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EAN : 9782924898512
224 pages
La Peuplade (27/02/2020)
3.76/5   205 notes
Résumé :
V. vient d'apprendre que l'on a retrouvé le corps sans vie de sa mère dans le ressac des vagues d'une plage non loin de la maison familiale. Elle quitte brusquement Montréal, direction la Gaspésie, terre natale, où elle retrouve sa soeur et sa tante, les « survivantes » de sa mère, cette femme fragile, instable, sauvage, qui a laissé une marque indélébile sur ses filles. En faisant le tri dans les affaires de la défunte, V. découvre de vieux cahiers contenant les jo... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (59) Voir plus Ajouter une critique
3,76

sur 205 notes
« J'ai l'automne à l'envers. En dedans au lieu d'en dehors. Humide, tiède dans le creux des joues. Du vent qui craque dans la cage thoracique.
C'est octobre.
Ma mère est morte et j'ai pas encore pleuré. »

Voici comment s'ouvre ce roman. Comme une éclipse d'une vision qui hantera à jamais l'auteure.

Voyage introspectif dans les eaux troubles de la maternité, ses silences, ses non-dits, ses apocalypses.

Au rivage des falaises de Gaspésie au Quebec, la mère de l'auteure est retrouvée morte telle une sirène échouée. Nul doute n'est permis. C'est un suicide. V. nous livre ici un texte hypnotisant d'une mère au bord du naufrage tout le long de sa vie, une femme ayant toujours préféré partir le plus loin possible. Toujours plus loin.
Ça la rassurait, trouver le chaos ailleurs. S'assurer qu'on existe encore à l'autre bout du monde.

Ce livre, ce sont quelques bribes poétiques, toujours immergées dans l'eau des falaises. Des éclipses temporelles, des émois de femmes, de deux soeurs, de deux corps à corps. Des tentatives pour accrocher l'oxygène, gonfler ses poumons d'instantanés quand reviennent en carambole les souvenirs.

Le roman s'entrecoupe des pages manuscrites de la grand mère, au temps où elle portait son enfant, la mère de l'auteure.
On devine une souffrance intergénérationnelle, un fardeau de mère en fille, une souffrance latente.

Les larmes sont au bord du coeur, retenues dans les eaux froides de Gaspésie. On entend les fantômes murmurer les chants des défunts, on voit des sirènes couler loin des bras aimants des marins, les falaises enlèvent, réveillent, retiennent et sondent les coeurs tristes.
Les falaises au bord des lèvres pour distiller l'encens de ces amours qui jamais ne s'éteignent.

Un premier roman hypnotisant à souhait, d'une rare beauté où viennent se perdre quelques mots québécois pas toujours évidents à comprendre, un langage à la fois fort, brûlant et jeune avec ces phrases abruptes sans négation, flottant entre poésie et regards acerbes.
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Une narratrice, V. . Son « je » pour dire la mort de la mère. Déjà lu. Certes. Mais là où ce premier roman impressionne, c'est par la profondeur du traitement de ce thème, juste par la grâce d'une écriture enthousiasmante qui transcende la petite chose intimiste.

Virginie Dechamplain écrit en français mais c'est comme si elle écrivait dans une autre langue, et pas uniquement parce qu'elle utilise du parler québécois. Ses mots sentent la Gaspésie, cette presqu'île sauvage où la mère de la narratrice a été retrouvée morte, suicidée. Ils sentent l'iode, les embruns, le souffle du vent, le vertige des falaises, aux confins de la poésie : «  le Saint-Laurent jusqu'à l'échine », « l'air salin comme une ligne de coke ».

Tout devient sensation, les mots percutent avec énergie et emporte le lecteur dans un vortex d'émotions dans ce roman-tempête, à l'image du ressenti de la narratrice. Pour combler le trou béant laissé par la mort de sa mère, pour lui pardonner de l'avoir abandonné aussi, elle doit se réapproprier l'histoire de sa lignée : celle de sa mère bien sûr, mais aussi celle de sa grand-mère maternelle originaire d'Islande dont elle retrouve les carnets.

«  Je suis prise dans ma grand-mère. Dans son fleuve de mots. Je suis pas capable de décrocher d'elle. de sa mémoire. de ses doigts serrés sur son stylo. du bruit qu'elle fait en écrivant quand tout le monde dort. C'est comme tourner un couteau dans le passé. Gosser ( « sculpter dans du bois » ) dans la plaie pour l'agrandir.
Je l'entends. Partout. Et soudain elle me manque, ma grand-mère. Elle me manque d'avoir pas été là. J'entends sa voix quand je lis ses mots. Sa voix que j'ai jamais entendue. Sa voix rauque, qui finit ses phrases abruptes. Rauque, mais qui chante.  Une voix du Nord un peu triste. Je file d'un cahier à l'autre, dévore les années où on s'est manquées. Comme deux trains qui se croisent à toute vitesse et font trembler la campagne alentours. »

La résilience passe par l'archéologie familiale, une très belle idée, qui apporte du romanesque à un roman très introspectif. Les souvenirs jaillissent et apaisent la colère de la perte. le texte se fait cathartique et sa lumière réchauffe, pas uniquement le coeur de V. Les larmes, après s'être écrasées avec les poings, se sèchent dans la douceur.
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" Je cherche ma mère ma grand-mère ma galaxie de femmes. Éparpillées dans le monde, j'essaie de les retracer"...

