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sur 388 notes
Les guerres de religion vont bientôt s'achever dans le royaume de France par la victoire du roi Henri IV, ce huguenot converti au catholicisme par nécessité politique. La ligue catholique qui refuse de reconnaître ce roi parjure, recule sur tous les fronts. Mais elle tient encore Marseille. le Henri IV de « Royaume de vent et de colères » ne ressemble pas à celui décrit dans nos livres d'histoire : le roi du panache blanc et de la poule au pot, le roi égrillard, le vert galant. C'est un roi olympien, un conquérant brutal et sans pitié. En bon stratège, il sait qu'une cité fortifiée a plus de chances de se prendre de l'intérieur par la trahison que par un assaut frontal. Approchée, la puissante guilde des assassins de la ville est grassement payée pour permettre à l'armée royale de pénétrer dans Marseille.
Voilà ! Tout est mis en place ; l'histoire peut commencer. Celle de toute une petite bande de spadassins, de politiques ondoyants et fourbes, d'amoureux transis, de mystiques acharnés, de magiciens consumés par leurs pouvoirs, d'hommes du commun pris dans cet engrenage infernal, qui vont tourner autour de ce complot jusqu'à ce qu'il s'accomplisse dans un bain de sang.
Ce livre, c'est une danse macabre ! Une sarabande funèbre qui réunit notre petite bande où chacun part à la rencontre de son destin, où la fin ne peut pas être heureuse.
Je ne suis pas prêt d'oublier le gosse des rues, Gabin sans « aime » qui protège des reitres Axelle, sa seconde mère, avec un espadon trop lourd pour lui ; ni Armand qui se consume d'amour pour Gille ; ni victoire la démone qui a des yeux de Chimène pour Gabriel, le vieux, meurtri et probe Chevalier si plein d'allure…
Le style simple et dépouillé, parfois crépusculaire, est chargé d'émotions. Je suis entré dans la danse, moi aussi, avec cette espérance, mais sans trop y croire quand même, que quelque-chose ou quelqu'un allait pouvoir modifier la partie jouée d'avance de « Royaume de vent et de colères ».


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Jean-Laurent del Socorro nous offre, pour son premier roman, une plongée dans un Royaume de Vent et de Colères, un opus plein de punch au coeur des guerres de religion du XVIe siècle marseillais.

Dans Royaume de Vent et de Colères, le lecteur se rend vite compte des deux plus grandes forces du récit : d'abord son contexte accrocheur, ensuite ses personnages réalistes. le contexte du roman nous emmène en 1596 au milieu de la cité phocéenne alors qu'elle est soumise depuis cinq ans au consulat ligueur de Charles de Casaulx. Celui-ci est en proie à l'isolement, tiraillé entre l'avancée inexorable du nouveau roi de France, Henri IV qui a renié le protestantisme, et la fuite plus ou moins volontaire de ses alliés catholiques ; toutefois, le consul de Marseille est loin d'être le personnage principal ici, voire même un personnage secondaire, bien au contraire. Dans ce pan d'histoire de France finalement peu connu, nous avons le plaisir de suivre avant tout deux femmes et deux hommes qui constituent les narrateurs en alternance : Victoire, l'archétype de la mafiosa assassine ; Axelle, l'ancienne mercenaire devenue tenancière ; Armand, prêtre et maître de l'Art-bon (seule composante magique du roman) accessoirement en fuite avec son compagnon Roland ; enfin, Gabriel, chevalier sans terres torturé par les remords qui sent que son heure est venue pour briller une dernière fois au combat, dont la prégnance physique est magnifiée par la couverture de Milek Jakubiec (je salue bien bas le réalisme de son graphisme). Ils constituent une galerie de personnages touchants auxquels le lecteur peut s'attacher facilement, galerie à laquelle s'ajoute Silas dont le rôle est primordial dans l'histoire en lui-même comme dans la façon de nous le narrer. C'est d'ailleurs clairement mon personnage préféré, puisqu'il compose finalement le personnage passe-partout, mais intrigant, dans l'histoire qui finit par persister le plus durablement dans mon esprit.

