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EAN : 9782021039276
160 pages
Seuil (22/03/2012)
3.89/5   18 notes
Résumé :
Le 24 décembre 1847, l'émir Abd el-Kader (1808-1883) attend, dans le froid et la pluie, d'embarquer sur Le Solon qui a mouillé dans le petit port de Djemâa-Ghazaouët proche de la frontière marocaine. La veille, après une résistance de quinze années contre le corps expéditionnaire français, il avait signé sa reddition sous la promesse d'être conduit, avec quatre-vingt-seize de ses proches et compagnons, à Alexandrie ou à Saint-Jean-d'Acre. À travers la vie de l'émir,... >Voir plus
Que lire après La dernière nuit de l'EmirVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
C'est un témoignage émouvant et bouleversant sur la dernière nuit passée par l'émir Abdelkader sur sa terre natale avant de partir en exil. Il n'y reviendra plus jamais.
Après quinze années de combat, il s'est rendu la veille à l'armada française qui a envahi l'Algérie en 1830. Ce jour de départ est fixé pour le 24 décembre 1847. L'Emir Abdelkader est ce jour-là à Ghazaouet, un port pas loin d'Oran. Il est sur le point d'embarquer sur un vaisseau avec 96 personnes composées de sa famille et de ses fidèles lieutenants. le bateau, le Solon, porte le nom d'un sage de la Grèce antique, père de la démocratie. Cet évènement dur et douloureux est l'occasion pour l'auteur, dans un style romanesque, d'évoquer le passé de l'Emir, illuminé par de hauts faits d'arme contre l'envahisseur. C'est une résistance farouche et déterminée où l'Emir Abdelkader a mis le meilleur de ses forces ainsi que les capacités de sa vive intelligence. Il s'est rendu compte que son combat est vain contre une armée de loin plus nombreuse et mieux équipée. Il s'est rendu pour éviter les souffrances à son peuple face à un ennemi qui ne recule devant rien pour l'anéantir, l'affamer et le déposséder de ses terres. ‘'Nous les tuerons tous ‘', a dit un général qui n'a pas hésité à enfumer une grotte où se sont réfugiées des centaines de personnes pour les tuer. Un autre général a attaqué lâchement sa smala, une ville itinérante, tuant sauvagement des centaines d'enfants, de femmes et de vieillards. Même dans la France de l'époque, des voix de personnalités célèbres, comme celle de Théophile Gautier ou De Lamartine, se sont élevées d'une manière véhémente contre ces atrocités et ces actes inhumains.
D'autre part, l'Emir, lui homme de parole, empreint d'une foi pure et noble, n'a plus confiance dans les engagements de ses ennemis qui rompent leur parole donnée. Comme ce fut le cas dans le traité de la Tafna où l'armée d'occupation ne reconnaît plus les clauses signées. Cette parole donnée trahie, l'Emir l'a subie encore amèrement quand le bateau qui devait l'emmener en exil dans un pays musulman a accosté, après quatre jours de navigation, à Toulon. Pourtant sa volonté a été de joindre Alexandrie et cela, promesse ferme lui a été confirmée avant son départ, par les hauts officiers venus le saluer ce 24 décembre 1847 en partance pour l'exil. Cependant, l‘Emir partait avec dans ses pensées l'idée et la ferme conviction d'avoir semé dans l'esprit des Algériens cette soif de reconquérir le pays et de rejeter l'envahisseur. Cette idée sera concrétisée quelques années plus tard avec la révolte d'El Mokrani en 1871 en Kabylie.
