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Critique de Melisende


Comme pour Druide de Olivier Peru, en janvier dernier, c'est avant tout la magnifique illustration de couverture de ce premier tome du Dernier Jardin de Lauren DeStefano qui m'aura poussée à sortir ma carte bleue.
En revanche, si la découverte des mystères peuplant la forêt des druides a été un coup de coeur, cela n'a pas été le cas avec l'histoire de Rhine. Je ressors de cette lecture plutôt satisfaite même si, à mon goût, la jeune auteure aurait pu pousser le vice plus loin… A voir ce que donnera le tome suivant.

Rhine, 16 ans, a été enlevée par des Ramasseurs. Entourée de dizaines d'autres filles apeurées, elle attend son sort, parfaitement consciente que le dénouement le plus heureux serait peut-être la mort… Car entre la prostitution et le mariage forcé, la mort est peut-être la seule porte vers la liberté… mais à cause de ses yeux vairons, Rhine retient l'attention d'un homme riche qui la choisit, elle et deux autres jeunes filles pour devenir les nouvelles épouses de son fils Linden.
La première femme de celui-ci, Rose, dans sa vingtième année, est atteinte du virus et ne tardera pas à disparaître… son époux doit se servir des quatre années qu'il lui reste à vivre (il a 21 ans) pour enfanter. La naissance d'enfants est très importante dans cette société où les femmes s'éteignent à 20 ans, les hommes à 25.
Entourée de Jenna, l'épouse froide de 19 ans et de Cecily, la mariée très enthousiaste de 13 ans, Rhine doit trouver sa place et jouer son rôle à la perfection. En gagnant la confiance de ses tortionnaires, peut-être pourra-t-elle un jour s'échapper de cette prison dorée…

Dans cette société futuriste, les scientifiques ont mis au point des enfants parfaits. Revers de la médaille : les nouvelles générations ne survivent pas, les femmes meurent à 20 ans, les hommes à 25. de riches savants continuent les expériences pour trouver la solution au problème, quitte à kidnapper et engrosser les demoiselles afin d'avoir de nouveaux cobayes sous la main…
Les bases de cette histoire sont particulièrement glauques - et originales -, mais je regrette qu'elles n'aient pas été plus accentuer. Quitte à vouloir choquer et à partir dans un univers sombre, autant y aller à fond… mais non. Et c'est ce que je reproche à Lauren DeStefano, tout est un peu trop édulcoré. Alors oui, c'est un livre estampillé « jeunesse » donc j'imagine qu'il faut rester soft mais pour le coup, le titre aurait gagné en profondeur et en intérêt s'il avait été destiné à un public adulte.
Je regrette également qu'on en sache pas plus sur le virus ou sur la société en général. J'ai eu beaucoup de mal à me représenter la vie quotidienne que pouvait avoir Rhine avant son enlèvement. D'un côté je m'imaginais New York en ruine, maisons barricadées, enfants cachés (zombies dans l'ombre… ah non, on n'est pas dans 28 jours plus tard…) mais de l'autre, les gens vont au travail, les riches font la fête dans les boîtes de nuit… Je n'ai pas réussi à m'approprier correctement le contexte, et ça m'a manqué. Alors oui, ce n'est qu'un premier tome, on aura surement des réponses par la suite… mais quand même !

Du côté de l'intrigue, presqu'une année se passe pour Rhine dans sa nouvelle demeure, mais on ne peut pas dire qu'il y ait beaucoup de rebondissements. La jeune fille apprend à connaître ses nouvelles « soeurs-épouses », son mari, son beau-père, les domestiques et la maison… et cherche un moyen de s'enfuir. Elle se rend compte qu'il se passe des choses pas très jolies au sous-sol - où elle ne peut pas aller - et que sous ses airs de paradis, la maison est une prison dangereuse.
Encore une fois, les idées sont là mais pas assez développées à mon goût, ou alors de façon trop gentillette. Enfin, je ne sais pas pour les autres lecteurs, mais j'ai trouvé Rhine assez peu réactive face à la situation. J'ai bien compris qu'elle voulait gagner la confiance des maîtres des lieux, mais elle reste tout de même très (trop) docile (et j'irais même jusqu'à « molle »…)… Quant à la romance sans surprise, je l'ai trouvée trop facile et sans aucune émotion, dommage.

En revanche, je reconnais que l'auteure a bien rendu les relations entre les soeurs-épouses et leur mari commun. Tout est très contradictoire et paradoxal. Rhine déteste cet époux auquel elle a été obligée de s'unir mais s'attache tout de même à lui (le syndrome de Stockholm ?), comme aux autres épouses malgré leurs rivalités…
Je trouve que Lauren de Stefano a fait du bon travail de ce côté-là et nous a offert de bons personnages secondaires : Cecily la gamine insupportable qui devient adulte par la force des choses, Jenna la mystérieuse épouse qui a beaucoup à offrir sous son masque de froideur, Rose la première épouse malade qu'on apprend à aimer, Linden le fils prodige mélancolique et aveugle… Finalement, seuls Rhine et Gabriel - un domestique important - m'ont paru assez fades et sans relief ; j'espère qu'ils gagneront en épaisseur dans le tome suivant…

Comme la grande majorité des livres destinés à la jeunesse et classés du côté de la dystopie, ce premier tome offre un point de vue interne. Voilà donc le lecteur dans la peau de Rhine. Une nouvelle fois, ce choix permet d'être plus proche de l'héroïne et de mieux comprendre ce qu'elle vit et surtout ce qu'elle ressent (les sentiments contradictoires qu'elle éprouve pour son nouvel entourage, par exemple).
C'est également un bon moyen pour que le lecteur découvre l'univers et ses recoins sombres, exactement en même temps que la demoiselle. Mais, là où j'ai trouvé ce point de vue un peu dommage, c'est au début, quand on fait justement connaissance avec l'univers crée par Lauren DeStefano. Rhine y vit depuis 16 ans, le lecteur depuis 2 lignes… et la prise de contact est un peu brouillonne. En revanche, par la suite, j'ai bien aimé les sortes de flashbacks apportés par les souvenirs de Rhine, lorsqu'elle se remémore sa façon de vivre quand elle était encore avec ses parents et son frère jumeau.
D'une façon générale, la plume est fluide et abordable - encore une fois, le public jeune visé y est sans doute pour quelque chose. Cependant, si je me souviens bien, j'ai parfois eu du mal au niveau des temps (le passage du passé au présent, et vice versa, de façon intempestive) mais, soit je me suis habituée au fil des pages, soit ce défaut disparait. Quant à sa présence dans la version originale… mystère ! Les lecteurs en VO pourront peut-être nous le préciser.

En bref : une magnifique couverture qui cache de bonnes idées de base malheureusement trop gentiment survolées… le second tome sera peut-être plus sombre ? (Je suis un peu négative, mais j'ai quand même apprécié cette lecture, entendons-nous bien !)
Lien : http://bazar-de-la-litteratu..
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