La Hulotte, n°93

"La cantine est bien organisée chez les Vautours..." (5)

Vautour moine, percnoptère, gypaète barbu s'invitent au banquet à la suite du vautour fauve, chacun à son tour et avec son menu de prédilection, qui n'empiète pas sur celui des autres. La Hulotte saisi l'occasion des agapes pour nous présenter toute la communauté avec une grande clarté.

"Parfois je somnole - mais toujours en restant sur le qui-vive. J'ai beau me sentir en sécurité sur ma falaise, on ne sait jamais ce qui peut arriver. Un couple de grands corbeaux peut toujours venir vous chercher querelle. L'un vous aboie au bec, ou vous saute sur le dos à pieds joints, tandis que, par derrière, son complice vous tire la queue. Surtout, surtout, gardez votre calme, ne répondez à aucune de leurs provocations ! Si vous faisiez la sottise de vous lever pour chasser l'un de ces Thénardier, l'autre profiterait aussitôt de ce que vous avez le dos tourné, pour briser et manger votre oeuf." (36)

Bien moins joyeux est le passage à l'hiver. Navigation limitée et difficile, jeûnes pouvant s'éterniser jusqu'à deux ou trois semaines, couvaison de l'oeuf précieux sur une "corniche battue par les vents" et "les pluies glaciales", au point que le vautour nicheur disparaisse "momentanément sous une épaisse couche de neige, avec juste le bout des ailes et de la queue qui dépassent !" le jeu du tandem du mois de décembre, par contre, me donne des envies de photographies, je ne crois pas jamais y avoir assisté.

Tonton Griffon, le vautour fauve, revient vers Adrien Desfossés, reporter à La Hulotte et vers ses lecteurs, ravis de le trouver une nouvelle fois dans l'« irrégulomadaire » le plus lu dans les chaumières et les terriers. On fait connaissance avec les cousins de tonton, le vautour moine (23 couples en France au recensement de 2009) venant après la curée orchestrée par les griffons et capable d'ingérer les parties coriaces que les vautours fauves négligent. Arrive ensuite le percnoptère avec sa « tête de vieillard dépressif » (86 couples en 2008 pour la France entière). Poids plume des vautours, deux kilos, il grappille tout ce qui tombe sous son bec. Enfin, c'est au tour du gypaète barbu, victime de chasse et de piégeage frénétiques et disparu de France hormis dans quelques ultimes bastions pyrénéens. Oiseau timide et pacifique, il attend que les os aient été récurés et se charge de les gober ou de les briser, selon leurs tailles. Les sucs digestifs de l'oiseau sont tels que les os se trouvent dissous ainsi que toutes les bactéries. le vautour est le « loup-garou des microbes, la lessiveuse à virus, le cul-de-sac des épidémies ». La seconde moitié du numéro est consacrée à Madame Bouldras et à la nidification dès janvier, au plus fort de la tourmente et du froid. En effet, la couvaison dure 55 jours et le nourrissage au moins quatre mois. Un mois de plus est nécessaire pour que le jeune vautour apprenne à se débrouiller. Huit à dix mois sont donc requis pour qu'un jeune griffon devienne autonome. Au passage, le lecteur découvre la stratégie des corbeaux pour gober l'oeuf de vautour, le vol synchronisé des couples de vautour ainsi que l'ancêtre préhistorique de tous les vautours, l'argentin magnifique, 70 kilos pour 7 mètres d'envergure.
Les dessins sont davantage fouillés dans ce numéro à l'exemple des falaises qui emplissent les pages 22 et 23. C'est dans ces cas-là qu'on sent que La Hulotte est aussi une oeuvre d'art. La notation d'une telle production n'est significative qu'au sein de la collection même car plusieurs numéros sont de pures merveilles (Docteur Toutou, le crapaud accoucheur, LH 53, Charlie Pholcus, LH 55 et surtout le rat d'or, LH 59) sinon, dans l'absolu, comparé au tout venant formaté de l'édition, La Hulotte décroche à chaque livraison ses cinq étoiles grand format.

Suite et fin des aventures du vautour fauve dans ce numéro 93 de la Hulotte.
Non seulement ce numéro va nous faire découvrir les plus proches cousins du vautour fauve, à savoir, le vautour moine, le percnoptere, et le gyapete barbu, mais en plus, en découvrant les habitudes alimentaires de ces lascars, on va réaliser que la nature est terriblement bien faite.
Une autre partie de ce numéro est consacrée à madame Bouldras, femelle de vautour fauve qui va pondre son oeuf dans des conditions météo fort défavorables puisqu'elle le fait au beau milieu de l'hiver, au mois de janvier. de plus quand on connait les endroits où nichent les vautours, il faut reconnaitre qu'ils font cela dans des conditions plutôt extrêmes !!