Certains pays occidentaux s'illustrent par un refus d'appliquer réellement la démocratie que pourtant ils se targuent d'incarner et de défendre. Or, pour quelle raison ces démocraties viennent elles à se récuser en cette occasion, c'est-à-dire à refuser toute idée qui n'est pas conforme à leur volonté d'universalisme ? Tel est le thème du livre de
Chantal Delsol, qui aborde ce thème contemporain sous plusieurs perspectives : historique, politique et sociale.
- Historique ; rappelant les travers rencontrés par les premières démocraties Grecque et Romaine, où les formes de populisme ont menacé la stabilité par l'accès au pouvoir de personnages peu respectueux des lois et à dire vrai peu éduqués. Cependant, la population avait un accès direct à la représentation, ce qui a également permis leur durée.
Chantal Delsol éclaire aussi sur la différence entre deux ‘populismes' qui menèrent à la ruine : le communisme et le nazisme. L'un étant une volonté d'imposer par la force un universalisme, l'autre usant de la même démarche pour étendre un particularisme ‘aryen'. Tous les deux se rejoignant dans le crime contre l'humanité. L'auteur rappelle le rôle des Lumières dans l'émergence de l'universalisme progressiste qui s'oppose au traditionalisme conservateur. Attestant que les Lumières sont un jugement de l'histoire.
- Politique : on taxe de populiste pour mieux occulter le débat. Pourtant, les idées portées par le peuple doivent être débattues, car c'est la vocation même de la démocratie et c'est notamment grâce au peuple que les élus accèdent au pouvoir. Ce mépris rappelle la lutte des classes, entre le peuple jugé ignare et trop proche des réalités à court terme, et les dirigeants dont seul importe le dogme de l'universalisme, porteur du progrès qui garantit le bonheur de tous.
- Social : ce mépris de classe est aussi ignoble que le mépris de race. Une des distinctions étant que les classes populaires sont conservatrices en raison de leur cadre de vie plus provincial que citadin, et que l'autre est un alter-ego. Enfin, les classes populaires ont souffert du mondialisme et de l'universalisme, étant à la base plus fragiles que les classes supérieures. Ces dernières, essentiellement citadines, voient l'autre comme leur semblable ‘citadin', et ont profité de cet universalisme, étant plus apte à faire face aux déclassement économique inhérent au mondialisme et qui s'impose aux classes populaires.
J'ai trouvé ce livre très bien rédigé, accessible et clair. Les idées développées sont profondes et argumentées. Il permet de se rendre compte de l'inversion des valeurs qui est imposé dans le débat public où la tolérance d'opinion se révèle sélective. Je médite sur quelques citations, notamment celles-ci :
"Le passage de la grande particularité à l'universel représente un saut conceptuel de grandes dimensions. Il marque ma transition de la République démocratique à la République idéologique, de la politique de la tolérance à la politique, de la Vérité."
Hermann dira, regrettant que le nazisme ait acquis le pouvoir : « nous eûmes tort de tolérer, même provisoirement, l'atteinte portée au droit et à la justice, à l'humanité et à la liberté personnelle ».
Petit bémol, aucun aspect économique n'est abordé. Pourtant, un constat simple permet d'aborder ce thème : les classes populaires sont un fondement de l'économie, aucun pays ne pouvant se développer sans usine ou emplois dans le secteur secondaire, voire primaire pour espérer être souverain. Quel poids le peuple représente-t-il dans le PIB ? Et avec une meilleure adhésion du peuple à l'économie que peut on espérer ?