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Sur le littoral désolé d'un Nord qui n'en finit pas de se désindustrialiser, le long d'une portion de digue sur laquelle, entre friches industrielles, centrale nucléaires et vieux blockhaus évoluent une galerie de personnages en perdition. Chômeurs, ouvriers, adolescents coincés dans un monde étriqué… chacun porte ses sombres secrets, ses remords, son ressentiment et, parfois, ses espoirs, déçus ou encore vivaces.
Sur ces lieux ouverts sur la mer et pourtant complètement enclavés où la nature reprend peu à peu ses droits, Pascal Dessaint donne la parole à chacun des protagonistes, tisse peu à peu l'histoire de ces vies effilochées et fait apparaître progressivement à travers cette polyphonie des voix et des destins, l'enchaînement des actes inavouables et de leurs conséquences qui finissent de les amener là où ils sont.
Humains, trop humains, mais peu à peu privés par les grandes logiques économiques qui président à la destiné de leur région et de leurs vies, et de ce qui faisaient d'eux des êtres avec une existence sociale réelle, une partie d'entre eux, à l'image de cette nature inquiétante qui recommence à proliférer, s'ensauvage et se coule dans la dune, dans la digue… au propre comme au figuré. Et c'est bien ce sentiment d'abandon qui prévaut dans le roman de Pascal Dessaint. Des êtres abandonnés, dans un pays abandonné et qui finissent eux aussi par baisser les bras et s'abandonner à leur tour. Et ce sont naturellement ceux qui tentent de garder encore la tête hors de l'eau ou qui n'ont pas épuisé leurs réserves d'espoirs – femmes, enfants – qui en font les frais.
Livre d'une extrême noirceur, le chemin s'arrêtera là n'est toutefois pas dénué de poésie et même, aussi fugaces soient-elles, de quelques lueurs d'espoir. Menée avec beaucoup de sensibilité et ponctuée d'images fortes et poignantes, l'histoire qui se met en place et dont les personnages emboîtent peu à peu les pièces du puzzle qu'elle est devenue en même temps qu'explosaient ces vies que chacun d'entre eux nous conte, est saisissante. Pascal Dessaint se fait là le chantre d'un monde livré à lui-même et montre ce que personne ne veut plus voir ; ceux que l'on laisse au bord du chemin, que l'on pousse sous le tapis mais qui continuent pourtant de s'y agiter, que ce soit pour s'enfoncer un peu plus ou pour s'en extraire. Ça n'est pas toujours très joli, mais Dessaint y confère incontestablement une certaine beauté.

Lien : http://www.encoredunoir.com/..
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"Noir c'est noir; Il n'y a plus d'espoir". C'est rarissime qu'une chanson de Johnny me vienne à l'esprit lors d'une lecture, mais là elle s'est imposé. Il ne faut pas avoir le moral à zéro au moment de livre ce roman, sinon c'est le fond du trou assuré !
Le paysage, les personnages, les situations, tout est décrit avec beaucoup de réalisme. Et je dis ça alors que ce Dunkerquois me paraît être un Dunkerquois de caricature, pas celui que je connais ! Oui, on a de la misère et le paysage n'est pas jojo, mais pas à ce point tout de même ! Il y a plus de lumière, plus de positif. Mais cela n'enlève rien à ce roman. Car c'est un roman, alors si l'auteur prend des liberté avec la région (ou du moins avec l'image qui est a mienne) et bien tant pis ! C'est bien écrit, bien prenant, et c'est cela qui compte au final.
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Pascal Dessaint, le chemin s'arrêtera là. Rivages thriller.

Pascal Dessaint tient fermement son lecteur, comme Josiane tient Wilfried « coincé entre ses jambons ». Bon gré mal gré, on subit la violence, vient le plaisir, et on en voit de toutes les couleurs… surtout du noir, encore que le ciel s'éclaircisse et qu'on devine une nouvelle aurore.

