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Le Sang des Princes tome 1 sur 3
EAN : 9782918541226
400 pages
L'Homme sans nom (13/11/2015)
3.99/5   63 notes
Résumé :
Le destin des ducs Spadelpietra est assuré. Inexorable. Une ascension déterminée vers le pouvoir, vers la couronne, vers la place qui leur revient de droit. Ils sont les pacificateurs, les bâtisseurs, les gouverneurs de Slasie. Ils sont les Illustres.
Mais les nomades austrois y font à peine attention. Leur monde n'est fait que de théâtre, de musique, d'art et d'inventions dont ils gardent jalousement les secrets. Leur vie est une mécanique bien huilée, à l'... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (35) Voir plus Ajouter une critique
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Premier roman de Romain Delplancq et première partie d'un diptyque publié chez L'Homme Sans Nom, « L'appel des Illustres » a fait l'objet il y a quelques mois d'une réédition en format poche sur laquelle je suis tombée par hasard. S'il est désormais très rare que je cède à l'appel d'un ouvrage sur un coup de tête, sans m'être au préalable renseigné à son sujet, je n'ai cette fois pas pu m'empêcher de résister à la belle couverture de Gaelle Marco et aux promesses que laissant entrevoir le résumé. Et bien m'en a pris puisque cette lecture aura été une excellente surprise ! le roman met en scène une grande famille ducale, les Spadelpietra, qui ont su se tailler une réputation irréprochable tant auprès de l'aristocratie que du « bas-peuple ». Loin de se complaire dans les complots et les intrigues sordides qui occupent le reste de la noblesse, l'illustre famille prend soin de s'occuper de sa cité et de ses habitants, en améliorant leurs conditions de vie, en veillant à l'éducation de leurs enfants et en finançant tout un tas de projets qui contribuent à faire de Tandal une ville où il fait bon vivre. Bref, tout le monde s'accorde à le dire : les Spadelpietra sont un véritable modèle et ont bien mérité l'affection indéfectible que leur portent les gens du peuple, ainsi que l'influence de plus en plus grande qu'il exerce sur le royaume. L'incompréhension est d'autant plus grande pour le jeune Mical lorsqu'il manque de se faire enlever par des spadassins apparemment financés par la grande famille. Famille qui, manifestement, entend bien s'emparer de l'artiste par tous les moyens (y compris, évidemment, ceux parmi les plus discutables auxquels ils sont censés avoir renoncé...) La raison de cette attitude totalement contraire à la réputation immaculée dont se parent d'ordinaire les Spadelpietra ? Un tableau réalisé par le jeune homme et qui aurait des effets étranges sur les membres de l'illustre famille.

Difficile de ne pas se prendre au jeu de l'auteur qui parvient dès les premiers chapitres à capter l'intérêt du lecteur grâce à un très bon sens du coup de théâtre. le roman se lit ainsi rapidement et avec beaucoup de plaisir, quand bien même le rythme de ce premier tome demeure par moment un peu trop lent. Si l'ennui ne pointe à aucun moment, il n'en reste pas moins que le récit prend son temps et que le nombre de gros rebondissements est assez limité. Cela n'empêche pas le roman d'être captivant, d'autant que, si les événements vraiment déterminants ne sont pas nombreux, on sent tout de même que le danger n'est jamais vraiment très loin (même si on peine parfois à identifier la menace), ce qui renforce la tension qui habite une bonne partie du texte. La plume de l'auteur est quant à elle parfaitement maîtrisée : suffisamment fluide pour se faire oublier au moment opportun et ainsi rendre la lecture agréable, mais aussi suffisamment bien travaillée pour donner lieu à de beaux passages dans lesquels l'auteur peut se permettre de se montrer plus lyrique. La seule chose que l'on peut, à mon sens, vraiment reprocher à l'ouvrage tient à la manie franchement frustrante qu'a Romain Delplancq de nous laisser dans la même ignorance que ses personnages. L'auteur ne nous fournit en effet que très peu de pièces de ce complexe puzzle, ce qui empêche évidemment de se faire une vue d'ensemble des enjeux et de bien comprendre les motivations des personnages. Si la rétention d'informations s'avère certes efficace pour maintenir éveillée la curiosité du lecteur, elle peut aussi malheureusement nuire au récit, dans la mesure où on peut parfois s'agacer de voir les révélations tant attendues sans cesse repoussées. Ce n'est toutefois qu'un léger bémol, bien moindre en comparaison des qualités indéniables que possède par ailleurs ce premier tome.

