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Rentrée littéraire 2021.

Delta Blues est un énorme COUP DE COEUR. C'est le chant du Mississippi, au rythme de l'auteur, des mots, des vies et du blues.

Ce sont les années trente, la dépression, la prohibition, l'exil de quelques juifs d'Allemagne, le K. K. K. et par-dessus tout la musique pour ceux qui vivent dans le delta.

Le delta est peuplé de noirs, de cajuns, de blancs, de métisses et de quelques juifs , fuyant l'Allemagne et Hitler. Des vies avec leurs secrets, leurs fardeaux, leurs espoirs.

Ce sont aussi les racines, animisme, dieux, superstition, religion. Avec pour certains la magie, le vaudou, les envoûtements, la guériseuse. Quelques uns vendent leur âme au diable.

Il y a aussi le K.K.K. qui mène la danse et fait taire toute contestation d'autant que les élections approchent et qu'une démonstration de puissance s'impose.

Après viennent Betty et Steve qui s'aiment et sèment le bonheur autour d'eux. Mais personne n'est immunisé contre le mal Betty sera envoûtée par un joueur de blues mais Steve restera fidèle et aimant jusqu'au bout.
Il y a aussi un pasteur à faire perdre la foi. Élias parti en Europe pendant la grande guerre pour tuer du blanc, qui a continué dans les abattoirs.

Delta Blues ce sont de cours chapitres, une écriture musicale et une histoire comme il y en a beaucoup eu avec une part de fantastique L'amour, la haine, la folie, la jalousie, la peur, e pouvoir, l'orgueil tout ce qui fait le delta et ses habitants. Une bien belle partition de Julien Delmaire.

En fin de roman, vous trouverez une discographie sélective et une bibliograpie mais je vous conseille la poésie et la musique de l'auteur.

Merci aux éditions Grasset.

#Delta Blues#NetGalleyFrance
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Coloré, noir mais lumineux, ce récit fait renaître une époque, un monde. le delta du Mississippi, berceau du blues, est aussi l'enclave où vivent tous les héros de ce roman choral qui bruisse, fourmille, rythmé par toutes ces voix se chevauchant et formant un choeur parfois discordant. Julien Delmaire a une langue qui pulse, entre vaudou et moiteur du bayou non loin, luttes de pouvoir et révolte qui gronde, dur labeur hérité des planteurs et réconfort procuré par la chaleur humaine nocturne (plus de détails : https://pamolico.wordpress.com/2021/09/03/delta-blues-julien-delmaire/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
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Résonnent en moi, les voix de Bessie Smith, Son House ou Charley Patton, alors que je viens de refermer Delta blues, le roman de Julien Delmaire. (Rentrée littéraire 2021, eh oui, j'ai du retard).
Coup de coeur et pas coup de blues.
Non, ce n'est pas un énième pamphlet sur l'esclavage, ou le racisme d'une certaine Amérique.
Bien sûr, cela y ressemble, le décor, l'atmosphère, la couleur de peau.
Delmaire nous entraîne au coeur du Mississippi, dans les années trente.
Ses personnages ont la peau sombre et mènent une vie qu'on ne peut leur envier, dans une région où le Klan fait régner la terreur par le feu et la corde.
Pourtant, chacun s'accroche à ses rêves, promesses de jours meilleurs, d'égalité dans le confort, le travail,  de bonheur ou même de pouvoir.
Lavandière, prostituée, portefaix ou bagnard à chacun sa peine, à chacun son combat, à chacun son hymne.
Il y a même une sorcière et un Dieu vaudou.
Il faut bien ça, si l'on veut survivre.
Parce qu'ici, on meurt aussi, souvent dans l'indifférence.
Sous la plume du romancier, je me suis immiscé dans la vie de cette communauté. J'ai vécu leur misère, soutenu leur colère, affronté leurs peurs, souffert avec eux, j'ai prié à leur côté et j'ai chanté.
La chanson des bagnards, la chanson des portefaix et le blues.
Cette fameuse musique, ce fameux blues.
Dans une écriture magnifique, l'auteur, une plume en guise de guitare, nous conte l'histoire de Betty, Steve et autres Joshua.
Une galerie de personnages qui ne laissent pas indifférent.
Ce Delta blues ne vole pas son titre, c'est un cri, c'est un chant, c'est un beau roman que je vous encourage à découvrir.
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1932, Mississippi.
Noirs, blancs, métis, indiens...... toute une population miséreuse.
Heureusement, il y a le blues !
Toute une foison de personnages.
Tellement que je m'y suis un peu perdue.
Une belle écriture, une belle fresque historique.
Beaucoup de qualités pour ce roman dans lequel malheureusement je ne suis pas rentrée complètement.
J'avoue avoir survolé autant de pages que j'en ai lues.
J'ai un peu honte de ne pas m'être concentrée davantage car je suis persuadée que c'est un bon roman.
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Tout comme dans Minuit, Montmartre, seul autre roman lu de l'auteur, l'Histoire se mêle à la fiction dans cet ample tableau du Delta du Mississipi des années 1930. Histoire d'un art, de nouveau, non pas pictural cette fois, mais musical, avec le blues, qui sinue tout le long de l'intrigue, fusionne avec elle pour en faire, finalement, profondément partie, notamment dans l'écriture, qui pulse, qui chante les lamentations de Betty, de Steve, de Bobby, de Dora, du pasteur, de Sapphira… dans un rythme parfois saccadé et brutal, parfois lancinant et incantatoire. Histoire d'une région également, encore en pleine ségrégation raciale, qui essaie de ne plus s'y accorder, du moins de ne plus laisser la fatalité faire comme elle l'entend face aux violences et aux exactions des Blancs, avec plus ou moins de succès. Histoire d'une religion ancestrale, enfin, le vaudou, qui lie le blues au Delta qui l'a en partie engendré, dans un tourbillon envoûtant emportant le lecteur dans ses méandres tout autant inquiétants que fascinants.

