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Critique de kuroineko


Que d'émotions et de choses à comprendre sur la société japonaise dans ce court mais intense roman d'Antoine Dole!

Huit voix adolescentes se succèdent, tissant huit histoires hors des cases choisies pour elles. le Japon a un dicton pour le moins explicite : "Le clou qui dépasse appelle le marteau". Antoine Dole met en scène huit clous qui souffrent ou ont souffert, qui ne marchent pas dans les traces standardisées. Chaque voix, fille ou garçon, se raconte et explique son mal être, sa colère, sa résignation aussi parfois. Qu'il s'agisse d'Ayumi, hikikomori, de Natsuki, la rebelle pratiquant l'enjô-kosai (sortir avec des hommes plus âgés contre de l'argent), Sora, adepte du genderless kei (androgynie) et du maquillage, tous portent en eux des plaies et fêlures. Que ce soit par des attaques physiques ou verbales, par de lourds non-dits, par une pression trop forte ou par l'indifférence, tous ont été blessés.
L'auteur montre avec brio la tendance à exclure tout ce qui ne rentre pas dans les normes de la société japonaise. Freeters, hikikomori, rebelles, ... sont considérés comme des déchets, des inutiles. le père d'Ayumi ne dit-il pas lui-même que ce serait plus acceptable et moins honteux que sa fille unique soit morte plutôt que recluse volontaire dans sa chambre?

Uniquement nippon, ce constat d'intolérance? Hélas non. Trop de faits divers et incivilités au quotidien montrent combien la différence dérange, un peu partout dans le monde. La bêtise et les préjugés n'ont ni couleur ni nationalité. Pourtant, comme le dit si bien Sora, " Il suffirait de si peu pour que chacun ait sa place. Un peu d'amour, de compassion, d'empathie, de tolérance."

Je lis la prose d'Antoine Dole pour la première fois. Non seulement je suis conquise par la qualité de son écriture et de ses récits, mais aussi par sa capacité à pénétrer l'âme de ses jeunes héros et à nous la dévoiler en pleine lumière, sous les frondaisons chargées de fleurs de cerisiers du parc Ueno qui donne son nom au titre. C'est un des endroits préférés des Tokyoïtes pour célébrer O-hanami, la contemplation des sakura en floraison. Chacune à sa façon, les huit histoires tirent de cette fête traditionnelle et extrêmement prisée un message, une philosophie de vie, le courage d'affronter les épreuves. le courage de rester en vie, cette étincelle éphémère qui, comme les fleurs de cerisiers, belles et fragiles, passe si vite et doit se savourer au moment présent.

Un beau texte, présentant pourtant de dures et douloureuses situations mais porteurs de beaux messages disséminés dans le récit de chacun. Merci Monsieur Dole pour ce concentré d'émotions et de beauté!
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