Ainsi, si le rythme peut parfois sembler un peu lent, c'est avant tout parce qu'une bonne partie des chapitres ne servent pas tant à faire avancer l'intrigue qu'à immerger un peu plus le lecteur dans la culture dans laquelle baignent les personnages. Et c'est là l'un des gros points forts de l'ouvrage. le décor du royaume de Slasie a un petit côté Renaissance italienne, même si le territoire est ici unifié sous l'autorité d'un seul et même souverain. Tandal a toutefois des allures de cité-état, avec sa propre famille ducale à sa tête et sa relative indépendance. J'ai beaucoup aimé cet aspect de l'univers, même si on en sait encore trop peu sur l'histoire du royaume et son fonctionnement pour pouvoir bien appréhender tous les enjeux dont il est question ici. Si Tandal constitue l'un des décors les plus récurrents de ce premier tome, le lecteur passe cela dit la majeure partie du roman sur la route, aux côtés des Austrois, un peuple nomade composé de plusieurs clans se déplaçant de ville en ville pour faire bénéficier les habitants de leurs savoirs-faire. Et ceux-ci sont nombreux ! Artisans hors paires, ils sont par exemple réputés pour leurs automates et leurs innovations technologiques, à l'image des tenseurs, sortes de petites batteries qui leur permettent de faire avancer leurs caravanes et dont ils gardent jalousement le secret de fabrication. Mais si les Austrois sont accueillis avec autant d'enthousiasme partout où ils passent, c'est aussi et surtout en raison de leurs autres talents. Musiciens, comédiens, marionnettistes, poètes... : les Austrois sont avant tout des artistes d'exception ! L'auteur prend bien le temps de nous dépeindre le mode de vie et les règles qui régissent le fonctionnement de ces communautés dont on découvre les coulisses avec un émerveillement presque enfantin. Bref, leur réputation n'est plus à faire, et elle contraste très nettement avec la faible estime dans laquelle est souvent tenue cette même population aujourd'hui.

Le rôle déterminant joué dans l'intrigue par ces Austrois suffit à justifier le fait que la création artistique occupe elle-même une place centrale dans le roman. Or, décrire le processus créatif ou le rendu final d'un autre art que le sien n'est jamais chose aisée pour un écrivain. Comment retranscrire en mots l'émotion éprouvée à l'écoute d'un morceau, ou les sentiments qui nous traversent en découvrant pour la première fois un tableau ? Et bien Romain Delplancq, lui, y parvient très bien, et c'est cet hommage remarquable qu'il rend à l'art sous toutes ces formes qui contribue à donner un charme fou au roman. Vous aurez ainsi l'occasion d'assister au cours de votre lecture à un concert magnifique donné par un chef d'orchestre de génie, mais aussi à une représentation de marionnettes capable de conquérir tout un public de soudards pourtant peu amateurs de théâtre, ou encore à l'élaboration d'une toile de maître. Mais si les Austrois sont passionnés par leur art, ce qu'ils aiment avant tout, c'est de pouvoir le partager avec leur public. Ce peuple nomade est en effet considéré comme un havre de connaissances, apportant non seulement du divertissement mais aussi de la culture à des gens qui n'y ont d'ordinaire pas accès. Voilà un bel exemple de transmission et d'échange ! Reste maintenant à aborder la question des personnages, qui se révèlent eux aussi tout à fait à la hauteur. Difficile de ne pas se prendre d'affection pour les Austrois, à commencer par la famille Dael, composée de personnalités toutes très atypiques. Si les deux femmes de la famille séduisent par leur force et leur qualité de leader, j'avoue pour ma part avoir eu un petit faible pour les deux frères Basil et Philio : le premier est un jeune homme plein d'humour, débordant d'idées et d'énergie (au point parfois d'épuiser son entourage), et le second un grand mélomane et musicien de génie mais incapable d'avoir des interactions sociales « normales ». L'auteur tarde à nous faire véritablement rencontrer les Spadelpietra que l'on découvre essentiellement au cours de l'acte II, mais là encore le résultat est des plus réussi. La nouvelle génération de la famille apparaît sous un jour fort sympathique, qu'il s'agisse des jumeaux Jiani et Silva, ou de Kamil, tandis que les « anciens » semblent plus retors et plus difficiles à cerner.