Si nous essayons d'analyser la structure de ce roman dans l' « ordre d'apparition », il faut reconnaître dès le départ que Jean-Laurent del Socorro happe son lecteur avec ses chapitres véritablement brefs. le fait d'utiliser constamment la 1ère personne du singulier y est pour beaucoup, évidemment, tout comme l'impression d'entrer directement dans une pièce de théâtre classique avec une unité de temps, de lieu et d'intrigue. Nous sommes dans un terrain potentiellement connu (même si vous n'êtes pas familier du contexte) et sur un terreau fertile pour l'organisation de l'imagination du lecteur. le rythme est pressé d'entrée de jeu et l'impression de laisser pas mal de choses sur le côté est forte. Malgré tout, cela invite indubitablement à s'immerger complètement dans le récit. de sérieux doutes peuvent apparaître quand la deuxième partie débute. En effet, après avoir planté le décor avec quatre-cinq personnages forts et attirants, l'auteur fait non pas un bond en arrière pour, comme c'est traditionnellement souvent le cas, « raconter comment nous en sommes arrivés là », mais bien plusieurs en alternant la longueur des flash-backs et là l'alternance des personnages se fait drôlement sentir puisque nous naviguons à travers une cinquante d'années d'histoire (la deuxième moitié du XVIe siècle en somme). Or, pour le lecteur lancé gaiement dans l'évolution des personnages dans un décor bien planté avec une intrigue attendue car tendue dès le départ, ce rétropédalage fait mal. Somme toute, il est donc facile de cibler pour ce roman les défauts de ses qualités. Malgré cela, notez que, même si on trouvera les textes bien souvent trop courts et prétextes à une avancée du récit par étapes bien jalonnées, les chapitres qui dépassent les trois pages recèlent de très bonnes idées scénaristiques : sans y trouver un style flamboyant à chaque fois, le fond fait vraiment plaisir à lire. Et d'ailleurs, ce sont sur ces entrefaites que l'intrigue se remet en route avec la troisième partie et l'aboutissement de ces bonnes ficelles scénaristiques : les wagons se raccrochent dans une mécanique bien huilée dans une conclusion bien maîtrisée avec juste ce qu'il faut de mystérieux.

Toutefois, on ne peut décemment pas s'appesantir sur la structure de ce roman sans signaler qu'en deuxième niveau de lecture, les signes fourmillent pour multiplier les allusions à la chance, au sort et aux choix de chacun. L'intention de l'auteur semble, en effet, se porter de manière conséquente sur les signes qui bordent les destins des différents personnages. Ainsi, les allusions au jeu d'échecs sont légion, ce qui correspond bien à l'ambiance des dernières heures du consulat de Charles Casaulx à la tête de Marseille tenue par la Ligue : des sacrifices plus ou moins volontaires, des échanges de bons procédés, et même des prises parfois inattendues. Mais c'est le fameux tarot de Marseille qui recèle sûrement le plus d'anecdotes ici ; les noms des atouts de ce jeu de cartes, par exemple, sont parfois repris pour symboliser des objets cruciaux dans l'histoire, le Chariot et la Roue de Fortune en tête ; de même, dans la deuxième partie, les chapitres sont numérotées selon une formule de « 12 fois 4 » (12 chapitres par personnage principal), ce qui pourrait (le conditionnel ici est de rigueur) signifier quelque chose autour des « couleurs » dans un jeu de cartes, mais là cela révèlerait surtout de ma propre imagination à voir des signes partout. Enfin, cette intention de focaliser même la structure sur le destin des personnages me renvoie à ma propre vision de l'Histoire : l'Histoire est, pour moi, une façon d'étudier les choix, le sort et les tactiques de personnes ayant eu leur part dans des événements de plus ou moins grande importance (importance qui importe en fait peu, puisqu'il est souvent plus utile de se consacrer sur les réactions des personnages). La nouvelle qui clôt ce volume, « Gabin sans ‘‘aime'' », ne fait que renforcer cette agréable impression, même si cela se sent un peu que le personnage aurait pu, et dû au départ, constituer une voix alternative supplémentaire et qu'elle a fini par ne pas aboutir.

