C'est cet homme, et la quête spirituelle à laquelle peut s'apparenter son œuvre, que nous invite à suivre et à regarder Pierre Descargues, puisque c'est sa vie entière que Rembrandt a mis sur la toile.
Il commence à se lasser de faire le portraitiste, d'être le peintre que le bon ton voulait qu'on priât de faire son image. Cela pourrait ne jamais cesser. Il deviendrai un autre Mierevelt, un autre Thomas de Keyzer, attaché à la vanité des être, témoin d'une société qui montrait à l'univers son efficacité et qui s'estimait juste et généreuse.
Il y a un fil conducteur dans la vie de Rembrandt (1606-1669) : ses autoportraits. Il n'a jamais cessé de se représenter lui-même, tour à tour adolescent provocant, jeune peintre célèbre, ivrogne vociférant, fiancé amoureux, militaire fringant, mais aussi souverain, lui que la faillite a fini par déposséder. La veille de mourir, il s'ôte enfin les pinceaux des doigts pour se peindre les mains croisées.
Nuit sombre d'automne à Leyde. Il est dix heures. Depuis la fin du jour les portes de la ville sont closes. Aux remparts, le tambour résonne et de partout, à son appel, convergent des hommes portant chacun une lanterne.
I. Rembrandt van Leiden
Chapitre I. La ville d'Arminius
Car l'enseignement fonctionne bien quand les forces d'attraction et de répulsion se conjuguent pour faire naître, loin du soleil, une étoile nouvelle. C'est ainsi que Rembrandt est né contre Rubens, que Vermeer est né contre Rembrandt. Mais peut-on alors parler d'enseignement ?
Le champs de création n'est comparable qu'à ceux des soleils dont la puissance fait dévier les astres de leur orbite. On ne confond pas un atelier d'artistes avec l'idéal philosophique de l'harmonie éternelle des sphères, L'art suscite sans cesse des explosions, des chutes des disparitions, il se développe sur les morts, des blessures, sur des victoires et des défaites, des alliances et des trahisons, des assauts et des fuites. Ce que le maître cherche, c'est communiquer son exigence.
Jusque dans ses grandes compositions, il se veut présent. Ce n'est pas mégalomanie : son art consume le monde et le transforme en lumière spirituelle. Il donne de la grandeur à tout ce qu'il entreprend et hausse à un niveau inconnu ses portraits de groupe, telle La Ronde de nuit, qui sont le symbole des jeunes Provinces-Unies cernées par des monarchies puissantes.