Citations sur Les jolies choses (74)
Je voudrais que tu comprennes, et que tu m'aimes encore, que tu me protèges de tout ça, que tu me protèges de moi, que tu m'empêches de le faire, que tu saches bien comment c'est triste, être capable de ça, s'ouvrir comme je l'ai fait, à un autre que toi.
Il dit : "l'âge se lit dans les yeux des autres, même quand soi-même on n'y pense plus. La peau qui se barre, l'odeur qui change. C'est un corps étranger au sien, à celui qu'on devait toujours avoir, celui qu'on a toujours connu. C'est comme une erreur lamentable mais on ne peut se plaindre auprès de personne. Et se sentir passer, inexorablement, dans le camp des vieux qui jusqu'ici était une autre terre, qui ne nous concernait pas. Et à l'intérieur de ce corps, rien ne change, on est le même qu'il y a vingt ans, dans une machine qui se déglingue tout doucement. Et même les douleurs d'âme, les déceptions, on croyait s'y habituer, depuis le temps qu'on s'endurcit. Et c'est le contraire, ça se met à faire mal comme jamais. Et puis à force, toujours sentir que ça tape au même endroit, ça fait mal, c'en est atroce."
Il y a une sexualité qu'on ne peut vivre que sous alcool. Boire, c'est ça aussi : c'est accueillir ce qui devait rester caché- De notre propre désir.
Se sentir passer, inexorablement, dans le camp des vieux qui jusqu'ici était une autre terre, qui ne vous concernait pas.
C'était la différence fondamentale, entre Claudine et le monde. Comme tout un chacun, elle était calculatrice, égoïste, médisante, mesquine, jalouse, impostrice et menteuse. Mais, de façon atypique, elle assumait le tout, sans cynisme, avec un naturel assez désarmant pour la rendre inattaquable.
_ Pourquoi il fallait absolument qu'elle ait une meilleure vie que les autres ?
_ Parce que c'est humain. Ca ne te dit rien : "On veut vivre et pas survivre ! Un deux un deux trois quatre. On veut pas vivre pas survivre ?"
“Je veux plus de cette vie où jamais demain ne veut dire quelque chose.”
Métro Château-rouge
Terrasse, sur un trottoir, au milieu des travaux.
- Putain comme il fait beau...
- Ouais, ça fait mal aux yeux.
Claudine a oublié ses lunettes à l'appart, elle se fait éblouir, grimace en ajoutant :
- Je me sens chelou, c'est grave, ça fait déjà plusieurs jours.
Elle touche sa gorge et déglutit :
- Carrément, là, ça me brûle.
Magnanime, Nicolas hausse à peine les épaules :
- Si tu bouffais pas des antidépresseurs comme si c'était des carensacs, c'est probable que ça irait mieux.
Elle soupire longuement, en haussant les sourcils :
- Je me sens pas soutenue avec toi.
- Et moi je me sens mis dans la merde, avec tes idées à la con.
Et ils étaient devenus copains, quasiment par inadvertance, à force d'être toujours contents de se voir et d'en avoir souvent envie.
- Quand il te tape je te jure que je sens les coups.
Claudine s'était mise debout, retournée face à elle, l'avait attrapée par les cheveux. Pauline ne criait pas, pour pas que les parents viennent. Claudine l'avait entraînée sur le lit.
- T'es sûre que tu sens ?
Et bloquant sa tête par les cheveux, elle s'était mise à la cogner, ses petits poings s'abattant avec le plus de force possible contre le visage. Pour lui faire vraiment mal, elle avait pris l'oreiller, maintenu à deux poings contre la face de l'autre. Pour être bien sûre qu'elle entende, elle s'était mise à crier :
- C'est bizarre, parce que moi, quand il t'embrasse, je sens rien.