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Rome, années Berlusconi, juste avant la chute.

La Ville Eternelle est à la merci de Samouraï, ex-leader fasciste reconverti dans la grande criminalité. Il met la dernière main à un gigantesque projet immobilier qui aura pour effet de bétonner tout le territoire compris entre Rome et Ostie, sous couvert d'un philanthropique programme de développement de logements sociaux. le projet est pour l'heure top secret, puisqu'il faut d'abord trouver de quoi corrompre (ce ne sera pas trop difficile) les politiciens qui le voteront bientôt. Il faut aussi éliminer les autres obstacles, à savoir la concurrence, et pour cela, quoi de plus judicieux que de s'associer avec ses ennemis, en les « intéressant » au projet et garantir ainsi sa sécurité. Samouraï est donc sur le point de réaliser une union sacrée entre les différents mouvements mafieux oeuvrant à Rome, en ce compris (oups) la Banque du Vatican. Une belle brochette de riches pécheurs au service du Dieu Argent.

Mais ce beau projet pourrait bien capoter, parce que dans le camp des Gentils, Marco Malatesta, incorruptible chef d'une unité d'élite des carabiniers, a flairé que quelque chose d'énorme mijotait dans le chaudron des Méchants, et s'est donc mis en devoir de déjouer le plan, avec l'aide de sa belle collègue, d'un jeune procureur, et d'Alice, altermondialiste n'ayant pas froid aux yeux.

Crime, luxe, drogue, argent, prostitution, élites politiques et religieuses, hauts fonctionnaires, tous et tout sont inextricablement entremêlés dans des relations de domination, de chantage et de corruption.

On pourrait dire que les personnages de ce roman nerveux et haletant sont stéréotypées, et que toute cette histoire est trop énorme pour être vraisemblable. Et pourtant, c'est là le plus effarant, il paraît que tout cela est très réaliste et même carrément inspiré de la réalité.

Pauvre Rome, splendide déchue. Et combien d'autres, comme elle, corrompues jusqu'à L ADN ? C'est quoi, ce monde ?
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Suburra est un film coup de poing sur la mafia italienne sorti en salles le mercredi 9 décembre dernier.

Si je n'ai pas pu voir ce film en salles, bousculade de fin d'années oblige, j'ai profité de la prochaine venue de Carlo Bonini et Giancarlo de Cataldo, aux quais du polar 2016, pour me rattraper en plongeant dans le livre éponyme dont il est adapté.

A l'origine du livre, le célèbre juge Giancarlo de Cataldo, auteur de plusieurs best Sellers dont le formidable « Romanzo criminale » déjà adapté au cinéma et en série. le célébrissisme magistrat italien a ainsi voulu s'associer à Carlo Bonini (journaliste d'investigation à la « Repubblica ») dans le but de transmettre à leurs lecteurs l'état de gangrène qui frappe Rome, sous forme d'une fiction à la fois haletante et très documentée.

En lisant Suburra, on est assez terrifié de voir à quel point le grand banditisme des générations précédentes est parvenu à subsister et à prendre des formes nouvelles, afin de prendre possession de la cité romaine, dans un contexte de la mondialisation du crime, dont Berlusconi- l'intrigue se déroule juste avant le déclin de l'empire berlsuconien- n' y est évidemment pas étranger.

Les milieux du crime, des affaires, de la religion et de la politique sont tous étroitement reliés dans Suburra. Et pas pour faire le bien des citoyens, bien au contraire.

Suburra-2

On ne sait si le Rome vu par Carlo Bonini et Giancarlo de Cataldo est plus proche de leurs fantasmes que de la réalité, même si la lecture de certains articles de presse pencherait plutôt hélas pour la seconde option, mais on est assez terrifié et captivé en même temps par ce monde où ce côtoient policiers et politiciens totalement corrompus, grand banditisme, haut clergé peu scrupuleux, sous fond de spéculation immobilière, prostitution, règlement de compte, piratages d'internet.

