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Critique de Ziliz


Dans cette petite ville du nord, si on a la chance d'avoir un boulot, c'est à l'usine sidérurgique Europa. Le travail y est éreintant et dangereux, vous risquez d'y perdre des morceaux ou la vie au cours d'un accident, d'une explosion, ou de tomber malade prématurément.
Quand on a la chance d'être encore en vie, dans cette petite ville du nord, on est exposé à la pollution : « [...] cette année, l'usine a encore rejeté dans l'atmosphère 100 000 tonnes de gaz sulfureux, 150 d'oxyde d'azote, 110 de poussière de plomb, de zinc et de cadmium. »
Abstenez-vous de consommer les poissons des cours d'eau, les légumes du jardin, lavez soigneusement les mains de vos enfants, ne les laissez pas toucher la terre, gardez-les à l'intérieur quand le vent souffle dans la mauvaise direction. Malgré toutes ces précautions, leur plombémie sera très élevée, avec tous les risques sanitaires que cela comporte.

C'est dans ce coin sinistre et délétère que vit Clément avec sa fille de trois ans. Son frère aîné handicapé l'aide à s'occuper de la petite depuis le décès de la maman. Tous trois essaient de tenir la secousse, et c'est un vrai défi : deuil, pauvreté, conflits au boulot, spectre du chômage.

Roman noir social passionnant et révoltant pour qui s'intéresse un tant soit peu aux dégâts, sur l'économie locale et sur l'environnement, de la société de consommation à outrance et de la mondialisation. J'ai apprécié la sensibilité de l'auteur - les personnages et leurs émotions sont parfaitement décrits -, je partage sa vision pessimiste des conséquences de l'ultra-libéralisme. Mais mon intérêt a faibli au fil des pages, l'intrigue convenue m'a ennuyée, on voit tout venir, même si Dessaint ménage ses effets sur deux cent cinquante (longues) pages en alternant la narration.

Sentiments de révolte et d'impuissance en découvrant cette histoire, où l'instinct de survie est tel que des hommes préfèrent mourir "dignement" de maladie ou d'un accident en ayant un boulot, que de crever de faim en étant chômeurs ou en déménageant : « On a un problème de pollution, mais 830 familles sans travail, c'est encore plus dramatique. Nous avons toujours vécu dans la poussière, il faut savoir accepter un certain nombre de contraintes. » Alors « L'usine est bien protégée par ses esclaves. »

J'ai pensé en lisant ce roman sombre à "La frontière" de Patrick Bard, "Les vivants et les morts" de Gérard Mordillat, "D'acier" de Silvia Avallone (trois excellents romans noirs "sociaux"). J'ai pensé aussi à ceux qui ont préféré revenir sur leurs terres contaminées à Tchernobyl, plutôt que mourir de faim dans une ville inconnue...

- 5/5 pour la sensibilité, le contexte et les idées - 2,5/5 pour l'intrigue
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