Pour l'heure, le "partenariat transatlantique" va bon train et "l'Europe" des artifices défait l'Europe profonde. Mue après guerre par les meilleures intentions du monde, à l'abri d'une paix gagnée par la dissuasion nucléaire et l'équilibre des deux blocs, le beau projet fut bientôt l'otage d'une idée naïve : qu'une Cour de Justice et un marché libre peuvent fabriquer un peuple, comme une monnaie unique un réflexe de solidarité et des directives, un sentiment d'appartenance. D'où est sortie une auberge espagnole où la langue anglaise fait loi, tout entière acquise aux forces du marché, que l'on voit reféodaliser les espaces nationaux, mettant les pouvoirs publics, ou ce qu'il en reste, sous la coupe d'empires financiers privés et de lobbies voraces.
Le grand atout de la pensée politique occidentale est qu'elle n'est jamais figée dans le ciment et qu'elle sait parfois évoluer. Elle reste fille de la Liberté. Quand l'électorat américain eut compris que la politique proche-orientale de Georges W. Bush menait à une impasse, il changea de cap à 180° pour confier l'exécutif à Barack Obama, l'exact opposé de son prédécesseur.
Qu'on le veuille ou non, on assiste aujourd'hui en Occident au reflux de la politique de l'émotion et au grand retour de la Realpolitik.
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