Romain Delplancq signe avec « L'appel des Illustres » un premier tome et un premier roman hautement recommandable qui possède tous les ingrédients nécessaires pour faire passer un très bon moment aux amateurs de fantasy. On peut notamment saluer le talent avec lequel l'auteur parvient à mettre l'art (qu'il s'agisse de la musique ou de la peinture) au centre de son récit, ainsi que le soin avec lequel il dépeint une culture complexe et étonnante par bien des aspects. Une très belle découverte, que j'entends évidemment poursuivre avec la lecture du second tome.
Lien : https://lebibliocosme.fr/201..
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On a tous en tête un car revenant de Barcelone, après un voyage scolaire mêlant sérieux et déconne ; il fallait mettre au moins un peu d'animation pour tous ces Quatrièmes en manque d'occupation ; alors les deux profs d'espagnol ayant bu trop de gnôle lancèrent leur top seventies, pas besoin d'faire d'analyse.
Alors le car roulait, et les élèves chantaient, un truc qui me colle encore à la peau :

Besoin de rien, envie de toi,
Comme jamais envie de personne…

On a tous en tête un bus scolaire à Venise, entre l'marchand d'porte-clés et celui de Mr Freeze ; les élèves s'entassant plutôt mal réveillés, le whisky dans les chambres ça profite jamais ; le professeur d'arts plastiques montrait son répertoire, qui au moins valait mieux qu'celui du prof d'histoire, qui durant le voyage aux châteaux de la Louère entonnait rien qu'pour nous La maison du grand cerf.
Et de la pluie tombait, et l'prof d'arpla chantait, un truc qui me colle encore à la peau :

Quand Margot défaisait son corsage,
Pour donner la gougoutte à son chat…

On a tous en tête le chemin vers Florence, ses hôtels aux p'tits-déjs souvent plus ou moins rances ; et le car roulait, et personne chantait, car pour tuer le temps j'usais mon stock de blagues sur les clichés des italiens.
Ah, Florence… La première fois que je découvrais que tous les élèves se bourraient la gueule en cachette, chaque soir… L'époque où le délégué que vous admiriez entrait dans votre dortoir à une heure du matin pour vous faire des propositions pour le moins insolites, celle où vous vous demandiez sans cesse si vous n'étiez pas dans la seule chambre de l'immeuble où ne se déroulait pas une gigantesque partouze… le temps où vos camarades avaient trouvé une solution astucieuse pour se débarrasser de leur bouteille de vodka, à savoir la boire au goulot avant de se rendre compte qu'il y en avait une deuxième… Bref, la découverte de l'aventure et de la sensualité comme tout ado devrait la vivre.
En ce qui me concerne, j'ai toujours préféré Venise à Florence, mais force est de constater que cette ville n'en a pas moins joué un rôle autant sinon plus important dans l'histoire de l'Italie. Cité de tous les arts, de tous les complots, elle ne cesse d'intriguer, et donc d'inspirer nombre de romans. Ce n'est pas Romain Delplancq qui me contredira avec ce Renaissance-fantastique qui inaugure le tome 1 du diptyque le sang des princes. À première vue, on dirait de la fantasy politique européenne sans grande originalité, à un détail près : ici, l'art n'est pas juste pour faire joli sur le fond vert, mais possède une des places centrales au sein du récit. On s'est souvent penchés sur comment la magie pourraient modifier la guerre, voire la vie de tous les jours, mais honnêtement, combien de personnes ont réfléchi à l'impact culturel qu'elle pourrait avoir ? Et quand bien même cette première question n'est finalement pas abordée dans le livre, quel pouvoir obtiendraient les habitants d'un monde secondaire qui détiendraient dans les arts un savoir-faire méconnu des autres peuples ? Autant vous dire que j'étais chaud dès le moment où la camarade Boudicca en posta sa critique : ce bouquin n'annonçait que du bon !

