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EAN : 9782070139118
144 pages
Gallimard (26/04/2013)
3.82/5   314 notes
Résumé :
"À travers l’écriture, je m’approche du moi-même d’il y a cinquante ans, pour un jubilé personnel. L’âge de dix ans ne m’a pas porté à écrire, jusqu’à aujourd‘hui. Il n’a pas la foule intérieure de l’enfance ni la découverte physique du corps adolescent. À dix ans, on est dans une enveloppe contenant toutes les formes futures. On regarde à l’extérieur en adultes présumés, mais à l’étroit dans une taille de souliers plus petite."
Comme chaque été, l’enfant de... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (81) Voir plus Ajouter une critique
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C'est la fin des années cinquante, l'été s'installe sur la petite île d'Ischia au large de l'Italie. le jeune garçon de 10 ans vient passer ses vacances ici, comme tous les étés, avec sa maman, son papa étant parti en Amérique pour essayer de se faire une situation correcte là-bas. Il passe le plus clair de son temps avec les marins pêcheurs, admire leur travail et se réjouit lorsque ces derniers lui proposent de les aider ou de monter sur le bateau avec eux. Sinon, il est souvent seul. Enfant taciturne, timide et sensible, il n'ose se mêler avec ceux de son âge et préfère passer son temps dans les livres, les rébus ou les mots croisés. Un jour, il remarque sur la plage une jeune fille, les yeux rivés sur son polar. C'est elle qui fera le premier pas vers lui et une conversation s'engage entre eux. Elle lui apprend sa passion pour les animaux, la faune et l'écriture. Ils partagent un moment ensemble, une glace, le goût des mots et se promettent de se revoir. Mais cette relation tendre ne plaît pas à tout le monde et trois jeunes garçons vont venir s'en prendre à lui...

Comme les poissons qui ne ferment pas les yeux, ce jeune homme ne les ferme pas non plus quand il embrasse sa bien-aimée. C'est l'été de ses 10 ans, l'été de la prise de conscience de son corps, de l'autre. Erri de Luca se remémore cet été-là avec la sensibilité et la profondeur d'âme qui lui sont propres. C'est dans ce décor somptueux italien, sous un soleil de plomb et entre ses venelles que l'on suit ce petit garçon si tendre et si sensible qui apprendra à conjuguer le verbe aimer. Erri de Luca, dans ce roman autobiographique, laisse libre cours à ses pensées vagabondes et met en lumière ce petit garçon qu'il était et qu'il a apprivoisé. Initiatique, léger, tout en poésie et au style singulier et riche, ce petit roman est une agréable invitation au voyage.

Les poissons ne ferment pas les yeux... et voient avec le coeur...
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Erri de Luca raconte son enfance, ou plutôt raconte le petit garçon qu'il était à l'âge de dix ans. Dix ans, c'est l'âge de la transition entre l'enfance et le début de l'adolescence, le début du long chemin vers l'adulte que l'on deviendra.
Avec son habituel talent l'auteur nous fait vivre ses tourments intérieurs, nous raconte à sa façon des évènements qui le dépassent et sa découverte du monde réel : la lâcheté, la cruauté, l'injustice et bien d'autres choses encore, sans oublier l'amour.
En se retournant, cinquante ans plus tard, vers son passé et vers quelques épisodes déterminants, c'est en fait l'adulte qu'il est maintenant qu'Erri de Luca cherche à mieux connaître et comprendre. Le tout avec une grande lucidité, comme les poissons, sans fermer les yeux.
De tous les livres de l'auteur que j'ai lus, celui-ci est sans doute le plus personnel, le plus intime. Il s'y montre sans fard, dépouillé devant ses lecteurs. Au-delà du plaisir de lire un beau texte, j'ai eu la surprise de découvrir que la mer avait joué un grand rôle dans l'enfance d'Erri de Luca : je connaissais son amour absolu de la montagne, qui transparait dans nombre de ses écrits (dans "Sur la trace de Nives" entre autres), je découvre ces étés passés au bord de l'eau et l'importance que ce premier contact rapproché avec la nature a eu pour l'écrivain.
Erri de Luca raconte avec sa finesse coutumière et l'on comprend que pour quelqu'un de sa sensibilité l'enfance n'a pas toujours été facile : le petit garçon vulnérable et sans carapace a dû souffrir plus que d'autres.
Les poissons ne ferment pas les yeux, ce qui leur permet de mieux voir le beau... et le moins beau.
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Et, je reviens écouter la musique d'Erri de Luca, sa poésie, sa langue chantante, imagée et sensuelle ! Elle me transporte pour une centaine de pages inoubliables ! Ses phrases sont légères, ses mots chargés de sens :
Une caresse pour l'âme ! Une volupté de l'esprit !