En définitive, je suis sûrement un peu trop dur parfois dans cette critique, mais comme précisé plus haut, ce roman a les défauts de ses qualités (expression très bateau, mais qui correspond à mon état d'esprit sur ce sympathique premier roman) ; il constitue malgré cela un bon moment de lecture, et ce d'autant plus qu'une telle utilisation d'un fait historique ne pouvait que me convenir. Royaume de Vent et de Colères est un roman de chez ActuSF qui, encore une fois, nous sort de l'ordinaire, et c'est ce qui compte : nous avons là quelque chose de frais, de neuf et d'encourageant.

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Un attentat se fomente dans les rues de la ville. Au nom de Dieu, des hommes vont mourir et la cité va être mise à sac. Paris au XXIe siècle ? Non. Marseille au XVIe. 1596 : La cité phocéenne conteste la légitimité du Roi de France et s'auto-proclame République indépendante. Marseille, la catholique face à Henri IV, le huguenot : le décor est posé, mais les cartes ne sont pas encore tirées.
Elles sont toutes là, dans une même main dès le prologue, et ne demandent qu'à être abattues :

- Gabriel : Chevalier de sang et de misère, j'ai choisi la vie en donnant la mort. Tant et tant. Que je n'aspire à plus rien d'autre. Ce sera la dernière. Victoire. J'ai beau regarder le ciel, droit devant, debout, la tête haute, j'ai un genou à terre...
« Je vis en ermite depuis si longtemps que les mots m'ont déserté. »

- Victoire : Je suis née au combat, brandie comme un étendard par une Patience à la volonté de fer. le couteau à la ceinture et la Rapière à la main, je sais comment tailler les chairs. Tu ne bronches déjà plus devant la faible femme que je ne suis pas. Ça aide, le sang sur les mains pour attirer le respect. Je ne suis pas dupe, va ! Je sais. La Guilde attend toujours mon heure...
«Nous ferions pourtant un si beau couple d'assassins tous les deux. »

- Silas : Approche ! Et montre-moi de quoi tu es capable, Bourreau. Je te le rendrais au centuple. Tu crois mener la danse. Tu crois être passé maître dans l'art de manier la souffrance. Tes yeux jubilent. Profites-en bien. Tant qu'ils sont encore deux.
« Fouette-moi autant que tu veux, aucune explication ne sortira de ma bouche. Les plaies se referment et les os se ressoudent, mais enlève-moi l'honneur et je ne vaudrais guère plus qu'un chien. »

- Armand : Il nous faut fuir, Roland, et abandonner l'Artbon. Seras-tu assez fort pour résister à son appel ? Nous prendrons le chemin de Marseille. Puis nous embarquerons. Ils ne nous penseront pas assez fous pour faire ce choix-là. Et peu importe ce que nous ferons. Puisqu'il y aura toujours la mort au bout...
« Il n'est jamais trop tard pour se tromper. »

- Axelle : Je ne suis pas mère. Je règle mon pas sur le pas de mon père. L'espadon dans mes deux mains, à faire voler les têtes, j'apprends. J'apprends à maîtriser la colère. Gilles, penses-tu avoir fait taire en moi, la révolte et la haine ? La fortune et sa roue, le chariot dans les mains, je regarde l'Aube qui se réveille. Je ne suis pas ma mère...
« La peur je l'ai avalée. Dans ma bouche, dans ma gorge, elle me tombe tout au fond du ventre, jamais digérée.»

- Gabin : C'est la chanson du gamin qui a perdu son « aime », c'est la chanson que me fredonnait ma mère, du temps où j'en étais encore un. Je croque à pleines dents dans la pomme offerte par un mort et m'accroche à la roue de la fortune. Je sers les habitués, essuie les tables et disperse les poussières des routes. Je fais le pari de la vie et regarde l'espadon accroché au mur...
« Une moitié d'homme en guenille ».