Chantage, trahisons meurtres, sexe, extorsion : tous les ingrédients d'une bonne saga policière sont présents : cela pourrait donner un mélange assez indigeste de polar contemporain, un peu à la Gérard de Villier,s mais ca serait sans compter sans le style percutant et prenant du duo qui s'appuient sur un sens de la formule et de l'anecdote pour sonder en profondeur les coulisses criminelles de Rome.

On oubliera certains personnages caricaturaux et excessifs (la prostituée du chef de la mafia, l'altermondialiste..), et plus globalement une vision un peu manichéenne du monde- même si les méchants sont bien plus présents que les gentils, pour ne garder que l'essentiel de cette galerie des monstres romaine: le plume alerte et vive, pour un roman qui se lit d'une traite et qu'on a hâte de comparer au film lorsque celui-ci sortira en DVD ( pour info, sa date de sortie est prévue le 19 avril 2016 chez TF1vidéo).
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Il y a une dizaine d'années, j'avais entendu parler de « Romanzo Criminale » le roman et le film, comme d'une plongée magistrale dans la criminalité romaine des années 70/80. Les critiques étaient élogieuses et j'étais pourtant passé à côté du phénomène. Donc lorsque j'ai appris la sortie de la version plus moderne « Suburra » et que je me suis renseigné sur les auteurs (un juge et un journaliste spécialisé), je n'ai pas voulu me louper une deuxième fois. Parce que ce genre de romans mafieux me plaît souvent, surtout s'ils sont basés sur des faits réels.

Dès les premières pages, on entre dans vif du sujet. On se retrouve au coeur de l'action et celle-ci ne s'arrête jamais. Les auteurs alternent à chaque nouveau chapitre entre les différents personnages des différents clans. Et les clans sont nombreux dans cette machination crapuleuse. Les politiques, les journalistes, les religieux, les forces de l'ordre et les trafiquants jouent tous un rôle important et représentent une pièce fondamentale de ce grand échiquier de la magouille. Chacun agit dans son propre intérêt et utilise tous les moyens qu'il peut pour arriver à ses fins. Ce qui découle inexorablement sur une vague de violence dont le roman est imprégné. Entre orgueil et ambition, la paix n'a plus de place.

Giancarlo de Cataldo et Carlo Bonini nous font découvrir les multiples aspects du crime et de ses ramifications dans la ville de Rome. Ils nous font entrer autant dans le quotidien des individus les plus ingénieux et les plus influents que dans celui des plus dégénérés et donc des plus sanguinaires.

J'ai beaucoup aimé l'ambiance du livre et son rythme ininterrompu. J'ai eu un peu de difficultés à ne pas me perdre avec les nombreux personnages. Mais une fois que j'ai réussi à tous les maîtriser, j'ai vraiment pris mon pied à les regarder se manipuler entre eux. Malgré l'usage de quelques clichés, les auteurs ont vraiment su me captiver pour cette grande association de malfaiteurs et j'attends avec impatience la suite des aventures qui est à priori prévue.

Ce roman a été adapté au cinéma. Je le verrai avec plaisir même si je crois que la densité de l'ouvrage mériterait d'être mieux exploitée grâce à une série.
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Membre repenti des jeunesses fascistes romaines, le colonel des carabiniers Marco Malatesta assiste impuissant à une série de règlements de comptes entre les diverses mafias de la cité éternelle.

Ce que contrairement au lecteur il ignore, c'est que tout a commencé lors d'une énième nuit de débauche du député Péricle Malgradi au cours de laquelle l'une des deux professionnelles engagées pour l'occasion meurt d'une overdose de cocaïne...

Le grand intérêt cette intrigue haletante c'est qu'elle nous immerge dans plusieurs milieux à la fois : les élites politico-religieuses, les mafieux, les autorités, la gauche caviar ainsi que les laissés pour compte du système méritocratique.

