AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,55

sur 40 notes
5
5 avis
4
7 avis
3
3 avis
2
0 avis
1
1 avis
«Elle s'appelle Marie... Dans sa valise, le vendredi 24 février 1967; il y a un 45 tours des Stones prêté par une copine, glissé dans un cahier de sténo.Rentrée à la maison, la première chose qu'elle fait est de s'enfermer dans sa chambre pour écouter le disque : Satisfaction. Grow up wrong. Suzie Q.» p 13

Commençé avec Les Rolling Stones symbole d'une révolte sensuelle et violente dont la provocation ouvre une brèche vers une envie d'ailleurs, un désir fou de vivre autrement et intensément, pas comme les parents refermés sur leur silence, «La grande bleue» s'achèvera au cours de l'été 1978 par l'écoute de «La fille du fumeur de joint» premier disque «d'un mec de Dole», Hubert Félix Thiéfaine lui-aussi sensuel, révolté, à l'humour parfois féroce, mais franc-comtois comme Marie. Il semble lui dire : finalement même sans aller loin on peut avoir quand même une vie, une vie à soi et la défendre et en être fier.
Il vient clore ces dix années au cours desquelles Marie se sera sauvée plusieurs fois au double sens du terme fuir et réussir à s'extraire même maladroitement des pièges de la vie, ceux qu'elle nous tend et ceux dans lesquels on se précipite soi-même sans le vouloir, parce que c'est comme ça..... Avec Marie et ses amies, ses rencontres, revivent les années 1970 jalonnées par les luttes ouvrières chez Peugeot, Lip ou Myrys.
J'en retiens la force de vie qui permet à Marie de s'en sortir dont elle n'a pas vraiment conscience. Elle naît de son désir mais serait insuffisante sans celle de tous les liens amicaux, de la solidarité, de son attachement pour ses enfants, pour son frère Ivan revenu brisé de ses deux années en Algérie ; demeure aussi, préservé, son lien jamais rompu avec la nature bien présente au cours du récit. C'est tout cela qui l'empêche de se laisser enfouir dans le sommeil et sombrer dans le désespoir quand tout devient trop dur et qu'elle se sent prisonnière de son foyer et du travail à la chaîne.

«On n'a jamais été seule en fin de compte. On a toujours été soudée aux autres, avançant avec elles, malgré tout ce qu'on était d'impossible, une petite plouc qui rêvait d'une vie à elle. Et c'est comme ça qu'on s'est dépassée, depuis le début. Un jour, on racontera, avec une fierté étonnée. On dira c'est ma vie.» (Dernière phrase)

