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Bernard-Henri Gausseron (Traducteur)François Rivière (Auteur de la postface, du colophon, etc.)
EAN : 9782862604541
431 pages
Autrement (08/03/1999)
3.12/5   21 notes
Résumé :
Née à Poitiers, de parents protestants, Roxane est venue en Angleterre en 1683 avec ses parents qui fuyaient devant la persécution. Très belle, elle épouse à quinze ans un riche brasseur. Après huit ans d'une vie assez brillante, son mari prend la fuite pour éviter la faillite. La jeune femme est réduite à la misère. Elle confie ses enfants à ses beaux-parents et devient la maîtresse de son propriétaire, sa servante, Amy, jouant le rôle décisif de l'entremetteuse. L... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
“J'aime mieux un vice commode qu'une fatigante vertu.”
(Molière, "Amphitryon")

Surprenant Defoe. D'après le peu que j'ai pu lire de ses textes ou apprendre à son sujet, c'était un personnage assez original. Il n'est pas aisé de le comprendre, ni humainement, ni littérairement... ou, pour m'exprimer autrement : à l'exception de "Robinson Crusoé" (et même ici j'hésite), je ne sais toujours pas comment me saisir de son oeuvre.
Plusieurs couches successives de plusieurs réalités se superposent dans les textes de Defoe. C'était un filou. Sa prédisposition à jongler librement avec les chiffres (que ce soient les montants ou les dates) pourrait partiellement expliquer sa propre faillite commerciale. Son talent pour mener le lecteur par le bout du nez pourrait nous éclairer sur les raisons de sa réussite sociale, qui a atteint son apothéose au service de l'espionnage d'Etat. Et cette image d'homme-caméléon est encore rehaussée par les 198 pseudonymes divers que Defoe utilisa durant sa carrière de pamphlétaire et d'écrivain.

J'aurais pu m'épargner cette introduction, mais elle me semble utile pour aborder "Lady Roxana ou L'Heureuse maîtresse" (accessoirement "L'Heureuse catin" - ancienne traduction bien commode pour éviter un mauvais choix de cadeau pour la pédagogue de votre pitchoun à la fin de l'année scolaire).
Cette "confession", ou plutôt l'autobiographie fictive d'une femme déchue (déçue ?) est présentée comme un seul long chapitre dans sa version originale. Malgré tout ce que j'aurais pu lui reprocher (retours et répétitions à profusion, pages interminables de calculs et combines pour accroître une fortune...), l'histoire était captivante et m'a fait brasser tout un tas d'émotions intéressantes. Roxana, dont le lecteur n'apprendra jamais le prénom véritable (tout comme pour les autres noms, titres, lieux...) est une protagoniste qui a réussi à changer avec succès mes sympathies initiales en mépris et en dégoût absolus, au fur et à mesure de ses déboires.

C'est un roman sur les causes et les conséquences. Sur la vanité et les ambitions démesurées. Sur les tristes tentatives de justifier ses (mé)faits devant les autres et devant soi-même. Sur la société, le mariage et la liberté, l'indépendance, l'égalité. Sur le fait que les mensonges rattrapent toujours le menteur. Sur l'hypocrisie, la morale et la moralité. le récit roule comme une boule de neige, en ramassant au passage de nombreuses réflexions qui s'attaquent au statu quo de la société, mais aussi un tas d'immondices bien puantes qui collent au caractère de la pauvre Roxana.
La narratrice, qui touche le fond suite à son premier mariage malheureux avec un abruti et transgresse la frontière du "moralement acceptable", inspire la même compassion que sa soeur ainée "Moll Flanders", ou le personnage de Nancy dans "Oliver Twist"... mais elle se complaît tellement à cultiver son vicieux jardin secret que bientôt on pense davantage à "Fanny Hill" de Cleland. Ses ambitions pécuniaires et son avidité de titres de noblesse ne sont pas sans rappeler la cour de Charles II Stuart dans toute sa splendeur. Tout ceci va culminer par la transformation de Roxana en monstre manipulateur qui négocie avec sa conscience, ment à tout le monde, intrigue devant son mari et renie ses propres enfants. Ces passages sont délectables.