Et, on découvre à quel point tous ces gens s'impactent mutuellement, 24h sur 24, quel que soit la décision qu'ils prennent. En effet, comme le dit Juan Manuel de Prada, « les riches sont détruits par la fascination qu'exercent sur eux la gadoue, la sexualité pressante des servantes et des chauffeurs, à laquelle ils ne peuvent résister. Ce n'est pas à l'usine, mais au lit, où ils se savent irrésistibles et presque divins, que les prolétaires l'emportent, dans la lutte des classes. »

Parmi les fils conducteurs de ce roman, de Cataldo et Bonini insistent d'ailleurs sur l'écart entre l'idéalisme des intellectuels et le réalisme populaire un peu à la manière de Manuel Vazquez Montalban ou Cervantes. Il y a d'ailleurs beaucoup de roman picaresque dans cette histoire.

Dans sa jeunesse, Samouraï (l'actuel coordinateur des mafias romaines) avait choisi de se suicider, car il ne supportait pas la médiocrité humaine qui l'entourait : « Samouraï était déçu. La prison lui avait imposé une promiscuité forcée. Il avait vu et connu les êtres humains tels qu'ils sont vraiment. Il n'y avait pas d'espoir. Impossible de réveiller leurs consciences engourdies. Il semblait que la société qu'il voulait changer n'en ait elle pas la moindre envie. »

Autre thème récurrent, la médiocrité des hauts-fonctionnaires. Même si, pour un pays qui a majoritairement voté Berlusconi durant deux décennies, ça n'est pas si surprenant, il n'en demeure pas moins que le tableau qu'en font ces deux auteurs très proches des arcanes du Palazzo Montecitorio (Chambre des députés) laisse sans voix. La mentalité de ces « serviteurs de l'État » italien me rappelle celle des dignitaires mexicains peints par Carlos Fuentes dans « le siège de l'Aigle ». Pour utiliser un doux euphémisme: inquiétante!

Un seul principe semble diriger leur action, l'argent. Et, peu importe s'il faut s'asseoir sur les lois, l'état de droit et l'intérêt général pour parvenir à ses fins. Ces gens ne sont rien d'autre que des hyènes affamées.

Pour nuancer un peu le pessimisme qu'ils ont instillé, les auteurs nous emmènent à la rencontre du grand amour de Marco Malatesta, l'archétype de la militante cultivée et à l'abri du besoin. le portrait au vitriol peint par Samouraï se veut réaliste, mais il dénote avant tout la capacité de prise de distance des auteurs par rapport à leurs personnages fétiches :

« Alice Savelli ne pouvait être définie stricto sensu comme "communiste". Tout au plus, c'était une de ces idéalistes confuses qui déblataraient sur un nouvel ordre sans tenir un minimum compte de la réalité. Ceux-là, Samouraï les considérait comme des millénaristes médiévaux. Utopistes d'un monde sans banques et sans patrons, sans plus de droite ni de gauche, une lande plate et grise sans beauté dans laquelle ce qui comptait était uniquement ce sot qualificatif, citoyen, qui voulait dire tout et son contraire. Les citoyens étaient ceux qui avaient condamné Socrate à la ciguë et qui choisirent Barabbas aux dépens du Christ. »

Finalement, un roman qu'on ne lâche pas avant la dernière ligne même s'il nous ôte nos dernières illusions sur la capacité du système dit « démocratique » à favoriser le bien commun dans la Cité.

