Il me sourit. Depuis que je l'ai rencontré, le froid ne cesse de reculer au-dedans, comme si des siècles de saisons mortes avaient vu naître un soleil.
Est-ce que j’en ai vraiment envie ? Toutes ces choses qu’on dit qu’on fera, et qu’on ne fait jamais. Nouvelle coiffure. Se mettre au sport. Réviser les cours. Prendre de l’avance. Vivre. Lâcher son téléphone. Se foutre en l’air
Se foutre en l’air.
Tout foutre en l’air.
Et tout a changé, doucement, sans que personne, ne s’en rende compte. J’ai cessé de faire partie des miens à ce moment précis. Un décalage, millimétrique, entre leurs vies et la mienne, imperceptible mais là, comme un fossé entre nous.
Leurs "Ca va ?" qui ne déclenchent plus rien que des "Oui bien, et toi ?" quand le dedans veut se vomir.
Depuis que je l'ai rencontré, le froid ne cesse de reculer au-dedans, comme si des siècles de saisons mortes avaient vu naître un soleil.
Les mauvais rêves, ce sont des choses qui arrivent. On croit qu'ils sont là, qu'ils restent, qu'ils s'imprègnent en nous et nous transforment trop profondément pour que l'on puisse se réveiller à nouveau un jour. Puis le jour se lève. Le jour finit toujours par se lever.
Près de lui, je suis plus près de moi.
Tu crois qu'ils comprendront ? Tu crois qu'ils m'en voudront ? Est-ce que tu penses qu'ils s'en rendront seulement compte ? Mon absence, comme un point de néant. Et leurs vies, lancées à cent à l'heure, impossibles à saisir, à attraper, à garder contre soi, est-ce que leur monde à eux s'arrêtera de tourner même une brève seconde ? Combien de fois j'ai eu l'impression de vivre en dehors de tout cela, à côté, en marge. Mon existence sur leurs contours, jamais tout à fait dans leurs vies à eux.
Je souffre et j'apprends que la douleur ne reste jamais, qu'elle s'interrompt, disparaît, revient, et ainsi de suite, entrecoupée de moments de bonheur et de joie.
Ce n'était pas de l'amour entre nous, la solitude ne laisse pas les gens s'aimer, elle les pousse à se dévorer, comme des vides insatiables, elle les relie par des fils invisibles, comme ceux des marionnettes, les agite, les détraque, leur fait prendre de mauvais chemins.
Est-ce que l'amour s'éteint comme une étoile, il n'est déjà plus là qu'on croit encore le voir ?