Ce sera sans doute avec une nouvelle génération, ou quelques survivants de l'ancienne, une fois dissipés les malentendus. Car dans la majeure partie des personnages, « pas un pour racheter l'autre ! ». C'est un concentré de misères sociales, de méchanceté et de bêtise humaines, avec parfois un sentiment de culpabilité, une mauvaise foi patente, et tous les comportements déviants exacerbés par l'alcool et les circonstances. Pertes d'emploi, habitats précaires, règlements de comptes, rancunes tenaces, et raids expéditifs.

Pourtant dans toute cette pénombre, des joies intermittentes : une partie de surf casting, un regard sur les phoques, sur un faucon prédateur, tandis qu'apparaissent, majestueux et imposants, d'énormes navires qui traversent les mers du globe, méthaniers, minéraliers, vraquiers…

Nos personnages, eux, vivent en vase clos, entre ponts et écluses, digues et jetées. Prisonniers d'un milieu industriel, de friches donnant sur une centrale nucléaire, un port. On entend le vapocraqueur dégazer. Tout est en action ou en sommeil agité, sans description pesante, mais partie prenante dans le récit.

« Par-dessus le chuintement habituel, s'est fait entendre un souffle de chalumeau, une respiration de dragon. Une cheminée a lâché un gros panache de fumée. Un calamar n'aurait pas craché une encre aussi noire. le nuage s'est étiré sur l'azur. L'usine était toujours vivante. Personne n'allait s'en plaindre. »

On se pose pourtant des questions : « qu'est-ce qui était pire ? Tuer un homme, un seul, un parmi la multitude, même d'une façon affreuse, ou bien fermer une usine et plonger du même coup dans le désarroi des centaines et même des milliers de pauvres gars ? Qui était le plus coupable ? Celui qui tuait ou celui qui licenciait ? Pour moi, c'était vite vu. »

dit un personnage.

Car dans ce roman choral, chaque chapitre donne la parole en soliste, à un protagoniste. le lecteur entend donc l'avis de chacun dans un grand puzzle soigneusement construit. Ainsi le lecteur se trouve en immersion dans ce bassin industriel, en contact constant avec ses rejetés, et les victimes collatérales de ses pratiques.

le titre indiquerait une impasse : « le chemin s'arrêtera là. ». On verrait plutôt, à la fin du livre, une ouverture, un itinéraire à emprunter.
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C'est une bande de terre perdue entre la mer du Nord et les raffineries. Une bande de terre coincée entre le monde sauvage et le monde industriel. Sur cette bande de terre vivent Jérôme, Cyril, Louis, Mona et Wilfried. Des ouvriers mis au rebut, des ados en perdition, des travailleurs précaires. Dans ce monde de laissés-pour-compte on habite une cabane déglinguée envahie par le sable où une caravane rouillée posée entre les dunes. On s'isole dans un entre-soi où la nature humaine révèle parfois ses aspects les plus sombres et les plus malsains. On vit à la marge entre gens de peu de mots, entre gens frustes et sans illusion. On ne se plaint pas, on prend les choses comme elles viennent, on s'occupe comme on peut, on fait avec les moyens du bord.

J'ai adoré ce roman choral parlant de misère sans misérabilisme, ce roman noir débordant d'humanité dans une langue d'une magnifique concision, ce roman qui offre une parole aux invisibles, ce roman qui dit un monde à l'agonie, une région rongée par la paupérisation galopante de sa population. Ici on ne juge pas, on ne minimise rien, on ne caresse personne dans le sens du poil. Chacun raconte son histoire, donne son point de vue, exprime son ressenti. C'est cash, lyrique, âpre, cruel, ou violent, drôle aussi parfois. On s'enlise, on glisse, on dérape, on se relève et on retombe. On n'est pas des saints, on traîne de douloureuses casseroles et on avance comme on peut. Pas à pas. Jusqu'au bord du gouffre…