J'ai passé un magnifique moment en compagnie des carabiniers romains et je me réjouis de lire « Romanzo criminale » le premier opus de la série paru en 2006 en France.
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En novembre 2014, la police italienne arrêtait Massimo Carminati, dit Le Borgne. Dans la foulée, des dizaines d'autres personnes sont arrêtées, dont un nombre conséquent de conseillers municipaux et régionaux, fonctionnaires et chefs d'entreprises et, cerise sur le gâteau, l'ancien maire post-fasciste de Rome Gianni Alemano est mis en examen. À cette occasion, l'emprise de la Mafia – au sens général du terme – sur la capitale italienne apparaît au grand jour. Le Borgne, les lecteurs de Romanzo Criminale, roman de Giancarlo de Cataldo, ancien juge reconverti dans l'écriture, qui romance l'histoire véridique de l'ascension et de la chute de la bande de la Magliana à Rome dans les années 1970-1980 le connaissent ; il y apparaît sous le surnom du Noir, référence à son appartenance à un groupuscule terroriste d'extrême-droite avant de s'engager dans le banditisme.
Et justement, un an auparavant, en 2013 donc, c'est un peu cette histoire vraie qu'anticipent Carlo Bonini et Giancarlo de Cataldo dans Suburra.
L'alter ego de Carminati s'appelle ici Samouraï, ancien chef d'un groupe fasciste lui aussi reconverti dans le grand banditisme et véritable maître de Rome après avoir su créer des alliances fructueuses avec les différentes factions prêtes à se partager cette ville ouverte, gitans, Camorra et N'Drangheta. Plus policé et certainement plus malin que ces alliés de circonstance, Samouraï a surtout pour lui de connaître intimement Rome et ceux qui y sont au pouvoir, que ce soit dans les différentes instances politiques ou au sein des forces de l'ordre et de la justice. Grâce à des affinités politiques, bien entendu, car comme le montrent les auteurs, les idées fascistes sont aussi bien implantées dans la pègre que dans les institutions, mais aussi grâce à de nombreux dossiers que Samouraï a pu se procurer et qui lui permettent de tenir la laisse courte à ceux qui sont aux affaires.
Tout pourrait aller pour le mieux, et le grand projet immobilier que caressent le Samouraï et ses complices entre Rome et le littoral d'Ostie pourrait bien sortir de terre si Malgradi, politique corrompu affidé de Samouraï ne dérapait pas lors d'une nuit agitée avec deux prostituées dont l'une finira mangée par les chiens errants après une inhumation aussi sommaire que clandestine. Dès lors s'enclenche un engrenage de violence et de trahison dans lequel vient par ailleurs s'insérer Marco Malatesta, carabinier tête brûlée et ancien disciple du chef mafieux.
Comme dans Romanzo Criminale, dont la bande de la Magliana hante ce roman, Suburra est d'abord une profusion de personnages. Ils sont au moins une bonne vingtaine, que Bonini et de Cataldo entendent bien ne pas négliger, à jouer un rôle essentiel dans l'intrigue. Pour autant, la description de cette Rome souterraine, pourrie par la corruption, minée par les luttes de pouvoir et d'influence, ne se révèle jamais confuse, les auteurs prenant grand soin de ne jamais perdre le lecteur.
Mais au-delà de cette quasi enquête – et on a tôt fait, au moins à cause de la ressemblance des deux noms, d'associer Suburra et Gomorra – Carlo Bonini et Giancarlo de Cataldo savent donner à leur histoire un véritable souffle romanesque, créent des personnages ambigus dont certains évoluent sur le fil ténu qui sépare le bien du mal. Des personnages surtout confrontés à de véritables dilemmes moraux, partagés entre la fidélité à leurs idéaux et leurs amours, dépassés par leur hybris ou par la bêtise crasse de ceux qui sont censés les épauler. Portrait sans fard de la putain croulante que semble être devenue Rome sous les années Berlusconi, Suburra se révèle être un roman passionnant.

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L'Italie, avec sa corruption politique et religieuse endémique, est un terrain fertile pour la fiction policière. Choisissant l'ère Berlusconi alors qu'elle entre dans sa phase finale attendue depuis longtemps, Bonini et de Cataldo (respectivement magistrat et journaliste) donnent à leur récit le nom de Suburra, un quartier délabré et sans loi de Rome. La crise financière de 2008 a permis à la mafia de gagner encore plus d'influence sur la police, ses propres fantassins criminels, les extrémistes d'extrême droite et une Église catholique profondément compromise en proie à des scandales sexuels.

Il n'y a pas de nuance ici, mais Suburra rappelle que la fiction policière peut en dire autant sur une société que d'autres genres.
Lien : http://holophernes.over-blog..
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Moi qui ne suis jamais allée à Rome (le destin est contre moi, mais c'est une autre histoire), j'ai suivi sans peine le conseil de mon libraire lorsque j'ai cherché un polar italien pour honorer le rendez-vous prévu aujourd'hui. Rome : capitale de la mafia, un sous-titre évocateur pour se mettre en appétit. Un duo d'auteurs formé par un journaliste d'investigation à La Repubblica grand connaisseur des milieux politiques et un magistrat à la cour de Rome ayant déjà commis nombre de romans noirs, il n'en fallait pas plus pour me convaincre.

