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sur 1269 notes
Comment dire, lire un Diderot pour un challenge, pourquoi pas, mais...
Mais peut-être avec des pieds de plomb, m'attendant à une écriture ampoulée et obscure, une histoire alambiquée et incompréhensible, un discours occulte pour nous qui ne sommes plus de ce siècle-là.
Et pourtant, quelle découverte finalement !
Voici un homme qui fort de ses convictions humanistes va nous décrire intimement les revers d'une jeune fille enfermée contre son gré dans un couvent et son combat acharné pour recouvrer sa liberté perdue tout en respectant les règles internes de ces lieux contre nature. C'est une descente aux enfers alors qui se déroule sous nos yeux, avec la bénédiction de Dieu et de certaines de ses institutions, avec la bénédiction du monde séculier qu'il soit de pouvoir ou de famille.
Diderot, d'une farce entre amis, s'est pris au combat de la Religieuse au point d'en être investi. Son mémoire est un plaidoyer contre l'hypocrisie des uns et l'inhumanité des autres, contre l'illusion des uns et la folie des autres. Il nous ouvre la porte d'une demeure réservée aux 'appelées' mais qui souvent n'était peuplée que d'enfants non désirées ou illégitimes, de jeunes filles déshéritées ou perdues. Et même celles qui étaient portées par la voie, voyaient leur foi se ternir au fil des ans passés entre ces quatre murs clos, entre méchanceté et rigueur, entre solitude et perversion.
Il dénonce, par la voix de sa Religieuse, le non-sens d'une non-vie et sa plume court, sans perdre haleine, sans le vouloir même, et crie à l'injustice et à l'imposture. On sent une souffrance réelle de l'auteur devant tant de cruautés imposées, physiques et psychologiques, et ce, tout en restant profondément croyant car Dieu reste omniprésent dans le discours. Un Dieu de pardon et d'amour qui clairement n'a jamais demandé le sacrifice d'une vie au monde, à la société.
Une plume riche et sensible, qui touche, percute et interroge ; un vocabulaire riche et parfois suranné mais toujours juste ; des personnages enfin, plus vrais que nature, profonds d'innocence ou de folie, emplis de dureté ou de tendresse, complètement naïfs ou juste pervertis. Et ça se lit d'une traite tant le récit bouleverse...
Et enfin, il ne faut pas oublier les préfaces, les car il y en a deux ! Celle en début de livre, là où est bien sa place, se lit pour mieux comprendre l'auteur et son temps, elle donne quelques clés au lecteur pour qu'il traverse sa lecture sans embuches. Et la deuxième, que l'on trouve bizarrement en fin d'ouvrage, est celle écrite par Diderot lui-même. Cette dernière termine le roman et donc, la brève vie de sa Religieuse.
Je ne pourrais dire si c'est un chef d'oeuvre mais c'est un livre puissant où l'on sent toute l'implication de l'auteur et son profond humanisme.
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Une histoire du 18ème siècle, mais une interrogation sur les pratiques religieuses qui, transposée aux préoccupations de notre époque, garderait tout son intérêt. Je me demande même comment le politiquement correct actuel réagirait à l'audace d'un Diderot moderne. J'ai souvenir du scandale qu'avait suscité le film de Rivette à sa sortie en salle et des débats qu'il avait suscités. Cette lecture tardive du modèle me donne envie de le revoir.
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Diderot dénonce l'arbitraire, la violence de la société bourgeoise, lorsqu'elle fait payer ses erreurs personnelle à ses filles qui ont la malchance d'être née en dernier, qui plus est d'une faute. Suzanne découvre cette vie de recluse qu'elle refuse, au prix de brimades, de tortures psychologiques et physiques.
Le style très reconnaissable de Diderot, au travers d'une correspondance imaginaire, mais inspirée de faits réels, exprime de manière magistrale la souffrance, la violence subie, l'injustice, le désespoir... avec une justesse psychologique étonnante ! On y trouve même une pointe d'érotisme !
Et c'est aussi l'intrigue et le suspense de ce livre (à condition de ne pas lire la préface) qui le rendent aussi addictif : savoir jusqu'où elle pourra supporter cette souffrance et comment se terminera cette réclusion.
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A travers cet ouvrage,Diderot critique avec beaucoup de realisme la condition de soeur
soeur....que fait-on dans les couvents?Brimades de toutes sortes exercees contre celles qui refusaient de se soumettre a la bulle
Il denonce l'absurdite nocive d'un systeme repressif,et de defendre les droits d'une sincere et saine conviction religieuse
Il ecrit la plus effrayante satire des couvents
Il proteste contre les vocations contraintes,il denonce l'isolement monastique comme contraire a la nature meme quand il est accepte librement
Il met en cause une societe et une eglise qui s'accordent a etouffer dans un etre humain,le desir naturel de liberte;l'etre humain n'est pas fait pour etre enferme,lorsqu'on isole l'homme de ses semblables,les pensees les plus extravagantes germent dans son esprit.S'isoler,c'est revenir a l'etat de sauvage
Cette critique acerbe est pour moi terriblement bien faite,et je suis entierement d'accord avec lui.De tout temps la condition de la femme a ete plus
que miserable,et la religion chretienne n'a rien arrange.Dans ce monde religieux,elles etaient pire que tout tant au niveau de la mechancete que de la cruaute.Privees de libertes,ces femmes sont devenues des monstres qui n'ont rien a envier aux dictateurs
C'est un livre qui se lit facilement et avec rapidite,je vous souhaite bonne lecture
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Je continue ma découverte (ou parfois relecture) de classiques de la littérature : livres que j'ai lus il y a très longtemps, livres que je n'ai jamais lus, livres qui me paraissaient inaccessibles ou qui ne se sont jamais trouvés à passer sous mes yeux ou entre mes mains.....