Beaucoup de critiques mettent l'accent sur l'aspect historique de ce livre. S'il est bien inscrit dans les années 70, chacun des êtres qui le traversent a sa propre lumière et les relations des uns aux autres infusent force et beauté à ce roman où la vie explose, dont les qualités d'écriture font qu'on se dit «Vivement le prochain !!»
Commenter  J’apprécie          260
Une bonne surprise de la rentrée littéraire, un livre plein d'émotions sur les illusions perdues d'une jeune fille. Marie, jeune lycéenne qui s'était promise une vie différente de ses parents (nous sommes dans les années 60 en Franche Comté) va épouser l'homme qui la met enceinte et par la même renoncer à ses rêves. Commence alors pour elle une vie d'ouvrière, banale et sans éclat. Malgré tout Marie prendra son destin en mains.
Commenter  J’apprécie          250
Cette rentrée littéraire regorge de bonnes surprises, tout de même, non ? Et, fait assez inhabituel pour être noté, voilà que plusieurs de mes coups de coeur sont des romans français !
Dans celui-ci, la décennie 1968-1978 est vue du côté de la Franche-Comté, par une toute jeune fille. de ses dix-huit ans où elle laisse tomber ses études, pour se marier, enceinte d'un garçon rencontré lors d'une sortie du samedi soir, jusqu'à ses vingt-huit ans... le mariage, l'installation dans la maison des beaux-parents, les bébés dont il faut s'occuper, et puis l'usine, le HLM à Vesoul, l'envie de passer des vacances à la mer, de voir enfin la grande bleue... C'est surtout de la condition féminine qu'il s'agit, de la "libération" de la femme du côté de la campagne française. Au-delà d'une fresque frappante des années 70, on entre de plein pied dans le monde ouvrier de cette décennie : Peugeot, Lip, Myrys, comme autant de balises dans un récit très poétique.
C'est le coup de maître de Nathalie Démoulin, d'avoir trouvé une manière aussi poétique de rendre compte d'un destin somme toute morne et balisé d'avance, d'avoir su toucher la lectrice que je suis, avec une histoire de gens simples dont les rêves, les aspirations et les chagrins ne sont pas moins grands que ceux de leur chefs ou de leurs patrons. J'ai été un peu déroutée au début par la forme, avant d'être complètement emportée. Des phrases courtes, très sensuelles, alternant le « elle » avec un « on » plus générique, dessinent Marie, sa famille, ses amis et collègues, avec une netteté extraordinaire. J'espère, que dis-je, je suis sûre que ce texte ne passera pas inaperçu parmi les nouveautés si nombreuses, car il mérite un très bel accueil !
Lien : http://lettresexpres.wordpre..
Commenter  J’apprécie          220
En 1967, Marie a 17 ans et des rêves plein la tête. Sa vie sera extraordinaire, sans comparaison avec celle de ses parents. Mais elle épouse Michel à 18 ans, a deux enfants presque coup sur coup, comme si sa vie se déroulait à son insu. Il reste un rêve de mer et de soleil, incarné par des starlettes qui se dorent au soleil. Sans aucun doute, la vie serait plus belle au bord de la Méditerranée. Mais le quotidien de Marie, c'est Vesoul, parfois Besançon, et l'usine Peugeot. La chaîne. La chaîne du Jura ? Non, la chaîne de montage, la chaîne de conditionnement. La cadence et le rythme des battements de coeur calqué sur l'horloge du grand atelier. de temps en temps, il y a des rumeurs de grèves menées ailleurs qui font sursauter la monotonie. Tous les jours, tous les soirs, les ouvriers syndiqués appellent au rassemblement, à la lutte, mais c'est déjà tellement difficile de tenir toute la journée et de s'occuper ensuite de la maison. « Marie Brulhard qu'on appellera bientôt la Bleue, comprendre l'éternelle nouvelle, l'éternelle paumée. » (p. 89)

La vie n'est pas tout à fait pauvre, mais elle est obligatoirement laborieuse. Alors, les vacances, ces échappées de dix jours au bord de la mer, ce sont des instants trop précieux que l'on range tout de suite sous du papier de soie, comme cette robe bleue qu'on ne remettra plus, mais qui chante si fort un souvenir interdit. On n'est pas tout à fait malheureux non plus, mais on rêve d'autre chose. « Tout ce qui vit s'accompagne d'une douleur sourde dont on ne sait pas la nature. On est avide de la vie des autres. » (p. 89) Ce « on » qui rythme les pages, c'est la déshumanisation lente, la perte de soi au milieu des autres ouvriers et d'une décennie qui va soudainement trop vite. Marie voudrait se libérer, mais par où commencer ? « Il faudrait commencer par dire qu'avant tout on veut en finir avec soi-même, que divorcer c'est se donner une chance d'être la femme que l'on voit naître autour de soi, en ces années 1970. […] On a vingt-cinq ans, huit ans de mariage, noces de coquelicot, trois ans d'usine, noces de froment, et ça devrait durer comme ça jusqu'à la fin de la vie ? » (p. 148)