Et la balade fut mouvementée, à la hauteur de mes attentes. Je lis assez peu de romans noirs mais j'ai tout de suite plongé dans celui-ci qui développe une impressionnante galerie de personnages. Au coeur de l'intrigue, l'opposition entre deux hommes puissants : Samouraï, l'un des mafieux les plus puissants et les plus mystérieux de la région romaine et le lieutenant-colonel Marco Malatesta. Dans sa jeunesse, pendant un laps de temps très court, Malatesta fut le disciple de Samouraï au sein de groupes d'inspiration néo-fascistes avant de se rebeller et d'entrer dans la police. Un passé commun qui n'est pas sans influence sur la relation ambigüe entre les deux hommes désormais face à face.

"Nous et eux. Nous et eux. Dans quelle mesure toute cette saloperie dépendait-elle de notre faiblesse ? de notre désir de ressembler à ceux que nous disons vouloir combattre et qu'en réalité nous admirons ? Et qu'est-ce que nous admirons en eux ? La liberté ? L'absence de préjugés ? La vie de merde qu'ils mènent ? Voilà une dynamique qu'il connaissait bien. Au fond, tant qu'il n'avait pas décidé de s'en retirer, ça avait été son histoire."

A Rome, Samouraï a de grands projets. Transformer le littoral en un gigantesque Atlantic City, promesse de gains mirifiques et de règne incontesté. Il lui faut simplement parvenir à faire tenir tranquilles les différentes familles qui s'affrontent régulièrement pour quelques arpents de territoire. Pour le reste, tout semble sous contrôle. Députés corrompus pour pousser le projet et obtenir les permis de construire. Journalistes à la botte. Des ramifications jusqu'au sein du Vatican dont l'évêque Tempesta est la figure de proue, vitrine factice d'un volet social du projet destiné à amadouer les décideurs. Mais c'est sans compter sur le petit grain de sable qui ne manque jamais de dérégler une machine bien huilée. En l'occurrence, le petit service que le député Malgradi demande à la mauvaise personne lorsque l'une des prostituées avec lesquelles il occupe une suite d'hôtel décède d'une overdose...

Pas de code d'honneur ici, on plonge directement dans ce qu'il y a de plus pourri au royaume des hommes. On élimine, on piège, on asservit. le lecteur est transporté certes dans les rouages de la mafia qui recrute ses sbires parmi les mouvances fascistes et les nostalgiques du nazisme, mais également dans les coulisses politiques bien contaminées elles aussi par une infection difficile à éradiquer. Un contexte qui sonne terriblement vrai, montrant l'inertie des forces de l'ordre minées par la corruption et le manque de moyens de groupes altermondialistes tentant de lutter contre la pieuvre. Mais la réussite du livre tient vraiment à ses seconds rôles. Chaque personnage apporte sa touche à un tableau d'ensemble saisissant. de la prostituée en fuite qui se recase avec un producteur de cinéma au fils malheureux d'un entrepreneur réduit à servir ceux-là même qui ont poussé son père au suicide. de la passionaria rebelle prête à risquer sa vie pour défendre la cause du peuple à l'ébéniste talentueux, émigré iranien et résistant majestueux. Et j'en passe... Tous contribuent à la réalisation de cette fresque sanglante et dramatique qui nous offre un final à haute dose de testostérone.

L'impression de visiter Rome par les égouts en quelque sorte. D'ailleurs j'ai vraiment regretté de ne pas connaître la ville car les descriptions des quartiers sont si précises qu'on aimerait les matérialiser par des images. Disons que, le jour où j'y mettrai les pieds, je ne la verrai peut-être pas simplement à l'aune des cartes postales touristiques. Quant au quartier de Suburra ...

"Suburra, image éternelle d'une ville incurable. Demeure d'une plèbe violente et désespérée qui des siècles auparavant s'était faite bourgeoisie et qui occupait le centre géographique de la ville. Parce qu'elle en était et en restait le coeur."
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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Voici un roman fascinant et ultra bien documenté qui plaira à tous les amoureux des histoires mafieuses !