Histoire puissante, dans tous les cas, racontée par de brèves scènes, souvent fulgurantes, qui s'intéressent à un personnage, parfois historique, à un mouvement, à un son, à un lieu… au moindre tressaillement qui fera avancer le lecteur au milieu du Delta, avec ses habitants, ses secrets, ses drames, jusqu'aux découvertes finales, qui feront prendre tout son sens, non seulement à la place de chacun, mais aussi de chaque chose, dans ce microcosme du Mississipi.

Je remercie les éditions Grasset et NetGalley de m'avoir permis de découvrir ce roman.
Lien : https://lartetletreblog.com/..
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Julien Delmaire, né en 1977, est un poète et écrivain français. Il anime de nombreux ateliers d'écriture dans les établissements scolaires, en milieu pénitentiaire et dans les hôpitaux psychiatriques. Son nouveau roman, Delta Blues, vient de paraître.
Je ne sais pas si le Mississipi est en crue mais ses eaux inondent ce bouquin et plusieurs de mes lectures récentes (Eddy L. Harris : Mississipi solo ; Hervé Gagnon : Crossroads) et pour faire bonne mesure, Robert Johnson le bluesman est dans tous les coups. Hasard ou maléfice vaudou ?
Clarksdale et sa région dans le delta du Mississippi en 1932. Dans la communauté Noire, Betty et Steve, sont jeunes, beaux et ils s'aiment. Mais quel peut-être leur avenir quand la ségrégation règne avec son bras armé le Ku Klux Klan qui répand la terreur à la lueur des croix enflammées ?
Un résumé hyper-court et à cent lieues du contenu de ce roman qui en réalité est une véritable fresque s'attachant à restituer la vie et l'ambiance d'une communauté dans le delta du Mississipi à cette époque particulièrement dure pour les gens de couleur. L'écrivain ne va donc pas se cantonner à suivre Steve et Betty - ce qui m'a surpris au début de ma lecture – mais au contraire, il éclate son récit en de multiples vignettes dressant le portrait d'autant de personnages tout aussi importants ou parfois secondaires : Steve bosse dans une boulangerie, Betty dans une blanchisserie et sa tante Sapphira est la guérisseuse/sorcière locale ; propriétaires Blancs et riches, cueilleurs de coton Noirs et pauvres ; shérif raquetteur des petits commerçants ; politiciens véreux ; distilleurs d'alcool et trafiquants ; prostituées dans des bouges minables où on joue du Blues. Tyrannie du Blanc sur le Noir mais réalité plus complexe quand le pauvre pactise avec le riche espérant s'en tirer ; racisme éhonté avec Ku Klux Klan et violences contre les Noirs, mais Le Blanc ne rechigne pas à violer celles qu'il abhorre par ailleurs ; Pasteur alcoolique ou pire encore… Etc. Il y aurait tant à dire. La galerie de portraits est complète, les liens psychologiques entre les uns et les autres parfaitement esquissés.
Julien Delmaire connait son affaire, on peut même se demander si ce livre n'est pas en réalité un hommage au Blues. Sous couvert d'une histoire multiple, il reprend les grands thèmes des classiques du blues et pour que son message soit clair, il fait intervenir comme personnages secondaires de fameux musiciens, Robert Johnson le cador du genre (un rôle plus que secondaire en fait), Son House, Willie Brown…, nous inoculant « la maladie de vivre ». Et qui dit blues, dit diableries, Sapphira la tante de Betty convoque Legba, la divinité vaudoue pratiquant la métamorphose.
Un excellent roman. L'écriture est magistrale flirtant parfois avec la poésie quand l'intrigue le demande, certaines pages sont grandioses, le lecteur s'inquiète quand le mystère rôde, enrage quand la brutalité et la vilénie frappent les faibles, retient ses larmes quand l'émotion est trop forte (l'enterrement de Dora la prostituée assassinée par exemple) et se réjouit de croiser ses bluesmen favoris dans des situations très crédibles.
La fresque historique s'achève en 1946, certains depuis sont morts, d'autres reviennent de la guerre en Europe constatant qu'ici encore Noirs et Blancs ne cohabitent pas alors qu'à Paris il y a peu, ils flirtaient avec les jeunes filles de leur âge. Après toutes ces années et malgré les épreuves, Steve le Noir et Aaron Posner, vieux tailleur Juif, immigré venu d'Allemagne sont toujours amis. Envers et contre tout, comme un symbole d'alliance entre les proscrits.
Ne ratez surtout pas ce roman c'est une pure merveille tant pour le style que pour l'émotion qu'il suscite.