Jean-Laurent del Socorro nous offre là un Royaume de vent et de colères qu'on peine à lâcher. La structure du livre atypique désarçonne au départ mais très vite, elle donne un tel rythme à la lecture, qu'on y adhère totalement. J'ai aussi beaucoup aimé le choix de la narration à la première personne, chaque personnage se succédant pour nous livrer « sa » vérité, son histoire. L'auteur est un roliste. Aucun doute à avoir sur cette affirmation, quand on voit avec quel soin il a travaillé ses perso : ils trimbalent tous leurs univers et ont une « vraie » présence et pourraient faire l'objet chacun d'un autre roman sans aucun problème. Et pas de demie mesure pour les personnages féminins : Chez del Socorro, point de gourdasses effarouchées, mais de vrais portraits de femmes, qui ne sont pas là pour distraire, faire joli ou tapisserie !

Bon, vous l'aurez compris, j'ai complètement accroché à ce Royaume de vent et de colères, premier roman aux éditions Actusf, suivi d'une nouvelle et d'une interview de l'auteur qui permettent de prolonger la découverte.

Et dans le ciel de mes coups de coeur, elles scintillent encore :
Cinq étoiles. Une par doigt.
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Enfin.
J'ai enfin pris le temps de lire le premier roman de Jean-Laurent del Socorro, après des années de tergiversations, à voir passer des critiques a minima élogieuses. Il aura fallu l'occasion d'un challenge et d'une lecture commune avec Nadou38 pour franchir le pas. Je la remercie de m'avoir accompagné.

Foin de suspense : ce livre est objectivement impressionnant de qualité.
Le fond historique est incroyablement maîtrisé et très instructif. J'ai un peu parcouru le 16ème siècle français au cours de mes lectures, mais je n'avais jamais ne serait-ce qu'entraperçu tout se qui s'était passé autour de Marseille. La domination de la Ligue catholique, les interventions intéressées du duc de Savoie, le pouvoir personnel dictatorial de Charles de Casaulx, la reprise en main par Henri IV. Tout cela est d'une grande richesse.
La forme est épatante. Roman choral, composé de chapitres courts donnant chacun la voix à un personnage qui parle à la première personne. Cela induit un rythme, une chanson particulière à cette histoire, comme des voix de ténor, soprano, alto et basse. Les intervenants sont peu nombreux, et la répétition de leurs interventions permet d'approfondir leur caractérisation en permanence. L'auteur joue beaucoup avec le point de vue, n'hésitant pas à nous faire revoir la même scène sous plusieurs angles, imprégnée d'émotions différentes.
Ces personnages m'ont eu l'air tous sortis d'une tragédie grecque. Un point commun qui ressort chez quasiment chacun d'entre eux est le regret. le regret d'avoir eu la vie qu'ils ont vécue, le regret d'avoir fait tel choix, ou de ne pas l'avoir fait, ou de ne pas avoir eu le choix. Ce ne sont pas des dieux qui les manipulent, qui les obligent à l'héroïsme ou au crime, c'est simplement le rouleau compresseur des événements. Les personnages n'en paraissent pas plus libres pour autant. C'est e regret de devoir être emporté par la vie qui ressort le plus vivement.
Silas le Turc échappe à cette définition, et peut-être Gabin aussi. Ce dernier est trop jeune pour regretter ; sa vie est devant lui. Gabriel est le seul dont je n'ai pas vraiment compris le comportement (attention SPOIL)
La pincée de fantasy qu'apporte l'Artbon est juste ce qu'il faut. J'aime beaucoup cette façon de considérer la magie ; quelque chose d'exigeant qui détruit petit à petit celui qui ose l'utiliser. On n'est pas éloigné de l'utilisation d'un certain anneau. Orson Scott Card est un autre auteur qui apprécie ce donnant-donnant.