Ce récit est autant un roman qu'un véritable documentaire sur des faits avérés. A mes yeux ce livre est de la même qualité qu'un James Ellroy : c'est sombre, véridique, historique même, complexe et d'une incroyable intensité dramatique. En effet il faut savoir que ce livre n'est pas facile à lire, il regorge d'informations, de faits mais les deux auteurs sont des pédagogues, ils réussissent à mélanger connaissance et littérature au travers d'un livre fascinant.

Je comprends immédiatement pourquoi ce livre a été adapté au cinéma : il a un véritable potentiel pour une telle adaptation. Ce récit repose sur la description minutieuse d'un univers souterrain : celui de la mafia, de son emprise sur le monde politique et économique, une emprise qui ne cesse de croitre au point de déterminer de manière insidieuse tous les éléments sociétales de Rome. Et si vous ne pensez pas qu'une telle chose est possible à notre époque, je vous prie de lire Suburra !

C'est un livre dense mais les chapitres réguliers permettent d'ingurgiter progressivement l'ensemble. Ce n'est pas mon genre de lecture habituelle mais je n'ai pu qu'adorer face à une telle qualité : le style est vraiment excellent, l'intrigue est réellement prenante et ce d'autant plus cela provient de la vérité : un grand roman ! Vous allez ainsi plonger dans le monde de la prostitution, de l'urbanisme, de la corruption, de la drogue...à Rome.


En définitive, une très bonne découverte : c'est passionnant du début jusqu'à la fin !
Lien : http://leatouchbook.blogspot..
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On n'a jamais oublié Giancarlo de Cataldo, le magistrat italien qui connut son heure de gloire avec son Romanzo criminale, brillamment adapté au cinéma.
Le voici aidé du journaliste Carlo Bonini pour un nouveau gros coup : Suburra, évidemment déjà adapté au cinéma !
Et traduit par Serge Quadruppani que demander de plus ?
Hasard des lectures, on vient tout juste de plonger dans les années 70 (l'époque de Romanzo Criminale) pour découvrir quel Sale temps il faisait pour les pays du nord.
Nous voici plus au sud, à Rome, au jour d'aujourd'hui. Mais la météo est toujours aussi pourrie. Pire, peut-être.

[...] Suburra, l'antique quartier des lupanars chanté par Pétrone.

Quelques pages suffisent à Bonini et de Cataldo pour nous accrocher, nous aimanter : on ne décrochera plus de ce gros pavé de près de 500 pages.
Annoncé comme touffu, complexe, le bouquin avait de quoi nous effrayer comme s'il s'agissait de décrypter l'organigramme des mafias italiennes. Ça commence même par la liste des nombreux personnages !
Mais c'était sans compter sur le talent des deux auteurs : patients et pédagogues juste ce qu'il faut pour ne jamais perdre le lecteur sans jamais le prendre pour un demeuré. le pavé s'avère très digeste et se dévore à la fois comme un reportage passionnant et comme un polar ronflant. Brillant.
Alors oui, nous voici plongés aujourd'hui dans les arcanes de la municipalité romaine, les dessous pas très chics, les couloirs mafieux, les arrière-cours de la corruption ...
Une peinture (un film !) sordide des dessous de notre société. Oui, bien entendu on se dit pendant quelques chapitres que ça se passe à Rome, dans ce pays italien, que c'est la mafia et tout et tout ...
Mais le livre est long et ce fragile rempart ne résiste pas bien longtemps : Bonini et de Cataldo nous forcent à ouvrir les yeux.
Heureusement, il y a de l'humour, parfois féroce, souvent ironique, un second degré d'auto-dérision comme cette fameuse liste de personnages qui ouvre le bouquin.
Alors oui, on y revient plusieurs fois à cette liste, non pas pour savoir qui est qui, nul besoin on l'a dit, mais bien pour savourer les épithètes dont ces personnages ont été affublés !
Il y a du règlement de compte dans l'air et quand on dit compte ... c'est qu'il y a beaucoup beaucoup, énormément d'argent à blanchir et à gagner. de quoi exciter les convoitises des plus honnêtes.
Politique (la pègre a fleuri dans le lit du fascisme), corruption ... difficile de délimiter la frontière entre le bien et le mal, le bon et le truand ...