Worldbuilding, intrigue

Donc L'appel des Illustres c'est l'histoire de Tandal, une ville vachement inspirée de Florence où les ducs Spadelpietra (vachement inspirés des Médicis) s'imposent comme la principale famille de richous de la ville, même s'ils sont osef par rapport à l'art (du moins officiellement). Ainsi ils forment un clan déterminant sur l'échiquier politique, promulguant un humanisme social à travers toute la Slasie, un pays vachement inspiré de l'Italie (Porto-Vecho fait d'ailleurs penser furieusement à Porto-Vecchio). Mais quand un tableau provoque pour des raisons inconnues la mort d'une enfant épileptique de leur entourage, forcément ça va barder. Leurs regards se tournent vers Mical, jeune peintre au service des moines de la religion alfine (vachement inspirée du catholicisme), qui se voit contraint de fuir chez les Austrois, un peuple nomade vachement inspiré des gitans…
Vous l'aurez compris, on a donc un monde pas franchement original, si ce n'est (à la rigueur) qu'il prend pour cadre la Renaissance au lieu du Moyen Âge relativement plus fréquent. Mais pour moi, il s'agit d'un défaut au final très secondaire, d'une part parce que je reste dans ma zone de con fort (comme dirait Caracole), d'une autre parce que tout comme pour un cycle tel que La dague et la fortune, l'important n'est pas la nouveauté du worldbuilding, mais l'angle sous lequel il est traité. Je n'aurais donc aucun problème de ce côté si l'auteur ne faisait pas aussi fortement allusion à ses références jusqu'à reprendre le vocabulaire tzigane ou changer seulement une lettre d'un prénom existant…
Du reste, on possède là un traitement tout à fait singulier : les différents arts de la Renaissance sont envisagés avec un réalisme et une documentation exemplaire, pour ne pas dire hard-fantasy : musique, peinture, théâtre, ect. On notera par ailleurs que si le roman est totalement dépourvu de sexe, il s'agit d'un des rares mentionnant des péripatéticiennes non pas simplement pour rincer l'oeil de l'adolescent prépubère, mais pour se pencher, même brièvement, sur les différents mécanismes de gestion (mais oui) des ces start-ups particulières.
Les Austrois pour les machineries de leurs spectacles fabriquent entre autres des automates ; si de la « vraie » Renaissance (celle reconnue par les universitaires, en gros juste François Ier) aux Lumières, il existait déjà des automates très perfectionnés, certains d'entre eux ici occupent des fonctions nettement plus spéculatives que les autres. En outre, il existe entre autres des éléments mécaniques au fonctionnement sur lequel l'auteur s'étend peu, les tenseurs, qui eux aussi font s'inscrire le roman dans le clockpunk puisqu'ils possèdent les propriétés d'un moteur moderne, au point d'ailleurs d'avoir remplacé les chevaux des Austrois ou les voiles des bateaux, ou même de créer des technologies… à la Batman. Si ce côté rétrofuturiste reste au second plan de l'histoire, il ne s'avère pas gadget puisqu'il sert notamment pour une scène de course-poursuite… qui aurait pu donner un grand moment si seulement les armes à feu n'apparaissaient pas comme une surprise pour quasiment tous les personnages (bon, OK, les technologies n'ont pas forcément été inventées dans le même ordre que notre monde, mais attention mini-spoil, si les Austrois sont les seuls à y avoir accès, m'est avis qu'ils seraient un peu mieux lotis, et avouez que ça aurait donné du piment !).

