Le monde a toujours préféré se déplacer à l'aide de sales béquilles plutôt que d'apprendre tout simplement à marcher.
Comment peut-on naître au sein de ce merdier ? J'ai grandi ailleurs, en Capitale, avec des saisons nettes, malodorantes et noyées d'oxyde de carbone, mais bien découpées. Un printemps sans oiseaux, un été vaseux dans les jupes des filles, un automne à contempler les balayeurs des parcs miteux, leur outil glissant le long des mains relâchées, un hiver de neige grise, sous le ciel gris, et toujours sans le moindre pigeon estropié pour venir picorer les miettes de pain lancées par des vieillards oubliés et oubliant. Une misère de vie citadine bien balisée par la monotonie.
J'aimerais pouvoir tous les enculer jusqu'à ce qu'ils en crèvent. Pour leur rendre ce qu'ils m'ont pris. Avoir une queue à la place de cette fêlure qui me blesse. Parce qu'elle ne me sert plus à rien. Oui, être un homme n'a forcément que du bon.
Chacun a sa façon d'emmerder l'autre. Bongo, c'est l'hygiène, moi, la lassitude d'une transpiration maladive, l'allemand, la culture du mauvais whisky. Une perle en son genre. Comme une espèce de diamant bouseux empestant l'alcool à des lieues. Lhar s'affranchit des distances. Quelqu'un, quelque part en Europe ou au fin fond de l'Alaska, l'a repéré à l'odeur, je miserais mon salaire de garde là-dessus. Il ne se saoule pas, il est le malt qu'il s'ingurgite par flacons entiers.
Quand on n'a pas connu l'enfer, on devrait fermer sa grande gueule.
Nous sommes sensibles au message de respect de la faune, aux valeurs écologiques les plus fondamentales. Mais nous ne vous avouerons jamais que le système a fini par bouffer tous les animaux. Parce que nous connaissons le prix de la dignité de façade. Celle que les caméras du monde entier magnifient à coups de gros plans sur nos visages de tribuns gravement pénétrés de leur mission et accomplissant tout ce qui est en leur pouvoir pour ne pas démériter de l'espèce humaine.
Le monde a toujours préféré se déplacer à l'aide de sales béquilles plutôt que d'apprendre tout simplement à marcher.
Je suis fatiguée. Fatiguée du monde.
J'ai abattu sept personnes à la poursuite d'un délinquant dont Dieu n'a rien voulu me dire, et dont je ne saurai probablement rien jusqu'à ce qu'Il consente à me placer de nouveau sur son chemin, si cela se produit un jour. Je n'éprouve aucun remords, je fais mon métier.