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EAN : 9782253034926
544 pages
Le Livre de Poche (03/10/1984)
4.13/5   562 notes
Résumé :
Une femme, Camille Claudel

C'est grâce à ce livre, enfin réédité, que nous a été révélée la vie extraordinaire de Camille Claudel.
Sœur aînée de l'écrivain Paul Claudel, Camille a connu en tant que femme et en tant qu'artiste, un destin hors du commun.

À la fin du siècle dernier, une jeune fille de dix-sept ans qui veut être sculpteur, c'est inconcevable, voire scandaleux. Or, Camille se lance dans l'aventure à corps perdu. Jusqu... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (49) Voir plus Ajouter une critique
4,13

sur 562 notes
Choqué ! Je suis absolument choqué quand j'essaye de m'imaginer, comment un membre tant éminent de l'élite ait pu traiter sa soeur, la plus grande sculptrice de tous les temps. Éminent il était ce Paul Claudel : immortel (membre de l'académie française), ambassadeur, grand-croix de la Légion d'honneur, auteur prolifique er figure de proue de la religion catholique. Je n'arrive tout bonnement pas à comprendre qu'un homme tant cultivé ait pu agir de la sorte. Et ce ne sont certainement pas ses explications vaseuses, à propos de la pauvre Camille, qui m'y mèneront.

J'avoue que le pourtant excellent ouvrage d'Anne Delbée m'a coûté de la peine à terminer. En fait, j'ai failli plusieurs fois l'abandonner, tellement que le sort scandaleux, réservé à cette artiste hors pair par son éminent frere m'a dégoûté. Si j'étais Saint-Pierre, je ne l'aurai pas laissé entrer au paradis, malgré son visa particulier, qu'était son 'Annonce faite à Marie'. Ouvrage sur lequel, j'ai trouvé une critique on ne peut plus pertinente de la main de ChatDuCheshire à Babelio, dans la vie, le professeur Isabelle Corbisier, qui après avoir loué les qualités littéraires de cette oeuvre, ajoute : "Mais celle-ci (l'écriture) est au service d'un propos catholique réactionnaire totalement écoeurant à mes yeux. Toutefois on ne peut reprocher à l'auteur de ne pas y être en phase avec lui-même quand on sait ce qu'il fit de sa soeur Camille..."

Une chose est certaine, jamais je ne lirai un autre ouvrage de Paul Claudel. Non pas comme une espèce de revanche posthume, mais tout simplement parce que n'importe quel oeuvre de lui serait hypothéquée par le tragique destin de sa soeur, qu'elle a vécu largement à cause de lui.
Il y aura, devant mes yeux en d'autres termes, toujours cet ahurissant contraste, entre la gloire et les honneurs d'un côté, la misère à l'état pur de l'autre.

Pour ceux qui n'ont pas lu ce livre ou un autre sur Camille Claudel, ni vu le film que Bruno Nuyten en a fait en 1988, avec une inoubliable Isabelle Adjani, l'incarnant à l'écran, je résume brièvement les faits. La sculptrice a passé presque 30 ans dans un asile d'aliénés, de février 1915 jusqu'à sa mort, le 19 octobre 1943, pour être précis. L'instigateur de cet enfermement, pour 'démence paranoïde', n'est autre que son frère. La cause principale de sa mort est la malnutrition, problème dont le frère avait été informé par le chef de clinique juste avant sa mort. le grand académicien-diplomate-supercatholique n'a pas daigné venir à son secours, ni à son enterrement (dans une fosse commune), d'ailleurs.

L'ouverture, à Nogent-sur-Seine, le 26 mars dernier, du Musée Camille Claudel, lui permettra enfin, du moins je l'espère, de sortir de l'ombre d'Auguste Rodin. 74 ans après sa mort, ce n'est vraiment pas une minute trop tôt !