« Les poissons ne ferment pas les yeux » raconte un moment précis de l'enfance de ce petit garçon Napolitain : Il a dix ans !
Dix ans, ce lieu commun ! La mue de l'enfance ! L'enfance muette !
Des questions sans réponse, des définitions non appropriées.
Il ressent ce besoin irrépressible d'ouvrir cette carcasse d'enfant, obliger son corps à changer !
Dix ans : la première fois où on écrit son âge avec un chiffre double
 « L'enfance se termine officiellement quand on ajoute le premier zéro aux années. »
Dix ans, le moment où le cocon s'ouvre sur l'extérieur
"À dix ans, on est dans une enveloppe contenant toutes les formes futures. On regarde à l'extérieur en adultes présumés, mais à l'étroit dans une pointure de souliers plus petite."

C'est un été initiatique : il observe les adultes, s'interroge sur le verbe aimer qu'il ne comprend pas et trouve que les adultes exagèrent ce mot à l'excès. « Au plus fort du verbe, les adultes se mariaient, ou bien se tuaient. »
Maintenir : son verbe préféré à dix ans
« Il comportait la promesse de tenir par la main, maintenir ! »
Il passe ses vacances avec sa mère, son père parti en Amérique à la recherche d'un sort meilleur. Sur l'île « une main ouverte », il retrouve le monde des pêcheurs, observe leur travail, les accompagne.
C'est un solitaire, il ne partage aucun loisir avec ceux de son âge, préfère les rébus et mots croisés. Il lit.
Sur la plage cet été là il y a aussi la fillette . Elle lit des polars à toute vitesse. Il la regarde avec curiosité
"J'étais sous le charme quand elle parlait, je la regardais en face, carrément dans la bouche."
C'est elle qui va prendre l'initiative en lui prenant la main :
« maintenir » "mon verbe préféré était arrivé ! "
Et puis tout se met en marche : la découverte de l'amour, le désir de liberté, la violence, la jalousie que peut provoquer cette amitié.
Il découvre « les antipathies », devenu la cible de trois garçons, les combats de mâles.

L'auteur qui est aussi le narrateur nous offre un puissant récit d'initiation d'une écriture somptueuse et simple.
Un récit à lire ou relire
Un petit bout d'enfance ! ...

🎶 🎶 🎶 🎶
J'ai dix ans
Je vis dans des sphères où les grands
N'ont rien à faire, j'vois souvent
Dans des montgolfières, des géants
Et des petits hommes verts
Si tu m'crois pas, hé
T'ar ta gueule à la récré
J'ai dix ans
Je sais qu'c'est pas vrai mais j'ai dix ans
Laissez-moi rêver que j'ai dix ans
Ça fait bientôt quinze ans que j'ai dix ans
Ça paraît bizarre mais
Si tu m'crois pas, hé
Tar' ta gueule à la récré
🎵. 🎵. 🎵. 🎵





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Les poissons ne ferment pas les yeux ; c’est ce que va faire le petit garçon de l’histoire, pour ne pas perdre une miette de sensation. Le petit garçon de dix ans, en vacances sur une île au large de l’Italie, a tant de sensibilité qu’il vit dans son monde intérieur. Son corps d’enfant le gêne, il ne correspond pas à ce qu’il vit à l’intérieur. Il s’évade avec les mots qu’il rencontre dans ses lectures.

