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Citations sur Sur mer et sur terre (10)

Il est des ciels trop bleus, et des soleils trop forts. Et des jours de trop grande fatigue ou de trop profonde lassitude, au cours desquels les éléments imposent victorieusement leur absolue puissance. Et nous enseigne l'humilité.
(Drôles de jeux)
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"Moi, j'sais même pas lire..."
Le pêcheur yéménite - ami de dix ans - s'était ainsi subitement interrompu, sans aller au bout de sa pensée, comme si l'essentiel était dit.
En ce début de l'année 2015, nous mâchions du qat face à la mer, sur la façade est de la péninsule d'Aden, juste à la sortie de la crique des pêcheurs de Crater, le quartier historique protégé des redoutables vents de la mousson d'été. Ainsi, nous tournions le dos au port moderne de Ma'alla et à l'intérieur de la baie, Towahi, ou Steamer Point (qui cent ans durant avait été le centre de l'animation de la British Crown Colony of Aden).
Ce jour-là, nous n'étions pas les seuls à mâcher du qat à cet endroit.
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A se laisser aller, l'être humain divague, à se laisser aller, le bateau dérive... mais il est loin d'être sûr que toute dérive soit chaotique.
(Peur ou amour)
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Depuis l'aube, le ciel pleurait.
Des nuages bas, serrés les uns aux autres, regroupés tels les membres d'une famille aux liens indéfectibles, se tenaient en suspens, recueillis au-dessus des crêtes du Djebel Shamsân. En silence, sans fracas de tonnerre ni souffle de vent, les nuages pleuraient une fine bruine sur le quartier de Crater, et, à cette heure, particulièrement sur Al'Aydarûs, le bidonville à flanc de volcan qui accueille en son giron (sur ses pentes) les maisons modestes mais colorées, petites mais débordantes de vie, d'un peuple d'honnêtes gens, dont les vies se tiennent face à la mer, et, à l'image des rondes des derviches, tournent autour de la mosquée nommée en hommage au saint homme qui selon la tradition avait, en le recueillant dans le creux de ses mains, redonné vie à un oiseau agonisant ; une mosquée blanche, millénaire, ornée de drapeaux verts flottants au vent, sur les marches de laquelle patientent des âmes sereines, des discrets en paix avec les hommes et l'univers, aux coeurs emplis des doux bienfaits de la sakîna (la quiétude), cette grâce accordée par le Ciel à ses enfants préférés - ceux qui lui sont demeurés fidèles. Sous une atmosphère éplorée donc ; ainsi se réveillait Aden en une matinée qui devait pourtant être identique aux autres.
Abû Hâfez
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Il est des ciels trop bleus, et des soleils trop forts et des jours de grande fatigue ou de trop profonde lassitude, au cours desquels les éléments imposent victorieusement leur absolue puissance. Et nous enseignent l'humilité.
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Une énième page lue, Gaël referma l'épais volume afin de fixer l'horizon, vers l'Est. Au loin, encore intangibles, perçaient les reliefs très bas des premiers îlots de l'archipel de Socotra. Presque rien. Après avoir soufflé avec ennui puis considéré les terres elles aussi lointaines qui se dessinaient au Sud, les si redoutables territoires des pirates (..) le jeune breton rouvrit le livre à la page qu'il avait écornée bien des années plus tôt, alors que ce voyage n'était seulement pas envisageable.
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Délaissant la vue du lourd navire refermé derrière ses portes métalliques, le trio reprit son ballet au rythme proposé par la houle. Devant ces hommes détrempés, des heures encore à faire face. A leurs côtés, la sombre et forte tempête, les vagues élevées et les creux profonds. Au-dessus d'eux, le ciel sombre et colérique. Tout autour d'eux, le sublime. Avec lequel ils avaient un contact physique, et qui, par leurs yeux, leurs narines et chaque pore de leur peau s'inoculait au plus profond de leur être.
(Sur mer)
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Abû Hamza rigola en écho à certains souvenirs évoqués par un des jeunes. Des souvenirs communs d’instants de périls, là-bas, au large, au cours desquels ils avaient risqué leurs peaux, les hommes en partageaient par dizaines ! Histoires de coups de vent, de prises périlleuses, de rencontres avec les pirates de l’autre côté du golfe… chacune des fortunes de mer vécues par-delà la ligne de l’horizon leur revenait sous la forme de sourires francs et leur arrachait des éclats de rire sonores, aussi vivifiants que les rafales de vent du large.
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À neuf ans, sur les eaux de la mer Rouge puis sur celles du golfe d’Aden, il avait esquissé son apprentissage de bahhâr (marin) aux côtés de son père et de ses oncles. Jusqu’à dix années en arrière, les souvenirs étaient joyeux et sains, environnés d’une nature aussi clémente que généreuse. Alors, la vie filait, à un rythme compréhensible, à l’image des marées qui vont et viennent depuis l’aube des temps. Puis, au fil des années passées au contact des experts étrangers, des gens qui disaient savoir, qui apportaient une science venue de l’extérieur, Abû Ahmad était parvenu à accumuler. Il avait acquis son propre bateau, démultiplié la puissance de ses moteurs, grossi aussi la taille de ses filets, avait même fini par acquérir trois houris supplémentaires confiés à des équipages de confiance. Mais, depuis dix ans, au rythme de l’augmentation des prix de l’essence, des moteurs et des pièces détachées (au départ très accessibles), Abû Ahmad n’avait cessé de s’endetter. Avec les ans, il en était finalement venu à constater qu’en suivant les conseils des étrangers qui disaient savoir, il n’avait jamais que bâti les murs de sa propre prison, ou, image pire encore à un pêcheur, n’avait jamais qu’ajouté un par un des boulets à ses pieds… En croyant développer ses activités, il s’était attaché de plus en plus de poids aux deux chevilles, lesquels poids désormais l’entraînaient vers le fond… Tant d’argent dû, à rembourser ! Et voici que ceux qui vingt ans plus tôt prêchaient d’investir, de pêcher plus, plus loin et plus efficacement, et prêtaient abondement l’argent dans ce but, revenaient maintenant lui dire de pêcher moins, moins loin et moins efficacement ! S’il considérait depuis plusieurs années déjà les étrangers conseilleurs comme des vendeurs de sommeil, et leurs chiffres comme des inepties (Quelle nouvelle camelote viendraient-ils vendre dans dix ans, sur la base d’autres chiffres et d’autres preuves irréfutables ?), son reproche le plus sévère il se l’adressait à lui-même : d’avoir écouté. Essentiellement, au plus profond de son être, le pêcheur vieillissant se remémorait avec nostalgie ses premières années sur l’eau. Loin dans le passé. Les années de navigation sur des coques de bois, et sous des voiles de coton. Les années de pêche simples et suffisantes, lentes et joyeuses, libres : un âge d’or perdu… Dont il avait été séparé par… des chiffres, des études, des graphiques et des statistiques ! Irrémédiablement. Des preuves scientifiques identiques à celles que l’expert étranger pointait maintenant du doigt.
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En poussant leurs moteurs à fond, les maigres barreurs projetèrent les coques fines et fières en direction du large, laissant loin derrière eux les remparts protégeant le palais présidentiel, ainsi que la silhouette – sinistre, lourde et grise – du navire des garde-côtes repus.
Devant eux, la mer.
Déjà, les couleurs joyeuses des houris bondissaient d’une vague à l’autre, en faisant songer à l’énergique, libre et insouciante avancée d’un banc de dauphins.
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