Comme il y a déjà 16 bonnes critiques de l'ouvrage d'Anne Delbée, je m'abstiendrai de synthétiser ce livre. Je veux juste exprimer mon étonnement que l'auteur n'a pas été couronné d'un prix prestigieux, outre celui des lectrices de Elle. Si le Prix de l'Académie française, s'avérait évidemment un peu délicat, il restait le Goncourt, Renaudot ou Femina !
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« Elle a tenu longtemps. Sans armes, sans ruses, sans faux-semblants. À mains nues. Voilà. Elle n'a plus ni ciseau, ni maillet, ni sculpture. Ils ont tout pris. Elle revoit la vieille Bible usagée. Elle voulait sculpter. Les petits contre les forts, les grands. Il y en avait encore tant d'autres – tant d'épopées qu'elle aurait aimé relire de ses doigts poussiéreux. Elle est là, sans livres, sans terre, sans bras. La camisole. » (p.70)
On est frappé par la splendeur avec laquelle Anne Delbée nous révèle la vocation de Camille, dans un des premiers chapitres (Les enfants de la lune). L'adolescente est bouleversée par l'appelle des rocs altiers et nous aussi avec elle. Dès le début, ces derniers ressortent des paysages familiers, ils sont humanisés. Un rituel mystique se joue entre Camille et la forêt, les falaises, les racines d'arbres, le vent, la boue, la Nature mystérieuse dans le bruit de l'orage. Elle veut respirer la terre, rouge, elle l'enveloppe dans sa pèlerine, en fait un balluchon. Dans une nudité sacré du coeur, elle se roule dans le sable.
Les pierres lui reviennent toujours : dans ses visions, dans les fables qu'elle invente pour son jeune frère. Elle fait parfois peur à son cadet par son regard vibrant de passion. Sous l'astre nocturne, les blocs de granit s'enlacent, lui demandent des baisers. « Ils étaient nus et leurs doigts à jamais étreints. Aussi ferme que la pierre, aussi obstiné que l'âne, tel était leur amour. » À 13 ans, elle se promène seule, ses vêtements trempés, oublie l'heure, la « petite sorcière » de son père, Louis-Prosper, qui la comprend si bien. Camille aimerait voir le diable, persuadée qu'il est « commun, passe-partout ». D'ailleurs, ce mot maléfique colle à son prénom, par le mépris des un, par l'admiration des autres. « Traînée, traînée ! » Sa mère lui donne des claques, son oeil noir et ses malédictions n'arrêtent pas Camille, si heureuse de sculpter.
Derrière les phrases haletantes d'Anne Delbée se cache le cerveau puissant de l'écrivain qui par le moindre détail de ces pages initiales annonce déjà tous les évènements futurs de l'histoire de l'artiste damnée.
Très jeune, Camille se passionne pour la lecture (Baudelaire, Villon, la Divine Comédie de Dante et tant d'autres), pour des concerts (Richard Wagner, Claude Debussy). Sa culture est immense. Tous les recoins de son âme nous sont dévoilés. Camille a besoin de solitude : « Elle n'est pas méchante mais elle veut être seule ». « Comment peut-on tous les jours de sa vie se réveiller à côté de quelqu'un ? Une chose est essentielle : la solitude à soi lorsqu'on ouvre les yeux… » « Camille marche sous la pluie. L'orage a crevé. Camille, curieusement, se sent heureuse d'être seule. Elle n'aurait pas aimé rester là-bas », sur le divan de l'atelier où Monsieur Rodin l'a aimée pour la première fois. « J'irai là où il n'y a personne. » « On me reproche (ô crime épouvantable) d'avoir vécu toute seule… »
Elle n'aime pas des longs sommeils, elle oeuvre dès l'aube ! Elle déteste les gens qui perdent leur temps dans les politesses. Comme si elle sentait que le temps lui était compté, son ouvrage ni ses mains ne peuvent attendre ! Et pourtant elle est capable d'humilité, douée d'autodérision, cette donzelle aux cheveux indisciplinés. « Ce sont les médiocres qui ont peur d'apprendre et qui s'enferment chez eux. le temps efface toutes les signatures. » Cependant ses yeux bleu sombre affolent, non seulement son petit Paul, mais des étrangers, d'autres sculpteurs, et parfois même son père. « Vous avez quelque chose. Ne le gâchez pas par votre violence ! », lui affirme son premier maître Alfred Boucher.
J'étais en quelque sorte voisine de Camille Claudel au temps où j'habitais à deux pas de l'Île Saint-Louis. Mon ami brûlait d'admiration pour cette femme sculpteur injustement enfermée dans des asiles psychiatriques. Nous nous arrêtions devant la plaque apposée sur sa dernière maison, en même temps son atelier, mais je ne connaissais pas encore la tragédie de Camille Claudel, ni par le film avec Adjani ni par ce texte. C'est maintenant que j'ai la chair de poule en longeant le quai de Bourbon, N°19. J'entends alors en moi ces phrases du livre : « Camille songe à la mer qui transforme les tempêtes du grand large en une caresse qui vient chatouiller doucement les pieds : Paris encercle amoureusement les jambes de l'adolescente. Elle se laisse faire, souveraine de cette ville qu'elle apprivoise déjà. »
À mon humble niveau, j'aime aussi reconnaître des « personnages » et des « attitudes » dans des gros rochers de la forêt de Fontainebleau et les photographier avec frénésie : un mouton, un couple, une fée carabosse, bien au-delà des silhouettes spectaculaires décrites communément dans des guides touristiques. Tant pis si un randonneur me lance avec sourire : « Arrête de fumer la moquette ! » C'est aussi pour cela que je dévore ce bouquin. Dire que je l'ai ramassé au kiosque du Jardin des Serres d'Auteuil, tout écorné par des lectures intensives !
Rodin, « lui seul partageait avec elle un identique idéal de beauté et de vérité. » Elle tombe amoureuse d'abord de ses Mains de sculpteur, si habiles, si intelligentes, si sensuelles, si mystiques, transfigurant la réalité. Ils se sculptent l'un l'autre, leur Rencontre les inspire pour plein d'oeuvres !
Anne Delbée s'est incroyablement documentée pour écrire un livre si détaillé, riche en renseignements techniques sur la sculpture, parsemé de références à Michel-Ange et d'autres génies intemporels. Ses pensées concernant la philosophie de l'art ainsi que l'histoire de l'art m'ont parlé énormément. Très vite j'ai arrêté de publier des citations car chaque passage me paraissait une révélation ! À vous de découvrir les étapes suivantes de la vie de Camille Claudel, ses autres rencontres, rêves et projets.
Un tel destin, un tel roman, poussent à réfléchir et peut-être à se dire qu'il existe un amour si fort, si torrentiel, qu'il faut savoir y survivre, mais déjà il faut avoir du courage pour le désirer. Pour Camille, c'est un amour où la vie et la création ne font qu'un. Elle n'en a pas besoin d'autre. Celui-là est sacré. Est-ce vouloir trop ?
Demeurent La Vague (1897), marbre-onyx et bronze, La Valse (1905), bronze, Vertumne et Pomone (1905), marbre, ces oeuvres présentées Paris, au musée Rodin, et tant d'autres encore…
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Fin du XIXe siècle, une très jeune femme rêve d'être sculpteur. Impensable à cette époque ! Et pourtant, pourtant Camille résiste en dépit des considérations de sa famille. Elle lutte pour assouvir sa passion. Un jour, elle rencontre le célèbre Rodin et c'est l'amour fou. Elle devient son élève aussi bien en amour qu'en sculpture. Son talent éclate, mais leur relation est orageuse et déborde de l'atelier. La rupture est annoncée et Camille ne la supporte pas. le scandale est là, le frère, Paul Claudel, ne le supporte pas. Il la fera enfermée...