Sa rencontre avec une petite fille sur la plage va le faire grandir. Il ne connaissait pas encore le sens du mot amour et du mot justice. Les deux sont liés :

« Aujourd’hui je sais que sans l’élan de l’amour la volonté de justice fait défaut. »

C’est un roman émouvant car il laisse entrevoir la sensibilité de l’enfance, ses petites blessures, sa difficulté à appréhender les sentiments, à analyser ses impressions. Il les met de côté, pour plus tard, quand il aura passé le cap de l’enfance.

L’écriture est merveilleusement poétique et rend hommage à la douceur féminine :

« Elle, à cette heure –là, était la volonté en personne. C’est normal que ce soit un mot féminin, comme « eau » ou « justice », et que ‘sang » soit masculin… »
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Comment faire ressurgir aussi bien son enfance, retrouver la force des émotions, le poids des questions, les interrogations, les certitudes sur les adultes, cette volonté de sortir d'un corps d'enfant. Un enfant calme, solitaire, réfléchi, épris de lecture, à qui seul le sens profond du mot « aimer » échappe un peu. Amo, amas, amat… n'est-ce qu'une conjugaison latine ?
C'est sans compter sur cette petite fille sérieuse, en vacances sur l'île, comme lui, et qui l'ouvrira à l'amour.
Avec sensibilité, l'auteur retourne sur l'année de ses dix ans.
C'est un beau texte, plein de nostalgie et de recherche sur soi.
C'est le deuxième livre que je lis d'Erri de Luca, je trouve l'écriture fine, sensible, mais, va savoir pourquoi, je reste spectatrice et il manque un petit je ne sais quoi pour que je me laisse complètement prendre par l'émotion.

