AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de BurjBabil


Bon, c'est mon deuxième Dicker. En fermant le premier, qui était presque aussi le sien (en terme de célébrité) et qui bénéficiait de critiques dithyrambiques, je m'étais dit : « mon gars, t'es pas dans le trip mainstream exigé en la circonstance, c'est quand-même pas, ce bouquin, le chef d'oeuvre qui fait tomber la bonne société en pâmoison ? »
Alors après avoir souri en voyant passer les suivants, je me suis donné une deuxième chance.
Et j'ai bien fait car, j'ai trouvé cet opus bien meilleur que le gars Harry. Et surtout j'ai bien mieux compris pourquoi je n'aime pas cette littérature.
C'est donc très bien construit, un petit bijou de complexité. Certains pourront s'extasier devant une telle prouesse narrative, mais personnellement, je crois que le mieux est parfois l'ennemi du bien. C'est tellement emberlificoté que je suis incapable de savoir si tous les indices, tous les faits sont réellement cohérents. Mais sans doute l'est-ce car c'est comme l'horlogerie Suisse, précis.
Et je ne doute pas qu'il y ait un vrai travail de découpage derrière cette énigme policière. Je me suis perdu dans les temps, l'auteur ayant pris un malin plaisir à aligner cinq ou six temporalités différentes. Un vrai labyrinthe.
Précis donc mais précieux aussi, comme leurs coffres cette fois. Ah quelle belle société nous est narrée ici. On ne bouffe pas sur le pouce des sandwichs dans ces romans Genevois, on déjeune, on soupe, on déguste des mets toujours très raffinés. On devine que l'auteur n'est pas en manque de connaissance sur ces pratiques culinaires sociétales. Au pire, la cuisine rapide pour nos personnages principaux : des tagliatelles au homard, mais juste parce-que le majordome n'a pas eu le temps d'acheter des truffes au marché bio de Verbier.
Car bien sûr tous ces héros qui émeuvent les critiques littéraires de Paris, de Lausanne et de Luxembourg (surtout de ce petit paradis mais est-ce surprenant ?) ne savent rien faire sans l'aide d'une armée de domestiques qui les transportent, les nourrissent, les habillent, leur font les courses, les aiment même comme de bons laquais.
Bien sûr ils ont des compétences tout de même, il faut être juste. En placements financiers juteux (Suisse oblige), en « rôle playing » aussi. Pas pour passer une soirée à jouer à « advanced dungeons and dragons » ou « call of chtulhu », mais pour espionner les employés d'hôtel et dénoncer éventuellement des comportements inappropriés de ces serviteurs plébéiens envers les riches clients qui fréquentent ces palaces Suisses. Grande tradition comique Suisse sans doute (Thomas Wiesel doit se retourner dans sa tombe).
Pareil, on n'est pas dans des lieux anodins. Suites quinze étoiles, villa à Corfou, limousines et voitures de sport…
Pour finir ce tableau, c'est le thème de la filiation qui est mis en exergue : fils de banquier tu es et tu seras . . .fils d'acteur tu nais et resteras . . . domestique tu es...etc...
Vous l'aurez compris, ce n'est pas tant la nature de l'intrigue qui m'ennuie, c'est le cadre.
Il ne m'intéresse pas.
Je n'ai ressenti aucune empathie pour aucun des personnages.
Leurs pseudo souffrances existentielles, leur volonté de dominer, de contrôler, de tromper, n'a même pas l'excuse de la nécessité, du concours de circonstances.
C'est l'anti polar noir : c'est le polar blanc
Blanc comme les neiges qui tombent là-bas, blanc comme l'argent qui est passé par leurs coffres, blanc comme les oies qui pépient à la recherche du bon parti pour avoir à éviter d'apprendre à faire la cuisine et se trouver un travail intéressant.
Pour couronner (et oui décidément) le tout, il nous fait un panégyrique de son éditeur décédé deux fois : en 2018 en vrai et une seconde (j'espère) dans ce livre. Oh que c'est touchant? Non, c'est nombriliste comme le reste.
C'est donc un exercice de style, mâtiné d'un hommage à son éditeur que livre Dicker, avec une histoire secondaire à l'eau de rose entre l'écrivain qui enquête sur tout ce que je viens de décrire et la riche (encore ?) héritière prénommée Scarlett et/ou sa voisine de palier... Peut-être faut-il aller voir les magazines people pour savoir à qui s'adressent ses clins d'oeil. Personnellement, cela ne m'intéresse pas.
Il serait temps que ce fils de politicien-écrivain revienne parmi les citoyens de base. Au vingt-et-unième siècle, cette histoire de « fils de » n'a plus de sens dans l'imaginaire collectif, n'en déplaise à nos maîtres.
C'est brillant et sans profondeur. La dernière phrase du livre est à replacer dans le contexte de ce que je viens de décrire pour en apprécier toute la saveur.
Finalement, zéro étoile pour le fond, cinq pour la forme parfaite. Moyenne : 2 arrondi à 0,5 (Je compte moins bien que ses personnages, moins habitué qu'eux aux bilans annuels des banques).
Commenter  J’apprécie          19520



Ont apprécié cette critique (113)voir plus




{* *}