Ils sont trois, trois hommes unis par des liens amicaux, familiaux et professionnels. Une situation somme toute banale, si ce n'est qu'il s'agit là de
Claude Berri, Maurice Pialat et
Jean-Pierre Rassam. le premier a épousé la soeur du troisième, le deuxième couche avec la soeur du premier et tous les trois font du cinéma. Pialat réalise des films à la hauteur de ses ambitions démesurées, Berri voudrait faire l'acteur, réaliser, produire et Rassam se lance dans la production, un peu en dilettante, mais fort d'une fortune familiale qui semble inépuisable. Entre trahisons, batailles d'ego, engueulades et rivalités, ces trois-là ont marqué de leur empreinte le cinéma français des années 70.
Il faut vraiment être féru de cinéma pour apprécier cette suite d'anecdotes qui tentent tant bien que mal et sans trop de nuances de nous faire revivre les débuts de ces trois figures du cinéma français. On saura que Maurice Pialat veut tourner des films, qu'il jalouse les plus jeunes qui réussissent alors que lui a beaucoup de mal à attirer le public dans les salles. On verra que Berri est peu sûr de lui, qu'il est partisan d'un cinéma autobiographique, qu'il peine à faire l'acteur mais réussit bien en tant que producteur, surtout lorsqu'il décide de financer un cinéma populaire, comique, mauvais mais rentable. Au grand dam de son beau-frère,
Jean-Pierre Rassam qui l'accuse de vouloir faire du fric au détriment de la qualité. Ce dernier, personnage central du livre, est décrit comme flamboyant, flambeur, richissime, exubérant et grand consommateur d'alcool, de cigares, de filles et de drogues. A côté de ce fils à papa qui dépense les pétro-dollars que son père distribue à ses enfants comme des bonbons acidulés,
Claude Berri, juif mélancolique, qui a commencé par être fourreur dans l'atelier parental, semble bien fade, voire mesquin quand il cherche à assurer ses arrières en finançant des films à succès.
Leurs histoires s'inscrivent dans celle du cinéma français et on assiste à quelques faits marquants comme le festival de Cannes perturbé en 1968 ou le montage de quelques grands classiques comme Nous ne vieillirons pas ensemble de Pialat ou Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil de Jean Yann. Pialat qui d'ailleurs est vite mis de côté par l'auteur qui préfèrent se concentrer sur la rivalité entre Berri Et Rassam, abordant même à l'occasion les crises internationales de l'époque entre Israël
et les pays arabes (guerre des six jours, prise d'otages aux J.O. de Munich, etc.) dans une vaine tentative pour faire de leur opposition professionnelle, un combat politique. Certes, Berri est juif et Rassam libanais, mais ils sont très peu politisés et leurs brouilles successives n'ont aucun rapport avec la situation au Moyen-Orient.
En bref, ce roman ravira les fans de cinéma. Pour les autres, ce sera un peu plus compliqué : détails techniques, listes de personnalités plus ou moins célèbres du cinéma, accumulations de faits sans réel intérêt. On en gardera une découverte de
Jean-Pierre Rassam, étoile filante du cinéma, personnalité hors-normes qui, d'ailleurs, méritait d'être un peu mieux traité par l'auteur qui bâcle sa fin de vie de grossière manière. Intéressant mais pas abouti et, surtout, à réserver aux fans de cinéma.