Jean-Hippolyte Flandrin, né à Lyon le 23 mars 1809, était le second de trois frères qui tous s'adonnèrent à la peinture, et le quatrième de sept enfants, dont le seul qui survive aujourd'hui est M. Paul Flandrin, un de nos paysagistes les plus justement estimés. Son père , placé d'abord dans une maison de commerce , avait, au bout de peu d'années, abandonné une carrière où il n'était entré qu'à regret. Artiste amateur dès sa jeunesse , il avait voulu devenir un artiste de profession ; mais, après quelques essais pour prendre rang parmi les peintres d'histoire ou de genre qui composaient ce qu'on appelait alors l'école de Lyon, il avait dû renoncer même à l'ambition modeste d'entrer un jour en rivalité avec les Richard et les Révoil.
Le nom d'Hippolyte Flandrin est, depuis bien des années déjà, si étroitement lié au nom de M. Ingres, l'influence du maître a été d'abord si pieusement acceptée par le disciple, et proclamée par lui en tout temps avec une si vive gratitude , qu'on croirait qu'une sympathie instinctive existait dès l'origine entre les deux artistes, et qu'en se rapprochant l'un de l'autre ils obéissaient sciemment à une sorte d'harmonie préétablie, à une force d'attraction naturelle. Rien de moins exact pourtant. A Lyon, Flandrin n'avait peut-être pas entendu parler une seule fois de M. Ingres, dont les principaux ouvrages, d'ailleurs, n'étaient à cette époque ni lithographiés ni gravés, et dont il n'avait pu par conséquent pressentir la manière.
Paris, 24 mars 1812.
Le Salon est pauvre, très-pauvre, surtout dans le genre historique. Ce sont les petits tableaux et les paysages qui me semblent les plus forts ; d'ailleurs, cette année, les artistes les plus connus s'abstiennent. Mon tableau à moi est dans le grand salon, mais placé très haut et à contre-jour. Au premier aspect, il m'a horriblement désolé; mais enfin, peu il peu, il revient sur l'eau, et je me méprise un peu moins. Quelques journaux m'ont bien traité, ce sont les plus graves; mais les journaux qui s'occupent d'art spécialement m'abiment. J'ai remarqué au Salon deux jolis tableaux de Meissonier....