T’interdire de punir t’obligera à les occuper.
Dis-toi bien que l’éducation commencera le jour où l’atmosphère sera complètement débarrassée du moindre miasme de « sanction ».
Et les plus difficiles à désinfecter seront peut-être les enfants.
Lorsque tout marche bien, il est temps d'entreprendre autre chose.
N'oublie jamais de regarder si celui qui refuse de marcher n'a pas un clou dans sa chaussure.
Une nation qui tolère les quartiers de taudis, les égoûts à ciel ouvert, les classes surpeuplées, et qui ose châtier les jeunes délinquants, me fait penser à cette vieille ivrognesse qui vomissait sur ses gosses à longueur de semaine et giflait le plus petit, par hasard, un dimanche, parce qu'il avait bavé sur son tablier.
Si tu joues au policier, ils joueront aux bandits. Si tu joues au bond Dieu, ils joueront aux diables.
Si tu joues au geôlier, ils joueront aux prisonniers.
Si tu es toi-même, ils seront bien embêtés. (p. 16)
Mieux vaudrait peut-être voir auprès des enfants malheureux de vieux bagnards parés du titre d'éducateur que certaines "âmes" de bonne volonté.
Car si les uns peuvent dégoûter du vice, les autres dégoûtent de la vie honnête.
Méfie-toi : celui qui se montre, c'est qu'il a envie de se faire voir, donc de se cacher. (p. 21)
Si tu viens les poches pleines de jouets, en une heure ils en feront du bois cassé. Si tu viens la tête pleine de projets, en trois jours ils seront usés. Et les journées ont vingt quatre heures, les semaines, sept journées, les mois, quatre semaines et les années douze mois.
Si, une fois lus, quelques-uns de mes propos frémissent gaiement dans le ciel de quelques mémoires, tant mieux : c'est là leur raison d'être. Mais celui qui voudrait s'en servir, les appliquer en quelque sorte, s'apercevrait du même coup, de quoi ils sont faits : des morceaux de pages lues encollés et tendus sur les branches souples et légères arrachées à une espèce particulière d'enthousiasme qui surgit chaque fois qu'un enfant m'aborde, qui a été mille fois scié, abattu et dont la souche n'en finit pas de pousser des rejets.
Arrange-toi pour qu'ils aient toujours cette sensation de choix, hors de laquelle il n'est pas de bonne volonté possible. (p. 14)