Camille Claudel fut internée pendant trente ans... Ce magnifique hommage contient quelques lettres écrites par Camille à son frère. Ce sont des lettres très poignantes dans lesquelles on ressent toute la passion dévorante de Camille pour son art. Quant à la folie, on peut se poser bien des questions à son sujet...
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«Une femme » d'Anne Delbée est la biographie de Camille Claudel, soeur de l'écrivain et poète Paul Claudel, et élève et amante d'Auguste Rodin.
XIX siècle, Camille est l'aînée d'une fratrie de deux soeurs et un frère Paul avec qui elle partage un amour fraternel. Jeune adolescente, atypique et sauvage, Camille aime fureter dans la nature et prend un réel plaisir à toucher et modeler la glaise.
Dotée d'un don pour la sculpture, la jeune fille décide d'exercer cet art.
Mais à cette époque, l'aspiration pour cet art est scandaleuse pour la femme, et sa mère qui voue une haine inextricable pour sa fille, s'y oppose catégoriquement. Soutenue par son frère et son père avec qui elle entretient une tendre complicité, ce dernier lui offre des cours sur Paris.
Camille rencontre le célèbre sculpteur Auguste Rodin et devient son élève, de cette passion commune découlera une longue et tumultueuse histoire d'amour.
Demeurant dans l'ombre de Rodin, la jeune femme trouve la force de quitter son amant malgré l'amour qu'elle lui porte, et se consacre à corps perdu dans ses oeuvres.
Murée dans sa passion, l'artiste Claudel s'isole dans son atelier, s'épuise à sculpter, démunie, sans ressources, elle s'acharne. Paul, attendri par sa soeur, essaie de l'aider mais sans espoir.
Malgré son génie, Camille n'arrive pas à imposer son art, anéantie et obsédée par Rodin qu'elle croit néfaste à sa réussite, malade, pauvre, essoufflée par sa vocation, elle sombrera dans la folie comme une bête sauvage, seule et perdue.
Sa mère, sans scrupules, prend l'initiative de la faire interner dans un hôpital psychiatrique où elle finira ses jours.
Chaque chapitre de cette biographie comporte des lettres de Camille Claudel, écrites de l'hôpital, où elle crie et adresse son désespoir, sa haine pour Rodin, son désir de retrouver sa liberté, mais elle n'aura en retour que du silence et de l'ignorance.
Bouleversante d'émotions, Camille Claudel fut une incomprise, naît d'une époque qui ne lui fut pas favorable, cette femme courageuse, volontaire, insoumise imposera sa passion pour la sculpture, et revendiquera sa rage de liberté.
Son intégrité et sa soif de réussir, malheureusement la conduiront vers une triste destinée, mais le temps jugera de son talent.
Anne Delbée signe une oeuvre littéraire touchante sur la vie de la sculptrice Camille Claudel.
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j'ouvre le livre et je lis, écrit à la main
"Printemps 2014
Pour ma soeur chérie"
il y a aussi un post-it : "Tu me reparleras de Rodin après avoir lu ce livre. Bises."
et je me souviens de la conversation que nous avons eue lui et moi quelques semaines auparavant où je lui confiais mon admiration pour cet homme.

