La plupart des musulmans laissent, à leur mort, un tiers de leur fortune immobilière aux mosquées ou autres fondations pieuses. Ces propriétés prennent le nom de biens vakfs. Le donateur a le droit d’en léguer la gestion à ses enfants ou à ses proches parents et d’établir à son gré l’ordre de succession d’après lequel ils doivent hériter à perpétuité de cette fonction. Une partie des revenus est réservée à l’administrateur et laissée à sa libre disposition, bien qu’il soit censé les utiliser en œuvres Ces libéralités ont pour but d’assurer à tout jamais une partie de la fortune du donateur à ses héritiers : placée sous la protection intéressée du clergé, elle échappe aux confiscations ordonnées par le roi à la mort des grands personnages ou des officiers publics.
La loi musulmane exige la plus parfaite régularité dans l’administration des biens vakfs ; elle oblige les détenteurs à se conformer à la volonté du donateur, leur défend de reverser les revenus d’un bien sur un autre, d’appliquer à leur usage ou à ceux de leur famille un immeuble vakf, même en payant loyer, rend les bénéficiaires responsables de toute dépense ou de tout emploi d’argent qui pourrait contrarier les volontés du fondateur, et enfin, en cas de malversations, les destitue ou les remplace.
Les biens vakfs sont inaliénables, car, au terme de la loi, ils appartiennent à Dieu, tandis que les hommes en ont seulement l’usufruit. On ne peut les échanger contre des terres d’égale valeur qu’avec l’assentiment royal. Deux tiers environ du revenu des biens vakfs sont employés en œuvres charitables, le dernier tiers sert à l’entretien du clergé. S’il y a des revenus superflus, les administrateurs sont autorisés à les placer, sous le titre de vakfs secondaires. En cas de nécessité, ceux-ci peuvent être aliénés comme des biens libres.
On comprend quelles ardentes compétitions s’élèvent entre les membres du clergé quand un riche personnage meurt sans avoir désigné les administrateurs de ses vakfs.
Le destin fabuleux de Jane et Marcel Dieulafoy.