Pourtant, malgré toutes les fleurs que je dépose aux pieds de ce roman, j'ai eu du mal à l'apprécier à sa juste valeur. Oh j'appréciais chaque fois où je me plongeais dedans, mais aucune folle envie de poursuivre ne s'emparait de moi. Chaque fois que je refermais le livre, la sensation de plaisir disparaissait vite. Et aujourd'hui il ne me reste guère d'émotion rémanente associée à sa lecture.
Et je ne comprends pas pourquoi.
Je soupçonne que la raison est ailleurs, en dehors du livre lui-même. Peut-être une saturation de lecture. C'est étrange mais réel.
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Cinq personnages pour cinq destins.
Un roman chorale mettant en scène Axelle, Gabriel, Victoire, Armand et Silas pour cinq histoires qui vont se croiser pour le meilleur et pour le pire.
Le style de la narration est assez particulier, les chapitres sont courts et se conjuguent à la première personne, c'est assez intimiste, nos personnages étant par ailleurs assez torturés dans une période plutôt sombre de l'histoire de France, à savoir les guerres de religion.
Le parti pris de l'auteur est de nous proposer trois parties distinctes que je définirais comme, l'introduction, la présentation des personnages, la conclusion personnelle de chaque destinée, ce qui donne un rythme atypique à cette histoire, la césure du milieu occasionnant ce que j'ai ressenti comme une cassure dans le récit.
Pour parler des personnages, je les ai trouvé trop stéréotypés, sauf peut-être Gabriel et Silas, pour tout dire, la comtesse est le personnage qui m'aura intéressé le plus alors qu'il s'agit d'un second rôle...
Je n'ai pas non plus été transporté par la trame du récit dont la teneur aurait tenu de la nouvelle sans la présence des cinq personnages, une anecdote plus qu'une histoire en fait, ajoutons que le classement en littérature fantasy est quasi anecdotique.
Dans le même parti pris narratif, j'ai lu plus abouti avec "le cercle de la croix" de Iain Pears.
Cela dit c'est bien écrit et je l'ai lu sans ennui, les bonnes critiques et le prix obtenu par le roman faisant que j'en attendais peut-être plus.
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C'est l'auteur rencontré aux Imaginales qui m'a lui-même incité à tenter l'aventure (un personnage dont la générosité n'a d'égale que la modestie, ce qui ne gâche rien)… Mais bon avec les Guerres de Religion, Marseille et la Fantasy, il n'avait pas besoin de beaucoup d'arguments pour me convaincre… L'oeuvre avait donc au départ tout pour me plaire, mais patatras le panégyrique d'Ugo Bellagamba sur la vraie littérature en préface m'a complètement douché…
Il a fallu repartir à l'assaut, et avec les phrases de quelques mots, les paragraphes de quelques lignes et les chapitres de quelques pages difficile de retrouver l'oeuvre de ouf tant vantée en préambule. Un prologue en forme d'huis-clos, où on glisse d'un personnage à l'autre avec des travellings de film d'auteur… Ah ce moment là j'ai eu peur, très peur… Et puis ouf, la magie de l'auteur fait son oeuvre et la musique de son écriture permettent d'accéder à l'essentiel !


Le Vent :
Nous sommes le 17 février 1596 et Henri IV est sur le point d'achever la reconquête du royaume de France par la prise de Marseille qui s'est érigée en République indépendante. le Consul Charles de Casaulx (successeur de Jules César ou annonciateur de Napoléon Bonaparte ? ^^), fait face seul à l'armée royale après le ralliement de la Ligue au roi nouvellement converti à la religion catholique, la défection de Charles-Emmanuel de Savoie et le retrait de Philippe II d'Espagne.
Le côté historique est impeccable car bien documenté, et la manière dont les personnages historiques et les personnages fictifs s'entremêlent est joliment maîtrisée. Ceux que l'auteur a choisi de mettre en avant veulent tous entamer une nouvelle vie permettant d'oublier celles qui furent les leurs, mais ils subissent les événements avant d'être rattrapés par l'amère fin dans un récit découpés en 3 actes avec unité de lieu, de temps et d'action… Jean-Laurent del Socorro n'échappe ainsi pas à sa formation d'homme de théâtre ^^