Mais même Roxana, aussi belle et astucieuse qu'elle soit, n'irait pas loin sans sa fidèle servante Amy. Ce petit bout de femme est vraiment brutal ! Sur son cas, Defoe illustre à la perfection la transformation d'une jeune fille joyeuse au grand coeur en créature angoissante, qui fera tout et n'importe quoi pour préserver le bonheur de sa maîtresse. Avec chaque page tournée, et particulièrement vers la fin, la situation devient de plus en plus dramatique. Notamment avec l'apparition de Susan, dont la perspicacité et le désir de connaître sa propre mère menace la liberté et l'existence même de la protagoniste principale.
Ma foi, la fin est tellement turbulente que j'ai presque oublié de mentionner le fait que Defoe imbrique dans son livre une rude critique de la société contemporaine, ainsi qu'une anticipation des choses à venir. Il n'hésite pas à s'attaquer aux désavantages de l'institution du mariage, et fait appel à la libération de la gent féminine ; chose surprenante en 1724. A ce sujet, je recommande la passionnante disputation entre Roxana et son "ami de Paris"("Roxanne, You don't have to put on the red light"), sur le thème de l'indépendance de la femme - l'indépendance sociale, financière, amoureuse... pour démontrer qu'au 18ème siècle, le prix à payer était encore beaucoup trop grand ! Defoe n'hésite pas non plus à taper sur les doigts des commerçants juifs ; mais j'y vois plutôt le reflet de la littérature ancienne que quelque règlement de comptes personnel. Parlant de commerçants, la clairvoyance de l'auteur qui anticipe une société où les "businessmen" dépasseront en fortune et en influence l'ancienne noblesse est tout aussi remarquable.

Le style plutôt plat de Defoe n'arrive pas à la cheville d'un Sterne ou d'un Smollett, mais malgré tout ce fut une chevauchée littéraire sans selle et sans bride à travers l'Angleterre, la France et la Hollande que je ne regrette pas... 3,5/5
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Ah Roxana... Classique du 18ème anglais, pas ma période de prédilection... Ce roman est attribué à Defoe, célèbre surtout pour son Robinson Crusoe - qui n'avait déjà pas été une partie de plaisir, et ma foi, il en fut de même pour celui-ci.
Cette fois-ci, comme dans Moll Flanders, Defoe dépeint une femme. Celle-ci, à l'inverse de Moll Flanders, est issue de la bourgeoisie marchande (dans l'auteur lui-même est issu) et d'origine française huguenote (Defoe aussi était protestant), délaissée par son mari et ses enfants qui en vient à monnayer ses charmes pour survivre. Débute alors une grande carrière de courtisane, pas très morale, mais bien à la mode libertine du 18ème anglais - on oublit que Londres était LA capitale des bordels en tous genres, pour toutes les classes sociales bien avant l'ère victorienne, en réaction au rigorisme puritain du 17ème.

Souvent présenté comme un roman social et pré-féministe, on se demande parfois si , à l'instar de Flaubert, Defoe aurait pu affirmer "Roxana, c'est moi" bien qu'il entretienne un rapport ambigu à son personnage qui devient riche grâce à son sens des affaires et les rentes et cadeaux que lui offrent ses amants.
Mais c'est surtout un personnage très orgueilleux, vaniteux et faux. le tout mêlé dans un récit opaque (pas de chapitrage!) et creux (très mal écrit!) qui ont rendu cette lecture bien pénible.
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Roxana est née à Poitiers et revenue très jeune dans le pays d'origine de ses géniteurs anglais (en 1683 pour cause de protestantisme). Mariée adolescente à un idiot patenté (fils d'un riche brasseur qui dilapida l'argent de l'entreprise avant de l'abandonner), elle se retrouva seule et sans ressources avec leurs cinq enfants - dont l'aîné n'avait pas dix ans. La soeur de son mari, (femme égoïste et cruelle) refusant de lui venir en aide, ce fut l'époux de cette dernière, fort heureusement un brave homme, qui décida de lui imposer cet acte charitable et les pris d'office en charge.

