La mort de la reine Marie-Thérèse ne fut pas une moins grande épreuve. Il y avait eu de l'amour entre eux, à l'époque où elle n'était encore qu'une petite Infante, à la santé faible, au corps délicat, aux sentiments résignés. elle n'avait pas élevé une plainte contre les liaisons abusives du Roi, s'était même prise d'affection pour Mlle. de La Vallière si toutefois elle n'eut aucune sympathie pour Mme. de Montespan. Louis XIV l'assista jusqu'au dernier souffle, ne la quittant pas d'un instant et lui parlant en espagnol pour qu'elle sourît. Plus tard il devait faire d'elle cet éloge mesuré mais qui en dit long :
- Elle ne m'a jamais donné d'autre déplaisir que celui qu'elle m'a causé par sa mort.
Un jour au tric-trac, le Roi eut un coup douteux. Autour de lui, on discutait. Les plus courtisans demeuraient dans le silence. Arrive M. de Gramont.
- Jugez-nous dit le Roi.
- Sire, c'est vous qui avez tort.
- Comment pouvez-vous me donner tort avant de savoir ce dont il s'agit ?
- Sire, ne voyez-vous pas que, pour peu que la chose eût été seulement douteuse, tous ces messieurs vous auraient donné gain de cause ?
Des messages portés par les nuages : lettres à des amis
Jean d'Ormesson
Jean-Luc Barré, Martin Veber
Éditions Bouquins
Recueil de lettres reflétant la grande diversité des correspondants de l'écrivain français : Marguerite Duras, Michel Déon, Raymond Aron, Jacques de Lacretelle, Jean-François Brisson, Roger Callois, Jeanne Hersch, Claude Lévi-Strauss, Simone Veil, Michel Debré, entre autres. Un dévoilement des jugements littéraires de l'auteur, de ses admirations, de son intimité et de son engagement d'écrivain. ©Electre 2021
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