Les Colères :
- Axelle, guerrière reconvertie en tenancière, est en colère contre ce que sa mère a fait d'elle…
- Gabriel, le huguenot converti de force, est en colère pour avoir survécu alors que toute sa famille a péri…
- Armand, le maître artbonnier en fuite, est en colère contre son ordre qui a transformé des guérisseurs en guerriers…
- Victoire, la maîtresse assassine, est en colère contre la société qui ne laisse aucune place aux femmes, et qui l'a obligé à effectuer des choix qu'elle regrette fortement
- Ce bon Silas garde pour lui ses secrets, et ce n'est pas ses courtes interactions avec Victoire et ses longs monologues avec son tortionnaire qui vont nous en apprendre davantage. Je ne sais pourquoi, je n'ai pas arrête de penser à l'auteur déguisé en Rochefort avec une pomme à la main… mdr
L'auteur a certes fait le choix de la tragédie plutôt que de la comédie, mais force est de constater qu'il a réalisé ce qui à ma connaissance est de plus proche de Joe Abercormbie, la comète de la fantasy britannique. Ses personnages auraient parfaitement leur place dans l'un de ces livres, et parfois la frontière est très mine entre untel / unetelle et untel / untelle… C'est sans doute ici l'humanisme à la Sergio Leone qui fait le pont entre les deux auteurs.
J'ai retrouvé en l'auteur un peu des intentions d'écriture de Fabrice Colin, de Mathieu Gaborit, de Laurent Gidéon ou d'Estelle Faye : l'auteur très empathique a de la tendresse pour ses personnages et nous la fait partager (mais comme j'ai fortement senti le trope du cape et épée, sa place est peut-être entre Pierre Pevel et Jean-Philippe Jaworski ^^) : oui on s'attarde sur la romance gay entre un éraste et un éromène, sur le beguin d'une strong independant women qui pense être passé à côté de sa vie, sur les fantômes qui hantent un chevalier qui cherche à oublier à défaut de se racheter, et sur les doutes d'une femme qui n'a trouvé sa place ni en tant que guerrière ni en tant que mère… Oui, on fait la part belle à l'introspection, et pourtant il faut souligner que l'auteur développe un talent de dialoguiste d'une redoutable efficacité, et ses tirades sont remplies de bons mots et de punchlines !


L'auteur a composé 4 voire 5 personnages très forts, suffisamment forts même pour que chacun d'entre eux puisse être l'objet d'un roman tout entier. Mais en les associant on parvient à un goût de trop peu, voire d'inabouti. J'ai eu un peu les mêmes sensations qu'un film de Jean-Pierre Bacri et Agnès Jaoui : des personnages en plein doute qui se croisent et qui s'entrecroisent, et quand on pense qu'ils vont relever la tête et construire quelque chose et ben c'est déjà fini…
La moitié de l'ouvrage c'est des bouts de flashbacks nous permettant de reconstituer l'Histoire des Guerres de Religion de du 24 août 1572 au 17 février 1596 à travers les POVs des personnages principaux (dont on reconstitue également les histoires individuelles), découpés en 12 parties chacun et repartis selon une chronologie quelques peu déstructurée… Originalité n'est pas synonyme de qualité, et ce n'est cette « témérité stylistique folle » qui apporte de la qualité à ce premier roman qui pourtant n'en manque pas du tout… Car le projet est un peu bâtard : roman ? novella ? nouvelles? Ah ça on sent que l'auteur est plus à l'aise comme nouvelliste que comme romancier, mais s'il continue dans sa voie il pourrait bien tout déchirer… Bref, c'est frais, c'est neuf et surtout c'est prometteur car à l'heure du tirage à la ligne sa concision e son efficacité sont des atouts maîtres ! ^^
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Pourquoi je l'ai choisi:

J'avais repéré ce livre sur Babélio, où les avis sont tous plus enthousiastes les uns que les autres…Et puis, il a été proposé en Masse Critique…J'ai été ravie d'être sélectionnée pour cette lecture! Merci donc à l'équipe Babélio et aux éditions J'ai lu pour l'envoi de ce livre!

Ce que j'ai ressenti:…Quand le Mistral souffle de colère…

Un royaume mis à sac par la guerre de religion, un saut dans le temps conséquent, une ville d'indépendance, un brin de magie: autant dire que le cocktail avait de quoi m'attirer!