Style

Or tout cela est bien joli, mais j'ai choisi de m'atteler à ce livre principalement pour le style ; on me vantait le bouquin comme immersif et parvenant à retracer les scènes de création d'oeuvres avec la même intensité émotionnelle que celles d'action, et il faut dire que sur ce coup, j'en ai eu pour mon argent. On entre dans quelque chose de réellement poétique, pas dans le sens Hervé c'est Bonnard et les jolies fleurs bleues, mais cette poésie puissante que des siècles d'auteurs du monde entier ont tenté d'élucider (les anglo-saxons étant, à mon humble avis, bien supérieurs là-dedans que les français). Quand la chose décrite prend des proportions gigantesques, quand la simple évocation des mots sans que vous ayez à en comprendre plus que le sens global vous donne l'impression de toucher au sublime, alors vous savez que vous avez affaire à de la vraie poésie.
Ici, Romain Delplancq retient ses effets mais sait les lâcher lors du bon moment : quand on atteint un climax dramatique, à ce moment l'art devient tout particulièrement important, et l'on passe de simples descriptions quoiqu'assez techniques à un pur ressenti de l'artiste envers le travail sur lequel il est focalisé. de façon plus générale, la plume romanesque s'inspire bien plus de l'école anglo-saxonne, visant avant tout à se faire directe, que de celle française, cherchant midi à quatorze heures à grands renforts de poésie ampoulée. le tout est d'immerger le lecteur dans la fiction, et ce par des phrases relativement simples n'excluant pas des subtilités telles que le sous-entendu. Leur longueur varie selon si nous sommes au coeur de l'action ou dans un instant plus inspiré du quotidien. La ponctuation se calque sur la respiration que l'on devrait avoir en lisant le texte à voix haute, de manière à ce qu'on ait le flux de mots le plus fluide possible ; exit donc les points d'exclamations hors dialogues et tous ces effets fête foraine, l'intensité dramatique doit se sentir dans le texte en lui-même. Ça peut sembler la base, mais c'est toujours bon de le rappeler connaissant le dilettantisme qu'on a en France (notamment dans l'autoédition).
Alors oui évidemment, par moments il y a plusieurs fois le verbe avoir dans une seule phrase, ce qui fera râler les élites bobo-intello-droitos et qui ne me fait pour ma pomme rien du tout. Au contraire, je trouve que la répétition, outre le fait que s'en passer nous oblige à utiliser des synonymes et périphrases par moments laborieux, peut apporter au texte une sensation d'immersion plus grande, tant elle paraît naturelle et peut retranscrire une action mécanique, répétitive, et donc demandant des efforts. C'est un de mes échecs, je le confesse, durant mes réécritures du Dernier Vagabond [roman que j'ai écrit mais encore jamais publié, ndlr], l'idée d'opter pour une musicalité minimaliste et rigide du texte afin de transmettre les difficultés du héros ; l'idéal aurait été d'écrire des phrases entières où chaque proposition aurait la même longueur de syllabes.
Mais fatalement, si on suit ce cheminement de pensée, on en arrive au piège d'alourdir trop le texte avec une figure de style qui donne du piment mais qui ne doit donc pas être semée à tout bout de champ : les allitérations. Et avouons-le, moi le premier, on est tous tentés par l'envie d'en truffer nos paragraphes. Ici, c'est globalement bien dosé, même si on s'aventure là sur un terrain hautement subjectif et que j'ai une ou deux fois grincé des dents face à des trucs que j'aurais pu écrire moi-même il y a un ou deux ans. Signalons également une quantité de termes inutilement soutenus qui ne fait qu'augmenter au fil du texte, ce qui semble être notre lot à tous, nous pauvres écrivains français…

Pur ressenti

Tout ça pourrait donner un bouquin agréable, mais passable ; pourtant, on est carrément un cran au-dessus. Parce que oui, même si les Austrois sont fortement inspirés des tziganes, ils parviennent à développer leur propre identité, grâce au fait qu'ils s'immiscent un peu partout dans les mondes de la culture et de l'ingénierie. L'auteur dépeint leur vie sans l'idéaliser, ni la tourner en clichés bobos ou racistes : on est mal vus, mais on tente de survivre, et de là sortent des moments de franche camaraderie. En matière de précision dans le naturel ou dans l'intensité dramatique, il y a à mon avis là-dedans un ou deux moments qui tutoient le Guy Gavriel Kay. Ça parle de la dure vie des vagabonds, des intermittents du spectacle, mais surtout de l'amour de l'art, et ça, ça fait du bien.
Par contre, il va falloir que le tome 2 soit un peu plus dynamique. Parce que mine de rien, les 300 premières pages peuvent se résumer comme ça : Mical risque de se faire capturer, mais en fait non, et ce à chaque fois. Sachant que les indices sur ses kidnappeurs sont distillés au compte-gouttes, ça créée une certaine frustration ; mais les retournements de situations restent cela dit suffisamment imprévisibles (quand bien même on sait qu'ils vont forcément arriver ^^) pour éviter que celle-ci ne devienne importante…

Conclusion

En bref, L'Appel des Illustres constitue un très bon premier roman, mais qui possède le potentiel de devenir infiniment plus. Reste à savoir si le tome 2 sera à la hauteur du défi, et alors nous aurons un auteur français à surveiller sérieusement. Après, je dis ça, c'est pour votre culture…
Lien : https://cestpourmaculture.wo..
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le moins que l'on puisse dire, c'est que cette année 2017 s'achève sur une excellente lecture ! Cet énorme pavé, qui m'a accompagnée durant toute une semaine, a été une véritable révélation : enfin un auteur qui ose s'affranchir des règles ancestrales de la fantasy tout en piochant allégrement quelques éléments chez les autres genres littéraires afin de proposer au lecteur quelque chose de nouveau, d'innovant, de rafraichissant, qui ravira autant les amoureux des grandes épopées épiques que les passionnés d'intrigues de cours, de steampunk ou de Renaissance ! Quel plaisir de se plonger, jour après jour, dans ce livre magnifiquement bien écrit qui nous transporte dans un monde à la fois si proche et si différent du nôtre, qui nous invite à faire la rencontre de personnages atypiques plongés au coeur d'une intrigue palpitante et captivante !

