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Critique de Fleitour


Le carnet retrouvé du Dormeur du Val, s'inscrit totalement dans la tradition républicaine des articles et des nouvelles qui ont fleuri au lendemain de la déroute de l'empire en 1870.
N'en déplaise à certains patriotes, la réalité dépasse la fiction. Bazaine ne sort pas grandi de cet opuscule retrouvé par Loïc Demey.


Le récit est conduit par le dormeur du Val, ce soldat français, engagé, pour avoir tiré le mauvais numéro, Il raconte sa guerre, à sa fiancée, avec candeur, et puise dans sa passion le courage de poursuivre.


J'aime cette lente dégradation, du moral des troupes françaises, les mots peu à peu se tordent de douleur, flanchent sous un soleil de plomb, les armes à la main, le chassepot est privé de ses plombs. Page 26 ; "il ajoute notre corps d'armée se démembre", propos qui succède, " ah! Comme tonneront bientôt nos canons sur la Prusse, page11."


Bientôt ce sera la bérézina, parfois imagée par une note d'humour grinçant ; "sans couverture, sans marmite, ni paquets de cartouches il est bien plus aisé de circuler." Page 29. Ou bien plus loin le 31 juillet, " j'ai tiré mon premier coup de guerre. Pan ! Et l'écorce d'un chêne s'est ouverte en crevasses, j'ignore tout du prénom des arbres."


Peu à peu, le texte se disloque, bafouille sur les horreurs de la guerre, " ils ont donné aux chiens ta guibole pourrie ! Il rit gras, il s'agite, puis bave et maintenant il dort. Page 42." On pressent la lente et inexorable démobilisation du jeune soldat. Ses mots d'amour se feront moins présents la mort s'insinue dans ses notes. Page 34, il écrit: J'avais effacé ce que nous sommes, comment tu m'aimes. Comme tu es mon amour. voudrais-tu encore quelques jours m'y attendre."


La fin est la rencontre improbable entre le soldat et le poète Rimbaud. C'est l'occasion pour Loïc Demey de saluer son maître, et de repeindre quelques scènes inoubliables comme la Bohème, et redessiner ce trou de verdure où chante une rivière.

D'un Coeur léger, est le titre paradoxal donné à ce un récit qui s'enfonce peu à peu dans le noir, l'auberge à la grande ourse, sera un cachot, et l'amour si fervent du soldat se noie dans le frais cresson bleu.

Le langage poétique de l'auteur, est au service de la mélancolie, c'est un homme seul qui semble avancer vers sa propre mort.
La qualité de l'écriture de ce poète devenu un jeune romancier est un régal, où "Metz frétille en plein soleil, grouille et scintille", et où l'amour trouve de belles élégances.
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