Lien : http://litterature-a-blog.bl..
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Dans le Nord de la France sur un littoral flanqué d'un bassin minéralier, d'une centrale nucléaire, d'anciens blockhaus et d'usines qui ont fermé, des personnages habitent dans ce paysage désolant. La mer et l'air sont polluées dans ce coin mais les personnages s'y accrochent. Ils n'ont rien connu d'autre, ont perdu leur emploi pour la plupart ou sont ouvriers et semblent subir les journées. Certains d'entre eux portent en eux des faits inavouables, se trouvent des excuses comme pour s'en dédouaner mais aussi des espoirs. Ces laissés pour compte se débrouillent, se croisent, connaissent les habitudes des uns et des autres.

En donnant la parole à chacun des personnages accidentés par la vie, les histoires mais surtout les vies de chacun et la passé nous sont révélés. Mais l'auteur ne s'arrête pas une situation globale à un moment donné, il les lie par plusieurs actes. Des faits exécutés quand on n'a plus rien à perdre mais aussi des élans de solidarité ou des envies de changer le futur.
Avec une écriture franche, sans fioritures qui colle aux personnages et rend à merveille l'ambiance et ce paysage où même la nature semble sordide, Pascal Dessaint nous entraîne dans ce roman/polar social noir. Ca secoue, ça fait mal, ça prend aux tripes, ça serre la gorge... Il nous dépeint une réalité que l'on oublie trop souvent, le quotidien et les préoccupations de certaines personnes mais aussi une vraie humanité pour certaines. Et le tout sans aucun pathos.
Un livre saisissant lu en apnée totale !

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Le chemin des contrées urbaines, policées, s'est arrêté quelque part sur une côte nordiste, au bord de morceaux de sable donnant sur la mer. Ça pourrait être une contrée idyllique, et pourtant : l'industrialisation à outrance a repoussé les humains au coeur des terres, les usines étouffent l'infini du ciel par leurs vapeurs méphitiques et les rares autochtones se sont coulés au fil du temps dans ce paysage délétère, dégénéré et moribond, jusqu'au délitement de leur humanité. Quand le chemin de Mona, Gilles et Louis croisent celui d'autres fantômes, l'histoire peut débuter et le chemin s'arrêter.

« le chemin s'arrêtera là » est un roman noir de Pascal Dessaint. La quatrième de couverture précise qu'il « dépeint la fragilité des êtres et la confusion des sentiments, sur fond de questions sociales et environnementales. Originaire du Nord, dont l'ambiance imprègne une partie de son oeuvre, il a remporté de nombreux prix (Prix Mystère de la critique 1997 et 2008, Grand Prix de littérature policière 2000, Prix du roman noir français 2006) ».
Tableaux après tableaux, l'auteur prend le temps de dépeindre diverses histoires, adoptant, ce faisant, des points de vue narratifs variés. En toile de fond, donnant cadre et sens à ces vécus sombres, dénués d'espoir, l'environnement tient une place majeure. Chacun semble tracer son chemin dans cette contrée sauvage, subissant sa destinée, plutôt que l'agissant. Et puis, les fils se croisent, s'entremêlent habilement sous la plume sans concession de l'auteur qui se plaît à traquer les états d'âme, les mouvements d'humeur les plus secrets. Car ce qui lie tous ces êtres, c'est d'abord un passé commun, marqué par le sordide et les secrets enterrés. La violence n'est jamais loin, sous les silences, à fleur des mots. Mais le propos ne se veut ni complètement désespéré ni, surtout, manichéen. le final laisse entrevoir, au bout du compte, là où un chemin s'arrête, un peu de lumière finalement, un carrefour où d'autres chemins commencent.
« le chemin s'arrêtera là » est un magnifique et profond roman noir, très bien écrit, émaillé de superbes descriptions d'un environnement hostile qui vient faire écho à la détresse de ceux qui y demeurent, en dépit des tempêtes.
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Ces pages ne respirent la joie de vivre, loin de là. L'auteur nous emmène dans une lande battue par les vents, polluée par le vapocraqueur qui rythme les journées, sans espoir de travail.

