J'ai lu votre roman et j'ai été tenue en haleine jusqu'à la fin. Cette histoire d'usurpation d'identité (elle semble enclencher un processus de destruction) est vraiment passionnante.
Dans le judaïsme, les noms véhiculent notre identité et nous définissent. Ceux qui nous sont donnés à la naissance résultent d'une inspiration prophétique accordée à nos parents. Ils renferment notre essence. le nom raconte une histoire, comme un livre (nom et livre ont la même valeur numérique en hébreu). Et changer de nom, c'est changer de destin. Vous en avez eu la prescience : les filles, écrivez-vous, pourraient se nommer d'abord merveille, enfin douleur.
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Votre livre (une belle construction !) est à la fois réaliste et poétique (que de nombreuses et belles comparaisons ! Un débordement de senteurs, de pigments minéraux…) J'ai aimé que la musique (aussi bien celle, baroque qui habille le salon de teintes chaudes et colorées, que le chant de l'alouette ou celle des mots), cette « déesse qui possède le don de tout transformer en autant de dieux à chaque écoute » et le cinéma (
Otto Preminger, Godard,
Lelouch), ces illusions salutaires, reviennent en leitmotive. Sans parler des récits de rêves et des références à la mythologie grecque.
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J'ai beaucoup aimé le personnage de Max, ce Minotaure dont la maison est un dédale. Ce Cerbère est en quelque sorte le vieux sage, le gardien du seuil, le principe de connaissance. Lui qui a fait voeu de silence (je montre aussi l'importance de celui-ci dans mon deuxième livre, « Dans le silence de Mila »), est l'homme intérieur, celui dont le mutisme invite à la réflexion, celui auquel l'autre, poussé à se confesser, a recours.
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Et j'ai aimé Ariane, obsédante Blanche-Neige au pouvoir mystérieux de transformer, cultiver et ennoblir l'autre (Teddy, en particulier), de libérer sa puissance sexuelle avec sa caresse musicale. Comme le dit Frédéric, Ariane Icard, il fallait le faire !
Ariane n'est pas Iseult qui meurt avec Tristan. Malgré sa relation malade à sa mère, malgré la mort du père de son fils, cette astucieuse Isis découvre une énergie nouvelle dans une autre relation amoureuse. Elle a la rage de vivre des émigrés. Elle est la vie (Vous montrez bien l'importance des mères qui sont la sève et le sang). A la fin du livre, l'enchantement est levé. L'énergique Ariane, a vaincu le néant. Elle a donné la vie. Elle a donné un nom à son enfant.
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L'apparent processus de destruction est devenu créateur.
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Et Max libèrera son cri.
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Et, à la chute des bûches, succèdera l'arbre de vie.
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Et vous, vous avez atteint la vérité, cette vérité « qui étend ses tentacules jusqu'aux tréfonds du corps », cette vérité qui, finit toujours par faire grandir.