Cette résistance a été âprement réprimée, aussi sauvagement qu'au temps de l'Emir Abdelkader avec les terres brûlées, les massacres, le vol des terres. La répression a été si féroce qui fallait attendre le 1er novembre 1954 pour reprendre la lutte armée. A Toulon, l'Emir et ses compagnons resteront pendant cinq mois enfermés dans une forteresse. Leur captivité a été ensuite allégée avec leur départ pour la ville d'Amboise à l'ouest de la France. Dans la traversée qui a duré une semaine, l'Emir a constaté la richesse des champs cultivés et l'abondance de l'eau dans les fleuves et les canaux. Il s'est demandé comment une nation aussi prospère est venue attaquer son pays aride et pauvre. Il s'est dit que l'arme suprême est la science et le savoir qu'il n'a cessé lui-même d'acquérir. Par son intelligence et son sens de l'humain, à Amboise, il a su gagner des sympathies, recevant des artistes, des intellectuels, des savants, des personnalités et parmi eux, Ferdinand de Lesseps, le concepteur du canal de Suez. D'ailleurs, il sera invité personnellement par l'impératrice Eugénie à assister à son inauguration en 1867. Les années 1800 sont les temps modernes où la technique triomphe avec l'arrivée des chemins de fer, l'avènement de l'électricité. Aussi a-t-on surnommé, à juste titre, l'Emir le Jugurtha des temps modernes. Jugurtha comme l'Emir Abdelkader, était téméraire et intrépide. Audacieux, tous les deux eurent le grand courage de combattre à l'époque les plus grandes puissances mondiale, la France pour l'Emir Abdelkader et Rome pour Jugurtha. Tous deux, nationalistes et patriotes, ont accompli leur devoir de défendre leur pays. Jugurtha avait un royaume dont les frontières s'étendaient du nord constantinois au sud du Maroc.Vaincus, mais restés profondément fidèles à leurs racines, ils eurent le même destin : ils ont vu leur combat rompu par la cruauté de la puissance colonialiste
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S'inspirant largement de la vie de l'Emir, Abdelkader Djemaï focalise son dernier livre ‘' La dernière nuit de l'Emir'', un récit, sur la dernière nuit que l'Emir, ses proches, et ses compagnons ont passée sur le sol natal : le 24 décembre 1847. Après plus de dix années de résistance, marquées par des trêves et des traités (Traité Desmichels, Traité de Tafna), l'Emir décide de se rendre aux Français, sentant l'impuissance des tribus face à une armée puissante en matière et en nombre. L'Emir obtient, lors de sa reddition, la promesse d'être conduit avec ses compagnons à Alexandrie ou à Saint-Jean-d'Acre. Après avoir quitté le port de Djemâa-Ghazouëtte, l'Emir, ses proches et ses compagnons, quatre vingt-dix-sept personnes au total, tous âges confondus, se trouvent, contrairement à ce que dit la promesse, en France. Ils sont libérés quelques années après, et l'Emir s'installe définitivement en Syrie où il sauve, en 1860, des chrétiens des émeutes. Il a déjà connu l'Orient grâce à un pèlerinage avec son père Mahieddine en 1927. Il meurt en Syrie en 1883.
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J'ai trouvé ce petit livre très intéressant. A travers la figure de l'Emir Abd Kader on revient sur les années de résistance en Algérie au début de la colonisation française. Je connais mieux l'histoire de la colonisation tunisienne qui, si je puis me permettre par rapport à ce que j'ai découvert dans ce récit, a été plus 'soft'.
Par contre ce n'est pas un roman comme indiqué, on est vraiment dans un document historique, presque scientifique et la multiplication des faits historiques débités par page rendent la lecture un peu ennuyeuse.
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C'est un livre inégal avec des longueurs (alors que le livre fait 150 pages) et des paragraphes / chapitres très intéressants (sur la pensée, l'exil, le combat de l'émir Abd-El-Kader). Dans l'ensemble, c'est très disparate et pour moi pas assez approfondi. Il faut plus le lire comme une promenade au gré des digressions de l'auteur, homme qui semble très cultivé. Ce n'est pas une biographie chronologique et on se perd un peu dans les détails sans avoir de vision d'ensemble. Ce n'est pas non plus très clair pour moi à qui le livre est adressé car pour bien l'apprécier, je pense qu'il faut bien voir très bien connaître l'Algérie et sa culture (l'auteur parle de beaucoup de tribus et de lieux) et en même temps, certains détails font penser que l'auteur s'adresse à des gens ne connaissant pas la culture algérienne (il explique que le hadj est un des 5 piliers de l'islam)
Dans l'ensemble, j'ai été assez déçue même si le fond reste intéressant. Je n'ai pas trouvé le style de l'auteur très intéressant ou mémorable. ça me conforte surtout dans mon envie de lire une vraie biographie, plus chronologique et analysée de la vie de ce résistant à l'état français qui semble avoir été un penseur et philosophe, ainsi qu'un homme empreint d'humanisme.