La Religieuse de Denis Diderot : celui-ci n'a jamais croisé ma route en tant que livre ou en tant qu'auteur. Le titre ne m'était pas inconnu, bien sûr, le sujet non plus, mais un livre d'un écrivain philosophe, encyclopédiste, il y a des cartes de visite qui peuvent effrayer. Je pensais découvrir une écriture hermétique, un texte ardu sur un sujet austère et finalement j'ai pris un plaisir fou à lire ce roman publié après la mort de l'auteur.

A regarder sa biographie, j'ai découvert qu'il avait fait des études de théologie, qu'il a séjourné dans un monastère où il avait été cloîtré par son père suite à un mariage secret qu'il avait contracté. D'autre part, dans les notes en fin d'ouvrage, on apprend que sa propre sœur Angélique Diderot est morte folle dans un couvent d'ursulines.....  Il sait de quoi il parle, il a fort à dire et je pense qu'il avait un regard très critique vis-à-vis de la religion et des communautés religieuses.

Dans ce roman, à travers le parcours (je devrais dire chemin de croix) de cette jeune fille, on évoque la condition de la femme bien sûr, le poids de la famille,  son destin quand le mariage est impossible, la vie dans les couvents qui peut être bien différente : austérité, dureté mais aussi douceur, amitié jusqu'à la folie parfois

L'acharnement à tourmenter et à perdre se lasse dans le monde ; il ne se lasse point dans les cloîtres. (p56)

mais aussi la solitude, la privation de liberté, de pensée, de destin mais il y a aussi de l'espoir par les êtres (peu) attentionnés qui croiseront sa route : Ursule, l'avocat Mr Manouri.

Diderot donne à son personnage central une force de caractère : elle résiste, elle tient, elle refuse dans un premier temps d'aller contre sa volonté, même si son éducation prend le dessus et  se résigne au destin qu'on lui assigne. On peut la trouver parfois naïve, mais jamais soumise. N'oublions pas que nous sommes au milieu du XVIIIème siècle, que ce récit est emprunt de la culture de l'époque, qu'une jeune fille de bonne famille n'avait pas le choix de sa vie, qu'elle pouvait être presque qu'une marchandise et qu'il se veut un pamphlet, une critique violente de la religion avec ses excès, son pouvoir, ses doctrines.