[...] La vérité, c'est qu'ici, ce sont les méchants qui pensent aux plus humbles. Ils donnent du travail et un brin d'espérance à ceux qui n'en ont pas.

Une lecture coup de poing et qui déménage. Un début d'année en fanfare même si c'est celle qui accompagne le corbillard bling-bling d'un mafieux sur le bord de mer d'Ostie.
Juste un (tout petit) regret pour les flics pas trop ripoux, Marco et Alba, les gentils (il en faut bien pour garder le lecteur en piste !), qui paraissent un peu falots à côté de la galerie dantesque de cette cour des miracles qu'était l'antique Subure et qu'est la Rome d'aujourd'hui.

Pour celles et ceux qui aiment qu'on les réveille.
Lien : http://bmr-mam.blogspot.fr/
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J'avais lu avec grand intérêt Rome Brûle (Suburra2) (2016) . J'avais regretté de lire la série à l'envers, j'ai donc acheté Suburra (2013) pour combler cette lacune. Et m'apercevoir ensuite que la série est beaucoup plus longue avec eux autres romans : Romanzo criminale (2006) et Je suis le Libanais (2014). Ceci pour remettre de l'ordre au cas où les amateurs de romans policiers voudraient tout lire. Attention, ces livres sont des pavés et très violents! Je frôle l'overdose de règlements de comptes, vengeances, et coups tordus, je vais laisser reposer et je reprendrais ces ouvrages un peu plus tard.

Court prologue 1993, la suite se déroule à la fin de l'ère berlusconienne (2011), il y a même une scène somptueuse de la retransmission de la démission de Berlusconi (12 novembre 2011) traité de « mafieux » et de « bouffon » par la foule, dans une réunion mondaine de politiciens….mais le Premier Ministre n'est pas en cause dans ce roman. En revanche, la corruption dans Rome est le sujet de l'intrigue. Corruption, cocaine, prostitution et affairisme sont les ressorts de l'action qui mêle allègrement la pègre et le personnel politique, ainsi que certains fonctionnaires et même dignitaires ecclésiastiques.


Plusieurs familles se partagent les affaires, « ceux de la Romanina » les Gitans, « Ceux d'Ostie », des Calabrais, des Napolitains, et même une filière géorgienne. Nous assistons le long des 515 pages à la guerre des clans pour les territoires, le trafic de la cocaïne, et simplement pour les luttes de pouvoir. le Samouraï, la personnalité la plus marquante, un bandit très classieux règne. Il faudra donc assister à de fastidieuses et interminables exécutions. Tout aussi répétitives, les préparations des innombrables rails de cocaïne et descriptions des effets de la-dite substance. Vulgarité du sexe tarifé…. J'ai trouvé des longueurs.

Ce bémol – violence et sexe sont des composantes obligées de la littérature du genre – ne retire rien à l'intérêt de l'analyse du fonctionnement des mafias. L'un des auteurs est journaliste, l'autre magistrat, leur récit est donc tout à fait crédible (malheureusement). le contexte politique est aussi essentiel. Evidemment la promenade dans Rome est plaisante. J'avais été très scotchée par cet aspect dans Rome brûle – presque un témoignage. le thème principal : la spéculation immobilière est aussi très intéressant.

J'avais été un peu perdue dans la foule des personnages de Rome Brûle, ils sont aussi nombreux dans Suburra, heureusement certains se retrouvent dans les deux romans. la psychologie des personnages est très fouillée : certains ne sont que des voyous primaires et brutaux mais d'autres ont des personnalités plus complexes et plus consistants. le samouraï est particulièrement intéressant, alors que dans l'opus suivant, incarcéré, il tire les ficelles sans vraiment apparaître.

Une série passionnante (mais à consommer avec modération).
Lien : http://miriampanigel.blog.le..
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