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Il fut inventé par les opprimés des champs de coton du sud des États-Unis. le blues, une musique qui chante la tristesse, la nostalgie et le désespoir, et qui leur donnait le courage.
Delta blues nous entraine dans une petite bourgade le long du Mississippi dans les années 30. le bourg grouille de vie, d'âmes et de d'esprits.
Alors que le Klan est on ne peut plus actif ; que la taverne accueille autant les bluesmen itinérants que Dora la prostituée habituée des lieux et chanteuse appréciée ; que Rachel et Aaron un couple d'émigrés juifs tentent de refaire une vie loin des leurs dans les affres du nazisme ; Betty et Steve émergent de ce cloaque à ciel ouvert, solaires, amoureux et malgré tout confiants en l'avenir.
Julien Delmaire déroule son roman, lentement telle une complainte, en posant méthodiquement son propos, et ses personnages. Ici où là, surgit la sorcière et Lebga, divinité vaudou aussi insaisissable que méconnaissable.
Le blues inonde littéralement ce roman choral où se perd parfois, pour mieux nous rassembler autour d'une guitare et d'un harmonica, et d'un verre d'alcool de contrebande.
Julien Delmaire donne à son récit une ambiance incroyablement musicale, pulsée, chantante. Son écriture est imagée, puissante, parfois crue. Elle évoque parfaitement le fardeau de ces gens qui n'ont que la musique pour chanter leur révolte et apaiser leurs douleurs.

Lien : https://leblogdemimipinson.b..
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J'ai découvert cet auteur le mois dernier suite à une résidence dans ma ville. J'ai participé à un stage d'écriture et était présente lors de sa lecture d'extraits de Delta Blues. Il était accompagné pour l'occasion de Nicolas Repac musicien. Cela a été une magnifique performance. La voix, le corps et la musique accompagnaient parfaitement le texte. Delta Blues est un roman de presque 500 pages avec de nombreux personnages gravitant autour de Betty et de sa tante Sapphira, une sorcière noire. Les évènements se déroulent en mai 1932 dans le delta du Mississippi, dans une petite ville où cohabitent sans se mélanger les blancs et les noirs. Les blancs tiennent les cordons de la bourses et du pouvoir institutionnel. Les noirs sont assignés à des tâches subalternes et sans avenir. Il y a le maire corrompu et le sheriff à sa botte, proche du Ku Klux Klan. Mais ceux qui ont vraiment le pouvoir ce sont les propriétaires terriens. le roman est axé sur le peuple noir. Il est inauguré par une créature nommée Legba. C'est une entité du folklore africain qui a accompagné les africains dans la traversée de l'océan atlantique dans des navires négriers. Betty est blanchisseuse. Elle est mariée à Steve. et malgré leur amour, ils ne parviennent pas à concevoir. Même, en dépit des décoctions de sa tante. Il y a Elias qui s'est engagé dans l'armée, la violence de la guerre était le seul exécutoire à sa douleur, à sa haine de l'homme blanc. Revenu, il est devenu auxiliaire de police auprès du sheriff. Il y a un couple de juif, ayant fui les persécutions nazis. Il y a le pasteur Lloyd, imbibé d'alcool, égaré dans sa foi. Il y a Dorothy, chanteuse de cabaret et gourgandine. Joshua, son tout jeune fils est adopté par le couple Betty et Steve lorsque Dorothy est victime d'un meurtre effroyable. le sheriff n'enquête pas. le meurtre d'une femme noire, qui plus est une catin est sans importance.
C'est un roman dense, sur la société américaine, sur les rapports entre la population blanche et noire et entre les noirs eux-mêmes. C'est un roman sur la situation des noirs américains au sortir de l'esclavage. C'est un roman sur comment redevenir un homme, une femme, un être humain. C'est une roman sur la question identitaire. C'est un roman fascinant.
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J'ai eu la chance de rencontrer le poète et romancier Julien Delmaire, d'échanger avec cet homme solaire et de l'entendre parler de son « Delta Blues », qu'il a écrit (comme ses autres livres) à la machine à écrire dans sa cuisine, sur fond de blues !