Alors, qu'en est-il, ce livre m'a-t-il cassé mon Rodin?
je ne peux pas dire ça, et le livre ne s'y prête pas.

Par contre, je suis tombée raide dingue (…) de Camille, sa personnalité, sa force de travail, sa pugnacité et bien sûr son génie.

Et on peut dire que sa rencontre avec Rodin a sans doute plus fait son malheur que son bonheur, une chape de tristesse et d'injustice face à de fugaces instants de bonheur et de complicité.

Touchante aussi la complicité avec son frère et fort son amour pour son père qui l'a toujours soutenue, même face à sa mère qui ne l'aime pas ; sa fille qui sculpte depuis l'enfance ne rentre pas dans le cadre bourgeois et conventionnel qu'elle s'est fixé pour elle.

Insupportable le poids étouffant de la société "bien pensante", impitoyable et destructrice.

Le livre se dévore, plein d'émotion, avec parfois des passages plus obscurs, où je ne savais plus qui parlait, ou alors si c'était une description réelle ou juste un égarement de la belle Camille.
Il est émaillé de passages de lettres, et de citations d'ouvrages de son petit frère Paul.

Bien sûr je n'ai pu m'empêcher, en cours de lecture, de googler les titres de sculptures pour (re)découvrir des oeuvres d'une intensité tangible, et je n'aurai de cesse désormais de pouvoir les découvrir en vrai, en plâtre, en marbre ou en jade (les Causeuses).

Sublime revanche, Camille, la force de ton oeuvre offre au monde ta pérennité.