On s'aperçoit que même dans les couvents la vie de celui-ci est à l'image de la supérieure qui le dirige.

Suzanne sera manipulée par sa famille mais n'aura d'autres solutions que d'obéir, sa mère ayant eu une relation extra-conjugale dont elle est le fruit, l'obligeant à subir les conséquences de ce passé. Pour les femmes et les humains que nous sommes certaines situations décrites, certaines tortures physiques et morales, certaines injonctions nous paraissent immondes, révoltantes. 

Ce que j'ai particulièrement aimé c'est le contraste entre les ambiances  des communautés où va se trouver Suzanne : la douceur puis la violence et ensuite la folie, ne faisant ainsi pas une généralité. Diderot à plusieurs reprises prend position assez ouvertement contre la religion, son pouvoir et son emprise :

Il me semble pourtant que dans un Etat bien gouverné ce devrait être le contraire ; entrer difficilement en religion et en sortir facilement (...) Les couvents sont-ils donc si essentiels à la constitution d'une Etat ? Jesus-Christ a-t-il institué des moines et des religieuses ? L'Eglise ne peut-elle absolument s'en passer ? Quel besoin a l'époux de tant de vierges folles, et l'espèce humaine de tant de victimes ? Ne sentira-t-on jamais la nécessité de rétrécir l'ouverture de ces goufres où les races futures vont se perdre ? (p106)

positions qui font parfois écho encore dans notre présent.

L'homme est né pour la société. Séparez-le. Isolez-le. Ses idées se désuniront. Son caractère se tournera. Mille affections ridicules germeront dans son cœur. Des pensées extravagantes germeront dans son esprit comme les ronces dans une terre sauvage. Placez un homme dans une forêt. Il y deviendra féroce. Dans un cloître, où l'idée de nécessité se joint à celle de servitude, c'est pis encore. On sort d'une forêt. On ne sort plus d'un cloître. On est libre dans la forêt. On est esclave dans le cloître. Il faut peut-être plus de force d'âme encore pour résister à la solitude qu'à la misère. La misère avilit. La retraite déprave. Vaut-il mieux vivre dans l'abjection que dans la folie ? 'est ce que je n'oserais décider. Mais il faut éviter l'une et l'autre. (p146)

Je suis passée par plusieurs phases de lecture : surprise d'une écriture certes par moment un peu  " vieillotte" dans l'utilisation des subjonctifs dont nous n'avons plus tellement l'usage, mais facile, rythmée par les révoltes et colères de son auteur. Je me suis agacée parfois par la naïveté de Suzanne, je l'ai poussée à s'enfuir mais je le fais avec mes pensées de femme du XXIème siècle, de femme libre de ses actes, je me suis révoltée contre ses parents qui l'abandonnent, contre les abus de la religion mais surtout de ceux qui disent la servir.

La fin du récit est un peu "bâclée" à mon avis dans le sens où le final est digne d'une aventure..... J'aurai aimé savoir le devenir de cette jeune femme à jamais marquée je pense par ce qu'elle a vécu. Comment peut-on en sortir indemne comme elle l'indique d'ailleurs dans les dernières lignes.

J'ai eu la possibilité de voir hier soir l'adaptation cinématographique de cette œuvre. 
Certaines modifications ont été faites par rapport au texte et comme souvent j'ai de loin préféré ma lecture au film. Même si l'ambiance y est, il y manque malgré tout les mots de Diderot, ceux qu'il met dans les voix des différents personnages mais aussi les siens, les mots de colère, de révolte, d'indignation....

C'est une lecture qui laisse des traces, qui reste en tête et qui me pousse à lire d'autres récits de Monsieur Denis Diderot.