Un premier roman d'une auteure canadienne très prenant, émouvant. Une quête difficile de la narratrice , revenue au bord du Saint-Laurent, là où sa mère s'est jetée d'une falaise. Elle reste au milieu de la maison maternelle , île -refuge, pour la vider, mais surtout pour comprendre ce vide en elle. Des souvenirs affluent, pas toujours agréables, et façonnent pour le lecteur une figure maternelle en fuite, proche de la folie, ayant laissé des traumatismes chez ses deux filles.

le texte est entrecoupé d'extraits des journaux intimes de la grand-mère, d'origine islandaise, et de courts poèmes inaugurant chaque chapitre.

Outre ces destins singuliers de femmes rebelles, apatrides, ce qui attire et retient le lecteur, c'est l'écriture. Pas vraiment les expressions canadiennes, même si elles sont savoureuses. Non, c'est l'aspect brut,sauvage, poétique qui saisit. Et provoque l'émotion. Parlant de sa soeur, elle écrit:

" Je regarde Ana. Ses yeux de feux de forêt,. de rivières qui sont sorties de leur lit. Ses cheveux toujous mêlés. Ses mains qui tremblent subtilement. Je regarde les fêlures dans sa façade. "

Il faudra un départ pour l'Islande, l'île des origines, pour, peut-être, se trouver et conjurer le passé, s'accorder douceur et apaisement... Un bien beau premier roman!
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Un livre sur le temps qui passe, la transmission entre générations. La narratrice V est de retour dans la maison familiale suite au suicide de sa mère, c'est le moment de faire le ménage, mais les blessures du passé non cicatrisées réapparaissent.
Un livre qui se lit avec le ventre, avec palpitation, un premier roman qui secoue le plus intime et une fois le livre commencé, impossible de s'arrêter avant d'assembler toutes les pièces du puzzle . Les chapitres sont courts, entrecoupés d'apartés poétiques, des carnets de la grand-mère que V a retrouvé et dont elle s'est entourée. Il va falloir réapprendre à vivre, prendre son envol en se réappropriant les vertiges intérieurs, et aussi entreprendre un retour au pays natal de la grand-mère l'Islande.
Un roman puissant, hypnotisant, j'ai adorée !!!!
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La mort d'une mère, probablement un suicide, car elle est tombée dans le fleuve, du haut des falaises…

Un récit comme un journal tenu par sa fille, pour comprendre, pour se raconter, pour accepter.

La vie avec sa mère, une vie de bohème, voyageuse et psychologiquement instable, une enfance toujours au bord de l'intervention des services sociaux.

Puis le deuil, faire le ménage de la maison qu'il faut vider, faire le ménage de ses souvenirs et de son coeur qu'il faut apaiser.

Apprendre à vivre sans remords, sans culpabilité.

Et la guérison demandera de se tourner vers d'autres lieux et d'explorer d'autres falaises…

Un roman plein d'émotions, avec une écriture qui emploie le langage parlé, mais aussi une belle profondeur poétique.
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Citations et extraits (61) Voir plus Ajouter une citation
Rester calme. Comme toujours. Ma plus grande qualité. Mon plus grand défaut. Rester calme. En tout temps, rester calme. Respirer de partout. Pour les autres, pour tout le monde. En photosynthèse, presque. Un sapin du Grand Nord. Des fois j’aimerais qu’il y ait quelqu’un d’autre qui respire pour moi. 
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je cherche les cerisiers

un goût de grands espaces dans le fond de la bouche

comme un mal de cœur qui passe pas

comment on fait pour s’évader 

quand on est déjà à l’autre bout du monde 
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Des fois j’aimerais ça me rappeler des choses que je me rappelle pas. Comme ma naissance. La première chose que j’ai vue. La première chose qui m’a fait rire. Qui m’a fait pleurer pour vrai. La première fois que j’ai eu mal. J’aimerais aussi avoir pris une photo mentale de moi pendant des moments importants pour pouvoir me les rappeler quand je vais être vieille. Je prends pas la peine de me souvenir de moi. De quoi j’avais l’air en dedans quand je suis tombée en amour. À quel âge j’ai eu peur de mourir pour la première fois. Et toutes les autres. Les fois où je me suis perdue, les fois où je suis partie, celles où j’aurais voulu rester.
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Tu viens de partir de la maison.
Tu ne retourneras pas à l'école cet automne.
Tu t'es acheté un billet simple pour l'Europe avec les économies que tu as faites en travaillant au bar du village.
Tu ne me reviendras pas.
Tes frères ne tarderont pas .Vous finirez tous par partir, pour trouver un autre bout du monde où le temps avance dans la bonne direction.

J'ai peur pour toi, un peu. J'ai peur que le monde ne soit pas prêt pour toi. Je t'ai regardée partir et j'ai su à l'instant où tu mettais le pied sur la marche de l'autobus que tu n'arrêterais pas. Que tu avais un souffle dans la poitrine qui avait besoin d être assouvi. Un besoin de mouvement qui te grugeait depuis toujours. Peut-être l'as tu découvert à ce moment-là toi aussi.
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J'attends qu'il fasse noir pour qu'on se voie moins un peu. J'attends qu'il fasse noir et je défais ses bretelles . Détricote son chandail. Détricote ses cheveux attachés sur sa nuque, les laisse glisser sur mes joues. La laisse glisser sur mes joues. Les mains enfiévrées les doigts araignées d'eau. J''échappe ses taches de rousseur sur le plancher.Ses dents accrochées dans les recoins sensibles de mon cou.
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Vidéo de Virginie DeChamplain
Au programme de cet épisode, deux livres, écrits par des femmes (oui, oui, il y en a plus que vous ne le pensez) et qui traitent de la figure maternelle dans leur vie. A travers le deuil avec "Les falaises" de Virginie Dechamplain (éditions La Peuplade) et à travers une enfance mouvementée et chaotique avec "Basse naissance" de Kerry Hudson (éditions Philippe Rey)
Générique et sound design : Gampopa
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