Cette lecture n'est ni une réussite, ni un échec. D'abord entraînée par la narration d'un souffle et les longues phrases, j'ai fini par m'empêtrer dans le ton monocorde et à perdre toute empathie pour Marie. J'ai compris le sens du « on », mais comme dans le roman de Julie Otsuka, Certaines n'avaient pas vu la mer, où le « nous » préside toute la narration, il m'a manqué une individualité plus marquée pour vraiment m'attacher au personnage. Chaque chapitre est une année, de 1967 jusqu'au tout début des années 1980 et le récit présente en filigrane la crise qui a frappé le monde industriel français. Il plane sur ce roman une nostalgie dont je n'ai pas saisi toute la portée, n'ayant pas connu les années 1970. Bref, une lecture douce-amère, pas déplaisante, mais un brin décevante.
Commenter  J’apprécie          210
"Une petite plouc qui rêvait d'une vie à elle" et par son obstination y parviendra, allant même vivre près de la grande bleue, mer et surnom réunis, voilà le thème du roman de Nathalie Démoulin (La grande bleue), un roman fort sur fond sociologique dur des années 60-70, le récit de dix ans de vie (entre Besançon et Vesoul) qui sonne tellement vrai que le lecteur capte tout autant le grondement des vagues ouvrières revendicatrices que les clapotis sereins (ou trop calmes) de rares et précieuses vacances au bord de l'eau!
Tout commence en 1967, où la jeune Marie et sa copine Delphine ("deux bouseuses un peu efflanquées") fuguent en mobylette (à Besançon!) rêvant de liberté, de musique anglaise aux accents sensuels et.... "d'un autre monde".
Elles reviendront vite au bercail et si Delphine, ouvrière d'usine, réapparait parfois comme une bouffée d'air salvatrice,c'est surtout aux pas de Marie que s'attache Nathalie Démoulin. Marie "yeux clairs et charbonneux", très vite enceinte,qui épouse un gentil Michel bucheron (bientôt ouvrier) et quittera vite la campagne pour un petit logement bruyant. Marie qui "rêve d'une existence à elle" et fantasme sur la relation Romy Schneider Alain Delon dans La piscine.Marie qui travaille en usine et veut devenir "la femme réinventée" promise à toutes par un cadre de la CGT.Marie qui prend la pillule.Marie qui apprend à conduire.Marie qui aime en cachette.Marie qui n'aime plus.Marie qui materne,déprime,perd,veut divorcer,culpabilise,déménage,travaille et travaille encore et toujours...mais existe,enfin!
Ce roman est authentique même si Marie est inventée, Nathalie Démoulin sait nous la rendre vivante.C'est une femme avec ses joies,ses doutes et ses peines qui a du mal à émerger de son milieu social modeste et perturbé (une mère qui boit,un frère fou,une belle soeur stérile douce dingue...)
La grande bleue c'est aussi un pan d'histoire de la France: le frère de Marie qui a fait l'Algérie et s'est fait "des bougnouls" (et en est ressorti complètement félé), Nordine le bel Arabe qui a quitté le bled pour travailler en France et attire Marie,le passage du monde de la terre au milieu ouvrier, les usines (Lip, Peugeot,Myris..),l'exploitation en usine,les progrés,l'évolution (la mob passe à la deuch,la 4 L, la Dauphine,la DS..) l'émancipation de la femme,le nucléaire,les hippies...
Richement documenté, bourré d'émotions,écrit parfois dans un langage familier (et des mots chocs) et toutefois alerte où le "on" rend cette femme presqu'anonyme parmi les femmes de sa condition, je recommande fortement La grande bleue (roman lu dans le cadre du comité de lecture de la Médiathèque de Bandol).
Nathalie Démoulin est également l'auteur de Après la forêt et de Ton nom argentin.
Commenter  J’apprécie          150
L'Histoire, la grande, vient s'immiscer dans ces vies quotidiennes marquées par les rotations à l'usine et le bruit des presses sur la tôle.

