Après avoir lu
La pendue de Londres, puis
le bureau des jardins et des étangs, voici un excellent moment d'évasion avec
La promeneuse d'oiseaux.
Didier Decoin, quel écrivain ! Quel conteur au formidable pouvoir d'évocation ! du pur bonheur d'imagination et de mots. « La vraie vie est ailleurs » pourrait dire cette jeune fille en butte à bien des malheurs mais qui continue à rêver sa vie malgré des parents recroquevillés sur leurs habitudes ancestrales dans l'isolement de cette île exiguë.
Voici l'histoire en quelques mots. En 1880, dans l'île anglo-normande d'Alderney, non loin de Guernesey. A la suite d'un accident, Sarah
McNeil a presque perdu l'usage de sa voix et vit dans la solitude des landes. Jusqu'à ce que deux évènements bousculent sa vie : la découverte d'une histoire d'amour, rapportée par la gazette d'Edimbourg, et la rencontre d'un maraîcher français nommé Gaudion, dont le bateau s'est échoué sur la côte. Un baiser plus tard, l'homme exposé à l'hostilité des soldats de l'île, doit repartir. Pour le retrouver la jeune fille usera de tous les stratagèmes. de Londres à Trouville, puis à la prison de Pont-l'Évêque, l'amour fantasmé de Sarah cherche, à force de courage, à s'attirer un destin plus favorable. Chaque personnage rencontré dans son périple est quasi inoubliable tant il représente une facette du genre humain : Hermie le garçon vacher, Gaudion le capitaine du bateau échoué sur l'île, M. Pook l'étrange empailleur, Nicolas Dunglewood le graveur de tombes, Marie le Faoûet la bonne pessimiste en tout et Soeur Véronique la religieuse amoureuse et prosélyte de Dieu.
Sarah McNeill, au filet de voix si ténu, a des difficultés à se faire entendre, ce qui l'amène à vivre intensément sa vie intérieure.
Elle n'est pas allée à l'école, c'est son père qui a tenu à lui faire lui-même son éducation en commentant tous les deux les journaux. Son intelligence et sa sensibilité sont évidentes, elle possède aussi une grande naïveté qui la pousse à toutes les péripéties, souvent improbables mais toujours palpitantes sous la plume efficace et poétique de
Didier Decoin. Il faut lire ce livre en se laissant happer par la surprise permanente, sans pouvoir anticiper la suite, jusqu'au point final.
Sarah est l'oie blanche, n'hésitant pas à suivre des personnages douteux, attirés par sa beauté et sa sensualité, réussissant malgré tout à se sortir des situations difficiles et continuant son périple avant de revenir comme Ulysse sur son île natale.
Roman d'aventure maritime, de voyage, roman initiatique, il y a de tout cela et avant tout le goût de conter des histoires, les mots, les phrases attirant d'autres phrases vers d'autres lieux et de nouveaux personnages. Attention, il faut être vigilant sur les pistes laissées par
Didier Decoin, surtout à la fin... Je connais des lecteurs qui sont passés à côté du dénouement et c'est bien dommage ! C'est un livre plaisant qui m'a beaucoup amusé. Quel titre magnifique !
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Visitez le blog Bibliofeel afin d'accéder à la photo de la très belle couverture du livre placé au milieu d'une composition florale printanière, et aussi à une illustration sonore avec les "chanteurs d'oiseaux" accompagnés au violon et piano, une curiosité... La passion et le talent !
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