Tout commence par une mort, foudroyante, inexpliquée, inexplicable. La jeune Iarma, onze ans, cousine de l'Illustre duchesse Jana Spadelpietra, meurt dans d'atroces souffrances en contemplant un tableau, apparemment banal et inoffensif. Commence alors une longue traque afin de retrouver le peintre et le faire venir à Tandal, ville historique des Illustres, cette noble famille qui va très prochainement s'unir à la lignée royale. Pour Mical, jeune prodige de la peinture, c'est le début d'une éprouvante fuite … La rencontre avec les Austrois, ce peuple nomade épris d'inventions mystérieuses et de spectacles envoutants, permettra-t-elle à ce jeune homme élevé dans un monastère de survivre ?

L'auteur a fait un choix, audacieux mais délicat : celui de plonger directement le lecteur dans cet univers sans jamais rien lui expliquer de son fonctionnement, en laissant aux événements et aux personnages la responsabilité d'enseigner discrètement au lecteur les rouages de ce monde. Et pourtant, pas une seule fois je ne me suis sentie perdue : Romain Delplancq a réussi l'incroyable exploit de construire un monde qui s'impose au lecteur, qui fait partie de lui. Cela peut sembler étrange dit comme cela, mais c'est vraiment l'impression que j'avais : que l'univers dans lequel prenait place le récit existait depuis toujours au fond de moi, de telle sorte qu'il était inutile d'en dire plus, je sentais comment les choses se passaient au sein de ce monde. La hiérarchie politique, militaire, religieuse, les mythes et les coutumes … tant d'éléments qui s'imposaient à moi comme coulant de source. du vrai génie, que de réussir à distiller tellement d'informations capitales de ci de là sans que le lecteur ne s'en rende vraiment compte, sans que cela ne l'ennuie, sans que cela ne ralentisse l'intrigue, sans que cela ne se voie, tout simplement !

Et cette intrigue, mais quelle intrigue ! Dès les toutes premières pages, le ton est donné : ce roman sera puissant, sanglant parfois, intriguant souvent, captivant toujours. Très rapidement, l'ambiance devient pesante, l'urgence se fait sentir, on a le souffle court et le coeur qui s'emballe. On tremble pour Mical, ce pauvre gamin qui n'a rien demandé, on serre les poings face aux manigances des Illustres, on exulte d'insouciance ou de vengeance aux côtés des Austrois. Les Austrois, probablement LE peuple le plus intriguant de toutes mes pérégrinations littéraires. Ces nomades, ces musiciens saltimbanques, ces savants gardant jalousement leurs secrets technologiques indispensables, ces familles soudées et solidaires qui ne laisseront jamais la mort d'un d'eux impunie mais sont capables de programmer une vendetta qui prendra des dizaines d'années avant de se réaliser, ont su conquérir mon petit coeur. Ils sont, à leur manière, bien plus intrigants encore que les Spadelpietra, cette Illustre famille qui a su se hisser tout en haut sans que l'on ne sache tout à fait comment … bien que j'aime énormément les intrigues de cour !

L'intrigue est menée d'une main de maitre. J'ai rarement croisé le chemin d'un rythme si bien géré, si bien maitrisé. Ce roman est un livre en clair-obscur : tantôt le lecteur se retrouve plongé au coeur du palais Spadelpietra, où tout se trame dans l'ombre et les faux-semblants, tantôt il se voit propulsé au milieu des plaines et des déserts traversés par les Austrois, où les batailles et les courses-poursuites s'enchainent. le calme avant la tempête, l'ouragan avant le silence. Et tout est parfaitement dosé : pas moyen de s'ennuyer, mais pas moyen non plus de se retrouvé submergé face à un trop-plein d'action. le juste milieu a été trouvé. L'auteur n'a pas hésité à avoir recours à des ellipses plus ou moins longues, il n'a pas hésité non plus à occulter volontairement tout un pan de l'histoire pour ne pas casser ce rythme ; certains regrettent ainsi de ne pas avoir vu naitre la romance entre deux personnages, pour ma part je suis ravie de voir que l'auteur a eu ce courage de ne pas en dire plus : j'aurai trouvé cela profondément ennuyant et inutile sur le plan de l'intrigue.