Pour nous raconter cette histoire, les choix que Marie fera au fur et à mesure des années qui s'égrennent sur le papier, Nathalie Démoulin utilise une écriture vive, rythmée, qui m'a par moment fait pensé à celle de Valentine Goby dans L'échappée, une écriture maîtrisée qui nous fait sentir l'angoisse de Marie, ses inquiétudes, ou au contraire ses soulagements. Ses phrases courtes, cadencée, rappellent la vie de l'ouvrier rythmée par le nombre de boulons à visser à la minute, ou les mots économisés de ces travailleurs de la terre et du bois qui peuplent la région... Nathalie Démoulin n'hésite pas non plus à utiliser de manière très régulière le pronom "on", donnant une sorte d'universalité à son texte. En dépersonnalisant le quotidien de Marie et de Michel, elle permet presque au lecteur de s'y glisser lui aussi...
Lien : http://croqlivres.canalblog...
Commenter  J’apprécie          90
Onze ans de la vie d'une femme (1967-1978) : Marie Zedet, fille de paysans jurassiens, mariée à dix-sept ans, devenue ouvrière chez Peugeot à Vesoul, à la grande époque du boom de l'automobile. La vie se passe entre chaîne et enfants, avec quelques échappées vers la mer, cette mer toute bleue entrevue en ouverture d'un film, "La piscine", avec le bel Alain et la belle Romy. Cette Méditerranée, qu'elle associe à la beauté de la vie, va lui donner un jour l'envie de prendre le large, de larguer les amarres, vers la grande bleue de ses rêves. le travail en usine va la reprendre, ailleurs, au bord de la mer cette fois : il faut bien vivre, et Marie est une très bonne ouvrière, rapide et sûre, mais qui ne s'en laisse pas conter. Elle va être des grandes grèves des années 70, celles qui ont inspiré les auteurs-chanteurs-interprètes de ces années-là. Nathalie Démoulin sait raconter le labeur quotidien, les espoirs, les déceptions de cette femme qui veut mordre dans la vie sans jamais renoncer à ses principes. Un beau portrait de femme, écrit dans une langue rare, peut-être un peu trop affectée à mon goût, mais qui ravira le lecteur amoureux des belles lettres…
Commenter  J’apprécie          70
1967, Marie et Delphine ont 17 ans ; Lycéennes, elles rêvent de s'échapper de la campagne de Franche Comté pour vivre une autre vie que celle de leurs parents attachés à la terre. Marie la rêveuse, Délphine la battante sont deux amies unies par le même espoir de "vivre une vie à soi".
Pourtant, tout va très vite à l'aube des grandes manifestations de 1968. Toutes les deux quittent le lycée. Marie amoureuse de Michel ouvrier chez Peugeot qu'elle épouse et avec qui elle a deux enfants ; Delphine pour se faire embaucher à l'usine.
En 1970, à 20 ans, le constat est amer "On voudrait être vierge, à nouveau, sans le poids de tout ce que l'on vient de vivre, en trois ans, qui nous a non seulement changée, mais perdue".
Delphine, trahie par l'organisation despotique et les méthodes de travail au rendement.
Marie, perdue dans sa tête et dans son corps ne se reconnaît pas dans sa vie de couple "étrangère à elle même", "D'où vient qu'elle est toujours envahie, que la poussière s'accumule, que les enfants ont faim ?". Marie profondément affectée par les troubles mentaux de son frère Ivan détruit par la guerre d'Algérie.
Pour échapper à ces chapes qui l'étouffent, Marie la fugitive part voir la mer, "la grande bleue", à peine entrevue dans le film "la piscine", l'image encore floue de la liberté qui devient obsédante.
A force de volonté et de courage et malgré les obstacles, Marie veut disposer de son corps en régulant sa maternité et rentre à l'usine Peugeot où elle est "la bleue" comptant les écrous à répétition jusqu'à 20 mais libre dans sa tête.
1978, Marie est divorcée et unie avec les autres notamment avec Delphine dans le combat militant des revendications ouvrières "On a toujours été soudée aux autres, avançant avec elles, malgré tout ce qu'on était d'impossible, une petite plouc qui rêvait d'une vie à elle".

L'espace historique où se situe le roman fait résonner douloureusement les problèmes socio-économiques de notre société actuelle.
Marie est très vraie, profondément humaine et contemporaine dans la recherche de sa liberté et la volonté farouche de vivre SA vie. L'utilisation du "on" à certains endroits du texte pour signifier les pensées intimes de Marie renforce le lien du lecteur avec ce très beau personnage féminin.

Je remercie Liblfy et les éditions du Rouergue pour ce beau moment de lecture.
Commenter  J’apprécie          70
Très documenté, plein d'émotions, une femme parmi tant d‘autres et pourtant un exemple de lutte !
Lien : https://www.livre-mois.fr/li..
Commenter  J’apprécie          30
L'histoire retrace le parcours de vie d'une femme parcourant les années 70: le départ de la ferme familiale dans les Vosges, le mariage et le travail d'ouvrière chez Peugeot près de Besançon, avant de finir dans l'Aude à l'usine Myrys, mais cette fois en femme libérée. La normalité, les espérances, les déceptions d'une femme qui cherche à s'émanciper mais sans pour autant être une révolutionnaire.
Commenter  J’apprécie          30




Lecteurs (84) Voir plus



Quiz Voir plus

Les emmerdeuses de la littérature

Les femmes écrivains ont souvent rencontré l'hostilité de leurs confrères. Mais il y a une exception parmi eux, un homme qui les a défendues, lequel?

Houellebecq
Flaubert
Edmond de Goncourt
Maupassant
Eric Zemmour

10 questions
562 lecteurs ont répondu
Thèmes : écriture , féminisme , luttes politiquesCréer un quiz sur ce livre

{* *}