C'est donc sur fond de blues (Son House) que j'ai l'espoir de réussir à écrire cette chronique sur son livre (« L'espoir c'est la salive du pauvre »)… car je lui dois d'avoir découvert cette musique qui m'était jusqu'alors inconnue, ces mélodies envoûtantes qui rendent addict, ce blues qui était joué et chanté dans les cabarets où les hommes, les damnés, venaient « fêter, exister, renaître ». Ce blues qui constitue l'une des trames de son roman historique.
« Chanteur de blues dans ce genre de rade, c'est une sacré responsabilité. Tu veilles sur des dizaines d'âmes, tu les aides à traverser des récifs d'émotion et tu dois les embellir, les récurer de l'intérieur. T'es le garant de la beauté de la race, mon vieux !... »

Mais… partons pour le delta du Mississipi, en 1932, sous un soleil accablant et une pluie qui a oublié de tomber, rendant les propriétaires de plantation de coton agressifs et plongeant les pauvres travailleurs noirs dans le doute permanent du lendemain (pas de chômage là-bas !). Tous ceux qui ne sont pas blancs souffrent le martyre, le Ku Klux Klan se charge de terroriser et d'exterminer ; un assassin rôde la nuit et frappe ; l'Eglise baptiste est plus jugeante qu'elle n'est consolante. Pourtant, un couple rayonne, celui des personnages principaux BETTY et STEVE. Ils s'accrochent à leur amour, à l'espoir de ce qu'ils construiront, au milieu du monde hoodoo, de ses sorcières et son Dieu Legba, le « maître des carrefours ». Ils adopteront même l'attachant petit JOSHUA, le fils de la prostituée.

L'auteur nous plonge au coeur de la ségrégation raciale qui bat son plein à cette époque, faisant de tout être non blanc depuis des générations un sous-être, un coupable potentiel, un personnage dégoutant par nature et qui devrait avoir honte de sa vie, de sa couleur, de sa condition.
Des règles existent donc partout pour éviter aux blancs d'avoir à côtoyer les noirs de près (les quartiers, le bus, les wc publiques, …) Et autant la police que la justice les ignore, les enfonce même. La suprématie blanche ne connaît pas de limite dans sa cruauté.

Et pourtant « les premiers blancs que vous croiserez sont encore dans les langes, ils babillent et pleurnichent sur des visages d'ébène qui les surplombent, leur sont familiers, penchés au-dessus de leurs couffins depuis le premier jour, souriant à leurs caprices et les tançant avec une gentillesse confite de scrupules ».
Quel dilemme ! Quand de toute ton enfance, la seule femme qui a été tendre comme aurait dû l'être ta mère est une noire, et qu'on t'enseigne soudain que tu dois la mépriser et qu'elle doit t'inspirer le dégoût….. et que ton père te fait assister à la pendaison par le Ku Klux Klan d'un noir que tu côtoyais…..Peux-tu vraiment te construire, devenir un adulte équilibré, capable d'empathie ou deviens-tu automatiquement un être qui a dû couper avec toute humanité pour survivre à l'injustice ressentie par le petit enfant en toi ?!
Voilà ce que va vivre JAMES CONRAD, un des héros du livre, un homme déchiré, énigmatique, qui reproduit malgré lui.
L'auteur nous fait vivre quelques virées du Klan qui « déchaînait les furies »… ça fait froid dans le dos.
le Klan, c'est la démonstration ultra violente de l'homme faible qui a peur de perdre son pouvoir blanc et sent une révolte sous-cape noire venir pas à pas. Car ANDREW WALLACE, riche mûlatre, le fils bâtard non reconnu d'un riche planteur blanc a bien l'intention de devenir maire ! « Contente-toi d'être riche et vivant » lui dit ce père ambigu qui accepte la visite de ce fils si celui-ci passe par l'entrée de service !!!
Ce même fils qui « se mit à penser à sa mère et à sa foutue mentalité d'esclave. Cette femme était pour lui le symbole d'une race engluée, il éprouvait à son égard une affection distante, mêlée de mépris »

