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EAN : 9782749534978
239 pages
Breal (25/03/2016)
5/5   1 notes
Résumé :
Marie-Claude Defores et Yvan Piedimonte sont psychanalystes. Ils ont travaillé avec Françoise Dolto au sein de l'école freudienne dirigée par Jacques Lacan. Leur recherche est issue d'une longue expérience acquise en cabinet et dans des institutions traitant les troubles de l'enfant, de l'adulte et les problématiques familiales et sociales. Leur approche de l'inconscient ouvre de nouvelles perspectives cliniques dans le domaine des troubles psychiques.

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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Ce livre s'intéresse au projet humain inscrit dans l'inconscient de chacun et aux obstacles quant à sa réalisation.
L'inconscient est vu à la fois comme ignorance et savoir potentiel :
• Ignorance due au processus de refoulement d'expériences douloureuses et non intégrables.
• Savoir latent, profond, mémoire de l'âme, de ce qu'on a toujours su sans le savoir.
Ceci est en écho avec ce que dit Freud sur les deux variétés de l'inconscient.
Il s'agit de rendre conscient ce savoir en le symbolisant pour l'incarner, cette symbolisation ne peut se faire que dans la rencontre avec autrui, aussi bien pour l'enfant, qui a besoin d'être éclairé par l'adulte, que pour le patient, invité par l'analyste à reconnaître ses ombres.
Pour ces psychanalystes, la voie royale de l'inconscient au conscient est la transformation de la perception par l'âme (sensation interne et image) en processus de pensée, ceci aussi bien pour le rêve que pour le ressenti. Cette transformation s'opère avec la prise en compte de l'Image Inconsciente du Corps en lien avec le concept vivant introduit par Françoise Dolto. le ressenti à l'état diurne est l'équivalent du rêve à l'état nocturne et permet par son élaboration le passage du conscient à l'inconscient.
Le livre est composé comme un guide permettant de se repérer quant à la mise en conscience pour relier les différentes dimensions de l'être : corps-âme-esprit. Selon les situations l'être se désarticule : douleur, souffrance, non perception, mise en auto ignorance ou refoulement qui allant jusqu'à la dissociation altère l'unité de l'être. L'âme, définie comme centre organisateur de l'être (Freud), doit symboliser les éléments de réalité de ces trois dimensions. L'âme peut être présente ou mise en absence, en éclipse par intermittence du fait de la décision du moi corporel.

Exemple issu de ma pratique à l'hôpital :
Un patient plafonnant, ne voulant pas venir à l'atelier d'ergothérapie me dit que « son âme est partie du corps ». Après quelques échanges, il évoque la promiscuité dans le pavillon, la sensation d'être vidé par les demandes exigeantes d'un autre patient, il parle alors de vampirisme* (ce patient est aussi hémophile). A force de partage de mots et sensations, son regard redevient habité, son âme se réapproprie son corps et il accepte de venir à l'atelier.

« L'âme en s'appuyant sur l'énergie du corps, la pulsion et en s'irriguant à celle de l'esprit, va permettre que se rencontrent ces deux énergies pour donner l'énergie du désir » (p212).

Les traumatismes, les empreintes traumatiques, laissent des trous de consciences, des vides qui se manifestent par des images inconscientes du corps universelles développées dans le livre (image du mur, de la cage, de l'abime et précipice, de la vrille....). Pour supporter le vide et se sentir exister, la personne peut compenser dans des circuits courts de jouissance (besoin irrépressible d'achat, drogue, sexualité anonyme et compulsive ...).
Les auteurs disent que la dissociation ne se supprime pas mais se dépasse par un gain de conscience, que la perception du trou de conscience est déjà une avancée. Ma compréhension est que tourner autour du pot et le savoir vide est déjà une avancée pour y cultiver quelque chose.

