« Rien n’est si beau, si pur et en même temps si grand qu’un lac, étalé à la surface de la terre. L’eau du ciel. Il n’a besoin d’aucune barrière. Les nations vont et viennent sans le profaner. C’est un miroir qu’aucune pierre ne peut briser, dont jamais le vif-argent ne s’efface, dont la dorure naturelle ne s’écaille ; aucune tempête, aucune poussière ne peut brouiller son onde toujours fraîche ; un miroir dans lequel se noient toutes les impuretés, balayé et lavé par l’effleurement brumeux du soleil. Voici ce léger chiffon à poussière, qui ne retient aucun souffle mais qui envoie le sien loin dans les nuages, au-dessus de l’eau, et se reflète calmement en son sein. »
Henry David Thoreau.
Toutes les chaînes mentionnaient l’affaire, montant en épingle les détails donnés par la presse du matin, diffusant une avalanche d’images. On la voyait grimacer devant la caméra ou tenter de se cacher le visage. Certaines étaient plus glamour. Après son arrivée à Boston, Lily s’était fait faire un press-book à des fins publicitaires. Elle possédait aussi des clichés plus anciens, élégants et raffinés. Bien évidemment, les médias n’avaient pas utilisé ceux-là. Ils avaient choisi de dépeindre une femme entretenue par des hommes puissants, vivant bien au-dessus de ses moyens et avaient sélectionné des images plus sensationnelles, prises au cours de ses débuts à New York.
Des clichés le montraient serrant la main d’hommes politiques d’envergure nationale ou éclatant de rire avec des collègues dans les bars de Boston. Il y en avait un pris au cours d’une fête de Noël lui et Marley dans la salle de rédaction entourés d’une foule d’amis. Là, un agrandissement de sa photo de carte professionnelle au Post : cheveux courts, mâchoire serrée, yeux fatigués, teint pâle. Il ressemblait à un homme sur le point de louper le scoop de sa vie, ou en proie à une douloureuse crise de constipation.
Ces photos témoignaient de sa vie antérieure comme le scanner captant la police qu’il avait désactivé et rangé dans une armoire.
Leur refuge de prédilection était l’île de No Man, située en plein milieu du lac. À douze ans, ils y allaient à la rame pour fumer de l’herbe. À treize ans, ils y avaient pris leur première cuite, à quatorze, y avaient perdu leur virginité, l’un après l’autre, avec une fille plantureuse et consentante, de deux ans leur aînée. Après le collège, Charlie était rentré dans le droit chemin, déterminé à faire revivre l’entreprise familiale qui était en perte de vitesse et à conquérir le cœur d’une femme qui possédait l’énergie, la méthode et les idées pour la faire revivre.
ce, mais n’avait pas d’argent pour aller devant les tribunaux. Elle n’avait pas le cœur de se lancer dans une guerre longue de trois ans. Certainement pas dans le genre de combat dont parlait Maxwell Funder.
La seule chose dont elle avait envie, c’était de s’enfuir. C’était un désir incontrôlé. Elle avait besoin de retrouver une vie – un peu de vie, n’importe quelle vie. Pour cela, elle avait besoin de dormir, de liberté. Elle avait besoin de quelqu’un qui prenne sa défense.