Lire, relire les classiques..... Classiques oui mais tellement riches, construits, des références même dans nos vies actuelles....
Lien : http://mumudanslebocage.word..
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Dans une digression dans les misérables, Victor Hugo décrit minutieusement la vie dans les couvents et l'austérité du mode de vie des religieuses cloitrées ainsi que les châtiments reçus tels que l'enfermement dans les cellules, les prosternations et coups, le jeûne au pain et à l'eau……
Dans ce roman je m'aperçois qu'un siècle avant Diderot s'est attaqué au même sujet et a peint la vie du couvent de la manière la plus horrible en dressant un portrait intime d'une religieuse, qui a fini par être une religieuse, non par vocation, mais en raison des circonstances. C'est l'histoire de son calvaire souvent scandaleux dans trois couvents de France, et de son évasion dans les rues de Paris.
J'ai beaucoup apprécié ce petit conte scandaleux sur les malheurs moraux et physiques d'être religieuse où Diderot tisse une satire subtile et sublime ce qui en fait non seulement une attaque puissante contre les personnes qui abusent de la religion comme un moyen de prendre leur vengeance mesquine et insensible sur le monde, mais aussi un cri mélancolique d'empathie pour les hommes et les femmes qui se retrouvent pris au piège
A lire absolument !!!
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J'ai récemment vu le film de Guillaume Nicloux avec la superbe Isabelle Huppert incarnant la mère supérieure… j'ai donc été curieuse de connaître l'ouvrage dont il était tiré, sachant être de Diderot des Lumières!

Je n'ai pas été déçue, ce roman est une vraie dénonciation d'un sujet peu documenté, tabou: les abus dans l'Eglise (au XVIIIe, certes, mais toujours actuel, que l'on retrouve notamment dans des documentaires Arte). Finalement qu'est ce que le personnage de la bonne-soeur, que l'on ne connaît pas, que l'on fantasme ou caricature, vivant dans un monde parallèle fait de spiritualité et de vivre ensemble communautaire? N'est-ce pas le personnage le plus respectable et le plus mystérieux vivant parmi les hommes? N'est-elle pas liée à Dieu et à la spiritualité métaphysique, d'une façon inaccessible pour nous communs des mortels?

Diderot pose la question de la prise du voile forcée ou sous pression, contraire au dévouement entier de l'individu à l'institution. Au delà du scandale familial, c'est une grave incrimination pour l'Eglise.
De plus, l'auteur décrit, inspiré par des faits réels, les tourments psychologiques, physiques et sexuels pouvant être infligés par des soeurs, sur des soeurs. La communauté joue un grand rôle, par le conformisme, à l'exclusion et le lynchage d'un individu. Ainsi, le couvent semble être une métonymie du fonctionnement de la société…

Finalement, ce roman nous permet de relativiser sur les couvents, lieux du meilleur de l'Humanité, mais pouvant en certains cas permettre le pire.

Ce livre m'a surtout permis de découvrir Diderot, à l'écriture fluide, claire et intrigante. Pour un ouvrage des Lumières, il représente tout à fait ses valeurs! Je vous le conseille donc, livre juste et toujours actuel dans sa relation à l'autre, ou plutôt de ce que l'Homme peut faire à l'autre…
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Ce roman, inspiré d'un fait divers réel d'une religieuse ayant été enfermée contre son gré au couvent et ayant désiré rompre ses voeux sans y être parvenue (elle perd son procès) est un réquisitoire amer sur les prisons que pouvaient être les couvents au XVIIIème siècle, quand des personnes n'avaient pas le choix d'y entrer et subissaient les pires brimades et humiliations. le roman est une longue lettre de soeur Suzanne qui raconte à un protecteur tout ce qu'elle a vécu pour qu'il consente à l'aider.
Le début narre comment sa famille n'en portait que le nom, combien elle a été détestée de ses parents et l'on apprendra pourquoi au fur et à mesure, raison qui montre aussi la réalité d'une époque, dont la morale très austère conduit à des malheurs sans fin pour des personnes innocentes qui n'ont pas demandé à naître.
Ensuite, on découvre peu à peu l'entrée au couvent et la vie dans ce genre de lieu. Et par-dessus tout, l'hypocrisie qui y règne ainsi que la manipulation : au départ, la mère supérieure est toute gentille avec les novices et leur masque quantité de difficultés de cette vie-là, réduit leurs obligations, pour qu'elles acceptent sans avoir pleinement conscience de ce à quoi elles s'engagent de formuler leurs voeux. Suivent des humiliations (quand on apprend que Suzanne veut partir du couvent) totalement abjectes, et on voit à quel point les « anges » peuvent se montrer démoniaques et retors. Quant à Suzanne, elle qui n'aspire qu'à la liberté, elle n'en est pas moins pieuse et ne veut pas le moindre mal à celles qui lui en font, au final c'est elle, qui rechigne à suivre une vie de règles monotones, qui est la plus sainte de toutes (d'ailleurs, c'est un élément du récit qui m'agace un peu, parce qu'on a l'impression que Diderot a voulu prévenir les critiques qu'on aurait pu faire à une telle religieuse qui veut fuir son couvent, en la rendant totalement angélique, alors qu'elle aurait bien le droit d'exécrer ses persécutrices et de vouloir s'en venger !)
La vie dans le second couvent, avec une mère supérieure très bonne en apparence, n'en est pas moins bancale.
En bref, ce roman émeut avec brio tout en cherchant à démontrer comment un couvent est un lieu qui peut transformer les recluses en les faisant basculer dans les coups tordus, la folie ou la dépression. le petit mot de la fin sera légèrement plus gai.
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Premier livre lu de cet auteur, sans regret!