4/5

is@juin14
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Citations et extraits (65) Voir plus Ajouter une citation
La voici, déjà à l’orée du bois. A grandes enjambées de garçon, dirait sa mère – sa mère ! De rage, elle donne un grand coup dans la terre détrempée qui éclate en mille gouttelettes noires. Elle reprend sa marche, violente. Les galoches s’enfoncent, lourdes dans la terre collante, humide. Cette grosse terre qu’elle pétrit de ses foulées d’adolescente – jeune insolente sans brides – sa crinière brun-rouge glisse peu à peu sur ses épaules encore frêles. Un désir soudain de saisir à pleins doigts la boue. La terre sent une odeur âcre, brûlante. Elle lui enserre les mains, l’étreint. La jeune fille la respire, s’en barbouille le visage. Le vent s’est levé, l’orage là-bas qui rage par-delà Reims, la terre amère, fumante, comme les crottins que laissent derrière eux les gros chevaux du père Jacquin. Elle se met à crier, l’envie de crier sans fin, d’expulser un désir incommensurable, l’envie d’être sans retenue, indécente.
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Elle a tout obtenu de la vie ; elle peut mourir maintenant. Camille se sent dangereusement puissante, elle aime, elle connaît l’amour, le reste est sans importance. Volontairement, elle patauge dans les flaques. Plus personne ne pourra la raisonner, plus personne à la maison ne lui dira quoi que ce soit. Elle connaît l’homme, elle est homme et femme, elle est sculpteur ! De grandes œuvres naîtront de ses mains, colossales, comme ce qu’il fait, lui. Elle saura apprendre encore et encore. Un jour elle sculptera une œuvre géante, comme Michel-Ange. Cette nuit elle a compris l’intelligence de la chair, elle a saisi ce qui lui manquait. On dit que les vierges sont invincibles : elle pense tout le contraire. Ce soir elle n’est plus la jeune fille incomplète, elle est une femme, libre, qui marche dans la nuit et qui sait où elle va. Ce soir, elle est Diane et Aphrodite, elle domine, le monde est à ses pieds. Cette nuit, elle a possédé un homme, l’homme qu’elle aime, ce soir Monsieur Rodin l’a aimée pour la première fois. Elle est aussi forte que l’amour même.
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Il y avait une fois un petit clown qui avait enfilé en cachette les grandes chaussures de la vie. Mais il les avait mises à l'envers. Le pied gauche était à droite et le pied droit était dans la chaussure de gauche.
Il partit tête baissée et se retrouva sur le nez. Mais son cœur était plus large que les chaussures : on pouvait y mettre les deux pieds. Les gens ne s'en privaient pas. Ils enfilaient son cœur et piétinaient avec.
Comme le petit clown ne voyait pas plus loin que le bout de son nez, il remit les grandes chaussures à ses mains pour mieux tâter la vie et ses pieds dans son cœur. Alors il se mit à courir : mais là où il posait les pieds, son cœur s'écrasait, et quand il ouvrait les bras, il perdait ses chaussures.
Il réfléchit, mais les yeux grands ouverts, et perdit son nez.
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Camille déteste ces femmes qui ne disent jamais ce qui leur fait ou non plaisir. Eternelles victimes, elles se sacrifient à tout jamais. Ayant réfrène leur joie, elles ne peuvent plus que subir. Elles ont de dressé un tel barrage devant le plaisir que même un plat, une fleur, ne provoquent plus chez elles le moindre acquiescement. Toute existence est en forme de croix. Camille, du fond du coeur, remercie Monsieur Rodin de lui avoir communiqué le goût du plaisir. De toute façon, elle l aurait trouvé. Toute petite, elle s'était juré de chercher toujours plus loin. Il y a un certain égoïsme qui est une forme de santé. La réflexion de son père, un jour, est restée gravée dans sa mémoire d'enfant. "Camille, dis aux autres ce qui te fait plaisir. Le sacrifice peut aliéné tout le monde. Que les autres sachent ton vrai désir. Rien n'est pire qu'on se sacrifié pour vous. Ce n'est pas un cadeau à faire. Pour un homme, c'est une forme insupportable de chantage."
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Le sculpteur donne des recommandations précises, rapides. Camille l'écoute un peu en retrait.
cet homme à l'air gauche, mal assuré, devient sobre et rapide dès qu'il parle sculpture. Il semble grandi. Une autorité, une énergie insoupçonnées. les mains montrent, caressent, reprennent la terre mouillée.
Soudain, il attrape le crayon et dessine un détail sur un bout de papier. Camille ne détache plus ses yeux des mains du sculpteur.
Le buste "puissant"... Jamais elle n'a entendu de pareils conseils. Rien n'est laissé au hasard. Un formidable praticien. Elle a devant elle un admirable artisan, qui reprend, affirme, complète la matière. C'est de la vie qu'il manie. Il la voit partout et la restitue avec passion, avec force.
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