Mais, plus que tout, je suis admirative face à la plume de Romain Delplancq. Quelle plume ! Certains trouveront peut-être qu'il utilise des phrases trop longues, trop emberlificotées … mais puisque j'ai tendance à faire la même chose dans mes propres écrits, je ne peux pas le lui reprocher. Bien au contraire. J'aime ces belles phrases riches en figures de style, ces tournures parfois alambiquées mais tellement riches de sens, ces jeux de sonorités qui font naitre des images, des sons, des sensations dans mon imagination ... Si la magie existe en ce monde, elle se cache au coeur des mots, qui, lorsqu'ils sont savamment agencés comme c'est le cas ici, parviennent à nous faire voyager sans efforts, sans autre support qu'un simple livre. En ouvrant ce livre, ce n'est pas uniquement une belle aventure que vous allez suivre de loin, mais c'est bel et bien un grand voyage que vous allez effectuer en compagnie de Mical et ses compagnons, aux côtés de Jana et des autres nobles. Ouvrez ce livre, lisez quelques pages, puis fermez les yeux et laissez-vous happer par cette fantastique histoire …

Vous l'aurez compris, je pourrais parler de ce roman pendant des heures. Je n'ai pas dit ici le quart de ce que j'aurai envie de vous dire au sujet de cet incroyable récit qui ne ressemble à rien de ce que j'ai pu lire jusqu'à présent. Des tas de portes s'ouvrent au fur et à mesure que l'histoire avance, des tas de sous-intrigues naissent, les alliances se font et se défont, les manigances se mélangent aux destinées mystiquement tracées … Il est tout simplement impossible de lâcher ce livre avant de l'avoir terminé, et une fois la dernière page tournée, on se languit de la suite. Il n'y a pas uniquement l'envie de savoir comment tout cela va se terminer, comment les choses vont évoluer et se dénouer, il y a surtout le besoin de retrouver cet univers riche et mystérieux, ces personnages atypiques et intrigants … et cette belle plume qui fait rêver et voyager. Que j'ai hâte de lire la suite, que j'ai hâte !
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Salut les Babelionautes
Voila un Auteur dont j'avais entendus que du bien qui m'a conquis avec ce premier tome.
Romain Delplancq, avec ce diptyque dont le titre générique s'intitule le sang des princes, a su créé un monde imaginaire ressemblant a la Renaissance italienne.
La jeune Iarma, onze ans, cousine de l'Illustre duchesse Jana Spadelpietra, meurt dans d'atroces souffrances en contemplant un tableau peint par Mical.
On n'apprend pas exactement le pouvoir des tableaux de Mica, d'ailleurs lui non plus, mais c'est la raison qui pousse une organisation secrète, la Masse Noire, a vouloir le capturer.
Après ce drame, nous allons suivre le jeune Mical, peintre de talent, dans sa fuite devant les séides de la duchesse.
Mica va trouvé refuge et protection au sein du peuple nomade des Austrois, qu'on pourrait comparé aux tziganes, comme eux ils vivent sur les chemins a bord de roulotte, s'arrêtant pour monter leur scène.
Curieux peuple que ces Austrois, détenteur d'une technologie qu'ils protègent contre l'espionnage, sachant divertir les puissants par les arts du spectacle qu'ils maîtrisent a la perfection.
Romain Delplancq, au fil du récit, va vous envoûter sous sa plume magique ou son imaginaire va faire surgir des scènes parfois comique, parfois tragiques.
La foule des personnages que l'on va croisés sont bien campés et pour certains indispensables.
j'ai énormément apprécié Basil, jeune homme débordant d'idées et d'énergie, avec un humour astringent et acide.
Bref! vous aurez compris, L'Appel des Illustres m'a complètement emballé , au point de l'avoir lu d'une traite, me faisant du café a trois heure du matin pour pouvoir le terminer.
Je vais surveillé de prés les publications de Romain Delplancq et ce diptyque prendra sa place dans mon top cinq 2019.
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Ce premier tome du diptyque présente de nombreux aspects intéressants. On y retrouve une pléthore de rebondissements, des personnages bien construits et des scènes qui gravitent autour des arts et de la haute société, le tout dans un univers imaginatif riche.