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Lorsqu'on évoque la guerre d'Algérie, on pense surtout à celle de la Libération, comme on la nomme de l'autre côté de la Méditerranée, occultant celle, bien plus lointaine, de la colonisation.

Le récit présenté aujourd'hui nous transporte au 24 décembre 1847, date à laquelle et suite à sa reddition, l'émir Abd el-Kader, en compagnie de quatre-vingt seize de ses proches, attend d'embarquer sur le Solon pour un exil qui doit le conduire à Alexandrie ou à Saint-Jean d'Acre. La voix des meddahs et les témoignages de personnalités militaires ou diplomatiques françaises vont nous conter ce qui a présidé à cette guerre de conquête et témoigner de cette période qui n'a rien à envier à celle qui dans le futur embrasera le pays à partir de 1954.

J'aime décidément beaucoup le talent de conteur d'Abdelkader Djemaï. Il réussit une fois de plus à mêler intelligemment le destin de ces deux pays, l'Algérie et la France, en un va et vient permanent entre vérités historiques et récit poétique, le tout délivré d'une plume simple et pudique. Contraint lui-même à l'exil en 1993, sa nostalgie des paysages et des parfums d'Oranie fait écho à celle de l'émir. On sent sa sympathie pour le personnage. Il brosse un portrait émouvant de la figure emblématique que fut Abd el-Kader, mais nous renseigne aussi sur les opinions de certaines personnalités de l'époque face à cette longue guerre de conquête qui était loin de faire l'unanimité en métropole.

L'auteur évoque plus rapidement, sans développer ni prendre position, qu'Abd el-Kader n'a pas que des partisans au sein même de l'Algérie. Pour certains, il a entraîné son pays vers la guerre alors que la France n'envisageait pas une colonisation complète. Pour d'autres, les Kabyles, il est un traître, ayant préféré la reddition à la mort au combat, qui a bien profité des largesses de son ancien ennemi ; ses amitiés françaises lui seront reprochées, de même que la Légion d'honneur qu'il reçoit pour avoir sauvé en 1860 des chrétiens d'un massacre perpétué par les Druzes lors de son exil syrien. le jeune pouvoir algérien a-t-il instrumentalisé sa mémoire en rapatriant sa dépouille à Alger alors que le souhait de l'émir était de reposer à Damas auprès du maître de tous les Soufis ? Que connaissent les jeunes générations de ce personnage et quelle image en ont-ils ? Il semble qu'il reste beaucoup à découvrir sur cet homme qui n'était pas qu'un chef guerrier mais un mystique, un penseur qui avait le goût des sciences autant que de la sagesse. Sa correspondance et ses écrits sont nombreux mais restent encore à recenser et étudier.

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critiques presse (1)
Lhumanite
02 avril 2012
La Dernière Nuit de l’émir nous plonge ainsi aux racines du mal de la conquête coloniale française.
Lire la critique sur le site : Lhumanite
Citations et extraits (19) Voir plus Ajouter une citation
Le 25 mars 1830, la flotte mit donc le cap sur Alger. (...) L'armada française était forte de 675 navires, dont une centaine de bâtiments de guerre, de 35 000 hommes, de 4 000 chevaux et de 70 000 tonnes de matériel. (...) Les jours qui suivirent furent marqués par le pillage, dans la Casbah, des palais et des caisses du Trésor. Des sommes colossales en or et en argent furent transférées en France.
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Dans les jours de tourmente comme dans les jours d'accalmie, l'émir, chef de guerre et grand ami des livres, voyageait toujours avec ses manuscrits, ses archives et sa riche bibliothèque, son "petit trésor", constituée de cinq mille titres auxquels il tenait comme à la prunelle de ses yeux.
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Que dit le capitaine à l'émir à la minute où , entre ciel et mer, tout allait basculer ? Personne ne le saura, personne ne connaîtra la position précise de la frégate à cet instant-là. Toujours est-il que c'est au milieu de la traversée qu'Abdelkader apprit qu'il irait, contrairement à la promesse que lui avait été faite, non pas vers l'est, vers Alexandrie ou Saint-Jean-d'Acre, mais vers la côte française. Il n'aurait jamais imaginé que le duc d'Aumal, "seigneur, fils de seigneur, chef de peuple, fils de chef de peuple ", pût après lui avoir serré chaleureusement la main avant son départ, faillir à sa parole, à son engagement! Comme le paysage lors de l'attaque de la Smala, les flots s'étaient déchirés telle une vieille étoffe. Abdelkader eut soudain l' impression qu'un immense gouffre s'était creusé dans le ventre de la mer qu'Allah avait fait, selon le verset 55 de la sourate XXV, confluer en deux.