« Les plaies se referment et les os se ressoudent, mais enlève-moi l'honneur et je ne vaudrai guère plus qu'un chien. »

Marseille, la belle…Marseille, la rebelle…C'était presque une évidence de lire ce livre de Jean-Laurent del Socorro! Il nous la rend tour à tour charmante, dangereuse, mystique, magique, colérique. 5 adjectifs comme les doigts d'une main, et cette main se referme sur un complot qui refoule des odeurs nauséabondes politiques et religieuses. Inutile de dire que ça gronde pas mal dans les rues du Panier, et Marseille vibre, et n'aura pas peur de faire couler le sang jusqu'au port, qu'il en ferait changer la couleur de ses eaux…Marseille, l'insoumise…

« Oui, demain Marseille deviendra folle, la tempête soufflera plus fort encore pour abattre ses murs comme un château de cartes. »

Les personnages sont la partie immergée de ce conflit, les acteurs de l'ombre. 5 comme les doigts d'une main, qui feront justement changer la Main du Destin, en enrayant tels des grains de sables, les rouages du pouvoir français. Ils sont aussi forts que le mistral, d'une froideur à couper à couper au couteau, mais le coeur bouillonnant…Tour à tour mis en lumière, leurs petits talents personnels nous éblouissent au milieu de ses ténèbres…La Roue de la Fortune livre sa plus belle galerie rotative de personnages forts et attachants…

« Lire et écrire, ça sert à être libre Axelle. Moi, j'sais pas lire. Toi, tu n'auras besoin de personne pour déchiffrer les mots. Tu feras seule tes propres choix. »

De par sa construction originale, ce roman est un vrai plaisir de lecture! C'est à la fois court, percutant et précis, bourré d'humour aussi, mais l'auteur arrive surtout à saisir toute une époque, à retranscrire toute une ambiance de sang et de chaos saisissante! Et si on se réjouit d'en savoir plus le contexte de guerre qui ont fait rage en ces temps anciens, il n'en reste pas moins que l'on a aussi une touche de magie qui nous ensorcelle…La force du Tarot de Marseille va battre ses cartes sur l'échiquier politique, et ses figures ont plus d'un tour dans leur sac, et les mains armées…

Il ne faut qu'une main, 5 doigts pour tenir cette petite pépite de science-fiction, et vous dire au cas, où il vous manquerait encore une bonne raison, que c'est un coup de coeur!!!

Ma note Plaisir de Lecture 10/10

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J'avais l'intention d'acheter le Royaume de vent et de colères (ou de l'emprunter à la bibliothèque) dans quelques mois. Mais, cela c'était avant que ma librairie préférée n'organise en son sein, une rencontre dédicace avec plusieurs auteurs de roman Fantasy dont Jean-Laurent del Socorro, le 9 mars prochain! J'ai donc profité de ce dimanche après-midi morose pour lire ce roman d'une traite!

Avant de débuter ma lecture, j'avoue avoir été un peu irritée par la préface signée par Ugo Bellagamba. Certes, ce dernier a beaucoup apprécié le premier roman de l'auteur et le fait savoir ; mais le placer au début incite inconsciemment le lecteur à "devoir" aimer le roman. Pour ma part, je préfère me faire ma propre opinion et je n'apprécie pas que l'on me mette la pression. C'est peut-être un peu maladroit de la part de l'éditeur ActuSF mais, je pense qu'il aurait peut-être été plus judicieux de mettre ce texte en fin de roman afin de laisser "respirer" son lecteur.

Hormis cet écueil qui n'est pas du fait de l'auteur, j'ai beaucoup apprécié ce roman. Il s'agit d'une uchronie minimaliste, dans le sens, où elle ne change pas le cours de l'Histoire avec un grand H, uniquement, dans le cadre local, à Marseille. le roman s'inscrit dans la deuxième partie du XVIème siècle français, au moment où les Guerres de religion entre Catholiques et Protestants font rage et déstabilisent le pouvoir royal. Il s'agit également d'un roman choral (genre littéraire que j'affectionne énormément depuis le Trône de fer de Martin) qui fait intervenir cinq personnages : Victoire, maîtresse de la Guilde des Assassins, Axelle, propriétaire d'une auberge et ancienne mercenaire, Gabriel, un chevalier, Armand, Artbonnier (sorte de moine-magicien) et Silas, assassin d'origine turque.

