Grégoire Delacourt est un auteur surprenant.
Ses histoires sont simples, simplistes parfois.
Mais les thèmes abordés sont d'une profondeur impressionnante. Ils ne cessent de m'émerveiller.
L'histoire de
la femme qui ne vieillissait pas est une histoire improbable.
Une femme qui arrête de vieillir à trente-cinq ans, on sait bien que cela est impossible. On peut en rester là, déçus, incapables d'aller au delà de ce message.
Moi j'ai choisi d'avancer, de me laisser surprendre, d'oser avancer sur le chemin des questionnements.
La femme qui ne vieillissait pas m'a captivée, a provoqué une certaine forme d'introspection et a soulevé en moi des montagnes d'émotions plus incroyables les unes que les autres.
Je ne pensais pas du tout en arriver là au moment d'ouvrir ce livre.
Je pense que c'était juste le bon moment.
Il y a tout d'abord mon rapport face à la vieillesse. Ai-je peur de vieillir ? Quelle image vais-je donner de moi quand ma peau sera flétrie et mon énergie amoindrie ? Quel est le sens de la vie ? Ai-je peur de la mort ?
Et puis, ce texte retrace toute la beauté et la complexité des relations humaines, dans le couple, entre une mère et son fils, avec ses amis.
Et moi, où en suis-je de mes relations aux autres ? Lesquelles sont motivantes et mobilisantes ? Lesquelles sont néfastes ? de quoi, de qui ai-je besoin pour être heureuse ?
Et puis, une émotion encore plus personnelle s'est ouverte à la lecture de ce livre lu deux mois après le décès de ma maman.
J'ai vu en Betty, ma maman.
A mes yeux, pendant longtemps, ma maman n'a pas vieilli. Elle est restée cette femme dynamique qui croyait en ses rêves, qui s'engageait pour eux. Sans concessions. Sa peau est restée jeune longtemps. Elle ne faisait pas son âge. Puis la maladie l'a ralentie. Mais jamais elle n'a été une autre.
Alors même qu'elle était totalement dépendante des soignants, elle est restée elle-même, indépendante convaincue. Son regard me l'a si souvent prouvé. Je suis même certaine qu'elle a choisi le moment de sa mort.
Comment aurais-je pu imaginer en ouvrant ce livre, que j'allais faire un bout de chemin du deuil de ma maman, avec toutes les émotions qui s'y rattachent ?
Grégoire Delacourt dit sans sa postface :
"
La femme qui ne vieillissait pas existait. Je la connaissais.
C'est ma mère.
Elle ne vieillira plus. Je possède son dernier portrait. Celui après lequel il n'y a plus rien. Plus de nouvelles rides, de nouveaux rires; plus de câlins ni de jattes de Ricoré les soirs d'enfance où on ne trouvait pas le sommeil parce que les chagrins empêchaient de dormir.
J'ai alors compris que les livres racontaient des choses bien à eux, qu'ils se servaient de nos mots pour placer les leurs."
Ces mots peuvent être les miens.