Le cycle de Syffe, tome 2 : La peste et la vigne

Les mots de Uldrick, prononcés dans la forêt vauvoise des années auparavant, m'étaient revenus à l'esprit, "L'homme sage est capable de discerner les nuances entre ce qu'il sait et ce qu'il croit, parce que la croyance est la plus dangereuse des ignorances. J'avais cru. J'avais cru des années durant, parce que cette fable que je m'étais racontée avait su ordonner le labyrinthe que je portais en moi et m'avait empêcher de sombrer. J'avais cru, et je m'étais trompé. L'erreur m'appartenait à moi, et à moi seul.

Nous étions six mille damnés, œuvrant de jour à nous briser l'échine, entassés de nuit dans des baraquements crasseux en aval des mines.

J'avais des vivres en abondance et du soleil,pas d'ennemis en vue, et l'espoir que j'entretenais à l'idée de revoir Brindille était une braise, un souffle que je portais en dedans pour le protéger du monde.

Entre ce que l’homme désire et ce que l’homme craint, là se trouve le monde.

On a beau dire, la guerre reste l’affaire des hommes.

Quelque chose d'animal, une frayeur crépitante, s’était greffée à notre course et cherchait désormais à en prendre les rênes.

D’après mon expérience, il en va ainsi en chacun des lieux où les hommes acceptent le jeu des rois et des seigneurs, des princes et des parlements, partout en somme où l’on drape l’or et l’épée des atours respectables de la loi, pour justifier la misère et le massacre aux miséreux et aux massacrés.

Comme la mienne, son existence avait été estropiée par le cours du monde et elle ne s'en était jamais remise.

L’idée même que deux hommes ou deux femmes puissent s’unir était considéré comme absurde, alors que de telles relations étaient les seules à être tolérées en dehors de l’hyménée, puisqu’aucun enfant ne pouvait en naître.

Il y avait de grands marais au sud, des aînés inondables et des tourbières, et la lumière avait renvoyé la réverbération immobile de l'eau. Ici, dans les hauteurs, l'onde était une chose vive qui rugissait sur des lits de galets, son courroux nourri par le fonte des neiges.