La pensée de Spinoza présentée par Deleuze, c'est plutôt la pensée de Deleuze qui s'ébroue dans Spinoza. c'est souvent stimulant, mais je ne suis pas sur d'avoir approcher la pensée du promoteur de la joie comme affect idéal.
"Un ouvrage dont les chapitres sont des articles plus ou moins longs sur la pensée de Spinoza.
Le deuxième ""sur la différence de l’Éthique avec une morale expose en trois parties la grande thèse de Spinoza : une seule substance ayant une infinité d'attributs, Deus sive Natura, toutes les ""créatures"" étant seulement des modes de ces attributs ou des modifications de cette substance.
1 - Dévalorisation de la conscience au profit de la pensée : Spinoza le matérialiste
2 - Dévalorisation de toutes les valeurs et surtout du bien et du mal au profit du bon et du mauvais : Spinoza l'immoraliste
3 - Dévalorisation de toutes les passions tristes au profit de la joie : Spinoza l'athée
C'est clair et expressif, mais surement plus nietzschéen que spinoziste.
Le troisième chapitre traite de la question du mal au travers de l'étude d'une série de lettres avec Blyenbergh. Pour Spinoza, comme pour les rationalistes du XVII° siècle : le mal n'est rien, il n'y a pas de mal en soi, mais du mauvais pour moi. Spinoza utilise largement le modèle de l'empoisonnement, des toxines qu i détruisent les rapports entre les éléments.
le quatrième chapitre est un lexique détaillé des principaux concepts de l""Ethique"" : dense et technique. La lecture directe de l’éthique n'est pas plus profitable.
Au total un livre assez disparate dont la difficulté de lecture n'est vraiment pas homogène."
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Lorsque nous rencontrons un corps extérieur qui ne convient pas avec le nôtre, tout se passe comme si la puissance de ce corps s'opposait à notre puissance, opérant une soustraction : on dit que notre puissance d'agir est diminuée et que les passions correspondantes sont de tristesse. Au contraire, lorsque nous rencontrons un corps qui convient à notre nature, on dirait que sa puissance s'additionne à la nôtre : les passions qui nous affectent sont de joie, notre puissance est augmentée ou aidée.
En effet la proposition cinétique nous dit qu'un corps se définit par des rapports de mouvement et de repos, de lenteur et de vitesse entre particules. C'est à dire : il ne se définit pas par une forme ou des fonctions. La forme globale, la forme spécifique, les fonctions organiques dépendront des rapports de vitesse et de lenteur. Même le développement d'une forme dépend de ces rapports, et non l'inverse. L'important, c'est de concevoir la vie, chaque individualité de vie, non pas comme une forme, ou un développement de forme, mais comme un rapport complexe entre vitesses différentielles, entre ralentissement et accélération de particules. Une composition de vitesses et de lenteurs sur un plan d'immanence. Il arrive de même qu'une forme musicale dépende d'un rapport complexe entre vitesses et lenteurs des particules sonores. Ce n'est pas seulement affaire de musique, mais de manière de vivre : c'est par vitesse et lenteur qu'on se glisse entre les choses, qu'on se conjugue avec autre chose : on ne commence jamais, on ne fait jamais table rase, on se glisse entre, on entre au milieu, on épouse ou impose des rythmes.
Est-il possible de faire avec la multitude une collectivité d'hommes libres au lieu d'un rassemblement d'esclaves ?
En tout société, montrera Spinoza, il s'agit d'obéir et rien d'autre : c'est pourquoi les notions de faute, de mérite et de démérite, de bien et de mal, sont exclusivement sociales, ayant trait à l'obéissance et à la désobéissance. La meilleure société sera donc celle qui exempte la puissance de penser du devoir d'obéir, et se garde en son propre intérêt de la soumette à la règle de l’État, qui ne vaut que pour les actions. Tant que la pensée est libre, donc vitale, rien n'est compromis ; quand elle cesse de l'être, toutes les autres oppressions sont aussi possibles et déjà réalisées, n'importe quelle action devient coupable, toute vie menacée.
Si bien qu'en attaquant le philosophe on se donne la honte d'attaquer une enveloppe modeste, pauvre et chaste; ce qui décuple la rage impuissante; et le philosophe n'offre aucune prise, bien qu'il prenne tous les coups. Là prend tout son sens la solitude du philosophe. Car il ne peut s'intégrer dans aucun milieu, il n'est bon pour aucun.
Frédérique Berthet Never(s) éditions P.O.L : où Frédérique Berthet tente de dire de quoi et comment est composé son nouveau livre "Never(s)" et où il est notamment question de Casablanca et de Saint-Benin-des-Bois, entre 1942 et 1948, de la libération de la France et de l'Indochine, de Gilles Deleuze et de Marguerite Duras, d'amour et d'éloignement, de jamais et de toujours, de correspondance et de parenthèses, de la différence entre écrire, écrire des lettres et faire des écritures, et de Nevers, à l'occasion de la parution aux éditions P.O.L de" Never(s)", à Paris le 4 juin 2020
"un jour vous avez sorti la valisette de l'ombre de la
chambre
toutes les disparitions étaient envisageables
même la vôtre, que vous avez vue venir
toutes, sauf ces efforts ces élans inspirés avec plume
encrier papier
– vos écritures
je vous ai lue, j'ai nagé
de Saint-Benin à Saïgon
il se pourrait donc bien que ce livre ait commencé de
s'écrire un été 42, dans une caserne de l'infanterie coloniale
de Casa."
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