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Citations sur En relisant les Évangiles (6)

J'avais été si marqué par la religion à travers mon inconscient, mes désirs, mes peurs que le christianisme était devenu mon christianisme, déformé par mes propres interprétations. Ce maître a dû démanteler ce christianisme-là, un des bastions de mon égocentrisme et j'ai accepté qu'il le fasse le jour où j'ai admis que, si j'étais engagé sur un chemin, il fallait que je sois vraiment sur ce chemin. Et si cela me demandait d'abandonner toute prière, je devais aussitôt y renoncer. Le but, c'était de devenir un chrétien mais puisque la voie que je suivais n'était ni celle d'un protestant dans sa paroisse ni celle d'un moine trappiste dans son monastère, si je voulais un jour avoir l'être d'un chrétien et non pas une « mentalité » de chrétien, il fallait que je m'engage complètement sur une seule voie et pas sur une voie de ma fabrication. Par conséquent, je devais m'interdire tous les syncrétismes. En laissant détruire « mon » christianisme, j'agissais enfin en conformité avec les Évangiles. Je comprenais que si je voulais être vraiment libre du passé, il fallait que je sois complètement libre du christianisme de mon enfance et de mon adolescence, que je devais y renoncer, lâcher, tout donner. C'était la condition sine qua non pour faire table rase de mon infantilisme. J'étais donc dans cette situation paradoxale, qui peut être celle de certains d'entre vous, de me dire que plus je me détournais apparemment du christianisme, moins je mettais apparemment celui-ci en pratique, plus je le vivais de l'intérieur et plus je devenais un chrétien cohérent. Grâce à ce maître et aux vérités védantiques qu'il enseignait, le Christ est devenu vivant en moi. Et aujourd'hui, je ne vois plus de contradictions entre l'essence des Évangiles et la rigueur de ce maître.
p. 62
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Par conséquent, pour aborder un enseignement ancien comme les Évangiles qui datent d'il y a deux mille ans, il faut comprendre que le Christ s'adresse à des hommes qui, à bien des égards, sont très semblables à nous, mais à d'autres sont différents de nous. Je veux dire par là que Jésus parle à des êtres humains moins perturbés et moins névrosés que la moyenne actuelle. Il ne faut pas ramener les enseignements traditionnels à des psychothérapies pour personnes au psychisme distordu et dont le cœur est infirme ou estropié.
Pour contrebalancer le monde sans cohésion dans lequel nous avons grandi et qui nous a rendus si divisés nous-mêmes, une aide efficace, qui m'a beaucoup soutenu personnellement, est de découvrir que les enseignements spirituels, même s'ils paraissent se contredire implacablement au niveau des dogmes, enseignent en fait le même chemin et les mêmes vérités. Nous rendre compte que ces enseignements attribuent la même finalité à notre existence sur terre, à savoir la croissance intime de l'être, peut faire grandir notre certitude si défaillante. Et l'essence du christianisme se rattache à ce tronc central dont sont issues toutes les grandes religions. Un seul et même message d'espérance s'exprime à travers des traditions différentes, chaque tradition étant parfaite en elle-même, à condition de ne pas être dégénérée : un hindou peut aller jusqu'au bout de sa propre transformation en s'appuyant uniquement sur l'hindouisme, de même qu'un chrétien pourrait aller jusqu'au bout de son cheminement intérieur en s'appuyant sur le christianisme, à condition que celui-ci ne soit pas contaminé comme il l'est aujourd'hui par la dégradation spirituelle généralisée.
p. 105
Dans ce domaine, l'existence est le Grand Maître à condition que nous sachions l'utiliser. Souvent auprès de sages où la vie était très dure me revenait cette parole du Christ : « Je ne suis pas venu apporter la paix mais le glaive ! » Bien que nous soit promise aussi — et ce n'est pas une promesse vaine — « la paix qui dépasse tout entendement », l'ascèse ne peut pas être un chemin semé de pétales de roses sur lequel vous allez paisiblement de moins de sérénité vers plus de sérénité, de moins de confiance vers plus de confiance. C'est un parcours au long duquel vous avez à passer par des doutes, des remous et parfois même des tempêtes.
