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Critique de Alfaric


Ce nouveau tome de la série « Ils ont fait l'histoire », collection de bandes dessinées qui prend la forme de biographies historiques présentant une dimension pédagogique car à destination du grand public, et qui espèrent vraiment que le public scolaire se prêtera au jeu, est consacré à Elisabeth Ière, la Gloriana de l'Angleterre éternelle !


Je vois d'ici les critiques presses expliquer que la narration perd le lecteur en multipliant les ellipses au lieu de tout expliquer des tenants et aboutissants des enjeux de tel ou tel épisode historique. Ils n'auront pas entièrement tort, mais le commun des mortels qui s'est intéressé aux "Tudors", "The White Queen", "The Devil's Whore", "New Worlds" et "Reign" ont depuis longtemps appris à utiliser wikipédia pour s'informer sur l'Histoire anglaise, au contraire de la caste journalistique et autres bobos hipster persuadés de tout savoir et de toujours avoir raison. En plus, pas besoin d'être un fin connaisseur de l'Histoire de l'Angleterre pour comprendre les enjeux de cet album : comment exercer le pouvoir quand on n'y a pas été préparé, surtout quand on est une femme !

On ne peut pas réaliser une biographie exhaustive d'un personnage historique de premier plan comment raconter la vie d'un personnage historique en moins de 50 pages sans effectuer des choix. On commence donc le récit avec la rivalité entre Marie Tudor, championne du catholicisme, et Elisabeth Tudor sa demi-soeur, point de ralliement de tous les partisans du protestantisme… (Vous ne savez pas ce que sont les guerres de religion ? Vous n'avez donc jamais été à l'école ou vous êtes journalistes ! ^^) Mais la Grande Faucheuse ouvre la voie à Elisabeth qui prend la place de Bloody Mary :
- pour éviter la guerre civile, elle évite de véritablement prendre parti et finalement continue l'oeuvre d'Henry VIII en développant l'anglicanisme
- pour éviter la guerre européenne, elle évite de s'impliquer dans chacune des guerres continentales
- pour éviter la révolution, elle multiplie les réformes financières et les oeuvres de charité
Les auteurs ont croisé les sources mélioratives et les sources péjoratives pour dresser un portrait contrasté mais finalement assez touchant d'une femme propulsée à la tête d'un Etat de premier plan à la croisée des chemins en cette fin de la Renaissance anglaise. En refusant le mariage pour rester à la tête de l'Etat, elle nourrit toutes les rumeurs et tous les complots, et faute d'héritier ceux-ci ne font que se multiplier… Alors que Mary Tudor avait pardonné à sa soeur pour lui confier le trône, quand les rôles sont inversés elle finit par faire décapiter sa cousine Mary Stuart alors que finalement c'est son fils qui prendra sa place… Après le bordel du roi fou et de la Guerre des Deux Roses, Henry VIII a remis le bordel avec ses mariages et répudiations à répétitions, avant qu'Elisabeth Ière ne remette encore une fois le bordel en restant sans descendance (sans parler des répercutions : on a à peine résolu la question galloise qu'on se lance à corps perdu dans les questions écossaise et irlandaise alors que niveau guerre de religions les braises couvaient encore plus que jamais !) Les contrecoups de l'exécution de la reine d'Ecosse Marie Stuart sont terribles et la reine d'Angleterre Elisabeth Tudor est bien près de perdre tout ce qu'elle avait gagné quand Philippe II envoie l'Invincible Armada mettre les choses au point au Nord-Ouest de l'Europe !
Mais on nous aussi conte le récit d'une femme, de ses amours, de ses haines, de ses espoirs, de ses craintes, troublée par la vieillesse et à la nostalgie, un temps tentée par la vie maritale quitte à perdre ce pour quoi elle s'est toujours battue en tant que strong independant woman, et qui se distraie avec des favoris avant de regretter de s'être éloignée de Robert Dudley, son ami d'enfance certainement, l'amour de sa vie sans doute…
La comparaison entre Elisabeth Ière avec Catherine de Médicis m'a sauté aux yeux, bien que la 1ère ait été qualifié de Reine Vierge alors que la 2ème ait enfanté à dix reprises : deux femmes qui sont passés de la prison au trône, parvenues au pouvoir sans l'avoir souhaité et condamné à l'exercer à une époque plus que troublée où les partisans du catholicisme et du protestantisme sont à couteaux tirés… Ces pionnières ont ouvert la voie aux femmes de pouvoirs en Europe, et peut-être dans le monde !


Pour accompagner cette biographie, les dessins d'Andrea Meloni assisté de Giulia Priori et de son studio Arancia manque d'ambition, de finition, de flamboyance, mais ils n'en restent pas moins tout aussi agréables qu'appréciables et m'ont fait passer un bon moment. Petit bémol peut-être pour le dossier historique, moins passionnant voire moins intéressant qu'à l'accoutumé car trop académique : peut-être le côté archiviste de Michel Duchein qui ici s'est laissé sentir ?
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