Clémence,
Petite étoile,
Tu souris à la vie... Tu as huit ans... La vie devant toi... Tu la vis et la croques à pleines dents cette vie... Tu vis des câlins de tes parents, de leurs bras aimants... de pains au chocolat, le dimanche, sous les draps... Tu vis de lâchers de ballons, ceux avec une adresse et un bout de ficelle, qu'on offre au ciel pour se faire de nouveaux amis à l'autre bout du pays... Tu vis de sauts à deux pieds dans les flaques d'eau, après une pluie d'été... Tu vis pour les bisous de Trottinette et pour ceux de Just... Un jour, quand tu seras grande, tu lui donneras de beaux enfants.. Tu as tous les matins de ta vie pour cela... Tu as tant à découvrir et elle a tant à t'offrir !
Tu as en toi l'innocence de l'enfance et l'angoisse de demain, quand tu seras grande... C'est comment quand on est grand, Papa ?
Tu aimerais aller faire un tour au bout du ciel... Y compter les étoiles... Elles te fascinent... Elles t'inondent de leur lumière, pourtant déjà mortes aux confins de l'Univers... C'est pour ça que les humains morts ils vont dans le ciel, pour continuer à vivre ? Et ils sont joyeux là-haut hein, Papa ? Tu t'ouvres à la Vie et tu questionnes la Mort...
Et puis...
Et puis l'absence... le vide... La douleur... Arrive ce jour où l'on voudrait tant pouvoir retenir ce qui a été perdu... Avec un regard d'homme et un coeur qui a vécu lui aussi, je me suis vite identifié à ton papa... Ne m'en veux pas, Clémence... Moi aussi, je pense à toi avec lui, même si la douleur n'est plus la même que celle qui est sienne... J'aimerais l'épauler, lui dire qu'on n'oublie jamais mais qu'il faut malgré tout avancer pour ne pas que la nuit nous prenne...
Le deuil de son enfant est une épreuve qui vous tatoue de son encre noire indélébile... un chemin de croix que l'on doit faire seul, terriblement seul... Il n'existe pas de recette gagnante, il n'existe pas de mode d'emploi... Il n'existe que deux êtres qui doivent arpenter chacun leur propre chemin, semé de leurs propres cailloux anguleux, de leur propre lave ardente, pour se retrouver à leur croisée et continuer à s'aimer... Il n'existe qu'une famille qu'il faut s'efforcer de protéger sans fuir le regard et les paroles des autres...
Certains passages de ce livre sont durs, crus, poignants... Il m'a parfois fallu prendre une bonne respiration pour m'y plonger... Ces mots sont durs mais ces mots sont vrais... L'espoir au bout de ces abîmes noires l'est aussi... Revivre ce n'est pas t'oublier, Clémence... C'est apprendre à te garder en nous différemment...
Une magnifique écriture que nous offre là
Isabelle Desesquelles... Un livre vibrant, émouvant, chargé de poésie, d'émotions, de sourires, de rires d'enfants, de frissons, de tristesse, de colère et de cris dans la nuit... Un livre qui marque au fer rouge, un livre qui vous ouvre le ventre et ravive des blessures enfouies... Un livre qui questionne sur la Vie et la Mort, sur le regard des autres, sur le temps qu'il est important de consacrer à ceux qu'on aime... Un merveilleux bonheur...
Un livre précieux, qui m'a été très gentiment offert. Je profite donc de ce billet pour te remercier si tu me lis :)