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Critique de Fleitour


Je suis tombé un jour sur les caisses d'objets laissées par Monne la soeur de papa,
dans la maison de l'Océan, après avoir effectué un tri entre les objets inutiles du passé et les documents soigneusement rangés par ma tante, j'ai pu mettre de côté un monticule d'archives, identique aux minutes d'un notaire.
C'est un peu ainsi que Patrick Deville a présenté son livre Taba-Taba aux lecteurs de la librairie " le silence de la Mer" à Vannes.

Depuis les années 1860, jusqu'aux années récentes ces archives dessinaient une toile, une sorte d'itinéraire permettant de couvrir l'ensemble du territoire national, comme l'aurait fait un petit enfant au hasard d'un gribouillage.
Ce voyage commence à lazaret, sous le signe de l'Empereur des Français le 21 mai 1862, à la pointe de Mindin, rive gauche de la Loire.

Ce long voyage le mènera à Antananarivo, dans la grande maison de Denis Bisson, seul avec Taba-Taba, pour évoquer l'insurrection du 30 mars 1947, celle qui devait marquer à vie Taba-Taba.

Pour Patrick Deville, 1962, signe le début de la mondialisation, la mise en connexion de l'ensemble de la planète, à partir de ces années tout événement fut-il déclenché en extrême Orient, ou sur les rives de la Loire, pouvait avoir des incidences sur l'ensemble du monde.

La vision de Patrick Deville est intéressante, j'ai retenu cette idée que la France n'était pas pas seulement un territoire, mais pouvait susciter par sa culture et sa langue, un intérêt pour les peuples les plus variés.
C'est sous la plume de Romain Gary que l'on trouve cette phrase, "je n'ai pas une seule goutte de sang français mais la France coule dans mes veines". Page 142

Il n'est donc pas surprenant qu' Alexandre Yersin, Cendrars ou Trotsky soient présents dans cette fresque, ils s'y promènent en tous sens, tels des balises que l'auteur aiment solliciter pour s'y accrocher, ou pour s'y reposer comme des bigorneaux, parfois langoureux.

Sa famille restera pour moi comme une énigme, car de multiples pages consacrées à son père, renvoient à si peu de mots pour évoquer sa mère restée semble t-il scotchée à sa maison des environs de Barbizon, Chally-en- bière.

Ce long périple est aussi l'occasion pour Patrick Deville de raconter son enfance à Lazaret, où il côtoyait les fous jusqu'à l'âge de huit ans.


Une enfance pourtant vécue de façon animée et de découvertes des trésors marins : "entre mes sandalettes, chacune de ces flaques est une réduction de mer intérieure avec ses falaises, ses végétations d'algues flottantes qu'il faut écarter comme une chevelure pour débusquer les crabes pince-sans-rire, suivre la panique des crevettes transparentes et parfois des civelles ou des alevins de mulets."


C'est aussi l'occasion pour lui de mettre à nu ce corps au bassin bancal, qui le laissa handicapé avant que le Dr Bretonnière, ne redresse l'enfant par une greffe en butée. Un an d'immobilisation annoncée ; le garçon s'enfuyait déjà en crabe, il fut rattrapé au lasso, et l'opération fut une réussite.
Sa convalescence lui permis d'élargir ses lectures Monne lui ayant appris à lire.

Les dernières pages finiront par dévoiler son amour pour la jeune Véronique Yersin. C'est une douce mélancolie qui berce cette complicité, les années effacent les chagrins, et pour l'historien un cycle s'achève.
Demain un autre itinéraire sera à imaginer, la très belle prose de Deville saura nous enchanter et remuer en nous notre soif de nouvelles découvertes, un autre grenier, qui sait ?

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