Ce que j'ai le plus apprécié dans la lecture de ce roman, c'est le grand dynamisme qui s'en dégage. En effet, il est divisé en trois grandes parties : la première fait un état des lieux au "présent", en 1596, puis la seconde nous éclaire sur le passé des personnages par des flashbacks, lorsque la dernière revient en 1596 pour achever le récit. Chaque chapitre, donnant le point de vue des cinq personnages, est court (à peine deux-trois pages). Au tout début, j'ai été très surprise par ce découpage, craignant que le roman ne soit pas assez fouillé et reste trop superficiel. Puis, au fil de ma lecture, je m'y suis faite, laissant les pages défiler et me donnant envie de poursuivre sans m'arrêter.

Le Royaume de vent et de colères est un premier roman de Jean-Laurent del Socorro très maîtrisé et très intéressant. Il mérite largement son Prix Elbakin 2015. de plus, il s'agit du deuxième roman des éditions ActusSF que je lis en une semaine et d'une deuxième bonne surprise. Je vais donc surveiller de très près l'actualité de l'auteur et de sa maison d'éditions.
Lien : https://labibliothequedaelin..
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A la suite de la lecture de nombreuses critiques positives je me suis décidée à découvrir l'écriture de Jean-Laurent del Socorro avec son Royaume de vent et de colères. En l'occurrence nous voici réunis à Marseille en 1596, l'armée du roi Henri IV est aux portes de la ville. Les soldats et les miliciens se préparent à défendre la cité.
Nous voici plus précisément à l'auberge de la Roue de la Fortune tenue par Axelle, ancienne capitaine d'une compagnie de mercenaires à la solde de la Ligue. On y fait connaissance de Gilles son compagnon, Gabriel ancien noble huguenot converti au catholicisme suite à la St-Barthélémy où il a perdu toute sa famille, il y a aussi Armand l'Artbonnier en fuite avec son compagnon, ainsi que Victoire, vieille femme au passé et au présent violent et tourmenté.
Tout ce petit monde fait partie de la petite histoire et leurs destins croisés sont contés au présent et au passé. A chaque personnage, un chapitre. A travers leur regard et expériences on assiste aux mêmes faits mais sous des points de vue différent mais qui se complètent.

Quand la petite histoire rencontre la grande histoire j'adore. Ce roman m'a aussi donné l'envie de connaître ces faits. On en découvre tous les jours ;-) . Je savais qu'Henri IV avait eu du mal à se faire reconnaître roi par tous les français surtout les ligueurs, mais je ne connaissais pas ce contexte de Marseille qui a voulu devenir une république avant l'heure.
C'est aussi une atmosphère particulière, étrange que l'on rencontre à travers ce livre, on sent que le destin de chacun est déjà scellé et que tous vont vers un même but.
Une belle plume que celle de del Socorro, j'en redemande. C'est fluide, entraînant, des chapitres courts qui donne une sorte d'urgence au déroulement des faits. de l'Histoire, un peu de magie quoique l'Artbon pourrait être assimilé à un outil scientifique. Des personnages très attachant et complexes. Tout pour me plaire.
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La roue de fortune, Une auberge où l’on peut croiser des personnes avec de grandes destinée. Une tenancière d’auberge ancienne capitaine de mercenaires, un chevalier ancien protestant, une cheffe de guilde d’assassin,..
Marseille, 1596, un combat se joue la fin ou la continuité de la rébellion républicaine.
Chaque homme a son rôle à jouer.

Un royaume de vent et de colère de Jean-Laurent del Socorro

Premier roman de l'auteur. Celui ci nous plonge fin XVIe siècle, Henri IV, Roi de France, fraîchement convertie au catholicisme, se bat contre Marseille, en consulat. Afin de faire valoir son pouvoir et d'asservir son pouvoir, le roi n'a que d'autre solution que d'éteindre la révolution. Assassinât, trahison, complot, combat et une dose de magie assez discrète, L. del Socorro nous fait découvrir une période sombre de l'histoire de France, « les guerres de religions » avec une touche de fantaisie. Au travers de personnage plus ou moins charismatique comme Axelle, le capitaine de mercenaire, Victoire de la guilde de la savonnière,...
Le livre est divisé en 3 parties avec un ordre particulier, cela permet de créer une attache entre le lecteur et les personnages.
Ce livre est intéressant et enrichissant, et pourrait intéresser un jeune lectorat.
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