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Critique de Charybde2


Talent ethnographique et prodigieuse culture africaine pour décrire les traditions actuelles...

Médecin de profession, célébré pour son grand roman africain "La mémoire du fleuve" en 1984, Christian Dedet publiait en 2000 ce récit-essai, fruit d'un long séjour au Bénin dans les années 1993-1995, durant lequel il se penchait sur le puissant mouvement de "revival" du vodoun et de la royauté (pas uniquement cérémoniale) d'Abomey, sous le régime Soglo, après la fin du "marxisme-léninisme" de Kérékou.

Avec un réel talent ethnographique, et une affectation de distance voire de cynisme plutôt bienvenue, l'auteur sait aussi bien entrer dans les détails du vu et du vécu, souvent bien étonnants, que dans les comparaisons et réflexions astucieuses, nourries d'une prodigieuse culture africaine.

Pour finir par quelques professions de foi sur la nature de son engagement dans ce continent : "On me demande parfois ce qui m'attire, tout près de l'équateur. Médecine ou littérature, j'avance des arguments raisonnables. Comment faire admettre à des gens bien programmés que l'on poursuit, au-delà des limites permises, un rêve adolescent ? Loin des utilités et des calculs qui nous enchaînent à milles lieues de nous-même, je m'y promène depuis vingt ans dans la jubilation d'un retour aux émotions primordiales.
Il y a tellement d'Afriques ! Elles sont si pleines de couleurs, de rumeurs, de bigarrures, de musiques envoûtantes, d'odeurs vigoureuses et superbes, de rythmes qui courent dans les hanches et dans les voix ! Afrique des anges tutélaires, soudain surgie de n'importe quelle banlieue, quand j'entends Angélique Kidjo, ce petit diamant de la chanson noire, cette sombre et profonde flamme en transe perpétuelle lancer en langue fon, comme si elle s'adressait aux foules de Cotonou : "Je suis partie depuis si longtemps que je me demande si le son des tambours possède le même pouvoir."
Afriques des grands espaces, de la savane, des forêts, de la plongée dans les masses, des épopées imprévisibles, des sociétés métissées, des anciens empires du Mali, des vaudous sages ou turbulents, des fantômes de l'hémisphère austral, des beautés somaliennes, souriantes ou impavides, des chefferies, des riyautés de sang et d'or ayant survécu aux envahisseurs et se perpétuant à la barbe du siècle... C'est ce foisonnement qui m'aura entraîné - péché capital ? - à recomposer après coup, sans grande méthode, ni fil conducteur trop astreignant, la part béninoise de mes fééries.
À moins que ce soit l'âge, lui encore, qui incite à une autre sagesse et me donne à penser que ce ne sont décidément pas les Africains qui déraisonnent ?"
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