L'auteur possède un style d'écriture agréable, bien que j'aie remarqué quelques longueurs. le rythme n'est pas nécessairement frénétique, ce qui peut parfois déranger, mais il n'est pas pour autant lent.

J'ai été captivé par les nomades, notamment par leurs caravanes équipées de batteries leur permettant de se déplacer plus facilement. Ces batteries doivent être rechargées dans certains villages où les nomades ont passé des accords pour séjourner quelques jours.

En revanche, le pouvoir de certains tableaux découverts ici n'est pas véritablement expliqué dans ce tome. Je ne sais pas si cela sera abordé dans le tome suivant, mais j'espère sincèrement que oui, car cela suscite du questionnement !

Il convient de noter que la magie ne joue pas un rôle prépondérant, ce qui diffère de ce que j'ai pu lire dans d'autres romans fantasy. de plus, l'auteur nous plonge directement dans son récit, nous laissant découvrir son monde. Il y a également une alternance des points de vue, parfois avec des ellipses temporelles.

N'oublions pas cette fin qui donne envie de plonger dans le tome 2.
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critiques presse (1)
Elbakin.net
24 mars 2016
Il est peut-être un peu tôt pour affirmer que la fantasy française a trouvé une nouvelle voix en la personne de Romain Delplancq, mais si le deuxième tome transforme l’essai du premier, il n’y aura aucune raison de se priver.
Lire la critique sur le site : Elbakin.net
Citations et extraits (5) Ajouter une citation
- La plupart des gens passent devant ce tableau, en imaginant vaguement le propos, et regardent le centre de la peinture - là où la lumière de la chandelle éclaire les visages des trois personnages. Vous, mademoiselle, jouissez d'un esprit plus pénétrant, et choisissez de fouiller la pénombre à la recherche de quelque trésor caché, où d'une chausse-trappe, mais c'est encore une tromperie. Un piège dans le piège. Le deuxième appât que le peintre laisse spécialement pour les poissons qui se croient trop malins.
Sa voix se faisait basse, presque un murmure.
- Moi, c'est l'ombre que je regarde. Cette ténèbre totale et imperméable qui ferme totalement la scène, mais dans laquelle viennent se perdre les éléments du décor, suggérant une continuité. Ce noir semble n'avoir pour fonction que de mettre la lumière en valeur. Mais il n'est pas naturel ! Un tel contraste n'est pas dans la nature.
La jeune fille, prise au jeu, répondit sur le même ton.
- Si le noir avait une autre fonction que le contraste, ce serait pour dissimuler quelque chose...
L'homme hocha la tête, ravi.
- Vous êtes impressionnante. Alors je vais vous laisser finir sur cette pensée : si l'auteur a mis en place tous ces trompe-l'œil, que cherche-t-il à dissimuler dans son tableau ? Qui se cache dans l'obscurité ? Un quatrième larron ? Le père du bourgeois venu surveiller son fils ? Des gardes venus arrêter les deux voleurs ? Peut-être tout cela à la fois ?
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Quand nous avons décidé de venir ici, nous pensions démarrer un grand jeu d'échecs. Aujourd'hui j'ai la certitude que nous n'avons fait que sauter les yeux bandés dans une partie en cours depuis longtemps. 
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Un rire malsain circula parmi les mercenaires.
- Les gars nous avons ici un docteur de la loi ! se moqua la cape noire. Et comment tu penses nous en empêcher, gamin ? En nous chantant quelque chose?
Basil grinca des dents.
- Ca se gate.
- Basil ? fit la patronne.
- Oui ?
- Chante.
La curieuse injonction fit tourner tous les yeux vers Sophia.
- Maman, repondit l'enfant, je crois qu'il plaisantait.
- Basil, écoute un peu ! J'ai dit "Chante".
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Une oeuvre devient chef-d'oeuvre quand son corps matériel ne suffit plus à contenir sa force créatrice, qu'elle vient contaminer l'âme de celui qui regarde, et la change pour toujours. Parfois inconsciemment.
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Déjà les silhouettes se détachaient dans la brume en ombres vaporeuses de plus en plus précises, de plus en plus matérielles, de plus en plus charnelles.
De plus en plus sanglantes.
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