Roman choral, les premiers chapitres sont arides, il m'a été difficile d'entrer dans la petite musique de l'auteur. Puis l'histoire prend forme et les liens entre les personnages apparaissent.

C'est triste, noir, d'autant plus qu'une certaine réalité se cache derrière.

Seule poche d'espoir, la présence des phoques que d'aucuns aperçoivent parfois. Mais est-ce une bonne nouvelle, finalement ?

L'image que je retiendrai :

Celle de Michel se passionnant pour les super-tankers entrant et sortant devant ses yeux.
Lien : https://alexmotamots.wordpre..
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Non ce n'est pas le nord des ch'tis, c'est celui de la desindustrialisation. C'est le nord mais cela aurait pu être l'est, l'activité portuaire en moins. D'ailleurs heureusement qu'il est là le port et ses minéraliers..Pascal Dessaint​ brosse un tableau en clair obscur de ces personnages presque normaux. C'est noir mais pas froid, c'est sombre mais pas glauque....bref c'est humain et c'est la force de ce livre. Soigneusement décortiqué le présent et le passé de chacun, les coups durs, le monde dans lequel nous vivons n'est peut-être pas si loin ( est très proche) de ce nord fantomatique
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Ce roman relate la vie de personnages coincés entre mer du Nord et fumée toxique balayée par le vent.Une micro-société d'âmes en peine meurtrie par la vie, l'industrialisation à outrance et laissée pour compte par la société.
Chacun son fardeau, son fonctionnement et sa vision du Monde !
Les dunes d'oyats renferment leurs vies, leurs histoires et leurs secrets.
L'auteur dépeint avec profondeur, humanité et un soupçon de poésie et d'humour les tribulations de ses personnages. Un peu trop nombreux à mon goût au début.
Et puis tout se met en place.
Le mystère alimenté de vieux secrets grandit lorsque les protagonistes se croisent, se rencontrent où partagent certains souvenirs, moments ... activités.
Mais la pêche en surfcasting, les ballades dans les dunes, les retrouvailles dans les blockhaus pour jeunes et moins jeunes, peuvent être aussi bien réjouissantes que terrifiantes !

Lien : https://imagesderomans.blogs..
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Dessaint Pascal – "Le chemin s'arrêtera là" – Payot/Rivages-noir, 2016 (ISBN 9782743636029)
– 1ère éd en 2015

Bien que publié dans la collection "Rivages/Noir", il s'agit d'un roman aussi peu policier que possible : quasiment pas d'intrigue, aucune énigme, un enquêteur éphémère.

Avant tout, ce roman constitue un témoignage, une mise en scène de la vie quotidienne d'un groupe de laissés pour compte, survivants dans la région de Dunkerque après l'énorme choc social qu'engendra et perpétua la fin des chantiers navals dans les années 1980. Loin du Zola messianique de "Germinal", proche du Zola de "La Terre", l'auteur livre une description sans fard ni angélisme de la déchéance morale et des abîmes sociaux dans lesquels sombrent les sept personnages qui prennent tour à tour la parole au fil des brefs chapitres (Louis, Jérôme, Cyril, Michel, Gilles, Wilfried, Mona).
Cette description de moeurs prend une ampleur d'autant plus vitriolante qu'elle se joue avec en toile de fond les ruines industrielles dénaturant (au vrai sens du terme) ce qui fut une région de tourisme chic.
Un roman réellement dérangeant.

De cet auteur, j'avais déjà lu "Cruelles natures" (publié en 2007 – voir recension), qui m'avait moyennement plu, mais déjà surpris par la qualité de la description des paysages.

Un auteur à suivre...
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