Vous portez en vous les potentialités latentes de toutes sortes de situations qui seront peu à peu actualisées. Si vous les vivez dans la peur, la négativité et l'indignation, vous ne pouvez pas progresser. Si, à l'instant où les souffrances se lèvent sous forme de révolte — ce peut être très pénible parce que tout votre monde de conceptions est mis sens dessus dessous —, vous vivez ces crises sans refus, avec vigilance, alors ces souffrances peuvent avoir un terme et un jour la page est tournée. Votre possibilité de doute et de désarroi est neutralisée et donc neutralisée aussi la possibilité même d'être entraînés par des comportements compulsifs, simples réactions mécaniques dues à des jeux implacables d'actions et de réactions, de chaînes de causes et d'effets en vous.
En payant ce prix, vous atteignez la connaissance de vous-mêmes, vous épuisez le stock d'émotions qui vous aveuglent. Surtout, par rapport à ce qui vous importe, vous accédez à une connaissance qui permet la réunification.
p. 215 et 216
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LE BIEN ET LE MAL
Les répercussions tragiques de la colonisation en général et des missions en particulier sont des sujets sur lesquels je me suis particulièrement penché pendant bien des années.
Ne prenons pas parti tout de suite, essayons de rester calmes et de regarder. Je me permets de dire que les missionnaires, qui ont consacré leurs vies à faire le bien, ont fait aussi le mal, ouvrant à leur insu la voie au matérialisme qui a envahi la planète et à la destruction de cultures qui constituaient pourtant de réels facteurs d'harmonie dans les sociétés. Leur conception du bien n'était pas alors celle de Vatican II. Pour les chrétiens, ne l'oublions pas, l'hindouisme, le bouddhisme et même l'islam incarnaient le Mal par excellence. Aujourd'hui encore, l'entourage du célèbre Monseigneur Lefèvre considère les religions autres que le christianisme comme sataniques. Du coup M. Rushdee, qui a écrit cavalièrement sur le Prophète, trouve grâce à leurs yeux « pour avoir rappelé au monde que le prophète de l'islam n'était qu'un débauché » — alors que celui-ci n'est d'ailleurs pas traité aussi sévèrement dans ce livre.

A partir de quelques faits véridiques, les adversaires de ces traditions ont brossé une description complète de ces religions qui, elle, est aberrante. Ce qui ne veut pas dire qu'il n'y ait pas de corruption et d'infantilisme dans le bouddhisme ou l'hindouisme, ni de fanatisme dans l'islam.
p. 259 et p. 258
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… EN RELISANT LES EVANGILES
Les milieux chrétiens montrent aujourd'hui deux attitudes nettement contradictoires en ce qui concerne la découverte des spiritualités vivantes de l'Asie. L'une est une attitude de très grand intérêt et de très grande tolérance. Le trappiste Thomas Merton en est le plus célèbre exemple mais, à cet égard, nous Français, pouvons citer les cas du Père Montchanin et surtout du Père Le Saulx, qui, tout en demeurant moine bénédictin, est allé aussi loin que possible dans la compréhension de l'hindouisme et pour qui le choc de la rencontre des deux traditions a été bouleversant. Nous savons aussi que beaucoup de membres de divers ordres religieux lisent des livres sur l'hindouisme et le bouddhisme, que certains pratiquent ouvertement le yoga ou le zazen. Je connais personnellement plusieurs dominicains, par exemple, avec qui je suis ou j'ai été en relation assez étroite et qui ont beaucoup approfondi ces techniques d'ascèse orientales. Dans cette même ligne d'ouverture, on peut citer la déclaration du Concile de Vatican Il sur les religions non chrétiennes (il y a à Rome un secrétariat pour la rencontre avec les grandes religions de l'humanité) et le rassemblement œcuménique d'Assise pour la paix auquel participait le pape actuel.