moderne, toujours d'actualité, rebelle pour son époque, voila un auteur précieux sur un sujet trop peu traité.

a lire pour développer son sens critique et regarder un peu autour de soi

Merci Mr D. !
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Durtal, le personnage récurrent des romans de Joris-Karl Huysmans interroge dans « En Route » son ami l'abbé Gévresin : « Je présume que des histoires dans le genre de celles que Diderot raconte dans ce sot volume qu'est « La Religieuse » sont inexactes ? »
L'abbé tentera, à la veille du séjour au couvent de Durtal, de le rassurer. Pourtant plusieurs historiens depuis ont démontré qu'en effet, l'acharnement sadique sur une pauvre fille qui n'a jamais désiré prononcer ses voeux exista bel et bien dans les cloîtres.

L'histoire déchirante de Suzanne Simonin est donc tout à fait plausible et par le talent de Denis Diderot prend tous les accents de la vérité.

Au-delà de sa terrible charge contre la claustration religieuse, on sait tout l'attachement de Diderot à lever tant de souffrances et d'injustices, à défendre la liberté individuelle contre la tyrannie des institutions. Sa soeur est morte dans un couvent atteinte de folie mais elle y entra de son plein gré, une autre religieuse Marguerite Delamare suscita le scandale en demandant par fait de justice la révocation de ses voeux et lui-même ne fut-il pas abbé, enfermé par son père dans un monastère, emprisonné ?

Cependant Diderot se prêta à un jeu cruel et même sadique envers son ami le marquis de Croismare en lui adressant un appel à l'aide d'une religieuse imaginaire pour lui faire quitter sa Normandie. Ce sont ces fausses missives qui susciteront la rédaction du roman. Que penser alors de l'engagement de Diderot sur ce qui ne démarra que comme un vilain jeu ?
Il est fort probable que la pauvre mort de sa soeur marqua son inconscient et que s'organisa peu à peu dans son esprit la volonté d'une sorte d'action expiatoire. Rejoignant sa passion pour la liberté, son caractère sociable, l'ancien abbé savait au fond de quoi il parlait. Mais beaucoup plus que le procès d'une institution religieuse, je vois dans ce roman celui de tout groupe d'individus placés sous une seule autorité. Car que ce soit dans un couvent, un régiment, sur un navire… Tout groupe isolé du monde se soumet aux mêmes excès et aux mêmes vices.

Ainsi en dehors même du monde religieux ce roman reste-t-il actuel. La beauté classique de son style, la grande sensibilité de Diderot y sont remarquables. A ce titre, les récits des « rapprochements » de la mère supérieure et de Suzanne sont un modèle de pudeur et de suggestion érotique que n'oublièrent pas les adaptateurs de « La Religieuse » à l'écran.
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