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critiques presse (4)
LaPresse
13 août 2013
Apprentissage de l'amour et de l'injustice: Erri de Luca pose sur tout cela le regard d'un homme qui a vécu, sans complaisance et sans adopter ton faussement naïf. «À dix ans, on est dans une enveloppe contenant toutes les formes futures.» Un livre terriblement beau et sincère.
Lire la critique sur le site : LaPresse
Lhumanite
01 juillet 2013
L’auteur de Montedidio revient sur ses dix ans, âge où il découvre le monde de la fiction et de la parole, de l’amour et de la violence des autres. Un récit d’initiation étonnant et émouvant.
Lire la critique sur le site : Lhumanite
LesEchos
24 mai 2013
Il faut lire lentement la prose d’Erri De Luca, s’arrêter sur chaque phrase, en alerte – comme les poissons qui ne ferment pas les yeux. Ce voyage scintillant et liquide, il faut le faire durer. En déguster les visions saisissantes.
Lire la critique sur le site : LesEchos
Culturebox
13 mai 2013
Ce dernier roman d'Erri de Luca est un hymne à la femme, à la figure féminine et au premier amour, qui est à la fois un début et une fin.
Lire la critique sur le site : Culturebox
Citations et extraits (131) Voir plus Ajouter une citation
Je n'aimais pas les feux d'artifice, leur imitation du volcan en flammes. J'étais intrigué par l'émerveillement qu'ils provoquaient, l'antique admiration pour le feu. Chez moi, non, pourquoi ? Je l'ai compris en montagne, quand j'ai vu ma première cascade au milieu des rochers et du bois. Elle m'éblouissait, je m'approchai de son vacarme, me déshabillai et me fis tremper par la poussière d'eau émiettée. À l'intérieur passait le spectre d'un petit arc-en-ciel. Là, j'ai su que la cascade est une merveille différente du feu d'artifice. J'aime la neige, la grêle et le saut à pic d'une cascade. J'admire l'avalanche, l'air déplacé comme une gifle, l'écroulement d'une paroi qui se détache avec sa charge de neige. J'aime l'eau qui plonge en descente, mais pas le feu qui s'élance vers le haut et veut monter, se cabrer et s'effriter en cendres.
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Je le rencontre dans mon sommeil, où je pleure sans larmes. le deuil de mon père est une flaque d'eau de mer asséchée. Au pilieu des rochers, il reste le sel séché, des sanglots à sec.
Je retrouve à présent mes larmes d'il y a cinquante ans. Elles reviennent à mes yeux après avoir voyagé et fait partie du goutte-à-goutte des yeux du monde. Elles sont revenues au point de départ et je les pleure de nouveau. La fenêtre disloquée par des décennies d'intempéries que je brûle dans la cheminée me suffit. des mains que je ne peux plus toucher l'ont ouverte et refermée. Pourtant, je les vois, veines, tendons, forme des ongles, remuer dans l'air de la maison et s'affairer.
Les larmes reviennent bras dessus bras dessous, deux par deux, se penchent sur le bord et plongent des cils sur mon pantalon, tandis que je pose mon front sur mes mains vides. ce sont les mêmes larmes d'enfant, d'ancienne impuissance. Elles n'ont rien demandées et cessent toutes seules.
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A travers l'écriture, je m'approche du moi-même d'il y a cinquante ans, pour un jubilé personnel. L'âge de dix ne m'a pas porté à écrire, jusqu'à aujourd'hui. Il n'a pas la foule intérieure de l'enfance ni la découverte physique du corps adolescent. A dix ans, on est dans une enveloppe contenant toutes les formes futures. On regarde à l'extérieur en adulte présumés, mais à l'étroit dans une taille de souliers trop petite.
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Le destin, selon sa définition, est un parcours prescrit. Dans la langue espagnole, c'est une arrivée. Pour celui qui est à Naples, le destin est dans son dos, c'est venir de là. Etre né et avoir grandi de là tarit le destin : où qu'il aille, il l'a déjà reçu en dot, lest et sauf-conduit à la fois. Les récits de mère, de ma grand-mère et de ma tante ouvraient les grands entrepôts des histoires. Leurs voix ont formé mes phrases écrites qui ne sont pas plus longues que le souffle nécessaire à les prononcer.
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Le papier buvard faisait partie de nos fournitures : les élèves pauvres ne pouvaient s’en acheter et alors ils séchaient en soufflant, mais doucement, une légère brise, pour ne pas étaler l’encre. Sous leur souffle mesuré, les lettres tremblaient en scintillant, comme les larmes et les braises.
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Videos de Erri De Luca (86) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Erri De Luca
Rencontre animée par Olivia Gesbert
De la bibliothèque paternelle à l'ombre de laquelle il a grandi jusqu'aux chantiers où il a été ouvrier, Erri de Luca a noué avec la lecture, puis avec l'écriture un rapport particulier pour bâtir une oeuvre double, celle d'une fiction romanesque aux forts accents autobiographiques et celle d'une réflexion sur l'Écriture. Depuis trente ans, c'est une oeuvre foisonnante et protéiforme qu'il bâtit, caractérisée par un style limpide, poétique, épuré. Ponctués de pensées, de métaphores, d'aphorismes, ses récits endossent souvent la forme d'une fable, d'une parabole empreinte d'une touche de merveilleux, dans une langue unique. Pour cette édition Quarto, ont été retenus une dizaine de textes publiés auxquels s'adjoignent cinq textes inédits, qui portent en eux la puissance de l'écriture d'Erri de Luca dans des genres littéraires variés, sa réflexion sur l'appartenance et l'identité, le poids du passé et l'importance de l'histoire, sur la fragilité et l'importance des relations humaines.
« Nous apprenons des alphabets et nous ne savons pas lire les arbres. Les chênes sont des romans, les pins des grammaires, les vignes sont des psaumes, les plantes grimpantes des proverbes, les sapins sont des plaidoiries, les cyprès des accusations, le romarin est une chanson, le laurier une prophétie. » Trois chevaux, Erri de Luca
À lire – Erri de Luca, Itinéraires, Gallimard, coll. « Quarto », 2023.
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