Pourtant, il y a en même temps dans l'Église, c'est visible à bien des signes, un durcissement à l'égard de l'intérêt que des chrétiens portent aux religions orientales. Récemment, le Secrétariat pour la Foi a publié un communiqué qui engage le Vatican et qui met sévèrement en garde les chrétiens contre la pratique du zazen ou du yoga. Tant et si bien qu'il revient souvent à mes oreilles que dans tel monastère en France on recommande à des jeunes « en recherche » qui y font une retraite la lecture des livres d'Amaud Desjardins et que dans d'autres abbayes on déconseille formellement ou même on interdit la lecture de ces livres. Alors que pour certains catholiques, y compris des religieux avec qui je suis en correspondance, ces ouvrages représentent un apport spirituel bienvenu leur permettant d'approfondir certains aspects de leur propre ascèse dans les conditions du monde moderne, pour d'autres religieux le personnage Arnaud Desjardins et son œuvre sont une cause de souffrance. Ils m'accusent d'être un propagandiste d'idées erronées et — certains n'hésitent pas à employer cette expression — un ennemi de la vraie doctrine et de la vraie foi.
...
Car il existe des valeurs spirituelles essentielles que j'ai retrouvées dans l'ancienne tradition chrétienne mais aussi dans le soufisme, le bouddhisme tibétain ou zen et l'hindouisme et qui se trouvent certainement dans d'autres traditions que je n'ai pas approfondies comme par exemple le judaïsme. Mais je sais que mes livres sont lus par des lecteurs ayant des positions et des convictions tout à fait différentes ou même opposées, depuis le refus catégorique du christianisme jusqu'au malaise devant tout ce qui n'est pas officiellement chrétien et plus précisément d'obédience catholique. Je dis simplement qu'il est dommage que des Occidentaux s’extasient devant les richesses de 1'Orient et ignorent complètement celles du christianisme.
p. 11 et p. 12
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L'originalité des voies spirituelles est de vous proposer autre chose que ce que la mentalité ordinaire est capable de comprendre. C'est le vrai sens d'une parole comme : « Mon royaume n'est pas de ce monde. » Le « Prince de ce monde » correspond à notre manière égocentrique d'appréhender chaque événement en fonction de nos goûts et de nos aversions personnelles dans tous les domaines.

Indéfiniment nous ne pouvons nous empêcher d'opposer, de diviser. Le sens étymologique du mot diable est d'ailleurs « le diviseur », division signifiant deux visions, alors que la vérité est toujours une. N'oubliez jamais que le royaume dont nous parle le Christ, s'il peut être découvert dans ce monde, n'est cependant pas de ce monde.
p. 304

« En relisant les évangiles* », Arnaud Desjardins, Véronique Loiseleur, Éditions La Table Ronde © 1990
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DU VIEIL HOMME A L'HOMME NOUVEAU
Sans entrer dans chaque détail pour justifier ce que je vais dire maintenant, je peux cependant affirmer que vous en trouveriez beaucoup de traces dans d'autres traditions et, ici ou là, chez les premiers auteurs chrétiens du II au VI siècle. La vérité — ou l'enseignement spirituel donné par le maître au disciple — est désignée par différents termes, le premier étant le mot pierre. La forme la plus immédiatement accessible de la vérité est la vérité écrite, la vérité « figée » qui recèle une certaine valeur, mais dans laquelle il ne faut pas s'emprisonner. La pierre dans les Évangiles désigne cette vérité dogmatique. Par exemple, les Dix Commandements donnés à Moise au sommet du Sinaï dans l'Ancien Testament sont gravés dans la pierre. Les temps anciens nous ont laissé de nombreux témoignages d'inscriptions dans la pierre, comme les hiéroglyphes des temples égyptiens — et on ne peut nier qu'il y a eu une certaine influence égyptienne sur la tradition hébraïque puis la tradition chrétienne. Le mot pierre se réfère à ce qui est écrit, transmis. Le fait de simplement lire les Upanishads, la Bhagavad-Gita ou la Bible correspond à ce niveau « pierre ». Il n'y a là rien de méprisant en soi pour le roc — ni pour saint Pierre. Quand le Christ dit qu'il faut bâtir sa maison sur le roc et non pas sur le sable, nous devons nous souvenir que, si ces termes évoquent immédiatement la solidité d'une part et la fragilité de l'autre, dans le symbolisme universel le sable composé de milliards de grains indique la multiplicité et le roc, le monolithe, désigne au contraire l'unité.