Pas si simples tous ces rapports humains ! Et pour compliquer un peu la chose, on fait connaissance avec l'Eglise baptiste et son PASTEUR LLOYD, veuf d'une mulâtresse et qui a toujours exigé de ses paroissiens qu'ils pardonnent à leurs bourreaux horreurs et injustices ! « La race noire devait faire preuve d'humilité, et plutôt que de rêver aux mirages de l'égalitarisme, faire amende honorable et se purger de la sauvagerie qui défigurait sa face. »
Et les fidèles viennent laver leur âme à l'office. C'est simple et peu onéreux…

Mais là où Julien Delmaire prend le plus de plaisir, c'est quand il flirte avec le réalisme magique, quand il invoque LEGBA, qu'il raconte SAPPHIRA la féticheuse de la forêt et tante de Betty, qu'il convoque les esprits et insuffle crainte et espoir à ses lecteurs. Les rites vaudou (hoodoo) font visiblement frémir notre auteur de plaisir ! Et nous avec lui…

Un livre profond, imagé, visuel et sonore, dont les chapitres courts m'ont d'abord un peu dérangée.
Je vais continuer à lire cet auteur qui met de la poésie jusque dans les pénitenciers dont on ne s'évade pas…

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Dans les méandres du Mississippi, une toile tissée des fils de la ségrégation et des rythmes envoûtants du blues prend forme dans Delta Blues de Julien Delmaire. En 1932, au coeur de la fournaise estivale menaçant les récoltes de coton, Delmaire déploie un tableau complexe de la vie dans cette petite ville du delta. À travers une multitude de voix, il explore les intrications tumultueuses de la société sudiste, où les tensions raciales et la prohibition font danser les destins de personnages magnifiquement dépeints.

L'âme de Delta Blues réside dans la dualité entre deux mondes étrangement liés à la ville basse, habitée par des âmes noires emprisonnées dans les griffes implacables de la survie, et la ville haute, où les Blancs conservent leur suprématie, soutenue par les sombres forces du Klan et les menaces qui planent. Les vies s'entrecroisent dans ce bourdonnement intense, où chaque personnage, des simples travailleurs comme Betty et Steve aux énigmatiques figures comme la sorcière Sapphira, laisse une empreinte unique sur cette mosaïque sociale.

Le récit s'élève au-dessus de la page grâce à l'habile utilisation des citations de bluesmen légendaires, un choeur poétique qui ajoute une profondeur supplémentaire à cette fresque. Delmaire dépeint la musique comme un fil conducteur transcendant le temps et l'espace, liant le destin de ces personnages à l'héritage musical profondément enraciné dans le sol fertile du delta du Mississippi. Les noms tels que Bessie Smith, Son House et Robert Johnson résonnent comme des échos du passé, nourrissant l'âme du récit.

Le style narratif de Delta Blues évoque un choeur de voix variées et parfois discordantes. Delmaire manie les phrases tantôt courtes et mélodieuses, tantôt longues et crues, créant une symphonie de langage qui capture l'essence brute de cette époque trouble. le lecteur est enveloppé dans une ambiance moite et étouffante, où le delta du fleuve devient un protagoniste à part entière, vibrant au rythme des souffrances et des espoirs qui s'entremêlent dans cette petite ville.

Le roman, bien qu'audacieux dans sa conception, peut sembler brouillon à certains moments, reflétant ainsi la cacophonie de cette époque et la multitude de voix qui cherchent à se faire entendre. Pourtant, c'est dans cette confusion que réside sa beauté. Julien Delmaire tisse avec adresse les fils du destin de chaque personnage pour former une fresque authentique et émouvante de la vie sudiste du delta.

Delta Blues est une plongée intense dans l'âme tourmentée d'une époque où la musique, les rêves et les luttes s'entremêlent dans une danse envoûtante. Dans cette oeuvre, Julien Delmaire laisse vibrer les échos d'un passé marqué par la souffrance, tout en illuminant les coins sombres avec des moments de beauté poétique. Une symphonie littéraire qui laisse une empreinte indélébile, résonnant longtemps après que la dernière page ait été tournée.
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