Plus que dans une simple ignorance, la perversion est dans l'intention de brouiller les repères et de créer de la confusion. le mensonge, qui est l'arme de la perversion, est décomposé ici en deux opérations mentales quasi simultanées : acte de déni d'une réalité, puis recouvrement de cette même réalité par une définition illusoire, contrefaçon de la réalité qui s'impose comme une croyance. le mensonge peut aller jusqu'à nier la perception et la falsifier.
La perversion peut s'ériger en système idéologique et toucher à la grammaire humaine articulée à la grammaire universelle. Les auteurs illustrent ce système qui est dans la volonté de déstructurer la langue par les principes de la novlangue du roman 1984 de Orwell (p176). Ce système est un ensemble de stratégies qui vise à tordre la langue en supprimant des mots, en englobant différentes réalités dans un mot fourre-tout et en créant des abréviations rendant la réalité abstraite pour instaurer un interdit de penser en disqualifiant le ressenti. Cet interdit n'est jamais formulé, il s'exerce par pression psychique, physique et spirituelle pour dissuader chacun de s'exercer à cette noble activité spécifique de l'humain, la pensée. Il est difficile de ne pas être pris dans le labyrinthe d'une idéologie qui aboutit à cet énoncé que « le mensonge est la vérité ». C'est dans ce lien au fil d'Ariane, ressenti et mémoire, que le sujet peut s'orienter pour s'engager sur ce chemin qui se fait en marchant, c'est à dire le trajet de la symbolisation qui relie l'intention à la sensation, la sensation à l'image puis au mot.
Les auteurs insistent sur le rôle de l'image (bien différente du fantasme), qu'ils situent à l'articulation âme-esprit et aussi sur la sensation interne qu'ils situent à l'articulation âme-corps. Toute leur théorisation invite le thérapeute à porter son attention sur l'intérêt à symboliser à partir des images intérieures du rêve ou du dessin, car l'image, plus proche des processus primaires, est la langue de l'âme.

Exemple issu de ma pratique à l'hopital :
Une patiente (hors secteur, attendant une place dans le service de son secteur) venant à l'expression plastique en ergothérapie, va dessiner une silhouette humaine avec un trou noir dans le corps, cette forme humaine étant elle-même dans une cage. A partir de cette image, la patiente va évoquer une agression sexuelle subie, par son cousin, dont elle n'avait jamais parlée pour éviter que cette révélation n'ébranle trop brutalement le code moral familial. Il ne s'agissait pas ici d'un refoulement mais d'une impossibilité à énoncer. du fait de son départ le jour même du service, il s'agissait de dire qu'une psychothérapie pouvait l'aider et à transmettre à l'équipe et au psychiatre cette émergence de l'histoire du sujet.

A propos de la tripartition de l'être humain qui est au fondement de ce livre, deux termes sont invisibles pour les yeux du corps et ne sont peut-être qu'une vue de l'esprit, je pense à Freud à la fin de l'étude des Mémoires d'un névropathe : « l'avenir dira si la théorie contient plus de folie que je ne le voudrais, ou si la folie plus de vérité que d'autres ne sont disposés à le croire. »
Les auteurs manifestent une subtilité radicale dans le choix des mots lorsqu'ils distinguent clairement : le futur et l'avenir, l'intelligence et la pensée, l'équilibre et l'évolution, le désir et l'envie, le transfert et l'alliance, la jouissance d'organe, la jouissance perverse et la joie d'être, le rythme et la cadence, répéter et rejouer, l'extase et l'éveil, l'union et la fusion…
Les auteurs affirment que les fruits d'un véritable engagement dans une psychanalyse sont la connaissance et la constitution d'une intériorité. le livre ne sera peut-être pour certains que le reflet de l'intériorité des auteurs, mais il me rappelle le zen : « si vous observez l'intérieur de la même manière que l'extérieur, veuillez à ne pas faire de l'intérieur un extérieur ». le lecteur peut trouver dans la constitution de l'être une profondeur.


François Salvi


*Le livre comporte un glossaire, ainsi à Ethique-lois symboliques, on peut lire : « … ces lois sont universelles et fondatrices de l'identité humaine. Elles se donnent sous forme d'interdits :

- interdit du parasitage …
- interdit du cannibalisme physique mais surtout psychique. La transgression de cet interdit consiste dans le fait d'amener l'autre par pression et stratégie à s'autodestituer de son identité, c'est-à-dire se désincarner. C'est cette désincarnation qui apporte au prédateur un accroissement d'énergie. Il s'agit là de la position perverse. L'intention de la perversion est de produire cette désincarnation et de faire voler en éclats la fonction de discernement pour réinscrire l'autre dans une forme qui est la contrefaçon du projet humain, là où la haine prétend être de l'amour : c'est le vampirisme …
- … »
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Seules les relations qui se fondent sur la parité des sujets, tout en reconnaissant la disparité des places, amènent à l’experience De l’horizontalité.
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