Pour que l'enseignement ne soit pas seulement un avoir intellectuel ou moral, pour qu'il nous transforme, il faut qu'il devienne vivant ; il est alors désigné par le mot eau. Par exemple, il est dit dans l'Ancien Testament que Moise des noces de Cana ?
p. 77
Combien cette histoire serait déplacée dans les Évangiles si elle ne revêtait pas un sens extrêmement profond. Tout de suite le Christ annonce qu'à partir de maintenant il va changer l'eau en vin, c'est-à-dire que la compréhension juste, vivante de l'enseignement, ne sera pas récupérée par le mental mais que l'enseignement va vivre en nous. « Ce n'est plus moi qui vis, c'est le Christ qui vit en moi » est l'achèvement de cette transformation en nous de l'eau en vin.
La vérité nous parvient d'abord sous la forme de la pierre, ensuite sous la forme de l'eau qui désaltère, enfin sous la forme du vin qui peut nous enivrer ; ce mot enivrer qui revient souvent dans la littérature chrétienne mais également chez les mystiques soufis — alors que les musulmans ne boivent jamais d'alcool — ne doit pas être pris dans un sens péjoratif. Il ne se réfère pas à un état d'ébriété, mais à l'ivresse mystique de celui qui est passé à un autre plan d'être, un autre plan de conscience. Voilà pourquoi Jésus dit à Thomas dans l'Évangile de Thomas : « Tu as bu et tu t'es enivré à la source bouillonnante que j'ai moi-même mesurée1. » La transformation de l'eau en vin est la préfiguration du sang du Christ versé. Le symbole du vin est présent lors de la première manifestation du Christ comme sauveur aux noces de Cana, il est à nouveau présent quand sa mission s'achève lors de la Cène, le dernier repas pris avec ses disciples avant la crucifixion. Le passage de la pierre à l'eau et de l'eau au vin peut aussi ne pas s'opérer. On peut rester attaché à la lettre, c'est-à-dire au niveau pierre de la vérité. Par exemple, il est dit qu'un des possédés guéris par le Christ « se déchirait avec des pierres ». Faut-il entendre par là qu'un malheureux ramassait des cailloux pointus pour s'écorcher ? Oui, peut-être. Mais il existe une autre manière de se déchirer que bien des êtres humains ont connue — et …
p. 79
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1. Évangile de Thomas, 13, 13-15.


… qui est, selon moi, une des plus cruelles et des plus douloureuses — c'est de buter sur la lettre de l'enseignement et de se débattre dans les contradictions : les protestants ont dit ceci, les catholiques ont dit cela et les orthodoxes disent encore autre chose ; et le Christ a donné un enseignement qu'on me dit être dualiste, le Védanta est un enseignement non dualiste, alors où est la vérité ? Tant qu'on s'en tient aux formulations, même en admettant qu'on connaisse l'hébreu, le grec, le sanskrit et l'arabe, on peut véritablement se torturer. Et, s'il n'y a pas un homme transformé, un sage, un maître pour nous sauver de cette torture, nous pouvons souffrir longtemps sans parvenir à réconcilier ces contradictions. Au nom du Christ, certains se sont meurtris avec des interdits et des dogmes sans comprendre que l'essentiel réside dans ce passage de l'amour ordinaire, phileo, à l'amour supérieur, agapè, dont je parlais tout à l'heure.
p. 80
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