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Le plus jeune fils du roi Louis-Philippe d'Orléans, âgé de 20 ans à peine.... donna, en levant son épée vers le ciel, l'ordre d'attaquer cette forteresse dépourvue de murailles, de rempart et de fossés. [...] Cette citadelle en toile, jusque-là insaisissable et volatile, se déplaçait comme un nuage blanc dans le ciel. Un énorme nuage qui allait très vite éclater en une pluie de larmes et de sang.
L'assaut eu lieu vers 11h30..... Soudain le ciel bascula, la sève se figea dans le corps des arbres, dans les veines des plantes, et en quelques secondes le paysage se déchira comme une vieille étoffe. Jusque là paisible et verdoyant, il se remplit vite, après le son impérieux et triomphant du clairon, du fracas des armes, du gémissement des blessés, du hurlement des femmes, des râles de ceux qui se vidaient0 de leur sang..... Les yeux d'abord étonnés puis terrorisés, les enfants couraient tels des oiseaux pris au piège, vers la mort qui surgissait partout.... Puis ce fut une immense, une interminable tâche tiède et rougeâtre qui s'élargit sur la plaine comme sur la chemise blanche d'un fusillé aux pieds et aux poignets solidement liés..... D'autres enfants, d'autres familles de la région du Dahra connurent eux aussi une mort atroce. Le matin du 19 juin 1845, le colonel Aimable Pélissier n'hésita pas à recourir à des enfumages. Il donna l'ordre à ses soldats de brûler des broussailles et du bois sec à l'entrée des grottes où c'étaient réfugiés, avec leurs bêtes, des centaines de membres de la tribu des Ouled Riah. La plupart moururent asphyxiés et ceux qui tentaient de fuir furent froidement abattus.
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C'était donc le 16 Mai 1943, l'air était léger et la lumière du printemps avait la douceur de la soie. Sous le ciel d'un bleu limpide, on sentait l'odeur des lenquistes, des genêts, de l'armoise, de l'aloès et de l'herbe écrasée. Soudain, le ciel bascula, la sève se figea dans le corps des arbres, dans les veines des plantes, et, en quelques secondes, le paysage se déchira comme une vieille étoffe.
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Videos de Abdelkader Djemaï (7) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Abdelkader Djemaï
Vendredi 8 mai 2009 Abdelkader Djemaï, romancier franco-algérien, vivant en France depuis 1993 après avoir dû fuir la guerre civile en Algérie, évoque l'exil contraint de l'écrivain, à travers la figure d'Albert Camus et sa propre existence. Il est l'auteur de Camus à Oran (1995) ; dernier roman paru : Un moment d'oubli (Seuil, 2009) dans le cadre du banquet de printemps 2009 intitulé " Exils et frontières"

Abdelkader Djemaï : Né à Oran en1948, Abdelkader Djemaï a été enseignant, journaliste et écrivain en Algérie. Il arrive en France en 1992, devant fuir la guerre civile algérienne, car il est menacé de mort. Son expérience lui inspire ses nombreux romans et récits. Son enfance et la guerre civile en Algérie constituent les thématiques de plusieurs de ses romans ; Eté de cendres (1995), Sable rouge (1996), 31, rue de l'Aigle (1998) qui forment une trilogie autour de la tragédie algérienne, ou encore Camping (2002). de même, le roman-photo : Un taxi vers la mer (2007) sur l'enfance en Algérie. Ensuite le déracinement, l‘exil et l'errance inspirent : Gare du Nord (2003), le Nez sur la vitre (2005) et enfin Un moment d'oubli (paru au Seuil cette année). La littérature française constitue pour lui un point d'appui essentiel. Et notamment la figure d'Albert Camus qui a lui-même vécu à Oran, est déterminante. Il a écrit Camus à Oran.
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