Restée seule avec sa fidèle servante Amy, elle fut prise en pitié par son logeur, très amoureux de sa personne, qui en fit sa maîtresse et l'entretint (hélas il mourut assassiné lors de leur séjour à Paris, lui laissant toutefois une fortune en bijoux).
Roxana passera alors sous la protection d'un Prince français. Il faut dire que sa beauté n'a pas son égal et attire toutes les convoitises ! Après huit grossesses (elle aura trois enfants avec lui) elle a conservé un corps de déesse et une peau de pêche ! Malheureusement, à la mort de la Princesse son épouse, il se retirera en repentance ...
Un troisième amant entrera alors dans sa vie : un marchand hollandais qui protègera sa fortune (eh oui, à l'époque les femmes ne pouvaient utiliser les services bancaires d'aujourd'hui en toute tranquillité !...) Elle finira par l'épouser après la naissance de leur fils, son neuvième enfant. Entretemps, Lady Roxana, honteuse de sa vie considérée comme dépravée, cherchera à savoir ce que sont devenus les cinq premiers enfants (qui eux ont eu une jeunesse particulièrement difficile !)
Un superbe récit de Daniel Defoe, édité en 1724, se déroulant entre Londres, Paris, la Hollande et Venise, vraiment passionnant et relativement “moderne” pour l'époque ! Un gros coup de coeur cette fois !
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Cette lecture confirme ce que je savais déjà : je ne suis pas amatrice de la littérature classique en général.
Je trouve qu'il y a beaucoup trop de redondances et la fin évasive après tant de circonvolutions me laisse... sur ma faim.
Lady Roxana, ou l'histoire d'une femme devenue catin d'abord par nécessité et ensuite par goût du luxe ainsi obtenu... On pourrait presque en faire une histoire moderne.
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Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
D'un autre côté, il y a tant de sortes de sots, une si infinie variété de sots, et il est si difficile de savoir lequel est le pire de l'espèce, que je suis obligée de vous dire : Pas de sot, mesdemoiselles, absolument aucune espèce de sot, sot furieux ou sot modéré, sot sage ou sot idiot ; prenez n'importe quoi si ce n'est un sot ; bien plus, soyez n'importe quoi vous-même, soyez même vieille fille, la pire des malédictions de la nature, plutôt que de ramasser un sot.
Mais laissons cela un moment, car j'aurai l'occasion d'en reparler. Mon cas était particulièrement pénible, et je trouvais, dans cette malheureuse union, toute une complication de sottises variées.
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Je voyais qu'une femme est traitée avec indifférence, une maîtresse avec une affection passionnée. On regarde une femme omme une servante d'un ordre supérieur, une maîtresse est une souveraine ; une femme doit abandonner tout ce qu'elle a, se sentir reprocher toutes les réserves qu'elle stipule pour elle, et être grondée même pour l'argent de ses épingles ; une maîtresse, au contraire, prouve la vérité due ce dicton qu'elle a ce que l'homme possède, et que ce qu'elle possède personne autre qu'elle ne l'a ; la femme supporte mille outrages et est forcée de rester tranquille et des supporter, ou de partir et de se perdre; une maîtresse insultée se défend elle-même aussitôt et prend un autre amant.
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Je croyais que la femme était un être libre, aussi bien que l'homme ; qu'elle était née libre, et que, si elle savait se conduire convenablement, elle pouvait jouir de cette liberté avec autant de profit que le font les hommes. Mais les lois du mariage étaient faites autrement, et, cette fois, le genre humain avait agi par des principes tout autres, à ce point qu'une femme en se mariant abandonnait entièrement la libre possession d'elle-même et ne se réservait tout au plus que d'être une servante d'un ordre supérieur. [...] La véritable nature du contrat matrimonial n'était, en somme, rien d'autre que l'abandon de liberté, des biens, de l'autorité, de tout à l'homme, et la femme n'était plus véritablement dès lors qu'une simple femme à tout jamais, c'est-à-dire une esclave.
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Mais je ne pouvais m'empêcher parfois de jeter avec étonnement un regard en arrière sur la folie des gens de qualité qui, immenses dans leur générosité comme dans leur richesse, donnent à profusion et sans connaître de bornes aux plus scandaleuses personnes de notre sexe, pour qu'elles leur accordent la liberté de s'abuser eux-mêmes et de se perdre avec elles.
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...prévoyant que s'il ne le faisait pas à temps , il serait forcé d'une autre manière , je veux dire en faisant banqueroute .
De mon côté , je ne demandais pas mieux qu'il s'en retirât pendant qu'il lui restait encore quelque chose , de peur de me retrouver dépouillée dans ma propre maison et mise à la porte avec mes enfants ; car j'avais maintenant cinq enfants . C'est le seul ouvrage , peut-être , à quoi les sots sont bons .
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Videos de Daniel Defoe (15) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Daniel Defoe
Journal de l'année de la peste de Daniel Defoe et Gérald Duchemin aux éditions du Chat Rouge
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